vivo per lei. (Arya)

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{ vivo per lei }
crédit/ tumblr ☆ w/@Arya Warren

Les yeux posés sur le bâtiment immense de l’université, un café brûlant entre les mains, elle attend son petit bébé. Elle l’attend avec plus de patience qu’à son habitude, surtout plus d’inquiétude. Tout commençait enfin à aller mieux entre elle et Arya. Pour la première fois depuis des mois, elle avait le sentiment d’avoir retrouvé sa fille. Sa meilleure amie. Son âme sœur. Mais elle a l’intuition terrible qu’elle va tout gâcher. Comme tu gâches toujours tout. Il s’est passé tant de choses dans sa vie. Des choses dont elle n’a jamais daigné lui parler. Des choses qu’elle a préférer conserver. C’était uniquement pour la protéger. C’était uniquement pour son bien. Comme tous ses actes, toutes ses décisions, toutes les erreurs qu’elle a commises, elle ne les a toujours faits que pour son bien. C’est Arya qui dirige le moindre de ses choix, Arya qui prime dans chaque instant de sa vie.

Mais à vouloir tout lui donner,
T’as réussi à la mettre en danger.

Elle, la prunelle de ses yeux. Elle, celle à qui elle a consacré son existence. Celle à qui elle a donné la vie, celle pour qui elle pourrait donner la sienne. Elle est tout pour elle, Arya. Elle a tellement voulu lui donner le meilleur, lui offrir tout ce bonheur. Mais, au bout du compte, elle a enchaîné les erreurs. Elle s’est retrouvée dans une situation financière catastrophique. Pour des choses qui lui paraissaient si importantes, si vitales, mais qui l’étaient bien moins que l’essentiel. Pour des choses aussi futiles, elle a manqué de la perdre une première fois en l’envoyant, ici, à New York. Loin d’elle. Et maintenant… Maintenant, la voilà en danger. Plus que jamais. Par la faute de sa mère. Elle a pourtant tellement voulu la préserver. Jusqu’à la faire déménager contre son gré, jusqu’à la laisser vivre avec son oncle plutôt qu’avec sa propre mère. Tout, elle a tout fait. Mais, avec ce qui est arrivé à Owen, la jeune femme se rend compte qu’Arya n’est pas en sécurité. Qu’elle se doit de lui parler. Parce que ce serait horrible qu’il lui arrive quelque chose sans qu’elle ne l’ait fait. Et si c’est à Arya qu’il arrivait quelque chose… Si c’était Arya qui subissait les conséquences de ses actes, elle ne s’en remettrait pas. Elle ne survivrait pas.

Tu y laisserais la vie,
Parce que c’est elle, ta vie.

C’est pour cette raison qu’elle est là, en cette fin d’après-midi, devant la faculté de sa fille. Pour cette raison qu’elle est là, prête à lui parler. Morte de peur en vérité. Elle essaie de garder son calme, Cassey. Le but n’est pas d’alarmer son ange, seulement de… De la prévenir. Lui expliquer. Lui dire, aussi, que son père s’est retrouvé à l’hôpital. Elle a le droit de savoir. Elle a le droit, depuis le début, de savoir. C’était tellement dur de lui taire ce secret, pour elles qui ont toujours tout partagé. Cela va remuer les anciennes douleurs tout juste refermées. Pas encore totalement cicatrisées. Cela va réveiller la rancœur d’Arya. Et elle a peur, Cassey. Peur de la perdre une nouvelle fois. Mais elle a besoin d’elle. Trop besoin d’elle. Quand elle la voit enfin sortir, les cheveux blonds au vent, entourée de ces garçons, elle esquisse un faible sourire. Elle lui rappelle elle, Arya. La plus belle version d’elle. Elle se lève de son banc sans plus attendre, approchant de la jeune fille avant qu’elle ne s’échappe. – Arya ? Un sourire qui naît sur ses lèvres, car il est inutile de l’effrayer. Pas tout de suite, pas si vite. – Je me suis dit que je ne serais pas une mère digne de ce nom si je ne venais pas au moins une fois te mettre la honte en venant te chercher. Elle la regarde avec malice alors qu’elle lui tend un petit paquet. – Et bien sûr, je t’ai emmené ton goûter. Elle la taquine, sa fille. Leur relation a toujours dépassé celles des autres enfants avec leurs parents. Pas de honte avec elles, pas de secrets avec elles… Ou, en tout cas, il n’y en aura bientôt plus.

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Déconcentrée. Elle est déconcentrée. Par tout ce qui se passe en ce moment. Par sa vie mouvementée. Par cet équilibre familial encore précaire et plus que jamais menacé. Déconcentrée, par cette rencontre avec Owen. Cette première rencontre, fracassante et déconcertante. Elle fait tout pour l’oublier, elle tente tout pour l’oublier, mais elle ne peut pas effacer son image dans son esprit. L’image bien trop présente symbole de souffrance. Symbole de la douleur qu’elle ressent, depuis des années, de plus en plus matérialisée. De plus en plus virulente, au creux de sa poitrine. La vérité, c’est que sa présence à New-York a bien plus d’impact sur toi que tu ne veux bien l’admettre, Arya. La vérité, c’est qu’il remet en cause toutes tes certitudes. Qu’il bouleverse un équilibre déjà bien trop instable. Il a de l’impact, sur elle, sur sa vie. Il chamboule son esprit, provoque un flux d’émotions négatives. Il la fait dérailler. Elle a déraillé, l’autre soir, avec Quinn. Une dispute a éclaté. Elle aurait pu tout arranger. Elle aurait pu calmer les choses. Elle aurait pu essayer de comprendre. Mais elle a tout empiré. Elle a envenimé la situation, en extériorisant toute cette colère sur la quadragénaire. Et tu t’en veux, Arya. Tu t’en veux, même si tout est oublié. Même si tout est arrangé. Tu t’en veux, parce que c’est elle qui a pâtit, qui a subi, ce qu’il aurait dû encaisser, lui. Tu t’en veux, de ne pas réussir à faire comme s’il n’existait pas. Elle sait pourtant ce qu’elle veut. Certaine de ne pas le vouloir dans sa vie. Certaine de ne même pas vouloir le voir tout court.
Il y a pourtant une chose. Une belle chose. Une chose positive, depuis qu’Owen est arrivé. Sa relation avec Cassey. Sa relation avec sa mère. Parce que son retour n’a fait que les rapprocher davantage. Parce que t’as une nouvelle personne à détester, Arya. Parce qu’avec Cassey, elles ont toujours été seules contre tous. Seules contre le reste du monde. Cette situation ne le prouve que plus encore. Il a fait du mal à la mère, comme il a blessé la fille. Elle est prête à faire front commun avec Cassey, quoi qu’il arrive. Elle est prête à faire front commun, oubliant sa rancœur. Elle est prête à la soutenir, comme l’a fait sa mère. Au fond, elles se retrouvent. Elles se retrouvent comme avant. Elles se retrouvent comme si jamais rien de mal n’était arrivé. Et l’essentiel est peut-être là. Peut-être que t’es doucement en train de retrouver tes repères. Retrouver un repère quand d’autres s’effondrent. Et c’est sans avoir écouté grand-chose, qu’elle termine cette journée. L’esprit ailleurs, entre toutes ces pensées et les messages avec Quinn qui sont multipliés. Mais elle a la surprise de voir apparaître le visage de sa mère, dès lors qu’elle s’approche de la sortie du bâtiment. - Maman ? Un sourire, lorsqu’elle s’approche d’elle pour déposer un baiser contre sa joue. Elle est surprise de la voir ici, mais heureuse aussi, de la voir s’intégrer à sa vie. Sa nouvelle vie. Et ses paroles ne font que confirmer ce fait, tout en provoquant un rire. Son vrai rire. - Tu n’es pas sérieuse ?! Qu’elle rétorque, attrapant finalement le paquet. - Bon, tu as bien fait. J’ai faim. Parce qu’entre elles, c’est comme ça. C’est toujours comme ça. Elles ont pris l’habitude de passer leur temps ensemble. Elles se sont toujours retrouvées, ainsi, après les cours d’Arya. A la fermeture de boutique de Cassey. - Alors ? Tu es vraiment venue me chercher ou tu étais dans le coin ? Dans les deux cas, elle est contente de la voir. Surtout que sa mère lui a récemment reproché ne pas passer assez de temps avec elle.

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Elle s’en veut, Cassey. Elle s’en veut de provoquer dans la vie de sa fille un tel chambardement. Constamment. Elle est censée être celle qui lui apporte un équilibre, celle qui lui donne de la stabilité. Mais elle fait tout le contraire. Parce que t’es comme un mauvais tourbillon, Cassey. T’entraînes tous ceux qui t’approchent dans tes démons. Dans tes erreurs, dans tes mauvais choix, dans tes pires décisions. L’impression de lui rendre la vie impossible là où elle devrait la lui faciliter. L’impression de lui faire du mal au lieu de l’en protéger. Elle se sent coupable. Elle se sent coupable pour Owen, pour Nikolaï, de les entraîner dans ses histoires. Mais, plus que tout, elle se sent coupable pour son bébé. Pour celle qu’elle devrait préserver de tous ces maux. Elle n’a jamais été quelqu’un de stable. Ni de bien raisonnable. Elle a toujours apporté un grain de folie là où elle va. Même avec Arya, surtout avec Arya. Mais, jamais, elle ne l’avait mise en danger. Et maintenant, elle craint pour sa sécurité. Elle craint tout ce qui la menace à cause d’elle, elle et tout ce qu’elle a engendré. Il aura fallu qu’Owen se fasse agresser pour qu’elle réalise. Pour qu’elle mesure la situation. Pour qu’elle se rende compte qu’elle ne peut pas tenir sa fille dans l’ignorance, elle ne peut plus. Et puis, tu n’en as plus la force. Tu n’as plus le courage de lui cacher la vérité. Garder tous ces secrets, ce n’est pas toi. Surtout pas avec Arya. Pour autant, elle n’est pas rassurée, Cassey. Elle a peur de la réaction de sa fille. Peur de la voir lui échapper, peur de la perdre une nouvelle fois. Elle ne s’en remettrait pas une seconde fois. Pas alors qu’elle la retrouve à peine. Quelques semaines, seulement, de bonheur, quelques semaines à sentir à nouveau son cœur connecté au sien, comme avant. Elle refuse d’imaginer qu’elle pourrait tout gâcher, pas encore, pas cette fois. Il est hors de question qu’elle doive à nouveau se passer d’elle. Tu ne survivrais pas une nouvelle fois. Alors elle prend son courage à deux mains, Cassey. Et elle l’affronte. Comme une femme.

Comme une mère. Une véritable mère.

Les angoisses qui s’évaporent quelques instants alors qu’elle reconnaît le visage si similaire au sien. Le sourire qui revient. Elle est sincèrement heureuse de retrouver son petit ange. Cela ne fait que quelques jours, pourtant, mais elle lui manque. Elle lui manque tous les jours. Elle l’aurait déjà priée de revenir vivre avec elle, si elle n’avait pas si peur de la mettre en danger. Inquiétude qui ne cesse d’accroître en elle au fil des jours. Le baiser de sa fille vient lui réchauffer le cœur avant qu’elle ne lui en rende un. Elle n’a pas honte d’elle, Arya. Elle n’a jamais eu honte d’elle. L’avantage d’être une jeune maman. Le sourire qui s’agrandit devant le rire lumineux de son bébé, elle la contemple avec malice à sa question, lui répondant seulement en lui donnant le paquet. À l’intérieur, quelques pâtisseries qui ont la préférence de la jolie tête blonde. – Je sais, t’es mon bébé qui mange toutes les quatre heures. affirme-t-elle avec amusement avant d’entendre sa question. – En fait, je suis venue me trouver un petit étudiant. Ils sont plutôt pas mal dans le coin. dit-elle, avant d’offrir son sourire charmeur à un gamin dont elle croise le regard. Mais elle plaisante. Évidemment. Elle glisse son bras autour de celui de sa fille pour qu’elles s’éloignent un peu et fassent quelques pas. – J’avais envie de te voir. Alors comment s’est passée ta journée ? demande-t-elle en lui piquant l’une des pâtisseries dans le paquet. Elle ne peut pas repousser le moment éternellement, elle le sait, mais elle ne va tout de même pas l’attaquer d’emblée.

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Elles se connaissent par cœur, toutes les deux. Elles se connaissent comme si elles ne formaient qu’un. Elles se connaissent, parce qu’elles ont toujours été uniquement deux. Parce qu’elles ont grandit ensemble, chacune à sa manière. Elles se connaissent par cœur, et pourtant, elles se cachent l’essentiel. L’essentiel de ce qui se passe, pour l’une, comme pour l’autre. Et tu ne sais plus vraiment quand tout cela a commencé, Arya. Quand les cachotteries ont commencé. Elles se sont éloignées l’une de l’autre, oubliant de partager leurs souffrances, comme elles ont toujours su le faire. Elle est restée sobre, sur sa rupture avec son petit-ami. Petit-ami que Cassey connaissait pourtant très bien. Mais elle a omis les détails les plus sordides, pour s’éviter à elle-même de souffrir bien davantage encore. Et parce que Cassey était déjà beaucoup trop loin. Elle n’a rien dit non plus, lorsqu’elle est tombée dans la boulimie. Se cachant derrière cette nouvelle carapace, plus dure. Cette carapace qui fait qu’aujourd’hui, elle est beaucoup plus fermée qu’elle ne l’était. Mais c’est un tout nouveau départ, maintenant qu’elles sont à New-York. Maintenant qu’elles ont crevé l’abcès. Elles se sont expliquées, retrouvées, rapprochées. Rapprochées depuis l’arrivée d’Owen. Peu importe combien leur relation a été amochée, elle sait qu’elle est plus forte que jamais.
Sa présence ici n’en est qu’une preuve supplémentaire. Elle ose venir la retrouver à l’université. Elle ose faire un pas de plus dans sa vie, Cassey. Et c’est parce qu’elle en a de nouveau le droit. Sois réaliste, Arya. T’étais décidée à la détester à jamais, mais tu aurais dû t’en douter, tu as échoué. Parce que Cassey est bien la personne la plus importe de sa vie. Elle constitue son monde. L’intégralité de son monde. Depuis toujours. Un rire s’échappe de ses lèvres, à l’entente de ses premières paroles. Elle ouvre immédiatement le paquet pour voir ce qu’il réserve, comme chaque goûter surprise de sa mère. - Tarte aux fraises ! Le sourire qui s’élargit davantage encore, parce qu’il s’agit là de sa douce préférence, et sa mère le sait très bien. Sa mère qui ne se gêne pas pour charmer un garçon qui passe. - Maman ! Le côté sans gêne de sa mère l’a toujours amusé. Pourtant, cette plaisanterie la ramène tout droit à sa propre histoire. A ce qu’elle vit en ce moment, avec Quinn. Sauf que dans ce cas précis, l’étudiante, c’est elle. Une situation de plus en plus délicate parce que de moins en moins anodine. De moins en moins légère. Et plus le temps passe, plus tu enfreins ta propre règle, Arya. Pas d’attachement. Plus le temps passe, plus tu perds pieds. Avançant avec Cassey, elle l’emmène jusqu’au banc un peu plus loin. - Bien. Bien. Et toi ? Un sourire sincère, parce qu’elle s’intéresse vraiment à sa mère. A son travail. A la façon dont se passe ses journées. Et puisqu’elles ne vivent plus ensemble, pour le moment, elles ont certainement énormément de choses à se raconter.

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Arya, est celle qui sait tout d'elle. Celle qu'elle appelle quand elle a un besoin urgent de se confier, celle qu'elle va voir quand elle a besoin d'être épaulée. Elle a toujours été, plus que sa fille, sa meilleure amie. La personne la plus importante de toute sa vie. Ce n'est sans doute pas la relation la plus recommandable au sein d'une famille, mais elle n'est pas n'importe quel parent. Elle n'a pas non plus n'importe quel enfant. C'est leur lien, à elles, à elles seulement. Elles n'ont toujours été que toutes les deux. C'est ce qui a créé leur lien indéfectible, c'est ce qui les a rendues aussi dépendantes l'une de l'autre. Mais les derniers mois ont été trop bouleversants. Il y a eu l'éloignement lorsqu'elles étaient encore à Los Angeles, puis le départ forcé d'Arya. Toutes ces choses qu'elle ne lui dit pas. De ses problèmes d'argent jusqu'à ses problèmes de cœur, elle a épargné sa fille de ce qu'elle lui a toujours confié. C'est uniquement pour l'en préserver. La protéger. Mais elle se rend compte, finalement, qu'elle risque de provoquer l'effet inverse en la tenant à l'écart de tout ce qui arrive. C'est pour cette raison qu'elle a choisi, cette fois, de tout lui dire. Sans rien omettre, sans rien garder pour elle. C'est effrayant et, à la fois, apaisant. Cela va la soulager, elle le sait, de ne plus avoir de secret. Mais elle fait ce qu'elle fait toujours, Cassey. Elle tourne autour du pot, parce qu'elle a peur malgré tout.

Peur de chambouler à nouveau une relation qui manque tant de stabilité,
Votre relation tellement précieuse à peine retrouvée.

C'est tellement agréable, pourtant. Tellement bon de retrouver son petit bébé. Leur complicité jamais vraiment partie, celle qu'elles ont eue toute leur vie. C'est tellement bon de pouvoir venir la chercher à l'université pour passer un petit moment avec elle comme elles l'ont toujours fait. Un large sourire se dessine sur son visage devant la réaction tellement enfantine de son ange, elle la contemple aussi amusée qu'attendrie. Car elle aura beau jouer les têtes dures, Arya, toi tu la connais. Toi, tu sais combien elle ne demande qu'à être aimée. - Bien sûr, tu me prends pour qui ? Le rire qui s'échappe de ses lèvres devant sa réaction faussement outrée, elle hausse les épaules avec nonchalance, jouant parfaitement l'innocence. - Très bien, je finirais seule, puisque tu me prives du potentiel amour de ma vie. Et ses mots, pourtant lancés avec légèreté, qui la ramènent inévitablement à la réalité. À son ex qui se trouve à l'hôpital, par sa faute. Elle sent son cœur se serrer dans sa poitrine, Cassey. Parce qu'elle sait qu'elle ne va pas pouvoir plaisanter et taquiner sa fille longtemps. Elle s'installe à ses côtés sur ce banc un peu à l'écart, l'esprit qui se perd légèrement dans ses pensées. Elle cherche le meilleur moyen de lui expliquer. - Hum, pas très bonne en fait… J'étais à l'hôpital. Le pire moyen d'engager la conversation, Cassey. Une inspiration plus tard, elle reprend rapidement, pour éviter de l'effrayer inutilement. - Tout va bien maintenant, hein, mais… Owen a été agressé. Elle marque un temps de silence. Laisse à sa fille le temps de prendre connaissance des informations, le temps aussi de la laisser réagir comme elle en a besoin.  

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Retrouver sa mère lui fait un bien fou. Retrouver sa mère, comme avant, lui fait un bien fou. Parce qu’elle lui a manqué. Elle lui a manqué durant tous ces mois, loin l’une de l’autre. Elle lui a manqué, durant tous ces mois passés à se déchirer. Et maintenant qu’elles sont ici, toutes les deux, elles retrouvent cette complicité qui font d’elles ce qu’elles sont. Elles retrouvent cette complicité qu’elles ont toujours partagé. Parce que Cassey est bien plus qu’une mère, à ses yeux. Contrairement à toutes les autres adolescentes qui faisaient tout pour fuir leurs mères, Arya avait la chance de passer tout son temps avec la sienne. Faire du shopping, organiser des soirées pyjamas, des moments confidences, les discussions sur les hommes, tout ce qu’une fille fait avec sa meilleure amie, Arya l’a fait avec Cassey. Et aujourd’hui, tu retrouves tes marques avec ta mère, Arya. Aujourd’hui, tu apprends à retrouver cette relation perdue. Cette relation si forte, et jamais oubliée. Cette plaisanterie sur les hommes n’en est qu’une preuve supplémentaire. Et Cassey parvient à lui arracher un rire, un rire sincère. Au fond, elle sait que malgré cette légèreté, sa mère a beaucoup de mal avec les hommes. Beaucoup de mal dans la durée. Et c’est certainement à cause de ce qu’elle a connu avec Owen. Elle l’aimait, et il l’a abandonné au pire des moments. Et t’es en train de prendre le même chemin, Arya. Fermée à l’amour, préférant entrer dans le jeu des relations interdites. Des relations sans avenir.
Le regard de Cassey s’embrume rapidement, lorsqu’elle lui demande si elle a passé une bonne journée. Son regard s’embrume rapidement, et la sentence tombe. L’hôpital. Elle était à l’hôpital. L’inquiétude envahit immédiatement l’étudiante. Elle imagine le pire, le pire à propos de sa mère. Mais finalement, ce n’est pas d’elle, qu’il s’agit. Ce n’est pas elle, mais son père. Owen. Owen qui s’est fait agresser. - Quoi… ? Elle est sous le choc, Arya. Sous le choc et elle ne sait pas quoi ressentir. Elle aimerait comprendre ce qui se passe. Parce que Cassey est, elle, visiblement déjà au courant de tout. - Mais qu’est-ce qui s’est passé ? Et puis, elle voit bien que Cassey est perturbée, Arya. Elle voit bien qu’il y a quelque chose, quelque chose de plus. Et si Owen va bien, comme elle le dit, il y a forcément autre chose.

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Elles n'ont toujours été que toutes les deux. Toutes les deux contre le reste du monde. Pour cause, Arya, elle a toujours été son univers, autant qu'elle a toujours été le sien. C'est elle, certainement, qui est à l'origine de cette relation si fusionnelle, peut-être même trop fusionnelle. Elle n’a jamais eu de filtre avec sa fille. Elle n’a jamais fait attention à ce qu’elle était censée lui raconter ou non, ce qu’elle devait partager avec elle ou lui taire. Elles se sont tant donné, toutes les deux, elles ont tellement partagé. Que lorsque, accaparée par sa vie tumultueuse, Cassey a pris un peu de distance et cumulé sans se rendre compte les absences, c'est là que tout s'est rompu. C'est là que tout s'est cassé. Les sorties entre mère et fille, les concerts, les magasins, les goûters même, exactement comme celui qu'elles sont en train de partager. Tout cela a disparu alors qu’elles se sont retrouvées loin l’une de l’autre, séparées pour la première fois. Elle a cru mourir, Cassey, sans elle. Elle a l’impression de revivre maintenant qu’elle est là, à ses côtés. Maintenant qu’elles se sont retrouvées. Comme une seconde chance que sa fille lui offre d’être la mère qu’elle mérite, une chance qu’elle saisit sans hésiter à chaque fois qu’elle en a l’occasion. Même quand elle ne l’a pas. Mais, cette fois, ce n’est pas seulement pour vivre un moment mère-fille qu’elle est venue retrouver Arya. C’est malheureusement pour lui annoncer une mauvaise nouvelle. Et Dieu sait combien elle aurait préféré l’épargner, mais elle ne peut pas lui cacher une chose pareille. Elle ne peut pas la mettre à l’écart de la vie de son père. Ni, quelque part, de la vie de sa mère parce que c’est elle qui a tout engendré, elle le sait. Elle voit tout de suite l’inquiétude submerger les yeux de son bébé, laissant place au choc quand elle comprend qu’il s’agit d’Owen. - Un homme, avec un couteau, alors qu’il sortait du travail… Il s’en est pris à lui sans qu’il ne le voit avant de s’enfuir. raconte-t-elle, la gorge serrée. Aucun motif, aucune raison, au premier abord. Mais, toi, tu sais que c’est toi la responsable. Toi, la seule coupable. Une brève inspiration qu’elle reprend, avant d’ajouter. - Il était très fatigué quand je l’ai vu mais… Il allait bien. Il devrait sortir de l’hôpital d’ici quelques jours... Mais elle ne lui parle pas de tout, Cassey. Il y a encore tant de choses qu’elle ne trouve pas le courage de lui dire. Mais ses émotions, sa culpabilité, elles sont trop fortes pour qu’elle puisse s’en empêcher plus longtemps. - Arya, je… Je crois que c’est ma faute…

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C’est violent. Extrêmement violent, ce que Cassey lui avoue. Ce qu’elle lui raconte, encore bouleversée, encore retournée. Certainement par l’état d’Owen. Certainement parce qu’elle s’est rendue à l’hôpital pour le voir. Et si elle avait été en stage, aujourd’hui, c’est peut-être elle, qui serait tombée sur lui. Elle reste sous le choc, Arya. Parce qu’elle imagine cette scène, cette brutalité, et une partie d’elle s’inquiète. Une partie d’elle s’inquiète sincèrement. Elle ne veut pas de lui dans sa vie, elle ne veut pas le voir, mais elle n’a jamais souhaité qu’il lui arrive une telle chose non plus. Elle n’a jamais souhaité qu’il soit blessé. C’est difficile à croire, difficile à encaisser. Surtout parce qu’elle sent que la situation est compliquée. Beaucoup plus compliquée que ce qu’elle pourrait imaginer. Parce que tu connais ta mère, Arya. Tu connais l’expression de son visage lorsqu’elle se sent coupable. Tu connais le ton de sa voix, lorsqu’elle a quelque chose à annoncer. Parce que toutes leurs vies, elles ne se sont jamais rien cachées. Rien, jusqu’à ces derniers mois. Jusqu’à ce qu’Arya débarque chez son oncle, valise à la main. Et aujourd’hui, elle aurait certainement beaucoup de choses à avouer elle-même à Cassey. Les raisons de sa descente aux enfers à Los Angeles, la boulimie, Quinn, tant de choses qu’elle garde pour elle alors qu’autrefois, elle aurait récité un monologue entier pour lui en parler. Mais tu te sens de plus en plus proche de Cassey, Arya. Tu sais que tu retrouves ta mère, et ça te fait un bien fou. Tu sais que t’as besoin d’elle, besoin de pouvoir lui parler. Et que ce n’est qu’une question de temps. - Je… C’est horrible… Elle n’a pas les mots. Elle reste sans voix. Parce qu’au fond d’elle, elle n’est pas si indifférente à Owen qu’elle souhaiterait le faire croire. - Tu es sûre qu’il va bien… ? Comme pour s’en assurer, comme pour se rassurer. Mais l’inquiétude est bien vite balayée par un aveu, un autre, beaucoup plus perturbant. - Ta faute ? Comment ça pourrait être ta faute maman ? Fronçant légèrement les sourcils, elle ne comprend pas où elle veut en venir, Arya. C’est une agression. Il était là, au mauvais endroit. Au mauvais moment. Et pourtant, elle a le sentiment, une fois de plus, que quelque chose se trame. Quelque chose dont elle ne sait rien. Quelque chose qui va lui tomber dessus, pour venir bouleverser sa vie, une fois de plus, une fois de trop. Tout bascule, toujours. Tout bascule toujours, tout ce qui te touche bascule toujours, Arya. Sa vie n’est qu’un saut dans le vie permanent. Qu’elle tente de les éviter ou non, le résultat reste le même. T’avais pas prévu de te faire tromper par celui que tu aimais, t’avais pas prévu d’être éloignée par ta propre mère, t’avais pas prévu de finir par te détester toi-même, t’avais pas prévu d’ouvrir ton cœur à une quarantenaire. Et t’en es là. Encore là, aujourd’hui, à ne pas prévoir la tornade qui s’approche.

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Si elle pouvait. Si elle pouvait seulement la préserver. Si elle pouvait effacer tous les malheurs du monde, les éloigner le plus loin possible de son regard, elle le ferait. Parce que tout ce qu'elle a fait, Cassey, tout ce qu'elle a toujours fait, c'était pour elle. Pour la protéger, pour la mettre à l'abri de tout, pour lui offrir la plus belle vie, celle qu'elle mérite. Tout ce qu'elle a fait, cela n'a toujours été que pour elle. Mais, à vouloir tant lui donner, elle en a oublié l'essentiel. Elle a oublié de la protéger. La garder en sécurité. Elle a été obligée de la faire déménager à l'autre bout du pays. Elle a été obligée de lui faire croire qu'elle l'abandonnait. Elle aurait pu continuer à lui mentir, elle aurait pu prétendre encore longtemps que tout allait bien. Mais elle ne peut pas prendre de risque, elle ne peut plus. Pas avec ce qui lui est arrivé, ni… Ce qui est arrivé à Owen. C'était l'élément déclencheur, comme un coup d'électrocution qui l'a secouée tout entière. La culpabilité qui l'a submergée, la peur avec elle, Cassey, elle ne peut plus reculer. Plus faire semblant. D'autant plus qu'il s'agit de la vie du père d'Arya. Elle ne peut plus mentir plus longtemps. Elle n’en a plus la force, d’autant plus qu’elle la connaît, sa fille. Elle est la personne qui la connaît le mieux au monde. Comme elle, elle la connaît aussi par cœur. Elle voit l’inquiétude dans son regard, elle voit combien elle est chamboulée par ce qui est arrivé à Owen.

Tu vois, t’avais raison,
t’avais raison quand tu disais qu’elle n’était pas indifférente.
t’avais raison quand tu disais qu’elle a besoin de le le connaître.
Besoin de lui.

Et ça lui déchire encore plus le cœur de se dire que, par sa faute, elle aurait pu le perdre avant même de le connaître. - Je te le promets. Je m’en suis assurée moi-même. promet-elle en posant sa main sur la sienne. Le besoin de la rassurer, elle, avant tout. Mais les mots suivants viennent d’eux-mêmes. Instinctivement. Comme si, à force de les penser, elle ne pouvait plus faire autrement que les prononcer. Comme si elle s’était trop retenue, pour y arriver une minute de plus. La gorge qui se noue, elle ose tout juste affronter le regard d’Arya. Le regard doux, enfantin, mais parfois impitoyable d’Arya. Elle ne sait comment trouver ses mots. Elle sait juste qu’elle va devoir parler maintenant qu’elle a commencé. - D’abord, je voudrais que tu saches que... Ne rien te dire a été la chose la plus difficile que je n’ai jamais eue à faire, et... Et je l’ai fait uniquement pour te protéger. Parce qu’elle lui a toujours tout raconté. Elles se sont toujours raconté. Jusqu’à ce qu’elle commence à dérailler. Jusqu’à ce qu’elle se retrouve enlisée sous tous ses secrets.

Parce que, pour une fois, tu te devais d’agir comme une mère.
Une véritable mère,
Une mère digne de ce nom, la mère qu’elle a toujours méritée,
Tu te devais de la protéger, même, contre son gré.

L’antiquaire prend une profonde inspiration, avant de se lancer enfin. - À Los Angeles, j’ai... j’ai eu beaucoup de problèmes d’argent. J’ai fait des mauvais choix, je... me suis tournée vers des mauvaises personnes. Au début, ça devait juste être un emprunt mais... Mais je n’ai pas réussi à les rembourser. Elle déglutit difficilement. C’est tellement difficile, tellement douloureux de se dire qu’elle est, une nouvelle fois, en train de chambouler la vie de son bébé. Elle voulait lui offrir le meilleur, Cassey, elle a l’impression de lui donner toujours le pire. - Ils... Ils m’ont retrouvée ici et... Et je crois que c’est l’un d’eux qui a agressé Owen. Les mots lui font si mal, ils ne laissent plus de place pour un retour en arrière.

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{ vivo per lei }
crédit/ tumblr ☾ w/@cassey warren

Il y a quelque chose qui l’alarme, qui lui fait dire que Cassey garde pour elle quelque chose de grave. Quelque chose qui va bien au-delà d’Owen, de sa présence, de son état. Quelque chose qui ne concerne qu’elle, qu’elles, et leur vie. Elle s’attend au pire, parce qu’elle connait sa mère, Arya. Elle est du genre à prendre chaque situation avec légèreté, à l’inverse d’elle, et si elle ne le fait pas aujourd’hui, c’est qu’il y a obligatoirement quelque chose de grave. Et ses premières paroles sont bien plus alarmantes encore. Quelque chose qu’elle lui a caché. Quelque chose qu’elle lui a caché pour la protéger. Elles, elles qui ne se sont jamais rien menti, par le passé. Jamais rien caché. Elles qui ont toujours tout partagé. C’est ce que tu penses, Arya. C’est ce que tu pensais. Que tu lui disais tout, qu’elle te disait tout. Et elle ne lui en veut même pas. Elle ne s’énerve même pas. Elle ne sent pas ne serait-ce qu’un brin de colère, en réalité. Il n’y a que l’inquiétude. L’inquiétude pour sa mère qui, quoi qu’elle fasse, passera toujours avant tout pour elle. Alors elle attend. Elle attend simplement que Cassey parle, enfin. Mais elle n’est pas préparée, elle n’est pas prête à entendre ce qu’elle lui dit. Des problèmes d’argent. Problèmes tellement grave, qu’Owen se retrouve aujourd’hui à l’hôpital, certainement à cause de cela. T’as rien vu, Arya. T’as rien compris. T’étais trop focalisée sur le rejet de Cassey pour entrevoir quoi que ce soit d’autre, en réalité. Et il ne reste qu’à encaisser la nouvelle. Qu’à accepter ses paroles. Mais elle est sous le choc, l’étudiante. Parce que cela fait des mois, désormais, et il a fallu qu’un événement aussi dramatique ne survienne pour que sa mère lui avoue finalement toute la vérité. - Quoi… Mais, c’est… C’était si grave que ça ? Elle tombe de haut. Elle tombe de mille étages. Elle ne réalise même pas qu’elles puissent se trouver dans une telle situation, toutes les deux. Toutes les deux, parce que ce qui touche l’une touche irrémédiablement l’autre. Elles sont liées, liées par un lien bien plus fort, bien plus intense, que celui du sang. - Mais pourquoi tu ne m’as rien dit, si c’était si grave… ? Elle entend déjà la réponse, Arya. Pour te protéger. Mais c’est une réponse qui n’entre qu’à moitié dans son esprit. Vraisemblablement Cassey a des ennuis, de gros ennuis. Et s’il lui était arrivé quelque chose, à elle, à sa mère, elle n’aurait jamais pu s’en remettre, Arya. - C’est le genre de choses dont tu es obligée de me parler… Parce que ta vie est étroitement liée à celle de ta mère, Arya. C’est le cas depuis ta naissance, et ce sera encore le cas dans bien des années. Parce que c’est de cette façon qu’elles fonctionnent, de cette façon qu’elles ont toujours fonctionné.