Need you now - "Warston"

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{need you now }
crédit/ tumblr ♛  w/@Nikolaï Warren

Elle n’est pas rentrée hier soir. C’est la première fois, depuis qu’elle a officiellement emménagé chez Nikolaï, qu’elle a découché. Ce n’était pas prévu, ni même envisagé. Elle devait simplement passer la soirée auprès de Peyton à l’origine. Mais le moment privilégié entre sœurs ne s’est pas du tout passé comme elle l’imaginait. Tout a basculé quand sa petite sœur, la prunelle de ses yeux, lui a annoncé qu’elle était malade. Malade, le mot qu’elle déteste le plus au monde. Malade, le mot qui sonne comme une malédiction. Celui qui fait si peur aux Cooper. Depuis le décès de leur mère, celui qui a suivi de leur frère, c’est là. Cela plane au-dessus de leurs têtes comme une menace qui, à tout moment, peut être mise à exécution. Et c’est sur Peyton que c’est tombé. Une insuffisance cardiaque, ce n’est pas anodin. C’est ce qui a pris leur mère malgré les indications de son médecin. Une maladie qui n’est pas faite pour ceux qui vivent à cent à l’heure. Une maladie qui n’est pas faite pour Peyton Cooper. Elle aurait préféré mille fois être à sa place, Isa. Elle donnerait tout pour être à sa place. Plutôt que la savoir en danger, plutôt que d’envisager le pire comme elle le fait depuis qu’elle sait tout. C’était la pire chose qui pouvait arriver à leur famille. La pire chose qui pouvait arriver à Isabella. Perdre encore un membre de sa famille, elle ne s’en remettrait pas. Elle succomberait cette fois. Depuis la veille, chaque seconde qui passe, elle n’a pensé qu’à sa petite sœur. C’est pour cette raison aussi qu’elle est restée dormir auprès d’elle. Le besoin d’être avec elle, le besoin de veiller sur elle. La quitter en cette fin d’après-midi a été extrêmement difficile. Extrêmement pénible. C’est Peyton qui a réussi à la persuader de rentrer, ne serait-ce que pour parler à son petit-ami. Elle ne sait pas comment elle va y arriver, Isa. Depuis la veille au soir, pas une fois, elle n’a craqué. Elle s’est retenue, pour sa petite sœur. Car c’est Peyton qui a besoin de soutien, non elle. Et Peyton, elle n’aurait pas supporté de la voir s’effondrer. Alors elle a fait ce qu’elle fait toujours, Isabella. Elle s’est contenue, elle s’est retenue. Elle a gardé le contrôle d’elle-même à défaut d’en avoir un sur la situation. Mais, face à Nikolaï, elle ne sait pas comment elle va pouvoir en faire autant. À lui, elle n’a jamais su lui mentir. Il est capable de déceler tout ce qu’elle garde enfoui au plus profond d’elle, tout ce qu’elle cache au reste du monde. Elle appréhende le moment où elle va le retrouver et, en même temps, elle sent qu’elle en a besoin. Besoin de le retrouver, besoin de l’avoir à ses côtés. Même si son attention était focalisée sur sa cadette, il lui a manqué. Sa force, sa présence, tout autour d’elle, elle lui a manqué. Alors, malgré toutes ses appréhensions, quand elle le voit assis sur le perron de la maison, elle sent son cœur se réchauffer instantanément. Elle récupère son sac à main avant de sortir de la voiture pour le rejoindre. Son regard croisé celui de Nikolaï qui lui adresse un simple petit sourire. Il ne bouge pas de sa place, mais attend qu’elle s’approche. Pour la première fois, depuis la veille, vient à l’idée de la jeune femme qu’il pourrait lui en vouloir. Elle a été laconique dans ses messages, indéniablement, elle n’allait pas parler de la maladie de sa sœur dans des messages. - Bonsoir bébé… le salue-t-elle avec un bref sourire. Elle se penche vers lui pour lui voler un tendre baiser. Plusieurs secondes durant, elle l’embrasse, les yeux fermés. Il ne sait pas le bien qu’il lui fait. - Il est un peu tôt pour chercher les étoiles...? elle lui dit de sa douce voix. Elle ne paraît ni heureuse, ni malheureuse, Isa. Juste calme. Incroyablement calme. Le calme qui cache la tempête qui fait rage en toi.

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crédit/ tumblr ♛  w/@Nikolaï Warren

Indéchiffrable Isabella, elle parait être un mystère à elle toute seule. Une femme douce, attentionnée, mais au fond inaccessible. Comme s’il y avait cette partie d’elle qu’elle refusait de dévoiler. Comme si, depuis toujours, elle avait besoin de se protéger. C’est quelque chose qu’elle apprend à combattre auprès de Nikolaï. Il lui montre le chemin, pour faire les choses à deux, main dans la main. Elle apprend, Isa, tout doucement elle apprend. Mais, dès lors que la souffrance vient à nouveau la submerger, elle retrouve ses vieux travers. Elle retrouve ce besoin de tout porter sur ses seules épaules. Au fond, ils seront toujours là, ses démons. Ceux qui l’empêchent de pleinement se libérer, ceux dont elle ne peut se délivrer. Comme une noirceur bien enfouie en elle, noirceur qui attend le moindre instant de faiblesse pour à nouveau la submerger. Et faible, elle l’est en ce moment, plus qu’elle ne pourrait jamais l’être. La maladie de Peyton lui fait terriblement peur. Elle la ramène à toutes les failles, toutes les fêlures du passé, celles qui ne se sont jamais refermées. Elle est terrorisée à l’idée de la perdre, terrorisée de ne rien pouvoir faire. Elle a eu beaucoup de mal à la laisser, l’impression désagréable qu’elle l’abandonnait. Mais elle doit rentrer chez elle et, chez elle, désormais, c’est chez Nikolaï. Loin de se douter de toutes les questions qu’elle a soulevées par son silence la veille au soir, la jeune femme imagine encore moins les craintes qui ont pu gagner son petit-ami. Elle a juste, en le voyant, une brève appréhension quant à sa réaction. Il pourrait lui en vouloir d’avoir découché, sans rien expliquer, juste avec quelques mots envoyés sur son téléphone. Mais, lorsqu’elle arrive jusqu’à lui pour l’embrasser, son homme prolonge son baiser avec tendresse. Il lui avoue même qu’elle lui a manqué. - Toi aussi. souffle-t-elle dans un murmure alors que son regard s’accroche au sien. Elle sent qu’il est heureux, non, même soulagé de la voir. Une pointe de culpabilité envahit la Latina qui, sans un mot, s’assoit à ses côtés comme elle y est invitée. Sa petite déclaration l’a fait tendrement sourire. Il est adorable, Nikolaï. Il a le don de l’envoûter avec ses paroles autant qu’avec ses gestes. - Tu es adorable... Elle ne pense pas avoir quoi que ce soit d’une étoile, encore moins ce soir. Rien qui scintille dans ses grands yeux noirs. Surprise par sa question, la belle secoue négativement la tête. - Non, tu sais que je n’en bois pas. Il le sait, alors pourquoi lui en propose-t-il ? A-t-il peur de ce qu’elle pourrait dire ? La main d’Isabella vient instantanément se poser contre sa cuisse alors qu’elle se tourne un peu plus vers lui pour lui faire face. - Je suis désolée pour mon manque d’explication hier soir. J’avais besoin d’être avec ma sœur. Et, tout doucement, elle entame le sujet. Même si, indéniablement, elle aurait préféré éviter. - Peyton m’a annoncée... Elle s’arrête subitement, incapable de continuer. Elle détourne les yeux, comme pour éviter son regard. Comme pour éviter de craquer. - Elle m’a annoncée qu’elle est malade. Et dans un murmure, elle finit. La même boule dans le ventre que depuis qu’elle l’a appris.

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crédit/ tumblr ♛  w/@Nikolaï Warren

C’est sa plus grande force mais sa plus grande faiblesse à la fois. C’est ce qui lui a permis de tenir durant tout ce temps, mais qui pourrait bien finir par avoir raison d’elle à tout moment. C’est ce qui l’a aidée à survivre mais c’est bien, aujourd’hui, ce qui l’empêche de vivre. Elle enfouit ses douleurs tellement profondément en elle, Isa. Elle les cache à l’intérieur de son cœur, elle les enlise sous tout ce qu’elle peut, uniquement pour les empêcher de l’atteindre. Les empêcher de la mettre plus bas que terre. Mais, à force de repousser son mal-être, elle ne fait que l’accentuer. Que le faire grandir quand ses forces, elles, tendent à faiblir. Elle ne peut pas tenir éternellement en agissant comme elle le fait, mais c’est bien ce qu’elle fait depuis des années. Et, devant l’annonce que lui a fait sa sœur il y a seulement quelques heures, elle ne peut pas faire autrement que reproduire le même schéma. Répéter les mêmes erreurs même en présence de l’élu de son cœur. La veille au soir, elle était incapable de parler à Nikolaï. En cette fin d’après-midi, elle n’en a pas plus envie. Mais elle n’a pas le choix. Elle sait qu’elle n’a pas le choix. Elle ne peut pas le mettre à l’écart d’une chose aussi importante de sa vie. De toute manière, il la connaît trop bien. Il se rendrait trop vite compte qu’elle ne va pas bien. Il semble déjà l’avoir compris alors que, depuis son arrivée, il ne la quitte pas des yeux. Il lui rappelle qu’elle a découché, comme pour la taquiner. Mais elle ne se sent pas capable de lui répondre, ni même de lui sourire. Les raisons de son éloignement lui sont bien trop pénibles, bien trop tortueuses. Elle s’assoit finalement auprès de lui pour lui parler. Elle essaie d’oublier sa douleur, oublier sa souffrance. C’est d’un ton neutre, trop neutre pour être vrai, qu’elle commence à lui expliquer. La voix basse, comme pour s’empêcher de craquer, elle lui avoue toute la vérité. Tout de suite, la voix de Nikolaï change.

Comme s’il comprenait,
Comme s’il réalisait,
Ce que tu n’arrives toujours pas à digérer,
Ce que tu n’arriveras pas à accepter.

Devant son choc, elle garde le silence, plusieurs secondes durant. Elle ne sait plus très bien si elle le fait pour lui, pour lui laisser le temps de réaliser. Ou bien pour elle, pour se laisser le temps de se calmer. Calmer la tempête qui s’abat en elle depuis la veille. – Elle a une insuffisance cardiaque. laisse-t-elle échapper dans un murmure. Elle ne le regarde pas, non, elle fuit ses prunelles bleutées. Les siennes rivées sur la maison en face de la leur, comme si pour la première fois, elle la découvrait. Elle essaie seulement de garder le contrôle d’elle-même, Isabella. Bien à défaut d’en avoir sur la situation, une situation qui lui échappe complètement. – C’est ce qu’avait notre mère. ajoute-t-elle finalement avant de se terrer dans le silence. Elle n’a pas la force de prononcer d’autres mots, elle ne saurait pas même lesquels employer. Lesquels seraient suffisamment forts pour décrire combien elle se sent brisée. Comme si c’était elle, subitement, qui avait le cœur broyé.

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crédit/ tumblr ♛  w/@Nikolaï Warren

Elle est là, juste à côté de lui. Sa cuisse qui effleure la sienne, son bras contre le sien. Elle est là, juste à côté de lui. Mais c’est comme si elle était à des milliers de kilomètres de lui. Comme s’il y avait cette distance entre eux, comme si subitement elle était dans un autre espace-temps. Comme si elle était dans une autre vie, dans un autre monde. Elle est, à nouveau, la jeune adolescente en proie à la maladie de sa mère. Elle est à nouveau cette gamine perdue, fébrile, trop fragile pour tout ce qui lui arrive. Elle a grandi depuis cette époque, Isabella. Elle est devenue une femme, une femme forte, une femme courageuse. Mais, devant l’état de santé de Peyton, elle est à nouveau cette enfant. Elle se retrouve face à son pire cauchemar, face à sa plus grande peur. Celle de perdre sa sœur. Elle ne s’en remettrait pas si elle perdait un nouveau membre de sa famille, non, elle ne s’en remettrait jamais. À l’intérieur d’elle, il y a déjà quelque chose de brisé. Nikolaï vient poser son bras autour d’elle, mais c’est comme si elle ne le sentait pas là. Comme s’il n’était pas là. Ou c’est peut-être elle qui n’est plus là. Elle ne craque pas, elle ne pleure pas.

Tu contiens toute cette peur en toi pour ne pas céder,
Pour ne pas craquer, pour ne pas t’effondrer,
Parce que t’es pas sure que tu pourrais vraiment te relever.

C’est l’homme qu’elle aime qui la sort de sa torpeur. Il veut rentrer dans la maison, comme s’il avait saisi, qu’il n’y aurait pas d’étoiles ce soir. Et, pour Isabella, plus vraiment d’espoir. Sans protester, l’âme en peine se relève, elle le suit, machinalement plus que naturellement. Une fois à l’intérieur, elle pose tout aussi mécaniquement son sac à main, puis retire sa veste. Elle est là sans être là. Elle entend à peine la voix de Nikolaï mais elle se focalise comme elle peut sur lui. Cela lui demande un certain effort de concentration. - Elle ne voudrait jamais. elle murmure doucement. Elle la connaît, sa sœur. Elle la connaît par cœur. Elle tient trop à son indépendance, elle tient trop à sa liberté. Elle tient trop à sa vie pour la changer. C’est bien ce qui te fait peur. Qu’elle refuse de changer, ta sœur. Quelle abime un peu plus encore son cœur. Elle prend appui sur le meuble derrière elle, geste qu’elle ne fait jamais, elle qui se tient toujours si droite, si parfaite. C’est comme si elle tenait à peine sur ses jambes. - Seulement tu ne peux rien faire. Et moi non plus. C’est cette impuissance qui la tue. Qui la met à bout. Elle ne sait pas comment elle va pouvoir la gérer, comment elle va bien pouvoir l’épauler. - Je vais lui trouver un autre médecin. Le plus réputé. J’ai des contacts, je dois juste... Elle passe fébrilement la main dans ses cheveux. Le cauchemar vient à peine de commencer... Elle ne peut pas se laisser aller. - Je dois passer des coups de fil. Elle l’entend à peine, Nikolaï. Elle ne le voit pas s’approcher. Elle est loin, trop loin.

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crédit/ tumblr ♛  w/@Nikolaï Warren

Tout. Elle aurait préféré tout, plutôt que cela. Plutôt qu’à nouveau cela. La maladie, elle en connaît trop bien les effets dévastateurs, Isabella. Elle ne connaît que trop bien le mal qu’elle engendre. Le mal dans le corps, le mal dans le cœur. Le mal dans l’âme tout entière de celui qui est contaminé, et de tous ceux qui peuvent l’aimer. Elle a trop souffert lorsqu’elle a subi la maladie de sa mère. Celle de son frère. Puis, désormais, c’est Peyton qui est infectée. Comme empoisonnée par ce poison qui les touche depuis trop longtemps. Une malédiction, c’est ainsi qu’elle le ressent, qu’elles le ressentent toutes les deux. Une malédiction qu’elles ne peuvent pas contrer, ni empêcher. Les autres encore moins. Elle ne pense même pas aux autres, Isabella. Pas même l’homme qu’elle aime. C’est terrible, c’est affreux même à dire. Mais c’est comme si ce qui est en train d’arriver ne concernait qu’elles. Que leur famille. Mai que tous les autres, ils n’y avaient pas leur place. Même pas Nikolaï. Comme si elles se repliaient sur elles-mêmes, sur ce qu’elles ne connaissent que trop bien, excluant ceux qui y sont étrangers. Ceux qui n’ont pas vécu avec elles les souffrances précédentes. Elle ne se rend pas compte, Isabella. Elle ne se rend pas compte de la distance qu’elle a vis-à-vis de son petit-ami. Elle est tellement prise par son mal-être, par ses tourments beaucoup trop familiers, qu’elle percute tout juste quand il essaie de l’approcher. Elle n’est pas dans son état normal, elle est juste beaucoup trop mal. Trop mal pour faire attention à son comportement avec lui, trop mal, peut-être, pour faire attention à lui.

Pourtant, t’as besoin de lui,
T’as tellement besoin de lui.

Mais elle est incapable de le montrer. Ni même de le réaliser. Elle est trop enlisée par tout ce qui arrive. C’est comme si un mur entier de souffrances, celles du passé et celles du présent, venait de se briser sur elle. Sur sa famille. Le silence qui répond à la voix de Nikolaï, elle se perd à nouveau dans ses pensées. C’est comme si elle ne l’entendait pas, comme si elle s’en fichait. Comme si elle n’en avait rien à faire, alors que c’est tout le contraire. Mais il ne laisse pas tomber, non. Il insiste, il fait tout pour lui ouvrir les yeux. Il fait tout pour lui dire qu’elle n’est pas seule dans cette épreuve. – Je ne sais pas comment, elle a… Elle a si peur que tout change dans sa vie. confie-t-elle, la voix encore lointaine. Elle se souvient de sa conversation avec Peyton. Plus que la maladie, c’est tout ce qu’elle implique qui semble lui faire peur. Les yeux qui se relèvent enfin vers le jeune homme quand il pose sa main contre sa joue, elle les plonge dans les siens pour la première fois. La première fois depuis qu’elle est là. – Je sais… Je sais que tu es là. Elle aussi, elle est là, pour Peyton. Mais, lui comme elle, ils ne peuvent rien faire. Le regard qu’elle baisse à nouveau, elle se sent incapable de dire un mot. Elle pourrait pleurer, elle pourrait crier. Elle pourrait se blottir dans ses bras jusqu'à sentir l'air lui manquer. Mais tout semble au-dessus de ses forces.