(milo) mmm, baby, I don't understand this [délai : 06/10]

traits de caractère / doux . protecteur . impulsif . gentil . bienveillant . triste . défaitiste . lasse . créatif . cultivé . à l'écoute . loyal . généreux . violent . voleur . pensif . mélancolique . silencieux . émotif . menteur.

J’viens postuler. Que tu craches en grattant frénétiquement l’intérieur de ton bras maigre. Joues creusées par la faim, cernes violettes sous tes yeux bleus. Le vent cherche à te faire basculer, la nuit s’empare de la rue. Tu t’sens si désespéré ce soir. Au point de vouloir dégueuler lorsque la porte du club grince et se referme derrière le colosse. Gaillard dans entrebâillement de la porte, qui te toise avant de descendre les quelques marches qui vous sépare. Il se plante devant toi, le rictus moqueur, les bras croisés et les yeux brulant d’excitation. La musique sourde dans la boite qui s’échappe de la porte te retourne d’avantage le cœur. Il observe ton corps, prend le temps de faire le tour pour toucher tes bras, ton cul, ton dos. Ses yeux qui se baladent pour vérifier la marchandise, savoir quoi faire d'un minet comme toi. Finalement il se refout d'vant toi, l'sourire qui revient pour te narguer. Tu veux qu’on te paie comment ? Argent ou… Parce qu’il a vite compris le colosse, en voyant ton bras couvert de sang, de croûtes et de griffures. En voyant tes lèvres blanches et la transpiration qui perle sur ton visage. Il comprend vite l’opportunité d’un gamin en manque, accroc qui ne pourra pas le lâcher au bout de quelques billets. Bête en cage qui ne pourra jamais s’enfuir. Hero... Héroïn tu repond faiblement, le rire glacé du gars qui s’envole encore encrer dans ta mémoire. Sa gueule qui t’souffle, merde ptit gars, comment t’en es arrivé là ?


Elle cachait ses bleues en souriant. A travers un grand miroir que t’appelait le miroir de la reine. Elle se poudrait tous les matins en appliquant joyeusement sa crème, son maquillage, sans que tu ne te rendes compte de sa souffrance. Tu la protégeais, dans tes histoires de chevaliers, parce que pour toi il n’y avait qu’elle et toi. Papa Milo était absent, trop bourré pour pouvoir te prendre dans les bras, trop con pour un geste tendre envers ta mère. Quand t’a eu cinq ans, t’a été en âge de comprendre. Comprendre que la petite île où vous habitez, vous abritez de tout bruit ou scandale. Comprendre que les coups pleuvaient sur ta mère quand tu te cachais sous ton lit. Comprendre que le maquillage sur sa peau ne faisait que ressortir les plaies. T’a compris, un soir aussi, quand elle venu te secouer dans ton lit, te dire de prendre le minimum, tes chaussures et de la suivre, que tu ne le reverrais jamais. Parce t’a juste aperçu ses bottes et une marre noire à côté quand tu tournais la tête vers la cuisine avant de partir à tout jamais.

Mais tu l’aimais ton île.
T’aimais le silence.
T’aimais les galets sur la plage.
T’aimais la pêche et les bateaux.
T’aimais l’odeur de l’iode, le vent dans tes cheveux et la sentiment constant d’extrème liberté.
Qu’elle t’a ôté une fois que t’a posé les pieds ici.

New York New york what a wonderful town.

Y’a du monde partout. Des gens qui se marchent dessus. Des taxis qui se doublent. Qui klaxonnent à tout va. T’avais la gueule effrayé, collé aux jupons de ta mère. Tenter vainement de la tirer en arrière pour lui supplier de rentrer chez vous.
T’aimes pas les gens.
T’aimes pas les hommes en costard qui te passe devant avec degout.
T’aimes pas les femmes aux robes serrés, leur sac à main posé betement sur leur bras.
T’aimes pas l’Energie de cette ville, celle qui ne dort jamais. Car toi t’aimes dormir et t’a l’impression qu’on t’en empêchera ici.

Quand tu montes dans le taxi, tu te retiens encore de pleurer. T’observes tes pieds de gamin qui ne touche pas le sol. Vous roulez longtemps en silence. Y’a le calme qui revient sur les routes. Moins de monde. Plus de discrétions. Les lampadaires qui s’éveillent sur votre passage. Puis le taxi s’arrête brusquement, vous laisse sur le trottoir devant une immense maison, qui dans ta tête apparait comme un terrible château.
Le manoir Ledottir.
« C’est notre nouvel maison Milo. »

Le lendemain elles ne se réveillent pas. Ni l’une ni l’autre. Toi t’es debout, le cœur battant, l’œil qui ne s’est pas fermé de la nuit. Parce que tu voulais les protéger. Même elle, celle que tu croyais voleuse de mère. T’avais veillé toute la nuit à ce qu’aucun avion, bombe ou n’importe quoi ne vous tombe dessus. Car Monsieur et Madame Ledottir n’étaient plus là pour veiller sur vous. Siobbhan avait dit qu’ils étaient restés là-bas. Qu’ils n’étaient plus avec vous. Et qu’ils ne reviendront pas. Ça t’avait rendu très triste, même si tu refusais de l’admettre devant elles. Parce qu’ils étaient doux, gentil et qu’ils ne t’avaient jamais hurlé dessus ou lever la main sur toi quand tu faisais une bêtise. Même quand tu tirais les nattes de leur petite Nashandra, que tu la poussais ou parfois même faisait tomber après une croche-patte. Et ce matin tu te sens honteux. Coupable. Parce qu’elle avait surement encore plus mal au cœur que toi Nash. Et qu’t’avait ce drôle d’instinct qui t’ordonnait de la protéger et de la faire sourire. T’es descendu dans la cuisine et tu as cherché dans ta mémoire à reproduire les gestes de Siobbhan. Ta mère était la meilleure cuisinière et dame de ménage du monde, tu en étais si fier. Alors toi aussi tu t’y mets. T’attrapes quatre œufs dans le frigo, un que tu fais tomber par terre et un autre qui s’éclate avec la coquille dans le bol. Tu pèches avec tes petits doigts les reste de coquille en te disant « au pire c’est bon quand c’est croquant ». Tu touilles, sort une poêle, attrape des allumettes et cuisines joyeusement des œufs brouillés. Ils ont une drôle de gueule quand tu les sert dans une assiette. Mais tu te dis que ça fera rire Nashandra. Et que tu donnerais tout pour la faire rire. Alors tu montes les marches, toques à la porte de ta petite sœur et lui déposes les œufs sur ta table de nuit en silence. Quand elle se réveillera tu la prendra dans tes bras pour lui promettre qu’à partir de maintenant tu seras toujours là.  

Gamin populaire. Charmant jeune homme au visage d’enfant. Belle gueule. Rieur. Fou de joie, fou de vie. T’es le con qui parfois rit en cœur lorsqu’un binoclard est bousculé. Celui qui se moque des doc Martens, des coupes étranges, des cheveux colorés. Tu ricanes bêtement en montrant fièrement au reste de la classe les sales notes que tu te tapes. Tu te sens fier à l’idée d’être le pire, l’idiot, le rigolo de classe. Celui qui lance les conneries, fait pleurer les professeurs. Tu cherches l’acceptation, l’approbation des chefs de l’école, tu fais tout pour appartenir à un groupe pour te sentir protéger si un jour ça tourne mal. Il t’arrive de te battre pour tes potes, ou juste pour te battre parce que ça ferait sourire les filles et te donnerait un drôle de statut. Mais t’y arrives plus, à jouer, à faire semblant. A faire pleurer Siobbhan, l’encourager à boire par tes actes. A faire souffrir Nashandra en te moquant de ses enfantillages. En inventant une personnalité qui ne t’appartient pas. Tout ça pour être accepté. Ou aimer. Tu refoules tes envies, ta vraie nature. Tu passes des soirées à te rendre plus con que tu ne l’es. Délire de popularité nocive.
Un soir t’a voulu vivre par toi-même. Tu sais pas ce qui t’a pris. Le plan était pourtant simple. Aller chercher la merde en meute. Meute au blouson fièrement porté du lycée. Gamin blasé devant vous qui était trop proche d’un garçon à leur gout. Donc au tien aussi, non ? Mais non. Alors ils s’acharnent, ils le cherchent. Il s’amuse à le bousculer, lui cracher des insultes à la gueule alors que tu te fous en retrait. T’arrives pas à détacher tes yeux du siens. Merde pourquoi il t’regarde comme ça ? Y’a un truc chez lui qui agite ton myocarde trop violemment. Un hurlement qui part de ton estomac pour le protéger, pour être là avec lui contre tous. Une drôle d’évidence. Et alors qu’ils s’apprêtent à lui tomber dessus, tu retourne ta veste. Ton couteau caché que tu plantes dans le mollet du chef. Tes jambes qui court vers l’autre ado. Ta main qui attrape trop vite la sienne et lui ordonne de courir avec toi. Les cris de colère et douleur dans le fond. Les autres qui hésitent à vous attraper pour vous buter. Mais tu fuis, tu cours, tu vis enfin. Ton cœur qui palpite, ton sourire qui s’étire, et ta main collé à la sienne pour signer un pacte du « pour toujours ».
A bout d’haleine, dans un coin de rue assez lointaine tu bredouille que t’es desolé pour tout ça. Et au fond tu te le dis à toi-même que t’es desolé pour tout, tout ce que t’es devenu.
« Love. »
« Hein ? »
« J’m’appelle Love ».
« Milo… »
Dans un élan désespéré, une moue enfantine et un gros creux au fond de ta poitrine t’ose lui demander.
« Dis Love ? Tu peux rester avec moi, genre longtemps j’sais pas ? »
« Ouais. Ouais ça me dit, pourquoi pas. »
Et c'est comme ça que tu signes ta plus belle histoire d'amitié.

Tu ne voulais pas la faire pleurer, ta mère. Tu ne voulais pas qu’elle se mette à boire à son tour quand tu la laissais seule le soir. Que tu passais tes nuits à t’échapper, à filer sur les toits pour rejoindre le seul qui te comprend vraiment sur cette terre. Love et vos folies, vos bonbons que vous vous enfilez en avalant, sniffant, piquant parfois. Tu tombes avec lui, allongés sur les toits, les yeux larmoyant vers le ciel et te demandant parfois pourquoi, merde pourquoi c’est si bon. Tu ne penses plus à rien d’autre qu’à lui, qu’à vous, qu’à ces poches remplies d’herbe, de poudre blanche, de pilules multicolores que t’enfiles pour t’enfuir vers le monde des merveilles. Besoin de rien d’autre. Juste lui et tout ça. Parfois, sur ces toits en observant les étoiles tu te mets à imaginer ta vie de rêve, si tu avais vraiment le choix et que tu pouvais tout plaquer pour vivre LE rêve ultime. Alors un joint perché sur un coin de ta bouche tu lui avait dit à Love tout ce que tu aimerais.
« Un camion. Un énorme van avec un l’intérieur en bois avec pleins de couvertures et de coussins. J’pourrais parcourir le monde avec. Gouter toutes les pilules de la Terre. Puis j’retournerais làs bas avec mon Van. Sur l’île de skye, t’sais. Et là-bas je construirais ma cabane à pèche et je vivrais d’ça, seul, sans que personne vienne me faire chier. »
Love était silencieux quand tu lui parlais de tout ça. De ton envie de virer toutes choses de ta vie pour t’retrouver vraiment seul. Ton envie de vivre une attaque nucléaire pour avoir l’excuse de vivre reclus. Parce que t’es encore un gosse dans ta tête. Un enfant qui n’a jamais voulu affronter le monde des adultes et des responsabilités. T’aimes être rien. T’aime te taire. Et ici ce n’est pas possible d’être rien et de se taire.
Puis y’a eu Noé.
La gueule rieuse, ses cheveux dans l’vent et sa folie des grandeurs. Fille des quartiers Uppé, gamine populaire sur tout ; lycée, fac, instagram, magazine people et tout le bordel. Enfant de star ou tu ne sais pas trop quoi. T’as rarement écouté quand elle te parlait de ce merdier. Elle est tombée dans votre vie comme ça, sans prévenir. Et merde, elle en a foutu du bordel. T’es un peu tombé amoureux d’elle. Love aussi. Du moins ce que tu croyais. Puis elle de lui. Ou elle de toi. Et Noé elle n’est pas comme les autres. Elle a pleins de trucs compliqué au fond d’elle, dans son cœur, qu’elle ne sait pas exprimer. Elle aime jouer, a débarqué avec ses caps ou pas cap qui t’ont entrainé parfois trop loin. « Cap ou pas cap de voler ça ? » « Cap ou pas cap de fumer ça ? » « Cap ou pas cap de l’embrasser ? » « Cap ou pas cap de sauter ? » « Cap ou pas cap de me faire l’amour ? »
Deux marionnettes idiotes. Toi et elle. Deux pantins fous d’ennuis. « Cap ou pas cap de partir ? » « Cap ou pas cap de me sortir de ta vie ? » Parce qu’elle hurlait parfois, elle n’étais plus elle-même. Elle avait mal à la tête, mal au cœur, mal à pleins de choses et elle voulait tout arrêter parfois. Ouais, tout.
« Cap ou pas cap d’essayer ? »
Elle Noé elle a entrainé ta perte. Son regard désespéré, yeux de barjot, elle était pas elle-même quand elle t’a demandé ça. Et t’a suivi, idiot.
Skag.

La préparation dure trop longtemps. Tu sues. Transpi qui perle sur ton front. Et cœur qui bat à la chamade. Tu fermes les yeux très fort quand la piqure s’approche de ta veine. Tu pousse un cri de surprise quand elle traverse ta peau et que le produit se repend dans ton sang lentement, doucement, parfaitement.

Et elle n’a pas essayé, elle. Quand t’avais ré-ouvert les yeux elle avait disparu. Mais tu étais si bien, si heureux, si apaisé, si soulagée, si bien, si heureux, si si sisisii……

Fuck.

Elle a finalement réussi à te foutre à la porte. La colère tremblante dans sa voix. La déception dans ses yeux. La tristesse dans son cœur. Car tu ne valais plus rien Milo. A errer sans but, à te piquer pour rien, à voler pour ça, à aimer ton train de vie quotidien. A aimer tes rêves qui s’effondrent. A pleurer Noé qui a disparu depuis. A t’lancer dans le tourbillon infernal de l’échec.  

Love te permet de squatter. Tu lui caches toute la vérité parce qu’il reste le seul que tu ne pourrais pas perdre. Tu caches à Nash, l’évites, n’ose plus intervenir dans sa vie. Tu l’observes de loin, l’évites quand t’es trop défoncé. Et tu hurles contre ton addiction qui t’empêche de vivre même une seule journée. Alors t’erres longtemps dans les rues après ces cris, après la porte qui claque. T’erres un sac à dos à la main, croise quelques sdf qui t’indique des foyers, des adresses.
Au bout de quelques jours, la monnaie manque, la faim et le reste aussi.

Y’a ce bar. Y’a cette boite. Y’a pleins de mecs qui entrent, qui sort avec d’autres mecs plus jeunes et plus beaux. Les billets pleuvent. Ta bête noire te fais tomber ton sac devant la porte des loges. Le colosse qui sort.

J’viens postuler.  Que tu craches en grattant frénétiquement l’intérieur de ton bras maigre...Joues creusées par la faim, cernes violettes sous tes yeux bleus....[..]