coeur éteint.

cigarette entre tes lèvres carmins, t’observes les voitures passaient sur la route devant toi. t’attends et t’attends. le ventre tordu, l’appréhension dans les veines. t’as le coeur qui bat un peu trop vite. la sensation de ne pas être très à l’aise, la mauvaise sensation de ressentir une gêne, un stress désagréable. c’est con, c’est vrai. mais c’est l’effet qu’il te fait. autre que l’amertume que tu ressens pour lui, autre qu’un certain espèce de sentiment d’amour pour lui, celui-ci, le stress dans les tripes, il surplombe tous les autres. pour aujourd’hui. pour cet instant que vous vous apprêtez à vivre, que tu t’apprêtes à partager avec lui. t’attends et t’attends, encore. tu sais même pas s'il va vraiment se pointer, même après votre échange par messages. est-ce que t'en serais étonnée ? sans doute pas. ca te meurtrirait encore plus mais à quoi bon. le vent froid venant soulever ton carré brun, t’es là à malmener ta pauvre lèvre inférieure de tes dents, à ramener bien trop vite ta clope entre tes lèvres comme s’il pouvait agir sur toi comme un antidépresseur, comme si prendre un peu plus de nicotine pourrait t’apaiser ou même te ramener un semblant de courage. tu détestes ça, qu’il te fasse sentir ainsi, qu'il vient mettre un bordel monstre dans ta vie déjà bousillée. ton attitude du jour, tu ne peux dire que c’est seulement le fait de le revoir depuis.. votre dernière altercation, qui te met dans cet état. mais c’est surtout le fait de l’emmener voir votre fille. douce ironie, cruelle ironie qui te meurtrie. c'est plutôt là où son corps repose que tu l'emmènes. une chose que tu n’as jamais faite avec quelqu’un extérieur à ta famille ou shabh. ismaël, c’est pas ta famille, pas ou plus ton ami, pas ou plus ton amour. pas ou plus ton amant. c’est rien, plus rien. comme il l’a désiré pendant neuf ans, comme il te l’a bien fait comprendre dans ce bar. t’aurais dû te maintenir sur tes pensées, sur tes dires, considérer comme il n’est pas le père, considérer qu'il ne mérite même pas cela. mais c’est plus fort que toi. parce qu’il y a ce truc que tu ressentiras toujours pour lui, malheureusement pour toi. il est ton passé, le démon qui te hante. alors, tu le fais, parce que d’une certaine manière tu lui offres une dernière chose de toi. la fin de la vérité, la fin de la partie. là où elle se repose. et après ça, tu couperas les ponts, facilement ou non mais tu reprendras ta vie tranquille. ton club, continuer de jouer la chiante avec nevaeh en te prenant pour sa mère, coucher avec des mecs lambdas sans attache, l’oublier lui. tout simplement. ton plan semble bien roder, même si t’as conscience qu’il te faudra un temps d’adaptation. t’attends et t’attends, et c’est enfin que le concerné se pointe. “t’es en retard.” tu lances d’une voix dénuée d’émotion alors qu'il ne l'est presque pas, ton visage qui se tourne vers lui, tes yeux fatigués et chagrineux qui s’ancrent dans les siens. t'as le visage cerné que t'as pas pris le temps de camoufler par un produit quelconque. en effet, t’as tourné dans tes draps encore et encore cette nuit en perspective de ce jour, impossible pour toi de fermer l’oeil. on est même pas le sept aujourd’hui mais t’as décidé de t’infliger la douleur de la perte deux fois ce mois-ci. “j'étais pas sûre que tu viendrais. ” mea culpa, t'as eu un petit soupir avant tes mots. tu te reprends par ces derniers,t'as pas envie d'être désagréable, d'être une garce, de t'engueuler avec lui aujourd'hui. surtout pas aujourd'hui. tu balances ton mégot au sol pour l’écraser sous tes bottines. c'est rare que tes pieds ne soient pas insérés dans tes talons, rare que ta silhouette ne soit pas plus sublimée par tes escarpins. t'as pas besoin de ça pour marcher sur l'herbe d'un cimetière, sur les graviers gris déprimant des chemins. c'est juste le reflet de ta résignation, celui d'une femme qui au fond a le coeur brisé depuis dix ans. et t'es sans doute la seule à ressentir cela, surtout quand tu repenses à ce qu'il t'a dit mais c'est ainsi, c'est la vie. c'est ta vie.

tu sais pas ce qu'elle te veut.
c'est pour avoir l'esprit libre que t'as accepté son invitation, que tu t'es préparé sans grande conviction. tu seras à l'heure, t'as déjà enfilé des habits sobre, tu descends rapidement les marches jusqu'au garage où tu grimpes dans ton aston. tu sais pas ce qu'elle te veut, t'essaies de pas te poser de questions. t'espères qu'il s'agit d'une connerie, un nouveau papier, une nouvelle mise en garde. une nouvelle interdiction d'approcher. ça ne te ferai qu ele plsu grand bien, mettre de la distance avec toutes ces femmes qui empoisonnent ton esprit. y'a un côté de toi que imagine que ce sont des excuses qu'elle veut te présenter, pour avoir coucher avec ton meilleur pote depuis toutes ces années, pour ses idioties balancés, pour son comportement. t'es pas le mieux placé, c'est certain.
il est quinze heure et une minute quand tu arrives à l'endroit demandé. tu te gares, très vite tu retrouve le trottoir et tes pas te conduisent jusqu'à nana, debout, clope au bec à quelques pas d'un cimetière. t'as desuite conscience de ce qui t'attends, mais t'essais de te mentir à toi même quand tes yeux se posent sur un café non loin de là. vous allez boire un café, rien de plus. n'est-ce pas ? arrivé à sa hauteur, les mains fourrées dans les poches de ton jean tu l'observes silencieux alors qu'elle balance une phrase. t'y réponds pas, préférant toi aussi t'allumer une cigarette. j'étais pas sûre que tu viendrais. tu lèves les yeux au ciel. bah, tu vois, j'suis là. que tu lâches, lassé. t'as le coeur un peu serré à la voir là, à te remémorer les semaines qui viennent de se passer. à cet amour que vous avez transformé en une haine redoutable.
tu tires sur ta cigarette, le regard un peu fuyant. qu'est-ce que tu voulais ? tu ne laisses pas le silence s'installer, sinon tu feras marche arrière tout de suite. tu n'as aucune envie d'être ici. aucune envie de vivre ce moment. aucune envie de ressentir quoi que ce soit.

clope qu'il s'allume, expression faciale peu commode et voix lassée, directe, peu accueillante qu'il te lance, t'as l'estomac qui se tord davantage. t'as le mal être qui continue de te surplomber, de faire en sorte que tu ne te sentes pas à ton avantage, dans un de tes meilleurs jours. tu sais qu'il a pas envie d'être là avec toi, près de toi, proche de toi. t'as la main qui passe dans tes cheveux, dégageant les mèches qui viennent chatouiller ton visage. "mes mots ont dépassé ma pensée." tu commences en détournant ton regard de lui. tes yeux se posent de nouveau sur les voitures qui passent non loin de vous alors que tu repenses à ces deux fois où tu lui as dit qu'il n'était rien. "toi comme moi, on a pas voulu de tout cela, que je tombe enceinte à l'époque." tu poursuis et tu pourrais tant t'attarder là-dessus, sur ce point. lui dire que t'aurais préféré même pas le connaître, pour le coup, après coup. parce que tandis que toi, t'étais là, avec ton mal au coeur, l'amour brisé, dégueulant tes tripes chaque matin, lui était passé à autre chose. bien trop rapidement à ton goût. t'aurais préféré déverser ta haine, ta jalousie pour cette femme qui t'a remplacé, qui vous a remplacé. mais tu fais rien et c'est peut-être parce que t'as plus la force de tout cela. d'être une garce. de te battre contre lui. ou pour lui. c'est dix, neuf ans trop tard. et c'est seulement qu'au bout de quelques semaines que tu déclares forfait. l'ex amour de ta vie est bien trop fort à ce jeu. t'es en dehors de la partie, qu'une spectatrice qui ne veut plus jouer. soupir extrait d'entre tes lèvres, sans plus de cérémonie, sans réellement un regard pour lui mais un mouvement de ta tête qui l'invite à te suivre, tu te mets à marcher, tes bras que tu croises contre ta poitrine. parce que c'est le moment que tu redoutes, celui de te retrouver de nouveau et bientôt devant cette tombe bien trop petite, celle qui ne laisse aucun doute sur l'âge du corps qui repose à l'intérieur. c'est dans l'autre direction que tu vas, pas vers le bar, ni aucun autre commerce. léger haussement de tes épaules alors que tes pas l'emmènent à l'entrée du cimetière. "mais qu'tu le veuilles ou non, que je le désires ou non, t'es son père." et c'est tout ce que tu resteras ismaël. après cela, on retournera tous les deux et chacun de notre côté à nos vies. loin de l'autre, comme ces dernières années. tu sais pas d'où tu sors ton courage, comment tu fais, comme à chaque début de mois, pour passer les grilles ouvertes.

nana elle s’excuse presque.
et tu la reconnais pas. tu reconnais la lueur au fond de ses yeux, tu reconnais pas sa façon de se tenir, sa tenue vestimentaire. tu la vois au fond du sceau, au bout d’un gouffre dans lequel tu n’es pas encore tombé. tu passes une main dans tes cheveux, alors que tu tires de nouveau sur ta clope. puis elle continue, ses mots tu les balais presque d’un revers de la main. si tu le dis... tu n’as pas envie de t’étaler sur le sujet, t’as pas envie de lui faire encore plus de mal. de lui avouer encore une fois que ce bébé, tu l’aurais pleinement assumé. elle n’a pas besoin de l’entendre, tu n’es pas capable de le dire. alors tu gardes le silence, tu regardes autour de vous vaguement. tu comprends assez vite, au vu son comportement, que ce n’est pas vers un café que vous allez vous diriger. d’ailleurs tu la suis dans sa marche. une main dans ta poche, l’autre toujours accrochée à cette cigarette. ais qu'tu le veuilles ou non, que je le désires ou non, t'es son père. t’inspires un grand coup. oui, je suis son père. que tu lâches alors que vous pénétrez ensemble dans le cimetière. l’atmosphère t’accable tout de suite, le temps semble être devenu gris. tu jettes ta cigarette au sol, sans prendre la peine de l’écraser. tu restes muet quand tu la suis dans ses allées sombres, la mort règne et te file un frisson répugnant. tu ne sais pas combien de minutes se sont écoulées avant que vous ne arriviez de la tombe. et ce qui te choque en premier, c’est sa taille. ce qui te frappe en deuxième c’est qu’il y a aussi ton nom gravé sur la pierre. et ça te file la gerbe, ça te retourne le coeur, tu poses une main contre ta poitrine. les larmes montent, mais ne coulent pas. tu t’efforces de tout garder, là, bien à l’intérieur alors que tu lis, et re-lis le nom de ta fille marqué pour l’éternité. ton cerveau te joue des tours, se met à l’imaginer, à les imaginer toutes les deux. main dans la main, se retournant vers toi à l’unissons, sourires aux lèvres. tu souffles fortement. tu pensais pas que tu ressentirai tout ça. la seule chose que tu trouves à faire, c’est te rapprocher de nana. de passer ton bras autour de ses épaules, et de la serrer un peu trop fort contre ton flanc. je suis, tellement, désolé. que t’articuler enfin. elle aurait du vivre. finis-tu, les yeux toujours fixés sur cette foutue tombe.

c'est pas facile pour toi. autant de présenter tes excuses, de taire ta fierté que de marcher encore une fois dans les allées entourées de pierres tombales. c'est encore plus difficile avec un homme comme ismaël. avec un homme qui ne s’épanche pas, un homme qui ne fait que dire que trois ou quatre mots par phrases, te faisant salement et méchamment ramer. et cette marche, tes pas qui s'enfoncent dans les graviers gris, ne t'aide en rien. elle ne fait que confirmer le sentiment que tu avais précédemment avant de rentrer ici. c'est pas difficile de le sentir venir. c'est toujours le même, tous les septièmes jours du mois et cela depuis dix ans, depuis que la cicatrice s'est ouverte en toi sans jamais se refermer. t'as jamais cherché à la recoudre parce qu'elle te rappelle que t'es là mais pas elle. elle te rappelle que t'es qu'une pécheresse, peut-être qu'une imposteur dans ce monde. la marche est tendue, respectueuse, silencieuse. émotive, t'as déjà le cœur mort. c'est toujours le même chemin, toujours la même direction qui te ramène au même endroit, devant cette tombe bien trop petite où tu t'arrêtes, devant ce morceau de pierre orné encore de jolies fleurs presque encore fraîches depuis la dernière fois, depuis deux semaines. c'est tellement injuste, tellement affligeant la vie. t'aurais aimé lui présenter une fillette de dix ans heureuse, pleine de vie, aux cheveux bruns sans aucun doute, aux yeux soit de son père ou comme les tiens, au regard espiègle et au sourire merveilleux. à la place, à cette putain de place, tu lui présentes qu'une pierre blanche, froide et sans vie. qu'une pierre où y est inscrit son prénom et vos deux noms accolés avec qu’une seule date de vie et de mort. t'es figée un instant comme si tu voulais lui laisser le temps, les bras contre ton corps comme si tu te protégeais toi, encore. et tu ne dis rien, comme si aucun mot ne suffisait ou que tu n'en trouvais aucun. que dire. finalement, c'est lui qui brise la bulle. t'as un sourire triste quand ses quelques mots atteignent tes oreilles, quand ses excuses viennent briser l'étrange silence dans lequel vous vous êtes plongés. ces putains de larmes aux yeux quand il te touche, quand il passe son bras contre tes épaules, quand t'as subitement l'impression de n'être plus toute seule sur cette terre à porter ce lourd fardeau, la disparition de ta fille, la mort de votre fille. tu te laisses faire quand il te colle contre lui, tu profites un peu trop de cela alors que quelques minutes plus tôt t’étais déterminée à ne plus laisser arriver cela, quelque chose comme cela. un contact. mais, c'est pour le moment. c'est qu'une parenthèse où tu prends tout ce qu'il a et peut te donner, avant que ce soit la fin. évidemment, tu ne peux qu’être d’accord avec lui. “oui..” tu souffles, battant des paupières pour empêcher toute larme de se fracasser sur tes joues. “mais c’est moi.” tes yeux restent figer sur la pierre alors que t’es celle qui est désolée, celle qui portera à jamais la responsabilité même si elle n’est pas légitime ou vraie. grande inspiration pour tenter de dégager cette boule au fond de ta gorge, celle qui parfois t’empêche de respirer quand cela la concerne. un grand bol d'air pour tenter de te débarrasser du chagrin qui te menace à nouveau, ton souffle qui ressort entre tes lèvres entrouvertes. “je suis sûre qu’elle aurait eue ton caractère de merde.” tu finis par dire pour essayer de soulager l’atmosphère, le sourire attristé qui revient sur tes lèvres pourpres. elle t’avait, après tout, déjà mener la vie dure dans ton ventre pendant ta grossesse, te réveillant à pas d'heure, préférant vivre la nuit que le jour, te faisant vomir tes tripes chaque matin pendant de longs mois et tous autres symptômes. mais sans grande étonnement, t'aurais préféré, encore aujourd'hui, revivre ou vivre bien pire cela pour qu'elle soit présente aujourd'hui à tes côtés, à vos côtés.

vous serez liés à jamais.
quoi que tu tentes. peu importe où la vie te mènera, c’est nana qui gardera la place principale dans ton esprit. nana et mia resteront sans aucun doute la meilleure partie de ton être, la seule bonne chose que tu auras fait dans ta foutue existence. et ça te fait mal au coeur.
alors tu la serres contre toi, lui montrant qu’elle n’est plus seule, pour affronter ce deuil. qu’il t’atteint, toi aussi. même si tu ne le montre pas, malgré les larmes qui refusent de dévaler la pente. pourtant t’as la gorge serrée, les mains moites et le palpitant dans tout ses états à chaque fois que tu lis et relis le nom sur la pierre tombale. une vie trop courte, même pas un souffle. tu t’en veux, qu’elle ait eu à affronter ça toute seule, à cause de ton agressivité maladive. de tes poings meurtriers. mais tu ne reviendrai pas en arrière, car ce jour, tu n’arrives pas à la regretter. il te suffit de repenser à ce charles, pour t’affirmer qu’il méritait la mort. plus que ta fille. tu grimaces légèrement, tes doigts s’agrippent à l’épaule de nanas t’es pas prêt de la lâcher. ce n’est pas toi, non. que tu murmures. serrant toujours plus la femme, dévorant un peu de sa chaleur. à sa dernière phrase, tu ne peux retenir un rire léger. bien sûr qu’elle aurait eu un caractère bien trempé, à en voir ses parents. que son enfance aurait été des plus heureuses, des plus merveilleuses. tu soupires, tu soupires trop fort. t’as déjà plus envie d’être là, de ressentir aussi fort. j’pense que c’est à toi, qu’elle aurait le plus ressemblé. j’aurai aimé, que ce soit le cas. qu’elle n’est rien de toi, le vulgaire meurtrier. l’homme sans foi, ni loi. tu sais pertinemment que je ne lui aurai rien apporté de bon. seulement de la déception. tu ricanes sans t’en apercevoir, tu te détaches de nana. un dernier coup d’œil pour le dernier endroit où reposera ton seul enfant, une œillade pour la femme. merci. que tu lâches enfin, un aveu, qui pourrait sonner comme une trêve.
il n’y a plus que des cendres entre vous deux. une passion bousillée, un amour détruit. des mots trop fort pour des coeur esquintés. tu passes une main dans tes cheveux, restent immobile un long moment. une minute, peut-être. tu comptais. vous comptiez, tu sais. nouveau soupire. mais, tu m’as abandonné, tout comme je l’ai sûrement fait. tu as joué les connes, autant que moi. et maintenant... maintenant, il y en a une autre, une qui te détruit plus qu’autre chose, un amour malfaisant, un autre coeur qui bat contre le tiens. ça te fou la rage. je ne peux pas rester, plus longtemps. tu voudrais lui tourner le dos, mais tu n’y parviens pas.

ce n’est pas toi, non. et pourtant si. personne n'éteindra la responsabilité que tu portes sur le dos depuis dix ans. ni même lui. alors tu réponds pas, posant un instant ta tête contre la sienne comme un vieux couple contemplant la même et unique chose. vous devriez contempler votre fille pleine de vie courir sur l'herbe devant vous et non pas reposer, morte, plongée sous terre. vous ne devriez pas mais c'est ainsi. "c'est bête mais je viens ici tous les sept du mois" tu confesses, tu avoues à quel point t'es pas guérie, à quel point tu restes prisonnière de la spirale. l'homme rit doucement à ta remarque suivante et un court instant, ce moment sans vous engueuler, sans vous entre-tuer l'un l'autre, te fait un peu de bien. "c'est vrai qu'elle aurait été plus jolie." légère plaisanterie avant que l'ambiance retombe sous ses mots qui suivent. "on n'en saura jamais rien." tu souffles tandis qu'il se décolle de toi, tandis qu'il brise de lui-même cet instant, comme si vous ne méritiez plus cela. simple haussement d'épaule à ses remerciements pour signifier que c'est normal, que ce n'est rien, que tu n'as pas le choix, que c'était une chose à faire et tu restes figer quand il avoue que tu comptais, que vous comptiez, mia et toi. au passé. il a raison après tout. c'est ce que vous êtes tous les deux, le passé de l'autre. et c'est sans doute ce qu'il restera pour toi. un homme que tu ne reverras sans doute plus, comme ces années entre sa sortie de prison et cette nuit où il s'est retrouvé devant tes yeux dans ton club, et cette nuit où tu t'es apparu devant lui.
ça te fait mal qu'il te dise cela, qu'il parle d'abandon. tu n'as pas eu le choix. on t'a pas laissé le choix. et tu pourrais lui balancer à gueule, encore et encore, comme l'autre jour que ce n'est pas vrai. peut-être que toi aussi, t'aurais dû te battre un peu plus. ne pas lâcher l'affaire comme tu ne lâches plus rien aujourd'hui mais t'as pas eu la force, sans doute guidée pas le choc de te retrouver dans cette situation, seule, le choc d'entendre ces mots sortir de sa connasse de sœur. à croire que tu l'as toujours pas aujourd'hui, cette force, quand il s'agit de lui. il finit par t'annoncer qu'il ne peut pas rester plus longtemps et tu le comprends. t'aimerais pouvoir fuir comme il semble le pouvoir. alors avant qu'il ne te quitte, t'as envie d'être sincère, de prouver que t'as pas réellement abandonné tout de suite. ce n'est qu'à leur absence, à son absence ce jour de l'enterrement, que tu as réellement arrêté d'y croire. "que tu le saches, un faire-part a été envoyé chez tes parents." t'annonces, détournant ton regard de la tombe sur lui, fixant ce profil qui ne lâche pas du regard l'endroit où la petite repose. t'as toujours ces larmes aux yeux dont quelques unes s'échappent sur tes joues. t'as toujours ce sourire triste sur tes lèvres pourpres alors que ton regard rencontre le sien. "vas-y, va la retrouver." reprends le cours de ta nouvelle vie. et cela semble tristement comme un au revoir ou un adieu. parce que tu sais. parce que t'es pas stupide. parce que t'as retenu ce qu'il t'a dit. et sans doute parce que t'as envie de te retrouver toute seule à présent. t'aimerais lui dire que c'est pas grave. t'aimerais lui mentir pour lui dire que tu comprends, que tu lui en veux pas alors que ta main se pose sur son bras, juste un instant, juste le temps d'y faire une petite pression avant que tu ne le relâches, avant que tu t'avances de quelques pas pour lui tourner le dos et le laisser partir comme il le veut, pour t'accroupir devant la petite tombe et retirer les fleurs fanées, celles qui ressemblent tant à ton cœur fané.