She brings me love (jana)

Jax rentre du travail. La journée a été exhaustive. Il n'a qu'une envie c'est rejoindre son refuge, son chez lui, où il y fait bon d'être silencieux. Son impatience gonfle à mesure qu'il s'en rapproche. Il jette un regard sur sa montre pour estimer son heure d'arrivée. Quatre minutes. Il ne marche plus, il court. Il monte les escaliers en sautant des marches. Il ne cherche pas ses clefs car il ne ferme jamais. Il n'y a rien de valeur dans son taudis. Il se contente du strict nécessaire. Il hésite même à balancer sa télé qui commence à dater, qui commence à ressembler à un meuble vintage. Cet appart il a juste l'honneur d'être propre. Pourtant, pour rien au monde il irait ailleurs. Il franchit le pas de la porte, haletant. Il balance son porte-document en cuir dans un coin et comme à son habitude il enlève son haut. Il se sent toujours plus à l'aise torse poile - et d'ailleurs complètement à poil. Il va pour se prélasser dans son lit afin de bouquiner. Depuis le matin il pense qu'à ce livre. Un jardin de sable d'Earl Thompson. Un roman noir comme Jax les aimes. S'il a eu du mal à s'accoutumer au mot "nègre, négresse" qui jonche certaines pages, il s'y est fait pour se focaliser seulement sur la pauvreté intellectuelle, financière et même sexuelle de la Grande Dépression. Une immersion dans la violence des vices. Ses yeux se posent sur son bouquin. Puis sur une courbe féminine. Il ne cache pas son étonnement de la voir, là, maintenant. Il n'est pas allé lui rentre visite depuis un certain temps. Il n'est pas le genre à faire le premier pas. Il exècre la dépendance en amour. Les roses qu'il lui a offertes sont déjà un petit miracle en soi. Il fait honneur à sa réputation de mec inaccessible et asocial, même en amour.

Sachant qu'il n'est plus seul, il se couvre le corps avec ses bras, la sensation qu'on a trahi son intimité. Surtout, qu'avec Vanille dans les parages, ça le rend nerveux. Surtout, que peut-être qu'elle va sentir son odeur sur les draps. Il ne l'invite pas souvent mais il aime garder ses draps intacts pour inhaler son parfum. Plus romantique qu'il ne le prétend le Jax. Il n'a pas envie qu'elle voit son malaise mais il se dit que c'est d'jà trop tard. Les femmes voient tout, tout le temps. Il se force à lui offrir un sourire potable et il lui demande, sans toute fois la fixer parce qu'il l'a trouve tellement belle qu'il est certain que son coeur va faire un dérapé et qu'il veut s'épargner cette peine.

Que me vaut le plaisir de ta venue ici ?

Il prend soin de tenir une distance entre eux même si elle lui a manqué car après tout Serena est imprévisible. Elle peut lui sauter au cou comme le claquer. Et Dieu sait qu'elle aurait des raisons de claquer.

Serena laisse ses doigts courir contre la barre de la rame de métro. Elle a l’esprit ailleurs, loin de la foule grouillante qui se presse autour d’elle. Le tumulte alentour ne serait pas là qu’elle n’en verrait pas la différence. Elle rentre, seule, son sac à main serré contre elle, la tête remplie d’idées noires. Le beau sourire s’est effacé pour un temps, la faute à ce patron de bar qui lui a fait faux bon. Elle espérait chanter, ce soir. A moins de pousser la chansonnette dans les couloirs du métro, l’oiseau ne se fera pas entendre aujourd’hui. La gamine est ennuyée: plus qu’une scène qui lui échappe, c’est un manque à gagner. Le ventre aussi vide que son porte-monnaie, Serena songe à sa soirée gâchée. Les stations défilent et la jeune femme perd toujours plus de son optimisme à chaque seconde qui la rapproche de son appartement. Elle ne veut pas rentrer sur une défaite. Alors, deux stations plus loin, elle suit la foule des badauds qui s’extirpe de la rame et file droit vers ailleurs. Jax. C’est Jax qu’elle veut voir, c’est ses caresses qu’elle désire, sa voix qu’elle veut entendre. Son réconfort, c’est lui. Elle déambule dans les rues de son quartier et chaque pas qui l’emporte vers lui, c’est un peu de son sourire qui revient. Il n’en fallait pas plus, finalement, pour que sa soirée s’illumine juste un peu. Elle suit une voisine qui s’engouffre dans l’immeuble vétuste, et grimpe les marches avec légèreté. Devant sa porte, elle hésite une seconde. Quand ses doigts tapent contre le panneau de bois, il n’y a que le silence qui lui répond. Elle insiste, sans plus de succès. Emportée par le culot et la crainte de finir seule malgré tout, elle tourne la poignée, sans rencontrer de résistance. Elle est surprise, Serena. Surprise par cette porte ouverte et cet appartement vide. Chez elle, tout est clos. Qu’importe que son appartement soit un taudis à l’image de celui-ci, elle s’y barricade comme si elle craignait qu’on prenne les lieux d’assaut. Jax est confiant, à l’évidence. Elle s’invite à entrer, referme derrière elle, et fait rapidement le tour des lieux pour s’assurer qu’il n’est pas là. Et maintenant quoi ? Sans garantie qu’il rentrera seulement ce soir, elle cherche un coin pour s’installer. Attendre en priant pour qu’il ne découche pas. C’est qu’elle a besoin de lui, Serena. Elle saisit un bouquin qui traîne sur la table de chevet, s'assoit au bout du lit et commence à tourner les pages d’un air vaguement concerné.

Une heure. Ou trente minutes, peut-être. Plongée dans le roman, elle ne voit pas l’aiguille des minutes qui défile. C’est la porte qui se claque qui la sort de son ailleurs. Elle reste assise, pourtant, subitement consciente d’être entrée sans y avoir été invité. Et s’il n’était pas seul ? Et s’il ne voulait tout bonnement pas la voir. Ni elle ni aucune autre ? Serena se mord la lèvre d’un air coupable. Trop tard, à présent. Alors elle ne bouge pas, tend l’oreille pour percevoir une voix: la sienne ou celle d’un autre. Une autre. Elle a beau savoir qu’il commet des écarts, Serena ne tient pas pour autant à en avoir la preuve formelle. Le silence qui lui revient comme un écho la soulage un peu, pourtant. Il est seul, et ses pas le rapproche. Elle ferme le bouquin qu’elle garde entre ses mains, son sac à main posé sur ses genoux, sa veste toujours sur ses épaules. Prête à partir s’il le souhaite. Il sursaute, elle sourit. Il est nu, et Serena s’amuse de le voir protéger son intimité. Cette gêne subite qu’elle lit dans son regard, elle le met sur le compte de la surprise. Elle s’est invitée, après tout, a pénétré son royaume sans y avoir été convié. Il aurait même toutes les raisons de la mettre dehors, qu’elle pourrait encore lui trouver des excuses. Elle ne veut pas chercher plus loin, parce qu’avec lui, elle ne préfère pas. Il fait naître des questions dont elle ne veut pas connaître les réponses, et s’invite dans ses pensées plus souvent qu’aucun autre. Serena se relève, un mince sourire aux lèvres. “C’est pour un cambriolage.” qu’elle glisse d’un air bien trop doux pour y percevoir une quelconque menace. Elle n’ose pas plaisanter davantage, consciente du malaise qui s’est installé entre eux. Serena regrette un peu d’être là, pas convaincue d’être la bienvenue. Elle fait un pas vers lui, et comme une gamine prise la main dans le pot de confiture, elle murmure, un brin fautive. “Est ce que je tombe mal ?” Du coin de l'oeil, Serena regarde par dessus l'épaule de Jax, craintive, encore, à l'idée qu'une silhouette se dessine brusquement.

Elle se lève, lui offre un sourire et glisse même une petite plaisanterie. Jax est soulagé et ça se lit sur toute sa face. Il a toujours peur qu'une d'entre elles, Vanille ou Serena, débarque dans son appart afin de le frapper, l'insulter ou tout casser. Il aime les femmes mais il s'en méfie. Sa mère avait tendance à tout dévaster sur son passage pour la moindre chose. Heureusement, c'pas pour aujourd'hui qu'il va devoir assister à ça. En plus, elle a l'air tout à fait ravie de le voir. Sa voix est guillerette et son sourire est à tomber. Il n'aurait pas dû être aussi "fermé". Il se fait violence, décroise les bras et tente de se rattraper comme il peut.

Y'a rien à volé ici. Pas même mon coeur.

Elle avance guère convaincue. Il se raidit pendant qu'elle fait un pas, complètement vulnérable à ses charmes dont il essaie toujours de se dépatouiller en vain. Elle lui demande si elle tombe mal. La phrase est ambiguë. Elle sous-entend qu'il serait occupé, affairer, qu'il aurait prévu quelque chise sauf, que comme elle peut parfaitement le voir il est seul. Elle regarde par-dessus de son épaule, tracassée. Il n'est pas du genre à inviter des amis ou même des amies. Peut-être qu'elle a peur de le surprendre avec une femme. Peut-être qu'elle est jalouse. À cette idée ses dents se dévoilent pour offrir un large sourire.

Mais non pourquoi tu tomberais mal ? Y'a qu'un seul cas où tu pourrais mal tomber et ce serait si j'étais au pieux avec une autre.

Il l'observe minutieusement voulant prendre connaissance de la moindre  réaction que suscite sa phrase. Serena est si libre et indépendante qu'il a du mal à l'imaginer réellement jalouse. La seule manière qu'il a de se le prouver c'est de la taquiner, d'enfoncer le couteau et de le retourner. Il en profite dans sa lancée pour rajouter un petit reproche subtil tout en la regardant avec tendresse.

D'ailleurs c'est pour ça qu'on envoie des sms.

Il tourne les talons et s'en va chercher la chemise balancée plus tôt, se voyant mal discuter le torse à l'air. Une fois plus habillé, il s'en va s'affairer dans sa cuisine afin de servir à lui-même et à son invité quelque chose. Il aime discuter autour d'un verre, toujours. Il farfouille dans ses placards vides. Il ne lui reste que du café, de la bière, du whisky. Il aurait souhaité avoir des sodas mais tant pis. Il propose depuis la cuisine à Serena.

Tu veux boire quelque chose ?

C’est un étrange balai qui s’opère, un manège étonnant entre les deux amants. Quand ses iris se posent sur lui, elle peut le voir fuir son regard. Et quand c’est lui qui daigne porter ses yeux sur elle, Serena l’évite à son tour. Elle n’est plus si sûre de vouloir être là, mal à l’aise de le voir si distant. Elle gêne et ne sait pas vraiment pourquoi, et son sourire tardif lui laisse comme un goût de non dit. Il s’est ressaisi trop tard, Jax. La confiance un peu bancale, l’assurance qui ne reparaît que lorsqu’il semble sûr de s’être écarté du danger. Quel danger ? C’est justement la question qui taraude Serena, celle qu’elle tente de faire taire à coup de sourires éclatants. Tout sonne faux, pourtant, depuis son rictus jusqu’aux mots lâchés par Jax pour détourner son attention. La belle assurance de Serena vole en éclats dès qu’il s’agit d’amour, et quand il la contraint à l’imaginer entre les cuisses d’une autre femme, elle gomme un peu de son sourire et sa voix se casse quand elle s’interroge. “Et ça arrive souvent, ça ?”

Elle ne lui a jamais rien demandé, Serena. Pas de compte, pas de fausses promesses. Lui imposer une fidélité contrainte aurait été jouer les hypocrites. Bien sûr qu’elle le voudrait pour lui, mais elle sait trop bien, Serena, que sur la durée, elle ne peut rien lui apporter qui puisse le convaincre de rester. Si elle s’efface, ça n’est pas par plaisir, parce qu’elle se rêve aimée et romantique à souhait. Elle s’espérait au moins spéciale, un peu au dessus du lot, celle qui revient, celle qu’on aime avoir contre soi, pas uniquement entre ses draps. Et voilà qu’elle doute, brusquement, car elle l’écoute et à l’impression d’être une copine comme les autres, de celles qui défilent et qu’on oublie sitôt la porte franchie. Et Serena n’a pas signé pour ça. Elle ne sait pas ce qu’elle veut, quand elle voit Jax. Elle est égoïste et généreuse, amoureuse et détachée, jalouse et permissive. Tout et son contraire, malade d’un avenir qu’elle sait presque impossible, jalouse qu’il préfère s’amuser avec d’autres et passer des jours sans lui donner de nouvelle. Jalouse, oui. Ca lui saute aux yeux comme une évidence, désormais.

On peut aussi fermer sa porte à clé, qu’elle murmure entre ses dents quand il enfile de quoi se couvrir. Elle a le poing serré et l’envie de filer en vitesse, agacée par sa propre attitude. Elle sourit toujours Serena, d’ordinaire. Mais le coeur n’y est plus vraiment. Elle réalise que l’attitude de Jax, elle a déjà vu dix fois. Pourtant il est le premier qui parvient à la blesser vraiment. Il a ce truc en plus que les autres n’avaient pas. Ce truc qu’elle ne voudrait que pour elle mais qu’elle a offert aux quatre vents. Cette impasse, ça n’est pas tant la faute de Jax que la sienne, qui a accepté un marché dont elle sent les règles s’effondrer sous elle. Il quitte la pièce et elle l’imite, déposant son sac dans l’entrée et sa veste négligemment posée sur le dossier du canapé. Elle ôte ses chaussures et s’installe en tailleur sur l’assise. Un oeil à sa robe à fleurs et à la pièce alentour, et elle réalise qu’elle est bien trop apprêtée pour l’endroit. Elle relève la tête quand la voix de Jax perce le silence. “Une bière, ça ira.” Elle s’enfonce au fond du sofa, ses doigts jouant avec l’extrémité de sa robe, comme une enfant. L’air soucieux, plus vraiment là.

Il plisse les sourcils en colère, mais lui tend sa bière. Il lui donne toujours ce qu'elle veut. Il lui donne toujours tout, tant qu'elle reste. Pendant qu'il effleure ses mains douces, le sourire de Jax se veut flamboyant mais il se souvient de sa question. Est ce que ça arrive souvent ? Il a honte de l'avouer. Il se sert un verre de whisky comme à son habitude. Sauf qu'il a l'air grave cette fois. S'il pouvait s'y noyer dans son verre il le ferair volontiers. Il réfléchit et y pense. à vanille. a ses courbes. à son regard. Il fait claquer sa langue contre son palais, agacé. Il ne veut pas y répondre, alors il se défend. Il n'est pas le coupable ici, n'est ce pas ?  Il lui dit plus sec qu'il ne le voulait.

Ça te regarde ? et toi, ça t'arrive souvent ?

Ses muscles se raidissent et a nouveau il en veut à la terre entière de le faire chier. Elle est belle dans sa petite robe. Elle est belle quand elle le regarde avec ses yeux. Pourquoi lui poser cette questions ? Elle veut le torturer c'est ça ? Ça le transperce l'esprit, alors. Elle est jalouse.  Il ne peut rester aveugle éternellement alors qu'il possède la vue. Il finit d'un trait son verre et s'en va la consoler. Il fait toujours ça quand une personne qu'il aime est blessée. depuis Cameron. depuis l'ami mort. Il va la prendre dans ses bras. Il se veut rassurant mais il sait que le doute est incrusté en elle. Son étreinte est étouffante. Plus que d'habitude. Il lui murmure.

Ne t'inquiète pas tu restes la seule.

Le souvenir de Vanille le blesse mais après tout elle va mourir. Alors, il n'y aura que Serena. Serena est son chant. Serena est sa magnifique voix qui le possède. Il lui demande d'une voix étouffée par la tristesse.

Veux tu bien me chanter une de tes chansons ?

Il n'y a que quand elle chante qu'il guéri. Il lui supplie eu regard. Une chanson seulement, pour apaiser l'âme tourmentée.

Elle sent la colère silencieuse, et baisse les yeux, fautive. Les torts sont partagés, mais Serena est consciente que sa simple venue a tout déclenché. Un effet boule de neige qu’elle n’avait pas vu venir, et elle, coincée sur ce canapé en attendant de pouvoir s’éclipser. Parce qu’elle ne trouve ni le réconfort ni l’oreille attentive qu’elle espérait trouver en franchissant la porte. Jax tend une bière qu’elle saisit sans un mot, tout juste un signe de tête en guise de merci. Il aboie ses reproches avec le ton cassant de l’orgueil blessé, pensant coller Serena face à ses contradictions. Regard relevé, prunelles vissées aux siennes, elle rétorque. “Pas depuis un bail, si tu veux tout savoir.” La poigne serrée contre la bouteille de bière, Serena se retient de parler à coeur ouvert. De lui confier l’humiliation qu’elle ressent en cet instant, le simple besoin de savoir qu’elles ne sont pas si nombreuses, les autres. Et qu’elle est la seule qui compte assez pour revenir. Question d’égo, oui. Et parce qu’elle s’est entichée, Serena. Il est venu la chercher, et elle a succombé.

Elle se tait parce qu’elle a peur des mots qui pourraient franchir la barrière de ses lippes. Elle goûte au silence comme un allié précieux, avale quelques gorgées de mousse et pose la bouteille sur la table basse. Jax s’installe à ses côtés, et Serena laisse ses bras l’entourer sans mot dire. Elle préfère coller sa tête dans le creux de sa nuque, les yeux clos et l’humeur plus légère. Elle n’est pas venue se battre, Serena. Et dans le creux de son oreille tombent des paroles de réconfort. Elle redresse la tête, l’embrasse au coin de la joue. Préférant taire les autres questions qui l’assaillent, se refusant à remettre de l’huile sur le feu. Après tout, qu’est ce que ça changerait ?

A sa demande, elle se retire de la chaleur rassurante de ses bras pour reculer de quelques centimètres. Juste ce qu’il faut pour inviter Jax à poser sa tête. Elle acquiesce sans un mot, un fin sourire aux lèvres. Chanter est une invitation qu’elle ne sait pas refuser. Moins encore, quand c’est à sa demande. Elle ferme les yeux et cherche dans son répertoire. Aux oubliettes, les chansons sur les coeurs brisés et les femmes bafouées. Elle préfère s’éviter d’envoyer le mauvais message. Alors sa voix s’élève au bout de quelques secondes, quand Serena a trouvé son air. Il suffit de l’entendre fredonner doucement pour s’imaginer le sourire qui prend place au coin de ses lèvres. La tension s’envole et les mains se font délicates, tandis qu’elle glisse sa main dans celle de Jax. Il a su déjouer la bombe qui menaçait d’exploser, laissant à Serena le soin de chanter ses craintes plutôt que de les cracher à son visage.

Le temps suspend son cours pendant quelques minutes, à peine. Le silence prend place là où Serena chantait encore quelques instants plus tôt. Elle laisse les notes s’éteindre au fond de sa gorge, appréciant le calme à peu près autant que le chant. Quand elle pose à nouveau ses yeux sur Jax, c’est un éclat nouveau qui brille dans son regard. On perçoit encore la gêne, et elle voudrait s’accorder le droit d’être possessive, encore un peu, mais Serena préfère baisser les armes et le laisser gagner cette bataille là. “La journée a été longue. Excuse moi si je suis un peu à fleur de peau…” Un pas vers lui, encore, dans l’espoir que les tensions soient derrière eux, cette fois...

Il est satisfait de savoir que ça fait depuis un bail qu'elle n'est pas allée ailleurs, mais d'un côté ça signifie peut-être qu'elle veut se poser. Qu'il doit dire au revoir à Vanille. Il n'est pas prêt à ça. Alors, même si son ego est ravi, il se tait. Il la contemple et il voit bien qu'elle n'est pas en forme, qu'il est trop dur, alors il lui réaffirme qu'elle est la seule. Il ressent le besoin de la toucher, de la rassurer, alors il vient l'étreindre maladroitement. Il n'est pas souvent tendre, mais ça lui arrive. Ils se dégagent l'un de l'autre, il aurait voulu la serrer un peu plus fort, un peu plus longtemps, lui caresser le visage et lui dire des jolies choses, mais tant pis. Une prochaine fois, quand il aura le courage. Il lui demande une chanson pour apaiser les tourmentes de son âme. Sa voix lui donne des frissons de la tête aux pieds, comme la première fois quand il l'a vu dans ce bar. Plus belle que jamais. Ce souvenir, lui réchauffe le coeur. Il ferme les yeux et se laisse porter par les lyrics d'Irma Thomas. Need someone’s hand to lead me through the night, I need someone’s arms to hold and squeeze me tight . Il se surprend à chantonner, à sourire. Il se sent loin de ce monde, alors il vient poser doucement sa main sur celle de Serena. Elle est chaude. Comme elle. Il se demande un instant si elle a choisi cette chanson par hasard ou non mais il n'ose pas lui demander directement alors il se tait, ému, jusqu'à ce qu'elle ait fini. Il aimerait lui en demander une autre, mais il ne veut pas l'emmerder.

Merci, c'était superbe.

Ses yeux se perdent dans les siens, il est sincèrement reconnaissant. Pour elle c'est sans doute rien, mais pour lui c'est beaucoup. Y'a que sa voix qui le calme. Elle s'en rend pas compte. Il continue de la fixer et il distingue au fond de ses prunelles une lueur étrange. Il se demande à quoi elle peut bien penser. Elle rompt le silence pour s'excuser d'être à fleur de peau, mais il balaie ses paroles d'un geste de main.

Non, j'suis pas facile non plus

Il se doute bien que quelque chose s'est passé, aujourd'hui, sinon elle n'aurait pas ce petit air triste qui ne quitte pas son joli minois. Alors, plutôt que de demander directement il lui lance

Alors, ce soir tu chantes ?

Il semble avoir miser dans le mil, car elle se renfrogne. Faut dire que la musique est le seul domaine qui la rend aussi fleur de peau. Il se sent obligé de rajouter, pour lui redonner un semblant de sourire.

Sinon, c'est pas grave, j'peux te réserver pour ce soir. J'ai plein d'argent.

Il sourit à s'en décrocher la mâchoire.