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| Cold-hearted, supposedly wise (Joyss) | |
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| Sujet: Cold-hearted, supposedly wise (Joyss) Mer 3 Mar - 14:43 |
| On l'a attendue plusieurs heures au Dutch Kills, mais Shea n'a pas pu se résoudre à franchir le pas de sa porte. Son téléphone la rappelait toutes les minutes à ses responsabilités. Elle s'est résolue à l'éteindre, et si son patron essayait de la joindre elle dirait qu'elle l'a perdu ou qu'elle a roulé dessus en voiture. Une soirée ‘exceptionnelle’ avait lieu au bar et qui soumettait à des conditions très strictes les employés, les tenues vestimentaires et même les clients, certains ‘spécimens’ dont Shea ignorait tout. Elle ignorait même la profondeur de l'objet de cette soirée, et si elle était légitime à y assister ou non. Avec un soupire puisé au plus profond de son être, Shea a prit le métro, dandiné un pied sur l'autre, agrippé sa main à l'accoudoir comme si sa vie en dépendait. Sur la route, tous les scénarios, du plus pertinent au plus invraisemblable, se sont succédé dans son esprit embrumé. Son imagination faisait preuve soudainement d'un énergie délirante - tout, aussi, pour éviter le moment fatidique où elle entrerait dans le bar. Elle s'était emparée de son sac, s'était saisie d'un calepin et d'un crayon pour en dresser une liste irraisonnée, attribuant à chaque personne concernée par la soirée, un historique mnémotechnique bien dans sa manière. La paranoïa et le travestissement étaient-ils devenus sa seconde nature ? Un surcroît de travail ?
A mesure que ses yeux s’habituent aux changements des projecteurs, elle constate que les groupes parmi lesquels trônent les verres vides sont concentrés autour du bar. Quelques personnes se trémoussent sur la piste et eux aussi finiraient, tôt ou tard, par l’encercler en prétextant une soif abominable. Elle n’aurait pas dû boire autant, et elle commence à être assez éméchée pour s’en soucier. Elle ne pense plus particulièrement à l'effort surhumain qu'il lui a fallu pour être là ce soir, même en retard. Elle ne songe pas non plus au fait qu’elle aurait préféré être ailleurs, accompagnée, ni au fait qu’elle a sans doute autre chose à faire que de s'imaginer un corps de femme cambré quand - « Hé ! Elle vient cette bière ? » Elle pourrait lui répondre que non, ou l’ignorer totalement, mais elle elle est en tort, et sait qu’elle devrait arrêter d’accompagner les clients dans leurs beuveries. Elle a déjà fait les frais du regard noir de ses collègues trois fois ce soir et c'est un record assez important pour être relevé. C'est là qu’elle ressent quelqu'un se poster en face d’elle au comptoir. Shea se redresse, prête à balancer une horreur au beauf en manque de bière, mais le parfum lui inspire autre chose. « Bonsoir. » qu'elle lance à la cliente, contente d'avoir enfin affaire à quelqu'un qui ne lui demandera pas toutes les cinq minutes et pourquoi t'arrives pas à t'attacher ? t'as déjà aimé quelqu'un ? ils sont où tes parents ? et puis c'est quoi cet accent ? Elle en a assez, Shea, qu’on lui pose ces questions à longueur de temps, alors elle voudrait les repousser et rétablir sa posture assurée en leur répondant quelque chose du genre : j'ai de comptes à rendre à personne.
D'ailleurs, ses premiers souvenirs dans ce bar ne sont pas les meilleurs. Elle a souvent fait les frais à Londres, surtout pendant son enfance, de commentaires déplacés sur le fait qu’elle était plus 'brown' que les autres, ou des phrases pleines de préjugés et stéréotypées, des questions auxquelles elle n’avait pas de réponse. En Amérique c’est autre chose, et les injures raciales de ce groupe d’étudiants ivres l'ont marquée plus qu’elle ne l’aurait voulu. Aujourd’hui elle saurait sans doute passer outre, ou lancer une répartie acerbe. Ce qui lui avait plu, en revanche, c’était le patron du bar qui leur avait interdit de revenir, définitivement, quelques secondes avant de lui dire qu’elle ferait une excellente serveuse et qu'elle était prise. Quant à l'accent... Ce qu'elle digère le plus facilement c'est d'être qualifiée et désignée comme la Brit, ou Votre Altesse Royale parmi les clients ou ses collègues, pourtant, dans l’imaginaire de Shea, elle n’est pas le fruit de l’Empire Britannique, mais plutôt, elle est le produit, et la conséquence de son appétit colonisateur. Elle pense que la jeune femme en face d'elle comprendrait, sans doute - pourquoi pas ? Même si ses yeux sont bleus et d'une telle clarté - elle s'y perdrait. C'est ce qu'elle aime se dire en tout cas. « J'ai pris de l'avance, vous voulez boire quoi ? »
@Joyss Lane |
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| Sujet: Re: Cold-hearted, supposedly wise (Joyss) Sam 6 Mar - 14:03 |
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| Sujet: Re: Cold-hearted, supposedly wise (Joyss) Mar 9 Mar - 19:27 |
| Sans qu'elle soit en état d'en comprendre la raison profonde, le rire de la jeune femme lui fait écho et participe à son vertige, elle tisonne en elle une volupté inattendue et elle ne pense plus désormais à la recherche d'un échappatoire, mais à seulement une jouissance physique par laquelle elle se délesterait d'un poids. Lorgnant le mécontent à sa droite, Shea comprend qu'elle vient s'imposer comme bouffée salvatrice. Le client bougon ouvre un oeil puis tire un paquet de cigarettes de l'une des poches de sa chemise, en plante une au coin de sa bouche et fait mine de l'allumer en défiant Shea du regard. Elle retrouve le regard de son interlocutrice aux yeux incroyables, rougit, et un sourire en coin devrai suffire à lui indiquer qu'elle n'est pas contre l'idée de la voir s'occuper de lui. « Une bière pour Bob. » soupire-t-elle, amusée, mais lassée d'avoir sans cesse à faire des compromis, et de justifier sa légitimité en tant que serveuse "passable". Bob, lui, hausse les épaules, tousse puis lance un rire entendu. « Croyez-moi chéries, j'ai tout mon temps. » Il se lève, avec un effort considérable. Le même qui retient Shea de frapper son poing contre le comptoir.
Il lui faut une ou deux minutes, tout au plus, pour confectionner les trois mojitos et pendant tout ce temps, elle veille à ne pas retourner planter ses yeux dans ce regard bleu. Une demi-minute pour le whisky coca et la revoilà chancelante vers le bord du comptoir. Accoudés aux rambardes ou assis sur des banquettes, des hommes et des femmes se toisent et boivent en bavardant. L'un prend la place de Bob, scrute son reflet dans son téléphone et remue sur son tabouret. Il remonte ses manches en adressant un regard en coin à la nouvelle vis-à-vis de Shea et gratte sa barbe de trois jours. Il va l'aborder, mais Shea est plus rapide. « C'est vingt-cinq dollars pour toi. » Elle désigne les verres du menton et offre un sourire éclairé, puis rapide coup d'oeil vers le corset de sa robe. « Trente, normalement mais tu m'as mise de bonne humeur. » Le tissu de son tee-shirt colle à sa peau mais elle n'y prête plus attention. Electrisée déjà, elle n'a d'yeux que pour la jeune femme en face d'elle, la saillie de ses clavicules, son comportement discret, qui par instant, lui semble ostentatoire. Elle chuchote presque son prix à son oreille et observe comment son message est perçu.
Elle risque encore quelques centimètres, se dit qu'au stade où elle est, elle ne risque plus rien, et Shea espère que l'ivresse qu'elle ressent ne soit que ça, un ressenti, car l'image qu'elle s'efforce de renvoyer aux autres ne correspond pas à la personne qu'elle semble être réellement et qu'elle a tant de fois combattue. L'anglaise se penche vers elle comme elle a l'habitude de faire avec ses conquêtes et, insistant sur son accent, en s'efforçant pour résister au besoin pressant de lui toucher la main, lui demande : « T'as besoin d'aide pour porter tout ça ? ». Elle ne relève les yeux que pour s'assurer qu'elle ne va pas trop loin. Elle ne peut que respirer à un rythme calculé, alors que son parfum vient presque l'étouffer. Son éternelle insatisfaction n'a aucune raison de ne pas se manifester cette fois. Il lui est impossible de mettre à nu ses pensées. Elle l'observe et tout ce qui lui vient à l'esprit est cette question imposante : « Tu viens souvent ici ? ». Alors seulement, sa Raison se défend, non, non, non, et c'est ainsi qu'elle parvient la plupart du temps à reculer, faire face, et fuir.
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| Sujet: Re: Cold-hearted, supposedly wise (Joyss) |
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