Si tu sautes, je saute. Pas vrai ? Thomella #4

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{ nuits fauves }
crédit/ tumblr ☾ w/@Thomas Farrel

Étendue de tout son long sur le lit, le joint fraîchement roulé entre les lèvres, elle savoure en toute sérénité les effluves de sa trouvaille miraculeuse. Elle peine à récupérer un dealer compétent ces derniers temps. Depuis que Thomas a arrêté, elle n’a pas eu d’autre choix que de se débrouiller. Ici et là, elle a pu récupérer quelques sachets. Un peut de poudre, un peu d’herbe, mais rien de régulier. Rien pour la contenter. Elle n’est pas accro, Ella, tout du moins elle ne pense pas l’être. Elle n’a pas touché à la coke depuis plusieurs jours déjà mais c’est peut-être uniquement parce que le cannabis est là pour contrebalancer. Elle ne sait combien de temps elle va pouvoir le supporter mais, pour le moment, elle se plaît à simplement en profiter. Les paupières fermées depuis plusieurs secondes, elle ne les rouvre qu’en entendant la porte d’entrée de l’appartement s’ouvrir. C’est certainement Thomas qui vient de revenir. D’où, elle n’en sait rien, ne lui pose pas trop de questions. Elle lui laisse sa liberté, n’est pas là pour le surveiller. Elle lui offre juste un toit où se poser. Ou, en tout cas, c’est ce que tu t’évertues à penser. Trop effrayée de laisser quelqu’un t’approcher. Il empiète déjà sur ton intimité, Thomas, alors que t’es si peu habituée à vivre avec quelqu’un. Mais il en a besoin. Et peut-être que, au fond, toi aussi t’en as besoin. Mais, ça non plus, elle ne l’avouera pas. Elle préfère croire qu’elle lui donne un coup de main. Qu’elle accepte de le dépanner, rien d’autre. Alors qu’en réalité, elle serait un peu trop inquiète qu’il se retrouve seul. Trop inquiète de ne pas pouvoir veiller sur lui. Elle n’a plus l’habitude d’entretenir de telles relations, ni même une quelconque véritable relation. Elle a des personnes auxquelles elle tient, Ella. Mais elle ne les voit pas si souvent, en tout cas pas régulièrement. Elle garde obstinément cette distance, comme pour se protéger, comme pour éviter de trop espérer. Tu te connais au fond, Ella. Tu joues les dures à cuir. Mais tu t’attaches trop vite. Tu t’attaches trop fort. Jusqu’à tout faire foirer, jusqu’à tout gâcher. Alors, elle préfère autant maintenir une distance. Distance plus compliquée à réaliser, lorsqu’elle se retrouve à partager son appart. Distance qui s’évapore instantanément quand il ouvre la porte de sa chambre, sans même frapper, dans un geste de plus en plus habituel d’intimité. Il crie aussi, au passage, mais Ella, elle ne se rend pas compte. Sûrement sous l’effet de sa drogue. – Bordel, il t’arrive quoi ? demande-t-elle en se redressant, comme pour mieux comprendre. Le regard vitreux, elle pose ses deux billes noires dans les siennes. Il s’emporte, il s’énerve. – Calme-toi, c’est juste de l’herbe. lâche-t-elle au dealer, comme s’il ne savait pas. Comme si ça pouvait le tranquilliser. Mais il sait. Il sait et semble quand même en colère. Comme s’il était inquiet pour elle. Mais Ella, elle n’a plus l’habitude d’inquiéter. Ou, juste, quand elle est sur le point de définitivement sombrer. Pas quand elle est sereinement allongée sur son lit à fumer une roulée. Toutefois, la féline ne s’attend pas à la réaction de celui qui devient de plus en plus son ami. Elle le regarde, l’air incrédule, alors qu’il insiste pour en avoir, lui aussi. – Tu viens de dire que c’était de la merde. rappelle-t-elle comme pour lui refuser. Pourtant, d’ordinaire, elle est plus partageuse. Mais il y a quelque chose qui la chiffonne à l’idée de lui en donner. Non, elle n’a vraiment aucune envie de partager ça, pas avec Thomas. Pas avec Thomas dont elle connaît tous les tourments, toutes les souffrances, tous les secrets. Pas avec Thomas sur lequel tu t’es promis de veiller. Sans vouloir non plus te l’avouer.

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Il n’y a pas beaucoup de choses auxquelles elle peut s’accrocher. Pas beaucoup de choses pour l’apaiser. La drogue, c’est tout ce qu’elle a trouvé pour la contenter. Pour lui faire oublier, l’espace de quelques minutes, le monde merdique dans lequel elle vit. Pour lui faire oublier, tout bonnement, sa misérable vie. Elle ne compte pas arrêter, n’a même jamais songé à arrêter. C’est d’autant plus vrai quand elle se retrouve à court de cocaïne, dont elle elle se dit vaguement qu’il ne s’agit que d’un moyen de s’évader, le temps de quelques soirées. Non, elle n’est pas une droguée, ou peut-être que si, mais qu’est-ce que ça peut lui faire, à lui ? Il lui a vendu sa came pendant tellement longtemps, il ne devrait pas se mettre dans un tel état pour quelques joints fumés pour se détendre. Mais il voit la situation bien autrement, Thomas.  Il paraît en colère, bien plus qu’elle qui est sous l’effet tranquillisant de l’objet magique qu’elle tient entre les doigts. Il paraît tellement, tellement en colère alors qu’elle ne réagit pas, ou bien à peine. D’ordinaire, c’est tout l’inverse. C’est elle qui s’est emportée quand il ne réalisait pas la situation dans laquelle elle se trouvait. Mais il semblerait que leurs rôles se soient soudain inversés. Intervertis, comme si c’était elle, qui avait besoin d’être protégée. Mais, toi, t’as rien demandé. T’étais très bien, occupée à te détruire, et t’as pas l’intention de changer. Ce n’est pas parce qu’il habite dans son appart qu’il peut lui dire ce qu’elle doit faire. Alors l'âme en peine essaie de le calmer à sa manière. Seulement c’est lui, par sa demande, qui parvient à la faire sortir de sa léthargie.

Tu ne veux pas,
tu ne veux pas qu’il devienne comme toi,
il mérite mieux que ça,
mieux que toi,

Thomas.

Elle secoue la tête de gauche à droite négativement. Presque, fébrilement. Elle ne sait pas pourquoi elle a aussi peu envie de lui tendre ce joint. Mais non, elle ne veut pas, vraiment pas. Tout ce que la louve a tenté de faire depuis le début avec lui, elle refuse de l’anéantir. Elle refuse de le faire souffrir. Cela va à l’encontre de tout ce qu’elle lui a promis. – T’en fais pas pour moi, c’est de la bonne came. lâche-t-elle avec une fausse nonchalance. Un faux détachement alors qu’elle ne se sent pas bien à l’aise en réalité, presque inquiète de le voir en consommer. – T’façon, je partage pas. Je te rappelle qu’à cause de toi, je suis sdf. Elle laisse échapper un léger sourire, fière de sa connerie. – T’as compris ? Sans dealer fixe. Elle n’est pas dans son état normal, non. Plus légère qu’à son habitude. Ça lui fait du bien… elle en a besoin. Elle en a besoin, Ella, ne le voit-il pas ?

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crédit/ tumblr ☾ w/@Thomas Farrel

Elle a fumé son premier joint alors qu’elle avait treize ans. Elle était jeune, mais déjà si loin d’être une enfant. Les années se sont enchaînées, l’herbe est devenue une habitude dont elle n’a pas tenté de se dérober. Mais c’est plus tard qu’elle a commencé à prendre des drogues dures, des drogues bien plus dangereuses pour elle. Elle a eu, cette descente aux enfers, quand elle a senti Morgan lui filer. Quand elle a fui la seule famille qu’elle avait. Quand tout, progressivement, a commencé à lui échapper. La tête à peine relevée, elle ne s’en est pas pour autant libérée. C’est quelque chose qui est ancré en elle, qui fait partie d’elle. Arrêter, elle n’y pense pas, parce que cela n’en vaut pas la peine. Il n’y a rien, dans sa vie, qui en vaille la peine. Elle préfère se tuer à petits feux avec des substances plutôt que se torturer un peu plus avec sa propre souffrance. Mais Thomas, il ne sait pas tout ça. Il ne sait rien de tout ce qui a pu lui arriver, elle ne s’est jamais confiée.

Âme sauvage qui refuse de se laisser approcher,
trop farouche pour accepter si facilement de parler.

Elle n’a pas non plus l’habitude d’intéresser. Elle n’est qu’une paumée, comme des centaines d’autres paumée, dans une ville qui porte parfaitement son surnom. Mais le voilà, lui, qui débarque dans sa vie et l’assaille de questions. Pourquoi tu fais ça Ella ? Parce qu’elle a mal. Et qu’elle a appris que c’est le mal qui guérit le mal. Parce qu’elle est tellement perdue, dans ce monde où elle ne se sent plus nulle part à sa place, qu’elle a besoin de l’oublier. Besoin de se laisser sombrer. Parce qu’elle est incapable de livrer sa douleur, peut-être qu’elle a trouvé le meilleur moyen de l’extérioriser. Mais elle ne lui dit pas tout ça, elle ne lui dit rien, parce qu’il continue, il ne la lâche plus. Balance des vérités qu’elle n’a aucunement envie d’entendre. – Mais moi je ne t’ai rien demandé ! Il ne peut pas le nier, Thomas. Elle s’occupait d’elle toute seule, cela fait bien longtemps qu’elle s’occupe d’elle toute seule. Ce n’est certainement pas lui qui va veiller sur elle. – Je n’ai pas besoin d’aide, et t’as aucune idée de ce que je vaux.

Rien,
tu vaux rien,

il finira par le savoir s’il ne l’a pas déjà deviné.

Un peu irritée, mais toujours bien loin de sa colère à lui, l’âme en perdition ne lui confie pas ce qu’elle pense vraiment. Ce qu’elle ressent réellement. Elle recule même la tête quand il pose ses mains sur son visage, l’obstinée. Elle ne cédera pas si tôt, même à quelqu’un qui veut seulement l’aider. Seulement, elle ne s’attend pas une seconde à l’action qui suit. Elle l’a rarement vu si vif, Thomas. Il s’empare du joint pour en tirer une taffe en lui affirmant qu’il va se détruire avec elle. – Putain ! Elle lui saute pratiquement dessus, pour lui arracher l’objet du délit. Il en tombe sur le lit, et elle sur lui. La torturée ne s’en détache qu’une fois la roulée entre ses mains. Cette fois debout, les prunelles assombries rivées sur lui, elle reprend avec colère à son tour. – Pourquoi tu fais ça ? T’as besoin de te reconstruire, c’est pour ça que t’es là, pas pour t’enfoncer un peu plus ! Elle écrase le mégot du joint elle-même contre son cendrier. Sans tout de suite réaliser l’attachement qu’elle a laissé dévoiler. Elle ne veut pas, surtout pas qu’il finisse comme elle. – J’veux pas que tu finisses comme moi ! Et surtout pas à cause de moi ! Parce qu’elle se déteste déjà suffisamment, Ella, et parce qu’elle tient à Thomas.

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Elle pourrait dire qu’il est coupable. Responsable d’une dépendance qu’il a acceptée, qui l’a même longtemps arrangé. Elle pourrait lui dire qu’il est fautif, Thomas, de tout ce mal qu’il lui a fait subir. Ce mal dont elle est devenue accro en même temps qu’à toutes ces substances nocives. Mais la drogue la plus toxique, en réalité, elle n’a rien à voir avec toutes les horreurs qu’il lui a vendues. La chose la plus toxique à laquelle elle est accro, Ella, c’est cette noirceur qui l’accapare. Celle qui a pris possession de tout son être pour mieux la torturer, pour mieux en faire sa prisonnière. Prise au piège d’un mal-être dont il n’est pas responsable, Thomas. Dont il ne se doute même pas. La preuve étant, il l’affirme lui-même, elle ne lui dit rien. Elle ne lui raconte absolument rien. C’est vrai, elle s’en rend compte, Ella. Parce qu’elle est comme ça. Elle garde ses souffrances pour elle, cache toutes les failles qui la rendent vulnérable à tous ceux qui peuvent l’approcher. À tous ceux qui pourraient prendre soin d’elle, si elle le voulait. Si elle apprenait, juste, à se dévoiler. Elle sait qu’il a raison, oui, il n’empêche que ses mots lui font l’effet d’un coup de poignard. Ses opales sombres accrochent son regard, alors qu’elle se terre dans le silence. Et tous ces mots que tu ne dis pas. La douleur que tu gardes pour toi. Tu sais que c’est vrai, Ella, mais tu ne savais pas que ça pouvait le toucher. Le cœur serré, elle finit par détourner ses pupilles noires, sans plus grand espoir, alors qu’il commence à rassembler le peu d’affaires qu’il a emmené chez elle. – Bordel, à quoi tu joues ? lâche-t-elle, cette fois dans l’incompréhension. Qu’il parte, comme ça, elle ne l’envisage même pas. Mais il en profite pour lui extirper le joint qu’elle lui a refusé. Sa culpabilité envolée, elle lui saute pratiquement dessus pour lui retirer l’objet destructeur. Cette fois, c’est elle qui se met en colère, à lui balancer toutes ces horreurs. Toute la peur qu’elle ressent, elle l’extériorise d’une autre manière. Elle se sert de cette colère, cette rage de le voir se foutre en l’air. Devant les paroles qu’elle le force pratiquement à prononcer, l’écorchée voit son regard perler. Comme s’il allait finir par craquer. Donne moi une raison de ne pas le faire. Ce serait le moment de trouver les mots. Mais elle se terre dans le silence alors qu’il en profite pour la repousser et s’éloigner. Elle ne perd pas de temps pour aller à sa suite, Ella, encore irritée, mais surtout effrayée. Apeurée par l’idée de le voir tout balancer. Tout ce qu’ils ont réussi, tant bien que mal, à créer. – Thomas, arrête ! Pars pas, s’te-plaît ! Elle l’attrape par le bras pour le retenir. L’empêcher de partir. L’âme en peine arrive à retrouver le contact de ses prunelles bleutées. Les siennes sont embuées des larmes qu’elle s’empêche encore de verser. – Tu veux que je te dise la vérité ? Tu veux que je te dise que j’ai l’impression d’être piégée depuis que je suis née ? Que je me sens tellement mal dans ce monde-là que j’ai envie de me foutre en l’air, mais que même ça, j’en ai pas le courage ? Et sous la colère, peu à peu, ses barrières s’abaissent. Tout le mur qu’elle a construit entre elle et les autres, il se pulvérise devant Thomas. – Tu veux que je te dise qu’il y a que la came pour me faire du bien ? M’faire oublier, juste quelques heures, combien y’a rien qui me retient ? Et elle s’effondre, littéralement, l’écorchée. Elle s’adosse au mur avec fatalité avant de se laisser tomber par terre. Au plus près de son enfer.

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Laisser Thomas entrer dans sa vie a été plus facile qu’elle ne l’aurait cru. L’aider aussi, lui a été quasiment instinctif, alors qu’il était perdu. Il a éveillé en elle cette partie qui n’existait plus. Ce besoin d’aider une âme écorchée, pour ne pas qu’il devienne aussi brisé que ce qu’elle est. L’empêcher de sombrer, alors qu’elle a déjà elle-même complètement succombé, c’est un pari risqué. Mais elle s’y est essayée, depuis plusieurs jours déjà, alors qu’il se révélait de plus en plus à elle. L’ange déchu qui lui a livré ses ailes. Mais Ella, elle a continué de se terrer dans le silence. Ses secrets les plus douloureux enfouis au plus profond de sa conscience. Il y a trop longtemps qu’elle ne les a pas confiés, trop longtemps qu’elle a décidé de ne plus jamais en parler. C’est trop douloureux, trop inutile surtout. La souffrance ne se guérit pas quand elle est confiée, elle paraît juste encore plus vraie. C’est pour cette raison qu’elle n’a rien dit, jamais, à Thomas. Elle veut juste s’empêcher d’avoir mal encore plus que c’est déjà le cas. Seulement elle ne s’attendait pas à entendre que tous ses secrets gardés aient pu le blesser. Elle ne s’attendait plus, à pouvoir réellement le blesser. C’est quand il menace de s’en aller, qu’elle se met à craquer.

Et tout se met soudain à craqueler,
tous tes remparts fissurés,
ton reflet vient d’éclater.

La colère l’emporte mais c’est la douleur derrière qui est la plus forte. La violence de cette rage qu’elle contient en elle depuis trop longtemps, depuis si longtemps qu’elle a la sensation de l’avoir depuis la naissance. L’écorchée vive laisse échapper toute la détresse ressentie, laissant peu à peu place à son véritable visage, anéantie. Elle lui avoue combien elle se sent meurtrie, combien elle se sente détruite. Combien sa vie ne tient plus qu’à un fil. Et le fil, s’il n’est pas encore coupé, c’est juste parce qu’elle est trop effrayée. Qu’elle n’a pas le courage d’affronter la mort, même pas celui-là, elle qui ne sait pas surmonter déjà la vie. Pour la première fois, elle avoue à haute voix. Si la drogue lui est aussi vitale, c’est simplement pour effacer tout ce mal. Lui faire oublier, quelques instants, sa vie si misérable. Lui faire oublier, aussi, à quel point elle est vulnérable. Mais ce soir, plus rien pour cacher sa fragilité, l’âme en peine se laisse aller. Les flots salés menacent à tout instant de couler. Jusqu’à ce qu’il lui attrape le visage entre les mains, tendrement, avant de l’entraîner jusqu’au lit. À peine assise, ses opales toujours rivées sur lui, Ella le contemple, sans un mot. Elle le regarde alors qu’il lui affirme qu’elle n’est pas sur cette terre sans raison. Et, sans lui laisser le temps de réagir davantage, il presse soudain ses lèvres contre les siennes avec passion.

Un,
deux,
trois,

trois secondes pour te faire oublier,
toute la détresse exposée.

C’est le regard vaporeux qu’elle pose ses pupilles sombres dans les siennes beaucoup plus claires. Peut-être à cause de l’herbe. Peut-être à cause de ce baiser pour lequel elle n’était pas prête. Un brin déstabilisée, l’oiseau blessé est incapable de prononcer un mot. C’est lui qui se lance dans une déclaration, une promesse qu’elle n’attendait pas. Sa main se pose sur son cœur, déclenchant ce trouble en elle malgré sa torpeur. – Thomas, je… Mais sa voix s’arrête. Devant ses paroles, devant ses gestes. Elle sent ses lèvres glisser dans son cou avec tendresse, ses dents s’en imprègnent avec davantage de fougue. Et la douleur, il a raison, disparaît sous son joug. Elle le laisse faire, fragile Ella, elle ferme même les paupières quand elle sent les caresses délicates de ses mains contre elle. Ses doigts à elle viennent se nicher dans la chevelure du jeune homme, la caresser lentement. – Tu… on devrait pas, Thomas… dit-elle en se reculant lentement pour ancrer son regard dans le sien. Oublier tous ses tourments, ne vivre que l’instant présent. S’oublier, elle, instantanément. Cela lui paraît si facile et, à la fois, si dangereux. Pour lui, pour elle, pour tous les deux.