Sujet: Dérapage contrôlé •• Cassey Jeu 13 Fév - 21:26
Cassey & Lonàn
Dérapage contrôlé
C’est ton jour de chance Les étoiles sont alignées Entre dans la danse Aucun faux pas n’est toléré
Un besoin de décompresser se fait sentir. C’est samedi soir, il est temps de sortir. De profiter de la vie et de ce qu’elle a à offrir. Les dernières semaines ont été compliquées à gérer. Difficile à assimiler. Trop d’événements se sont succédés. Plus qu’il n’a pu en supporter. Lonàn n’a jamais réellement su canaliser ses émotions. Trop instable pour tout garder. Un besoin d’exploser pour évacuer. Et c’est l’overdose qui a pointé le bout de son nez. A terre mais pas enterré. A présent, il faut se relever. Avancer et ne pas s’arrêter. Reprendre sa vie en main. C’est ce qu’il a commencé à faire et ne compte pas se stopper en si bon chemin. Debout face à son miroir dans la salle de bain, les gouttes d’eau ruisselant encore sur son corps mouillé et serviette enroulée autour de la taille, il observe son reflet quelques secondes. Balaye d’un geste de la main les derniers tracas qui embrument son esprit. C’est fou comme la sobriété et un corps dénué de toute substance nocive diffusent des idées noires dans son esprit. A croire que la drogue est devenue nécessaire à son équilibre mental. Vital même, paradoxalement.
Ce soir, il ne compte pas rentrer seul chez lui. Il a besoin de se détendre. De passer du bon temps avec une femme à la place des médicaments. Pour changer. Le jour de la semaine idéal pour ça, le samedi, les nanas peu farouches sont de sortie. Un détour dans sa chambre et il récupère une chemise noire et un jean foncé. Retour dans la salle de bain pour tenter de se coiffer et se parfumer. Avec une tignasse récalcitrante comme la sienne, dresser sa chevelure et ses mèches rebelles relèvent parfois de l’exploit. Un passage chez le coiffeur ne serait pas de refus mais la flemme est bien trop écrasante. Alors tant pis, ça pousse. Fin prêt, il avale une pilule colorée et sort de son appartement après avoir récupéré veste et clés. Pas de moto ce soir, il se déplace à pied. C’est bien plus sage quand on compte picoler.
La brise est douce en ce début de soirée Les festivités ont débuté Et toi, tu marches fièrement vers ta destinée L’heure de passer du bon temps a sonné
Mains dans les poches et cigarette entre les lèvres, il jette le mégot par terre avant d’entrer dans l’un de ses bars préférés. L’ambiance y est agréable. La musique appréciable. La déco discutable mais acceptable. A cette heure, pas mal de monde afflue déjà dans l’établissement. La soirée bat son plein. Un coup d’œil alentour et il constate avec plaisir que pas mal de jolies filles sont déjà présentes. Il n’y a plus qu’à choisir une cible. A moins que, comme souvent, les demoiselles prennent les devants. Il n’est pas rare qu’il se fasse aborder. Il est fini le temps où les hommes décidaient de la marche à suivre. L’homme n’est plus maître de rien par les temps qui courent. Les femmes aussi savent prendre les choses en main. Pour autant, ce soir il ne laisse pas le hasard décider du déroulement de sa soirée. Une silhouette blonde, connue, se dessine au niveau du comptoir. La jolie Cassey est de toute beauté. De longues jambes. Un visage de poupon. Et une fâcheuse tendance à dire non. Ce n’est pas la première fois qu’ils se croisent tous les deux. Pas la première fois non plus que Lonàn joue de ses charmes sur la jeune femme. Oh, elle entre dans son jeu. Les sourires sont échangés. Les coups d’oeils malicieux partagés. Les sous-entendus à peine voilés. Mais le résultat reste indubitablement le même à la fin. Le refus d’obtempérer. Le stop inconsidéré. Et c’est l’irlandais qui finit frustré. La belle est devenue un défi à part entière. Un jour, il la fera succomber où il ne s’appelle pas Lonàn McGrath. D’un pas sûr et assuré, il avance vers elle. Sourire déjà greffé sur les lèvres, il prend place sur le tabouret libre à ses côtés, sans se demander une seule seconde si la place est occupée. « La jolie Cassey en chair et en os. » Prunelles pétillantes de malice qu’il laisse glisser allègrement sur la demoiselle. « Ma soirée vient subitement de prendre une tournure bien plus intéressante. » Sourire charmeur ancré sur les lèvres, le jeu vient de débuter. « Tu es de toute beauté ce soir. Un événement à fêter ? » Mon arrivée sans doute, songe-t-il très fort sans vraiment prononcer ses pensées. « Je t’offre ton prochain verre. » Est-ce une proposition ? Non, pas vraiment. Le refus n’est pas une option. Pas tout de suite, en tout cas.
La lune est pleine ce soir. À la recherche des étoiles, c’est elle qu’elle peut tout de suite apercevoir. Elle la voit dès l’instant où ses escarpins quittent l’immeuble de son appartement pour se poser sur le macadam. L’air est plus rafraîchissant, ces nuits-là, un peu moins polluées par l’atmosphère de la ville qui ne dort jamais. La ville où elle est arrivée, plus d’un an auparavant, à s’agacer des aérations intempestives du métro, où elle s’insurgeait du manque de soleil, et de cette tendance beaucoup trop new-yorkaise d’avancer à pas pressés. Comme s’ils espéraient rattraper l’avenir plutôt que profiter de l’instant présent. Plutôt que tout faire pour se sentir vivant. Elle ne s’agace plus, Cassey. Ses escarpins aux talons vertigineux dévient les grilles du métro sans même les regarder. Et, même parfois, d’un pas pressé. Mais elle continue de porter des robes trop légères pour le temps qu’il fait. Et continue, sans cesse, de chercher les étoiles.
Et peut-être que ce soir tu les trouveras, peut-être que c’est autre chose que tu découvriras,
peut-être que tu sentiras encore, toujours un peu plus fort,
la vie en toi.
Il y a ceux qui la trouveront naïve. Peut-être même candide. Mais, sous l’insouciance et la légèreté, il y a juste cette envie de rêver. Continuer à rêver dans un monde où tout le monde a oublié. Elle ne pourrait pas dire que tout est parfait, pourtant. Rien ne l’est véritablement. Seulement elle a appris à danser sous la pluie, Cassey, quitte à attraper une pneumonie. C’est ce qu’elle veut faire ce soir, danser sous la pluie. Danser toute la nuit. Pour l’occasion, elle a choisi l’un de ses bars de prédilection. Comme une véritable New-Yorkaise, la belle parvient à se faufiler rapidement à l’intérieur, avant d’approcher le bar. Quelques cocktails, quelques échanges plus tard, elle s’éloigne du comptoir. C’est la piste de danse qui l’attire vite, aussi vite que d’ordinaire. La blonde l’illumine de sa lumière. Ou c’est peut-être elle qui est irradiée par toute cette vie, tout ce monde qui change dès l’instant où vient la nuit. Les visages plus si chagrinés, les corps plus si pressés, ils redeviennent ce qu’ils ont toujours été. Ce qu’elle, continue d’être, à chaque instant, quelqu’un de vivant. Et elle savoure ce moment, la jeune femme s’en imprègne, de longues minutes durant. C’est la soif qui la pousse à s’éloigner des quelques personnes avec lesquelles elle a facilement sympathisé. Le bar qu’elle rejoint à nouveau, elle s’installe sur le tabouret pour commander un Mojito. Rafraîchissant, délicieux et épicé. Comme l’homme qui vient de s’asseoir à ses côtés.
La tenue soignée, la coiffure négligée, le charme invétéré, de celui qui ne cesse de te tenter.
Lonàn, il est beau. Diablement beau. Il a l’insouciance de l’homme qui sait la faire sourire, combiné à ce charisme de l’homme mystérieux. L’homme dont elle a fini par comprendre, trop souvent, dangereux. Il dégage quelque chose d’interdit, quelque chose qu’elle s’est peut-être elle-même interdit. Mais la tentation n’en est, comme souvent, que plus forte. Ce n’est pas d’une évidence même pour elle de s’empêcher de céder. C’est même la première fois qu’elle se l’est imposée. Cela fait plusieurs mois pourtant, maintenant, qu’elle s’amuse avec lui à ce petit jeu. Jeu dangereux. Mais c’est aussi ce qui lui plaît tant, à Cassey. C’est aussi ce qui attise son intérêt, peut-être autant que pour le blondinet. Véritable coureur de jupons, séducteur plus qu’avéré, elle serait idiote de succomber. Ce serait beaucoup moins drôle, même, de succomber. C’est ce dont elle s’est toujours persuadée, comme une tentative de plus pour résister. Et elle y est toujours arrivée. Frôler les limites avec lui, s’approcher au plus près de ses limites, sans jamais les franchir. C’est aussi galvanisant que grisant, c’est se sentir vivant.
Tu cherchais les étoiles, mais n’oublie pas, t’as trouvé la lune ce soir.
Un sourire malicieux vient répondre à celui du jeune homme alors qu’elle tourne déjà la tête vers lui. Ses prunelles bleutées s’ancrent tout de suite dans son regard joueur, heureuse de le revoir, comme c’est le cas à chacune de leurs rencontres improvisées. Il est cet acolyte de soirées, ce complice avec lequel elle sait s’amuser, lorsqu’ils ne sont pas en train de flirter. Ce qui est rare, les jeux ne revenant jamais bien tard. – Bonsoir Lonàn. le salue-t-elle, les mots neutres, la voix bien plus enjouée. Comme déjà prête à jouer. Il ne perd pas de temps pour lancer la première partie en prenant soin de la complimenter. – J’espérais tomber sur toi. se justifie-t-elle de sa voix sucrée. Faussement, car elle ne s’est pas faite aussi jolie pour lui. Ni pour aucun autre homme cela dit. Mais le sourire enjôleur de la jeune femme pourrait même paraître convaincant, s’ils ne s’amusaient pas de ce petit jeu depuis si longtemps. – Tu crois pouvoir me saouler ? lui demande-t-elle, cette fois plus taquine. Au-delà de leur petit jeu de séduction, elle a appris à l’apprécier. Autant que leur complicité. Lonàn, elle l’aime bien. Un instant avec lui, en ce moment, c’est peut-être exactement ce dont elle a besoin. Son verre qu’elle porte à ses lèvres, la jolie blonde en boit une petite gorgée, avant d’ajouter avec le même sourire joueur. Déjà un brin trop aguicheur. – Tu es très beau toi aussi. Tu vas toutes les faire craquer. Toutes, sauf elle. Et elle se fait un malin plaisir d’être celle qu’il n’aura pas, toujours trop inconsciente, toujours trop sûre d’elle. À frôler constamment la flamme, le papillon risque pourtant chaque fois un peu plus de frôler les enfers.
La nuit est tombée La soirée est avancée Les dés sont jetés Et la partie peut commencer
Qu’elle est délicieuse, cette jolie blonde. Qu’elle est envoûtante, cette douce sirène. Qu’elle est résistante, cette belle plante. Depuis leur première rencontre, tout n’est qu’un éternel jeu de séduction entre eux. Poussé toujours plus loin. Stoppé avec un plaisir certain. Lonàn n’a pas dit son dernier mot. L’objectif final lui glisse toujours entre les doigts mais il sent chaque fois qu’il s’en rapproche. Les barrières sont friables, sur le point de céder à chaque nouvelle attaque. Jusqu’à quel point pourra-t-elle résister ? N’est-elle pas un minimum intéressée ? Dans le cas contraire, elle n’entrerait pas dans son jeu avec une telle intensité. Le désir se lit dans ses yeux. Perceptible dans chacun d’eux. Lonàn n’est pas un homme ambitieux. Pourtant, lorsqu’il se sent si prêt du but, il n’est pas homme à reculer ou à baisser les bras. Les défis, il les relève sans jamais hésiter. La récompense n’en est que plus méritée. A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. A méditer.
Sentir un regard empli de malice sur soi, c’est grisant. Se sentir désiré, c’est plaisant. Jouer avec le feu, c’est vivifiant. Parce qu’il ressent ce besoin de se sentir vivant, Lonàn. Ce besoin d’exister aux yeux des autres. Pourquoi suit-il son frère aveuglément ? Parce qu’il se sent important. Pour un homme qui cherche encore désespérément sa place dans la vie, c’est indispensable. Ce petit garçon paumé qui cherche encore et encore son chemin dans ce dédale d’existences qui croisent sa route. Il la cherche encore et toujours, sa voie. Sans jamais parvenir à la trouver. Alors il se raccroche aux branches, le trafiquant, pour ne pas sombrer définitivement. Car, à n’en pas douter, la chute serait mortelle. Mais ce soir, il chasse toutes sortes d’idées négatives. Pas de place pour les mauvaises ondes. Le cacheton qu’il a avalé avant de partir a déjà tout dissipé. A présent, c’est la jovialité assurée. La partie peut continuer.
Ne te fis pas à son sourire Car tu risques de la maudire Quand elle te forcera à fuir
La soirée prend une tournure bien plus intéressante. Palpitante. Enivrante. La balle est envoyée. D’un rebond adroit, elle lui renvoie dans les pieds. Un léger rire glisse entre ses lèvres face à cette hypothèse qu’elle soulève. Pur hasard qu’ils soient tombés l’un sur l’autre, mais ça ne l’empêche pas d’en jouer. Bien tenté. « Je pourrais m’en sentir flatté si on avait prévu de se retrouver. » Le hasard fait pourtant bien les choses, de temps en temps. Les compliments, ça marche toujours. Brosser dans le sens du poil. Glisser quelques mots doux. Une technique que maitrise même Lonàn. Comme quoi, c’est à la portée de tous, si tant est que la tchatche suive un minimum. Elle persiste et signe en renvoyant son invitation dans le coin de son nez. « Moi, te saouler ? » Qu’il balance d’un air faussement outré. Main sur le cœur pour appuyer son air renfrogné. « Je n’oserais jamais voyons. » Lève les yeux au ciel d’un air théâtral. Personne n’est dupe, Lonàn. Même pas toi. L’alcool est l’un des moyens les plus efficaces pour parvenir à ses fins. Ou pour simplement aider à détendre l’atmosphère dans une situation qui le requiert. « Tant pis pour toi si tu refuses ma générosité. » Fin sourire aux lèvres, la plaisanterie s’élève dans l’air. Difficile de garder un semblant de sérieux plus longtemps cependant. Et c’est l’éclat de rire qui résonne doucement.
Jusqu’à ce qu’elle le complimente elle aussi. Surpris, l’un de ses sourcils se rehausse et son sourire irradie de nouveau. Pose son coude sur le comptoir pour se rapprocher de la jolie Cassey. « Elles devront prendre un ticket pour une prochaine fois dans ce cas, parce que ce soir, c’est toi qui vas craquer. » Le ton est à la confidence, comme un secret qu’il vient de lui révéler. Un peu trop sûr de lui ? Ou est-ce le défi du jour qu’il vient de lancer ? Ce soir, comme à chaque fois, il ne compte pas rester sur la touche. Qu’importe la cartouche qu’il se prendra surement. La persévérance comme ligne de conduite. L’obstination comme moteur. Une chose est sûre, il l’aura à l’usure. Il se redresse finalement et lève la main pour attirer le barman à lui. « Tu m’as complimenté, c’est un bon début. Et puis tu me trouves à ton goût alors c’est presque gagné. » Comme un petit air de provocation. Elle ne peut nier qu’il y a tentation. Dans le cas contraire, voilà des mois qu’elle aurait tourné les talons. Sans même se retourner. « Ça te plait de me faire languir, je le sais. Je le sens. Mais tu craqueras, tu verras. Un jour. » Un clin d’œil à son attention pour appuyer ses propos et ses prunelles se posent sur le barman qui fait son apparition. « Je vais prendre un whisky, mais laisse la bouteille à proximité, ça m’évitera de t’appeler toutes les cinq minutes. » Un whisky irlandais de préférence pour lui rappeler ses origines, bien qu’il n’ait pas longtemps connu ses terres natales. De nouveau, il tourne la tête vers sa cible favorite du moment et accroche ses iris clairs aux siens. « Combien tu mises sur ta résistance à l’alcool ? » Comme un air de défi dans le regard, il ne baisse pas les yeux. Combien de verres peut-elle encaisser jusqu’à atteindre le point de non retour ? Quel est son seuil de tolérance ? Est-elle capable de boire avec lui et de le suivre dans sa descente vertigineuse ? « Un autre verre belle blonde ? » Autant profiter de la présence du barman pour passer commande.
il a quelque chose, Lonàn. Ce serait mentir d’affirmer qu’elle n’a pas été charmée. Envoûtée par cet homme qui représente à lui tout seul ce qui la fait irrémédiablement craquer. C’est peut-être pour cette raison précise qu’elle ne s’y est jamais risquée. Parce qu’elle sait qu’elle pourrait trop vite s’attacher. Et lui, la briser. Sous ses airs enjôleurs et son assurance à toute épreuve, la séductrice est aussi une femme trop fragile. Trop fébrile devant les muscles saillants, les moues boudeuses ou malicieuses, les voix rauques qui savent murmurer à son oreille. Le cœur émietté, beaucoup trop de fois, pour ne pas se méfier. Pour le laisser approcher.
Mais c’est trop difficile de t’éloigner, parce qu’il te plaît, Lonàn, il t’attire, et plus il t’attire, plus tu t’obliges à le fuir.
Alors elle frôle le danger, chaque fois, sans jamais céder. Elle approche au plus proche de la barrière sans pour autant la dépasser. Elle se contente d’avancer, de plus en plus. De s’en rapprocher, de plus en plus. Il n’empêche que Lonàn, elle commence à le connaître beaucoup plus et l’apprécier beaucoup plus que si elle s’était contentée de le mettre dans son lit dès la première nuit. Et en voulant s’éviter le danger, elle ne l’a rendu que plus vrai. Que plus réel, que plus authentique, que plus attrayant aussi. C’est peut-être bien cela, le souci. Elle aime ce petit jeu autant que lui.
Et c’est comme s’il le savait, comme s’il t’avait trop bien cernée.
Il y a quelque chose chez le beau blond, une douce détermination. Il dégage toute cette assurance comme s’il était persuadé que, un jour, il y arrivera. Qu’il n’y a pas de doute à avoir. Peut-être bien qu’il a raison, elle ne saura pas toujours dire non. L’oiseau libre n’a jamais su s’empêcher de voler. Suivre ses envies sans penser à ce qui pourrait finir par arriver. Elle a un regard sur la vie bien particulier, Cassey, celui qu’il vaut mieux avoir tout vécu que rien ressenti. C’est en cela que ce jeu du chat et la souris qu’elle entretient consciemment avec lui n’est pas habituel. Qu’il devient d’autant plus captivant qu’il est une première. C’est peut-être pour cette raison qu’elle l’apprécie autant, ou juste parce que c’est avec Lonàn. Ils jouent avec le feu, certainement, mais ils en ont peut-être besoin tous les deux.
Besoin de vous sentir vivants, besoin exaltant, besoin d’exister.
C’est comme un jeu dont ils connaissent les règles par cœur. La balle qu’ils se renvoient avec ce naturel déconcertant. Elle ne le voit pas si régulièrement. Pourtant, elle a chaque fois l’impression que rien n’a changé. Que ce petit manège qu’ils entretiennent, peu importe tout ce qui peut se produire dans sa vie, il est toujours là, toujours intact. Comme si rien ne pouvait vraiment l’arrêter. Comme si rien ne pourrait les arrêter. Du tac au tac, le charmeur vient lui répondre, d’une manière qui la fait sourire, l’air rêveur, la tête penchée vers lui pour mieux le contempler alors que ses iris continuent de pétiller. – Et n’y vois-tu pas, au contraire, une forme de beauté ? On finit toujours par se recroiser. lui affirme-t-elle d’une voix malicieuse, un brin joueuse. À son tour, il parvient à déclencher un rire cristallin de la part de la belle devant cette petite moue craquante, celle-là même du mauvais garçon qui la fait trop facilement chavirer. L’air innocent, faussement innocent.
Parce qu’ils ne le sont jamais, et ça a le don de t’envoûter.
Il en fait beaucoup trop pour que ce soit naturel. Un peu extrême, Lonàn, comme elle. Mais c’est aussi ce qui fait son charme. Jusqu’à ce qu’il affirme qu’elle refuse sa générosité. – Hé, non, je ne dis jamais non à un verre. C’était simplement un moyen de lui rappeler, qu’il ne la fera pas craquer, pas parce qu’elle serait alcoolisée. Saoule ou non, Cassey, il n’y a que son envie qui peut la faire flancher. Pas besoin de tequila, pour ça. Les rires s’enchaînent naturellement. Et la petite étoile se rend compte que cela fait longtemps, qu’elle n’a pas ri avec un homme. Elle rit constamment avec Lonàn. Les pensées évacuées avant même d’en être submergée, elle en profite pour rappeler sa capacité à s’attirer les faveurs des femmes. Même si c’est elle qu’il regarde ce soir. Les deux océans accrochés aux siens, elle laisse échapper un nouveau rire, comme pour montrer combien il a beaucoup trop d’espoir. – C’est ce que tu dis à chaque fois. reprend-elle, l’air faussement blasée, même s’il la connaît suffisamment désormais pour savoir qu’elle s’amuse à le taquiner. Lui ne se gêne pas non plus pour la provoquer. Un sourire coupable apparaît sur le visage angélique de la diablesse, car il a raison, elle aime beaucoup trop le faire mariner. Le faire espérer. – Je te trouve bien sûr de toi. Une belle gueule ne suffit pas, tu sais. Pour ce coup, elle dit vrai. Mais il n’a pas seulement la gueule, Lonàn.
Il a tout le charme, toute la légèreté, toute la complicité, il sait, trop bien, comment te parler.
Ses jolis yeux se détournent quelques instants d’elle pour se focaliser sur le barman alors qu’elle attend, patiente. Son verre se porte à ses lèvres alors qu’elle le termine d’une traite, prête à le suivre. – Je suis plus que résistante. Tu dois le savoir mieux que personne. lâche-t-elle, avec insolence, fière d’elle en plus. Le sourire mutin qu’elle lui adresse, la sirène finit par se tourner vers le barman pour commander. – Je vais prendre la même chose que monsieur. Parce qu’elle relèvera toujours ses défis. Parce qu’elle en a envie. Parce qu’elle se sent bien avec lui.
Cassey, Joli petit oiseau de nuit Un sourire envers lui Et il te suit sans souci
Sportif émérite. Compétiteur dans l’âme. Il relève tout type de défi sans rechigner à la tâche. Le jeu en vaut la chandelle juste pour le plaisir de la voir échouer à résister. Quelle femme obstinée. Mais cela ne rend la partie que plus délectable. Cette joute verbale est un régal. Le jeu est presque plus appréciable que l’enjeu final. En règle générale, il parvient à ses fins assez facilement. Cette fois, la belle blonde a du répondant. Un challenge bien plus intéressant. Joueur persévérant, Lonàn n’est pas homme à s’imaginer perdant. Et pourtant, avec Cassey, ça arrive constamment. Une habitude qu’il aimerait changer. Le tout, c’est de persévérer. Jouer toutes les cartes qu’il tient dans sa main. Continuer sans jamais renoncer. S’acharner en cas de nécessité. Parce qu’à la fin, il le sait, elle finira par craquer. C’est inscrit dans son regard pétillant de malice. Véritable indice qu’il ne peut ignorer.
Danse, le feu au fond de ses iris S’il y a bien une chose qu’ils ne peuvent tous deux cacher C’est ce désir qui brûle du fond des abysses Et qui finira par les consumer tout entier
Jouer avec le feu est une mauvaise habitude que Lonàn adore expérimenter. Malheureusement pour lui, il finit toujours pas se brûler. Et à force de la côtoyer, il s’est mis à l’apprécier. L’attachement est un danger qu’il a déjà affronté par le passé. Le tout, c’est de savoir doser. Pas sûr que l’irlandais soit expert en la matière. Ça se saurait, dans le cas contraire. Mais Lonàn n’est pas connu pour ses capacités de réflexion. Esprit bien trop souvent embrumé par toutes ses addictions. Difficile de trouver son chemin et de ne pas emprunter les sentiers de la perdition. Comme toujours, lorsqu’il aura atteint le point de non retour, ce sera trop tard. Mais l’heure n’est pas à la rétrospection. Alors revenons à nos moutons.
La tête penchée sur le côté, et ce sourire irradiant d’une sincérité qui le fait vibrer, Cassey a tout l’air d’une fée. Prête à l’enchanter de sa douce voix sucrée. « Tu vois, même le hasard s’en mêle. » Lui aussi est décidé à la faire succomber ? A les pousser l’un vers l’autre pour qu’enfin, ils puissent concrétiser ? La manœuvre peut encore durer une éternité. Les éclats de rire sont échangés. Il n’envisage pas de la saouler, non, même si l’alcool a tendance à détendre l’atmosphère et à radoucir les êtres les plus fermés. Pas besoin de ça pour passer une bonne soirée avec elle. Après tout, il n’a pas encore bu qu’il rit déjà. N’est-ce pas le signe d’un bon moment partagé ? Une pique est lancée pour lui rappeler que chacune de ses tentatives est soldée par un échec cuisant. Jusqu’à maintenant en effet, c’est le cas. Loin de s’en offusquer, Lonàn l’accompagne de son rire enjoué. « Et je continuerais de le dire à chaque fois ! Je n’ai pas dit mon dernier mot, crois-moi. » Persévérance ou entêtement ? La frontière est mince. Un sourire fier se dessine sur ses lèvres lorsque la réplique suivante de la belle vient lui fouetter les tympans. « Heureusement pour moi, j’ai bien plus qu’une belle gueule. J’arrive à te faire rire et ça, c’est bon signe. » Elle ne peut pas le nier. Il y a un diction là-dessus. Femme qui rit… Et on connait la suite.
Le barman est arrivé. Le nouveau défi est lancé. Cassey est loin de se défiler. Une bonne chose. Le contraire aurait été décevant. Il n’en attend pas moins d’elle. Après tout, il commence à la connaitre, depuis le temps qu’ils se tournent autour sans discontinuer. Son sourire satisfait étire les traits de son visage face à l’insolence dont elle fait preuve. Une femme de caractère, tout ce qu’il aime. Elle commande la même chose que lui. Le barman acquiesce, sert les verres et laisse la bouteille comme demandé. Un gain de temps évident pour la suite de la soirée. Lonàn récupère son verre entre ses doigts, le lève quelques secondes avant de s’exclamer et de trinquer. « A ton futur craquage ma jolie. » Il arrivera bien, un jour ou l’autre. Clin d’œil malicieux à sa comparse de soirée et le voilà qui amène son verre à ses lèvres pour en boire une longue gorgée et savourer l’alcool qui glisse lentement dans sa gorge. Quelle sensation revigorante. Et maintenant ? Il est temps de passer à l’offensive. Coude posé sur le comptoir, la nonchalance comme marque de fabrique, l’étincelle taquine brille dans ses prunelles qu’il pose sur elle. « Je sais ce que tu es en train de faire. Tu me fais mariner parce que ça t’amuse. Parce que tu aimes que je te complimente sur ton incroyable beauté. Tu aimes que je te dévore littéralement des yeux sans pouvoir te toucher. Ça te fait kiffer de me rendre dingue. » A chaque mot prononcé, il s’est un peu plus rapproché. Millimètre par millimètre. Tout en subtilité. « Prend garde à toi, j’pourrais y prendre goût. » Le goût du risque. Le goût du danger. Ce n’est pas elle en tant que personne qui pourrait poser problème. Mais l’attachement potentiel qu’elle peut représenter. Et ça, c’est risqué. Penchant légèrement la tête sur le côté, il amène lentement l’un de ses doigts vers son visage de poupée pour glisser l’une de ses longues mèches blondes derrière son oreille. Premier contact effectué. « Et je vais même finir par croire que tu n’aimes pas prendre du bon temps. » Le sous-entendu est évident et la provocation, elle, n’est même pas camouflée.
Beaucoup d’hommes auraient déjà abandonné. L’auraient estimée pas intéressée, ou peut-être juste pas suffisamment intéressante pour s’obstiner. C’est la détermination dont il fait preuve, sous ses airs nonchalants, qui le rend d’autant plus captivant. Qui la rend, elle, d’autant plus captivée. Il pourrait s’approcher de n’importe quelle femme, ici, dans ce club et tenter aisément de la mettre dans son lit. Mais il continue de jeter son dévolu sur elle, comme s’il ne lâcherait pas tant qu’elle n’aurait pas craqué. Tant qu’elle n’aurait pas prouvé, combien lui aussi peut l’attirer. Il y a quelque chose de diablement sexy là-dedans, un jeu qu’il la pousse à continuer, juste pour avoir encore cette sensation qu’il y a quelque chose de particulier entre eux. Au-delà d’une simple aventure, le goût du défi a fait d’eux presque des amis. Des amis qui ne cessent de se séduire jusqu’au jour où la limite sera franchie.
Jeu dangereux, mais tu t’obstines, enjeu douloureux, mais tu persistes.
C’est beaucoup trop exaltant de se retrouver en face de Lonàn. Il a l’insouciance dans le sourire, mais cette intensité dans le regard. Il a du répondant, aussi, ce qui rend chaque instant auprès de lui des plus prenants. Vibrant… stimulant. Et elle a besoin de ça, Cassey, besoin d’être stimulée. Besoin de sentir ses prunelles pétiller. Elles pétillent, depuis qu’il l’a rejointe, depuis qu’il est auprès de la belle. Elles pétillent bien plus qu’elles ne l’ont fait tout au long de la semaine. Bien plus même qu’elle ne s’en rend compte. Trop occupée à jouer avec son partenaire de crime, elle n’a pas conscience du rapprochement auquel ils s’adonnent. Trop focalisée sur l’intimité charnelle qu’elle lui refuse, elle ne réalise pas que ce sont leurs âmes qui se frôlent. Elles se découvrent et s’emmêlent, un peu plus à chaque rencontre. Du bel inconnu, il est devenu emblème de la tentation absolue. Et, maintenant, cet homme qu’elle a envie de croiser, chaque fois qu’elle sort en soirée.
Et c’est déjà plus que prévu, peut-être même que c’est déjà perdu.
C’est le point de non-retour qu’elle veut éviter. L’attachement engendrant la souffrance qu’elle cherche à empêcher. Mais elle n’est pas connue pour retenir ses émotions, Cassey. Elle les laisse complètement la submerger, de toute son excessivité. Mais c’est en voulant s’abstenir à tout prix, paradoxalement, elle favorise ce petit jeu de séduction autant que lui. – Moi, je pense que c’est le destin. déclare-t-elle, le sourire mutin. C’est qu’elle cherche, la sirène, elle cherche autant à l’envoûter qu’à ne pas se laisser hypnotiser. Comme si c’était un jeu qu’elle pouvait gagner. Mais elle a les épaules trop frêles, et le cœur encore plus faible, pour l’espérer. Il la laisserait à coup sûr, elle en est convaincue. Ou peut-être qu’ils se brûleraient tous les deux, de tout cet incendie qui s’embrase déjà dans leurs yeux. Mais la complicité qui émane des deux oiseaux ne laisse rien imaginer, ils respirent tous deux beaucoup trop la liberté… pour s’y risquer.
Mais c’est ce que vous faites constamment, prendre des risques inconsciemment, irrésistiblement.
Son joli sourire en permanence sur les lèvres, elle contemple le beau blond avec une certaine fascination. Elle admire sa détermination. Elle ne le dit pas, l’enchanteresse, mais c’est bien ce qu’elle espère. Qu’il continue comme ça, qu’il le fasse à chaque fois. Il ne le sait pas, Lonàn, mais il est comme une bouffée d’oxygène. Il est sa source de légèreté dans les abysses où son cœur s’est perdu. Celui qui pourrait bien lui rappeler, celle qu’elle est. La tête toujours penchée vers lui, tout son corps désormais tourné vers lui, elle le fixe avec une petite lueur amusée. – Mais c’est parce que je t’aime bien Lonàn, tu es… rafraîchissant. dit-elle, la voix malicieuse, pourtant sincère. Elle l’aime bien, c’est peut-être justement ce qui pourrait devenir un problème. Seulement, tout en se privant de l’approcher, elle n’est pas pour autant décidée à lui échapper. La preuve avec ce verre qu’il veut lui offrir, de cette boisson qu’elle ne sait pas si bien tenir. Elle l’accepte et trinque avec lui avec entrain alors que ses iris bleutés se perdent dans les siens. – À tes faux-espoirs ! lui rétorque-t-elle avec amusement. L’un d’eux se trompe, assurément. Mais ils ne sauront pas lesquels, elle espère, pas avant un moment. Le verre qu’elle porte à ses lèvres, l’alcool vient lui brûler la gorge, grisant et électrisant à la fois. Précisément comme l’homme qui se tient à ses côtés.
Et il vient te surprendre, de sa douce nonchalance, le danger s’avance.
Les opales rivées sur lui, elle l’écoute avec une attention non dissimulée. Comme envoûtée. Lonàn, il l’a trop bien cernée. Elle se sent presque coupable, d’aimer autant ce qu’il peut énoncer. Coupable de vouloir lui plaire sans rien lui donner. La princesse se mordille la lèvre inférieure, sans le quitter de son regard captivé, sans remarquer non plus comme il s’est rapproché. C’est vrai, t’aimes ça, Cassey. T’as toujours aimé ça. Déstabiliser les hommes, comme un pouvoir que t’aurais. C’est pourtant toujours toi qui finis le cœur brisé. Sans se rendre compte, instinctivement, elle se rapproche à son tour de lui. De sa voix suave, elle vient lui murmurer, des mots qui seront à sa seule portée. – Peut-être que c’est ce que je veux, te rendre fou. Que tu y prennes goût. La proximité dont il fait preuve vient dangereusement la troubler. D’un geste délicat, presque tendre, il replace l’une de ses mèches de cheveux sans qu’elle ne cherche à se dérober. Un fin sourire apparaît sur ses lippes alors qu’elle a toujours le regard ancré dans le sien, comme un besoin. Ses paroles suivantes, lancées comme une provocation, lui permettent de retrouver contenance. Et, surtout, toute son assurance. Il l’en avait privée, l’espace de quelques secondes. – Oui, je déteste ça. En plus, je ne suis pas un bon coup, tu ne perds rien, crois-moi. lâche-t-elle avec un petit air entendu, comme si elle le mettait gentiment en garde contre elle et ses lacunes. De sa lueur pétillante, après une nouvelle gorgée, elle choisit soudain de se redresser. – Viens, on va danser. Et elle n’attend pas son accord, elle prend sa main pour l’entraîner jusqu’à la piste de danse, pour faire vibrer au son de la musique leurs corps. à défaut d'autre chose.
Le destin a des plans pour chacun A quoi joue-t-il ce petit malin ? A trop s’avancer en terrain miné C’est leurs cœurs qui seront piétinés
Jouer avec les limites, les repousser toujours plus loin pour les outrepasser. Depuis toujours, Lonàn s’y est engagé. A quoi bon vivre sa vie s’il n’y a aucun risque à la clé ? Métro, boulot, dodo, ce n’est pas l’avenir qu’il a imaginé. Bien trop paumé pour s’y retrouver. Ce n’est même pas la peine d’y penser. La vie qu’il mène est bien plus prenante. Plus intéressante. Et permet des rencontres envoûtantes. L’ennui n’est jamais au programme. Ce soir encore ne fait pas exception. Il n’a jamais eu l’intention de tomber sur un visage connu et désiré. Mais puisque le destin en a décidé ainsi, pourquoi se priver ? Cassey représente tout ce qui l’attire. Le sourire mutin. Le regard malin. Cet humour qui lui va si bien et cette audace qui lui sied au teint. Peu habitué à apprendre à connaitre ses conquêtes, c’est un mal pour un bien. En plus d’être attirante, Cassey est amusante et intéressante. C’est fou à quel point ils se ressemblent tous les deux. Les mêmes caractères et au fond, les mêmes blessures qui ne cicatriseront jamais vraiment. La belle blonde a sans doute raison et ne croit pas si bien dire. Ce n’est pas le hasard qui les a réunis mais bel et bien le destin.
Alors vole, petite hirondelle Déploie tes ailes Mais prends garde, car au contraire du ciel Sur terre, les dangers sont bien réels
Pourtant, les risques encourus lui passent bien au dessus. Il se laisse prendre au jeu sans réfléchir une seule seconde aux conséquences de ses actes. Comme d’habitude. Carpe Diem, Lonàn. Profiter de chaque instant comme si c’était le dernier. Savourer sans se soucier de ce que demain pourrait apporter. Il n’a jamais cherché plus loin que le bout de son nez. Ça ne risque pas de changer. Et elle balance le meilleur compliment de la soirée. C’est surprenant, mais plaisant. Il n’a pas l’habitude d’entendre qu’on l’aime bien, Lonàn. Aucun de ses frères n’a jamais été très expressif à ce niveau là. Et son père ? N’en parlons pas. L’affection, ce n’est pas quelque chose qu’il croise très souvent. C’est triste, au fond. N’est-ce pas ça qu’il cherche désespérément auprès de ses proches ? Ce besoin de se sentir important aux yeux de quelqu’un. Vivant. Ce besoin d’être indispensable. Essentiel. Ce lien qu’il s’efforce de maintenir avec la force d’un dément avec son dieu vivant. Si lui donne énormément, en retour il n’en reçoit qu’infiniment peu. Faible consolation qu’il chérit pourtant avec attention. Sourcils qui se rehaussent sous la surprise, il retrouve vite le sourire. « Tu m’aimes bien ? Vraiment ? Fais gaffe, tu vas finir par ne plus pouvoir te passer de moi. » Est-ce une promesse ? Seul l’avenir nous le dira.
L’heure de passer à l’attaque a sonné. Cassey, il l’a bien cernée. Depuis le temps qu’ils se tournent autour, ce serait bête d’être passé à côté. Elle prend un malin plaisir à l’allumer. Retarde l’échéance de manière démesurée. Parce que c’est flatteur de se faire draguer. Peu habitué à trimer, Lonàn, il y prend finalement goût, lui aussi. Même s’il finit à chaque fois frustré. Il espère cette fois-ci, changer la finalité de la soirée. « Pari gagné. » Qu’il lance avant d’effectuer le premier contact. Contact de courte durée qu’il aurait aimé prolonger. Mais il ne faut pas se précipiter. L’aveu qu’elle balance a le don de le faire rire aux éclats. Même avec toute la bonne volonté du monde, elle ne le convaincrait pas. Qui déteste s’envoyer en l’air ? Certainement pas une femme qui n’hésite pas à jouer de ses charmes pour l’allumer tout entier. L’autodérision, en voilà une belle qualité. Pas le genre de réponse à laquelle on s’attend. Tellement surprenant qu’il en a perdu son répondant. Seul son rire est virevoltant. C’est lorsqu’elle l’oblige à danser avec elle et qu’elle le traine sur la piste de danse qu’il retrouve l’usage de la parole. « Toi t’es vraiment pas comme les autres. » Un compliment maladroit ? Pas vraiment. Plutôt une constatation à voix haute. Une manifestation de ses pensées.
Et maintenant, McGrath ? Ce n’est pas ce genre de danse que tu avais escompté Fais preuve d’un minimum de grâce Si tu ne veux pas être ridiculisé
Lonàn est-il un bon danseur ? Tout dépend du point de vue. Il sait bouger son corps, ne manque pas de souplesse. Ce serait le comble pour un boxeur et un sportif comme lui. Même si ses capacités s’en trouvent parfois réduites à cause de ses excès. La danse, c’est comme un combat, non ? Il faut faire preuve d’agilité et de légèreté. Alors danse, Lonàn. Et profite de cette proximité pour te rapprocher. C’est le moment de marquer des points. Même si la danse, c’est clairement un truc de gonzesse. Décidé à ne pas lâcher sa main, il attire Cassey contre lui. Place sa main libre dans le creux de ses reins. Et rapproche son corps du sien. Ainsi l’un contre l’autre, il peut sentir son souffle sur sa peau. Si ça ne tenait qu’à lui, il l’aurait embrassée dans le même mouvement. Mais chaque chose en son temps. En rythme avec la musique, son corps ondule doucement. Ses prunelles, elles, s’accrochent aux siennes paisiblement. L’envie de se pencher pour poser ses lèvres sur les siennes le démange tellement. Et cette chaleur entre ses reins qui ne fait que monter progressivement. Qui l’envahit tout entier et distinctement. Comment résister à cet enchantement ? Tentant de calmer ses ardeurs, sa lèvre inférieure vient se coincer entre ses dents, un signe évident de ce qui se trame dans son subconscient. Elle le rend fou, Cassey, en ce moment. Difficile pour un être aussi impatient que lui de lutter contre ses pulsions comme un dément. Et pourtant, c’est ce qu’il fait présentement. Mais pour combien de temps ?
Il y a ceux qui fuient le danger, puis ceux qui aiment trop le frôler. Qui n’hésitent pas à s’y plonger, la tête la première, les yeux fermés. Cassey, indiscutablement, elle fait partie de la seconde catégorie. De ces femmes qui ont le goût du risque, elle a aussi désespérément un goût pour les mauvais partis. Ces hommes qui lui feront du mal, assurément, mais qui la feront vibrer indéniablement. Elle a besoin de sentir la vie lui échapper, besoin de se sentir comme au bord d’un précipice prête à sauter. Mais, voilà, elle est trop souvent tombée. Le cœur détruit, brisé en mille morceaux, n’a fait que davantage se rompre au fil des années. C’est la première fois qu’elle agit différemment avec un garçon. La première fois que, malgré ses envies, elle s’obstine à dire non.
Le pauvre Lonàn, c’est sûr lui que c’est tombé, peut-être parce qu’il représente, à lui tout seul, ce qui t’a toujours fait craquer.
Un brin d’arrogance, un soupçon de nonchalance. Un trop-plein d’assurance. Mais la légèreté dans le sourire, animé par cette soif de vivre. Il peut la pousser à se noyer dans ses pupilles beaucoup trop envoûtantes, pour l’instant d’après, la faire rire aux éclats. C’est si facile de se laisser attirer, captivée par lui. Ce serait si facile de se perdre avec lui. Comme une sorte de connexion préétablie, les prémisses d’une imprévisible alchimie. Relation qu’ils ne font qu’accentuer, encore et encore, chaque fois que leurs âmes sont à nouveau réunies. Elle a la sensation qu’ils se comprennent bien. Peut-être que tout les oppose, le jour levé. Peut-être que leurs vies sont diamétralement opposées. C’est peut-être même cette hypothèse, entre autres choses, qui lui plaît. Mais ils ont les mêmes tempéraments, les mêmes envies de savourer au maximum chaque instant. Le danger qu’elle touche du bout des doigts, elle ne s’en préoccupe pas. Vient lui confier quelques mots alors qu’elle ne devrait peut-être pas.
Tu vas finir par ne plus pouvoir te passer de moi, il te dit, comme une mise en garde, comme des représailles, comme du danger qui t’assaille,
Mais, toi, tu restes là.
Et l’inconsciente, c’est avec le sourire qu’elle lui répond. La voix chantante, le regard captivé, de celle qui ne se pose pas de question. – C’est si surprenant ? lui demande-t-elle, question rhétorique alors que rapidement, elle enchaîne. – Moi, je sais que tu m’aimes bien. Il y a l’assurance à toute épreuve, que l’on prendrait aisément pour un trop-plein d’arrogance. Juste une forme d’impertinence. Mais c’est vrai, elle sait, Cassey. Elle sait qu’il veut avant tout la mettre dans son lit, elle n’est pas naïve. Mais il s’amuse bien, avec elle, sinon cela fait longtemps qu’il ne s’intéresserait plus à elle. Qu’il aurait trouvé une autre jolie fille à convoiter ici, au lieu de se laisser capturer par la sirène. Puis, comme pour lui rappeler qui tient les rênes, il vient jouer de son magnétisme sur elle. Un doux instant de flottement, elle ne prononce pas une parole. Oublie le monde autour et n’entend même plus la musique, parce que ce sont les mots de Lonàn qui retentissent en écho. Il y a quelque chose de plaisant et déstabilisant à la fois, de se dire qu’il l’a si bien cernée. Qu’il a compris les rouages de son esprit charmé. Mais les aveux du jeune homme, à demi-mi, sont plus déroutants encore. Ils poussent à davantage de rapprochements, ou c’est peut-être elle, qui est trop facile à amadouer. Trop facile à séduire, bien sûr, après l’avoir tant observée.
C’est en frôlant le danger, que tu te sens le mieux exister, mais c’est peut-être à trop t’en approcher, qu’il finira par vous consumer.
Ses mots naturellement échappés parviennent à déclencher ce rire insouciant, presque enfantin, chez son interlocuteur. Comme s’il ne s’y attendait pas, comme si elle le surprenait. Parce qu’elle ne donne pas tout de suite l’impression d’être cette femme dotée d’autodérision, Cassey. Les allures de princesse, la rendraient pour certains très vite superficielle. Mais elle est bien dans sa peau, bien dans ce qu’elle est… Elle est saine, si l’on fait abstraction de son penchant pour les mauvais garçons. Les garçons comme celui-ci, qui à peine l’a-t-il approchée, a su la troubler. C’est lui le premier, qui a réussi à la perturber. Mais elle réalise qu’elle a parfaitement su lui renvoyer la pareille seulement bien après. Seulement en l’entraînant dans cette danse improvisée, alors qu’elle entend, les mots à peine avoués. Non, elle n’est pas comme les autres. Cassey, elle virevolte comme un papillon. Mais comme un chaton en recherche d’affection. Il y a celle qui veut s’amuser, puis celle qui a besoin d’aimer. Il y a celle qui joue les princesses, puis celle qui s’aventure avec hardiesse. Celle qui prône sa liberté, puis celle qui pourrait tout donner. Et quelque chose lui dit, qu’il est exactement comme elle, Lonàn. Qu’il a cette première couche, le visage qu’il laisse entrevoir. Mais, aussi, une autre, qu’elle n’a encore eu la chance que d’entr’apercevoir.
Et c’est à ce moment précis que tu sais que c’est foutu, quand tu cherches à deviner, ce que d’autres ne verraient, tu le sais que t’as perdu, t’es fichue.
Peut-être que, dans quelques temps, elle se dira que c’est à cet instant précis que tout a commencé. La littéraire en elle qui a lu beaucoup trop d’histoires où tout était destiné, où tout était magnifié. Peut-être aussi l’âme rêveuse qui ne peut s’empêcher de tout idéaliser. Mais il y a cette partie d’elle, incontrôlable, qui a cette pensée, l’espace d’une seconde, que c’est maintenant que tout commence. – Tu n’as encore rien vu. lui promet-elle, avec légèreté, avant qu’ils n’arrivent jusqu’à la piste de danse. C’est avec aisance qu’elle entoure son bras contre l’épaule de son partenaire. Lui pose sa main dans le creux chaud de ses reins, l’autre toujours dans la sienne. Et ils commencent à danser, onduler au rythme de la musique. Ils sont si proches, l’un de l’autre, qu’elle peut respirer son odeur. Il suffirait qu’elle s’approche pour sentir les battements de son cœur. Il suffirait qu’elle s’approche pour s’emparer de ses lèvres. Ses deux océans ne savent plus où se poser, entre les deux opales qui ne la quittent pas, ou bien la bouche qui l’appelle à elle. Et la chaleur la submerge. Et le désir s’empare d’elle. Plus encore quand elle voit sa lèvre se glisser entre ses dents, comme le même geste qu’il pense. Comme le geste qu’il retient, alors qu’ils en auraient irrémédiablement besoin. Ils tentent le diable, leurs corps si proches, qu’elle sent son souffle chaud se mêler au sien. Elle sent l’envie, lui faire oublier l’interdit. Plusieurs minutes durant, leurs corps se frôlent, parfois sensuellement, parfois plus impudiquement. Plus les chansons défilent, plus la chaleur l’irradie. Ou c’est peut-être juste cette proximité avec lui. Elle sent le besoin de retrouver un peu d'air frais, ou juste ses esprits. Le sourire mutin sur les lèvres, la jolie blonde approche son visage du sien, comme pour l’embrasser, mais c’est sur son oreille qu’elle choisit de s’arrêter. – Et si on allait prendre l’air ? lui demande-t-elle, sans savoir exactement ce qu’elle est en train de faire. Ou peut-être qu’elle sait exactement ce qu’elle est en train de faire. Les limites qui s’abaissent, plus fragile que d’ordinaire. Juste, l’envie de changer d’air. Se retrouver avec cet homme qui fait vibrer tout son être.
Il est simple, mais tellement complexe à la fois, Lonàn. Un paradoxe à lui tout seul. Un manuscrit difficile à déchiffrer mais pourtant facile à analyser. Avec lui, difficile de savoir sur quel pied danser. Car on ne sait jamais à quelle sauce il va vous dévorer. Mais ce qu’il aime par-dessus tout, l’irlandais, c’est jouer. Pousser le vice toujours plus loin pour titiller. Franchir les barrières l’une après l’autre sans hésiter. Laisser l’âme se libérer. Danser avec les limites pour les tester. Mais au final, il finit toujours par se faire piéger parce qu’il s’est attaché. C’est toujours la même chose avec le camé. A force de constamment jouer avec le feu, il finit irrévocablement par se brûler. Un foutu cercle vicieux qu’il n’est pas prêt de quitter. Parce que Lonàn, il n’apprend pas de ses erreurs passées.
Oh rassure-toi mon garçon Tu n’es pas le seul à te perdre de cette façon Comme deux âmes en perdition Vous souffrirez à l’unisson
Est-ce qu’il l’aime bien, cette sirène qui l’attire malgré elle dans ses filets ? Sans doute, dans le cas contraire, il aurait déjà laissé tomber. Le défi en vaut la chandelle parce qu’au final, il s’intéresse à elle. « Ah oui ? Je te trouve bien sûre de toi. » Qu’il balance, fier, en écho aux précédentes paroles de la demoiselle. Pour autant, il ne peut pas le nier puisqu’elle a raison. Dans le cas contraire, il ne serait pas venu à sa rencontre. Il ne se serait pas installé à côté d’elle et n’aurait pas recommencé son jeu de séduction. Mais l’heure n’est plus à la discussion. Place à l’action. La princesse veut danser alors son prétendant la fera virevolter. Parce qu’il sait y faire, Lonàn. Il sait jouer de ses charmes. Il a parfaitement conscience que son style débraillé plait à pas mal de femmes. Cassey, notamment. Le doute n’est plus permis à présent. Elle ne pourra pas résister éternellement. Il en fait la promesse dès maintenant.
Au milieu de la piste de danse Tu dois saisir ta chance Ne laisse pas l’occasion s’envoler De la faire vibrer
Corps emmêlés, la musique guide leurs pas. En cet instant, plus rien d’autre ne compte que cette nana qu’il tient au creux de ses bras. Son parfum lui chatouille doucement le nez. Il peut sentir son souffle le frôler. Ce contact avec sa peau qui continue de l'envoûter. Et cet air mutin qui ne cesse de l’ensorceler. Ses lèvres sont à proximité. Il n’aurait qu’à légèrement se baisser pour s’en emparer. Ses prunelles bleutées détaillent les traits de son visage avec avidité. S’il s’est quelque peu perdu dans ses yeux, c’est sur sa bouche qu’il finit par s’arrêter. Difficile de ne pas céder à la tentation qui le pousse à davantage s’approcher. Pour enfin la capturer. La chaleur le submerge tout entier. Le désir brûle avec intensité. Les minutes passent pour ne rien arranger. Combien de temps doivent-ils danser ? Combien de temps doit-il résister à cette envie imprenable de l’embrasser ? Il n’a plus besoin de se poser cette question puisque la belle blonde y répond. Elle approche son visage du sien mais au dernier moment, lui fait faux bond. T’y as cru Lonàn, t’es vraiment trop con. Elle lui glisse à l’oreille une toute autre proposition. Pas vraiment celle qu’il a à l’esprit mais il ne va pas dire non. Un peu d’air lui ferait le plus grand bien, histoire de redescendre un peu en pression. « Si tu veux. » Danser, ça va bien cinq minutes, il ne va pas le nier. Il ne compte pas se faire prier pour arrêter. Pour autant, il ne rompt pas le contact et c’est main dans la main qu’il se faufile avec elle parmi la foule des habitués. Se fraye un chemin jusqu’à la sortie et ce n’est qu’à ce moment précis, une fois l’air frais ressenti, qu’il daigne enfin la lâcher.
Jetant un œil aux alentours, il repère un endroit à l’écart où ils ne seront pas dérangés. Un signe de tête dans sa direction pour l’inviter à le suivre et il se dirige vers l’endroit repéré. Une petite pause clope s’impose. Tout en marchant, il récupère une cigarette qu’il coince entre ses lèvres le temps de sortir son briquet pour l’allumer. Arrivé à destination, il colle son dos contre le mur en béton et observe sa partenaire de soirée avec attention. De la tête au pied pour mieux profiter de cette vue d’ensemble. Maintenant qu’il peut la voir dans son intégralité. Ses prunelles parcourent son corps avec une lenteur démesurée. Il ne peut s’empêcher de littéralement la dévorer. « Et maintenant ? » Elle qui souhaitait prendre l’air, que compte-t-elle faire à présent ? « Tu avais trop chaud à l’intérieur ? » La réponse est évidente puisqu’il ressentait la même chose. « Pour quelle raison ? » Fin sourire aux lèvres, il feint l’innocence, quelle ironie quand on le connait réellement. Lonàn n’a strictement rien d’un innocent. Autant dans la vie de tous les jours que dans tout ce qu’il entreprend. Mais ça, il se garde bien de lui avouer promptement. La nicotine court dans ses poumons et des volutes de fumée s’élèvent dans l’air alors qu’il se décolle du mur lentement. « Attends, laisse-moi deviner, j’ai peut-être ma petite idée. » A pas lents, il se rapproche doucement. « Ce coup de chaud, je pense savoir d’où il vient. De ce mec avec toi qui dansait incroyablement bien. » L’exagération à son paroxysme, évidemment. « De ce type super canon à qui tu t’obstines à dire non. » A nouveau proche d’elle, il glisse sa main libre dans le creux de ses reins pour la plaquer contre son bassin. « J’ai raison ? » Et ça, il en est certain.
Jouer pour s’amuser, jouer pour se sentir existé. C’est la même flamme qui les anime, le même incendie qui brûle dans leurs prunelles assombries. Il y a le désir, incontestablement, mais il y a aussi l’envie. L’envie de vivre chaque instant comme s’il était le dernier, comme i aucun autre ne comptait. Comme si le monde entier avait cessé de tourner. Il n’y a plus qu’eux, pour exister. Plus qu’eux, pour savourer la vie qui leur est donnée. C’est parce qu’il est aussi joueur qu’elle, que le courant passe si bien. Car beaucoup auraient abandonné, beaucoup auraient estimé qu’il vaut mieux laisser tomber. Qu’elle n’en vaut pas la peine, la blondinette. Qu’elle ne fera toujours que les allumer, la sirène. Mais Lonàn, il a compris. Il a saisi qu’elle veut faire durer ce jeu le plus longtemps, comme pour mieux en savourer l’issue fatale. Parce que ce sera bien la fin de ce petit manège entre eux quand elle aura craqué. Cassey, elle en est persuadée. Comme si rien ne pouvait être possible, rien d’autre qu’une nuit, une seule nuit, même magique.
Vous ne venez pas du même monde, vous ne partagez peut-être même pas grand-chose,
pourtant, y’a cette voix qui te rappelle, t’aimes beaucoup trop te noyer dans ses prunelles.
L’alchimie évidente de deux âmes ressemblantes. Étrangères mais siamoises, elle a parfois la sensation de retrouver son reflet chez le bellâtre. Comme quand il se met à la provoquer, la taquiner pour mieux la charmer. Comme il s’amuse à danser, aussi près d’elle, pour mieux la tester. Pour mieux approcher ces limites qu’elle se borne encore avec tant de mal à établir. La chaleur engendrée, la soudaine proximité, lui fait perdre doucement pied. C’est le trouble qui la submerge alors qu’elle se laisse enivrer, victime consentante, de l’emprise exercée. Ce serait si facile de céder, là tout de suite, elle n’aurait qu’à fermer les yeux et suivre ses envies. Son corps emmêlé au sien, dans une danse qui paraît sans fin. Elle pourrait s’y perdre, Cassey, elle pourrait s’y brûler.
C’est dans un élan de survie que tu proposes de t’échapper, un élan autodestructeur de le laisser t’entraîner.
Ce n’est pas en acceptant de suivre celui qui l’a tant troublée qu’elle risque de retrouver la réalité. Elle devrait reprendre ses esprits, laisser les battements de son cœur se calmer. Mais, à la place, elle se laisse attirer par le beau blond jusqu’à l’extérieur du bar. Sa main dans la sienne, contact indispensable, comme s’ils ne voulait pas se perdre. Comme s’il n’était pas question de se perdre. Et la sensation en elle, un peu effrayante, de faire quelque chose qu’elle ne devrait pas faire. Quelque chose d’interdit. Mais c’est bien connu chez Cassey. L’interdit, il ne la fait pas fuir. Il ne la pousse que davantage vers lui. Il la séduit autant qu’il l’hypnotise. Lonàn, à cet instant, il est sa plus belle représentation de l’interdit tant redouté, mais toujours moins qu’il n’est désiré.
Et tu te retrouves seule avec lui,
pas la première fois, mais tu ressens quelque chose de différent ce soir, tu ressens davantage ce soir.
Le frisson, la convoitise. Les limites dépassées petit à petit. Car elle a envie de s’amuser, envie d’oublier tout ce qui peut l’accaparer. Tout ce qui l’a, ces derniers temps, beaucoup trop submergée. Elle a envie de se sentir exister, avec une âme dotée de la même soif de vivre. Dans ce coin à l’écart, la princesse se laisse entraîner sans l’ombre d’une inquiétude. Parce qu’il doit avoir l’habitude, son acolyte de la soirée ne paraît pas lui en vouloir, pour avoir occasionné ce faux-espoir. La cigarette qu’il allume sous les pupilles bleutées de l’objet de ses convoitises, il l’allume avant de lui demander, pourquoi elle a voulu partir. Il le sait, le malin, il le sait déjà, parce qu’il devait être comme elle. C’est un sourire malicieux qui la submerge, alors qu’elle le contemple toujours de cet air mutin. L’air frais ne lui fera pas de bien. Il ne suffira pas, s’il continue de la fixer avec ce regard, les prunelles qui la dévorent, de haut en bas.
Consumée par ses yeux, il fait naître en toi ce feu,
tu n’y échapperas pas, Cassey.
Elle le sait, rien qu’à ce regard, qui vient le murmurer. Sans un mot, il arrive à le crier. Et quand il ouvre la bouche, c’est pour mieux le confirmer. Elle le voit approcher lentement, dangereusement. Elle pourrait reculer, elle ne bouge pas d’un millimètre, comme envoûtée. – Ah oui, et dis-moi, d’après toi, pourquoi j’avais si chaud ? Tu tentes le diable, Cassey, tu t’y brûleras. Il vous aura. Elle n’écoute pas la voix dans sa tête, elle ne l’a jamais écoutée. Celle du charmeur est beaucoup trop forte, elle n’entend plus qu’elle. Comme elle ne voit plus que lui. Il se rapproche, toujours un peu plus, avant de lui dire enfin le fond de sa pensée. C’est lui, il le sait. Pas le temps de réagir, de sa main contre ses reins, il l’attire. Il la plaque contre lui, si vite, qu’elle ne s’y attend pas. Elle ne croise pas tout de suite son regard, son visage frôle d’abord le cou de Lonàn. Son parfum l’enivre en un instant, comme hypnotisant. Elle respire sa peau instantanément, avant de reculer doucement sa tête pour le contempler. Son océan se retrouve noyé dans le sien, son souffle se mêle au sien. Elle se mordille la lèvre alors qu’elle sent la situation lui échapper. Le désir la submerger. – Tu as raison. susurre-t-elle, surprise elle-même. De cet aveu pas prémédité, comme si elle avait oublié de jouer.
Difficile, avec une telle proximité, difficile, dans une telle intensité, une telle avidité, de ce désir si souvent refoulé.
Sa main vient frôler sa peau, sa joue qu’elle caresse presque dans un effleurement. Comme si elle n’osait pas, comme si elle croyait encore, avoir la force de dire non. – Et si c’était la fin de notre petit jeu… il ne te manquerait pas, un tout petit peu… ? Cette fois, déjà, elle ne joue plus. Le sens de la séduction disparu. Parce qu’elle sent déjà qu’à la seconde où ils franchiront cette limite, le jeu sera fini. Tout sera fini. Et peut-être juste que, Cassey, elle n’en a pas envie.