dead or alive. (andréa)

missed call from andréa.
missed call from andréa.
text from andréa
Décroche.
missed call from andréa.
missed call from andréa.
missed call from andréa.
missed call from andréa.
Vingt minutes plus tard.
text from andrea.
J’suis en bas et j’sais que t’es là.

Affalé en boxer dans son canapé, il regarde son téléphone en soupirant Sartier. Le compte à rebours est lancé. Deux minutes, c’est ce qu’il lui reste avant qu’elle ne frappe à la porte. Trois, si elle s’arrête en chemin pour échanger quelques politesses avec le portier. Deux jours qu’il ne répondait plus au harcèlement de sa sœur. C’est qu’il avait osé se barrer à l’autre bout du monde sans la tenir qu courant, qu’en plus de ça, il avait fait le mort pendant toute sa semaine avec Lilith. Préférant sa compagnie à elle, plutôt que celle de son téléphone. Et ça, Andréa, elle ne l’avait pas supporté. Si peu habituée à ne pas être le centre de son attention. Ils étaient nés à trois, avaient grandi à trois et fonctionnait comme un engrenage bien huilé jusqu’au début de leurs vies d’adultes. Aujourd’hui, les choses évoluaient. Personne n’aimait ça.
Lui le premier.
Il n’avait pas supporté les fiançailles de sa sœur. N’avait pas supporter qu’un autre homme rentre dans sa vie aussi rapidement. Ca le rendait malade, lui filait la nausée rien que d’en parler. Alors, inconsciemment, il s’était vengé en devenant distant. Se faisant du mal à lui-même en s’efforçant à rester éloigné. Il ne lui disait plus tout, ou pour dire vrai, ne lui confiait presque plus rien. Gardant tout enfermer à double tour au fond de lui, ne faisant confiance qu’à leur frère -même s’il se doutait que Timothée répétait tout à leur sœur chérie. Il y avait un grain de sable dans l’engrenage, qui abimé le mécanisme et les rendait plus brutes qu’ils ne l’avaient jamais été.
Trois minutes.
Elle frappa à la porte.
Il soupire de plus belle Ismaël, se redressant avec peine, se trainant jusqu’à l’entrée pour ouvrir grand la porte. Le regard méfiant, les sourcils froncés et une envie extrême de lui claquer la porte au nez. Quand il regardait Andréa, il avait la sensation d’être face à un miroir le déformant en femme. Elle était lui et il était elle. Deux corps pour trois personnes. Il sentait leurs poids sur ses épaules en permanence, les triplets maudits.
tu m’fais chier, tu le sais ça.
Il faisait demi-tour, lui tournant le dos pour regagner le salon. Une clope, un verre. C’est ce don il avait besoin quand elle était dans les parages. De quoi garder son calme, de quoi endormir ses neurones. Il se conterai de la cigarette pour le moment, l’allumant et reposant ses iris clairs sur elle.
si je réponds pas, c’est que soit, j’ai pas envie de te parler, là tout de suite. Soit que j’suis occupé, comme tu peux le voir.
Il souriait en coin.
Ouvrant ses bras nus pour lui montrer tout ce dans quoi elle le coupait. Un bon film, une bonne sieste. Elle avait toujours eu plus de classe qu’eux. C’était indéniable. Il aurait pu faire l’effort d’enfiler un pantalon et un t-shirt, mais en bon Sartier qui se respecte, il ne faisait que ce qu’il avait envie de faire.
qu’est-ce que tu veux ? richard est trop occupé c’est ça ?
Richard, Ian, c’était la même chose à ses yeux. Une vermine.

- tu m’fais chier, tu le sais ça.
parfois, il est des choses sur lesquelles les sartier s'accordent. la principale étant toujours le zèle dont ils font preuve pour s'empoisonner l'existence. andréa balaya sa remarque d'un arrogant revers de la main. le faire chier, dieu seul sait ce qu'elle s'en fiche. au contraire, c'est même la cerise sur le gâteau de sa fureur. les talons de la blonde claquent alors qu'elle traverse un fin nuage de fumée, laissé à la traine par son frère. encore une habitude qu'elle rebute, petits tubes de cancer.
- si je réponds pas, c’est que soit, j’ai pas envie de te parler, là tout de suite. soit que j’suis occupé, comme tu peux le voir.
- occupé, oui. relève-t-elle. rire jaune. occupé à être un imbécile, je suppose. les mots filent comme si elle ne s'attendait à rien d'autre, rien de mieux venant d'ismaël.
ses bras écartés, la clope au bec, andréa digère mal l'affront, à peine dissimulé. plus que ça, il agite le drapeau de sa rébellion sous le nez de sa benjamine. alors, les yeux se plissent, et, l'ouragan qu'elle retient ne demande plus qu'à gronder. son coeur chante les intempéries, mais ses lèvres tempèrent. soupirer, et subtiliser la cigarette puisque ses mains tendues ne font que la narguer. elle laisse ensuite tomber la clope dans une coupe de champagne, vieille d'au moins la veille. et, instinctivement, andréa sait. elle connait les nuances des yeux clairs de son frère. elle le devine toujours avant qu'il ne perde patience. elle sait les frontières de sa toute fragile tranquillité. sourire de chat.
- qu’est-ce que tu veux ? richard est trop occupé c’est ça ?
- n'essaie pas de faire de l'esprit. tu as toujours été très mauvais pour réfléchir seul..
ce que sous-entend l'héritière, c'est qu'il aura besoin d'elle pour toute une vie. parce qu'il n'a pas le choix, et elle non plus. parce qu'elle ne veut surtout pas le lui laisser. si il est la folie et la force, elle est l'esprit et la prose. les deux pièces maitresses d'une machine infernale. alors elle avance, elle approche doucement et elle juge: le traitre qui lui sera toujours loyal, le déserteur qui ne pourra jamais s'échapper. c'est parfois une promesse, souvent une menace.
- ..c'est une évidence. sinon pourquoi partir en vacances à l'autre bout du monde, avec une prostituée?
mais, mettre des mots, c'est perdre pied. comme si son incartade prenait forme réelle à cet instant, faisant danser des flammes de jalousie jusqu'aux tréfonds des yeux d'andréa. depuis quand une fille facile suffit-elle à la remplacer? pourquoi le silence et les mensonges défendraient-ils une croqueuse de diamants? -ce qu'elle est forcément.
- ouvrir ta porte à une arriviste en petite culotte n'était pas suffisant? il t'en fallait une autre, une sale jusqu'à l'os pour te sentir mieux, hm? j'espère que tu fais au moins attention à ne pas engrosser ton nouvel animal de compagnie. le serpent crache, l'animal attaque parce qu'il est blessé. mais, plutôt qu'avouer sa chair meurtrie, elle veut faire plier le frère-ennemi.

Andréa sa douce folie.
Il n’est plus un homme sous le regard de sa sœur. Juste un enfant qui quémanderait de l’attention. C’est comme ça qu’ils ont toujours été. Des êtres en perpétuel manque de reconnaissance les uns des autres. C’est leur fardeau, celui d’être venu au monde par trois et non par paire. S’il disparaissait pendant des semaines, ce n’était que pour la voir revenir à la charge. Qu’elle lui montre, d’une manière ou d’une autre l’amour qu’elle lui portait -qui ne serait jamais suffisant. Sa sœur, il l’avait toujours mis sur un piédestal bancal, duquel il était le seul à pouvoir la faire chuter d’un coup de pied mal placé. Sa sœur, il l’aimait d’un amour si puissant qu’il avait fini cinq années en prison. Sa sœur, était le plus doux des poisons.
Ce soir, pourtant, il ne voulait pas d’elle.
Il grimace quand elle s’empare de la cigarette, fronce encore plus les sourcils lorsqu’elle la jette dans le bourbon à peine entamé. Une manière qu’elle avait, d’asseoir son autorité. Il la regarde en serrant les dents, encaisses ses mots sans ouvrir la bouche. Les poings déjà serrés, ses ongles laissant leurs marques au creux de ses paumes. ..c'est une évidence. sinon pourquoi partir en vacances à l'autre bout du monde, avec une prostituée? il sourit en coin à présent, voit la lueur au fond de ses yeux, la même qui danse au fond des siens quand il se sent délaissé. Ils n’ont pas besoin de parler pour comprendre leurs maux muets. ouvrir ta porte à une arriviste en petite culotte n'était pas suffisant? il t'en fallait une autre, une sale jusqu'à l'os pour te sentir mieux, hm? j'espère que tu fais au moins attention à ne pas engrosser ton nouvel animal de compagnie. il lève les yeux au ciel Ismaël, contourne la blonde pour retrouver place sur le canapé et se rallumer une clope sans la lâcher du regard.
tu m’espionnes ? c’est ce que t’es en train de me dire là, on est d’accord ?
Il arque un sourcil. La sait capable d’une telle intrusion dans sa vie privée -qui ne l’est jamais réellement. Elle n’aimait déjà pas Cami, qui avait pris place depuis trop d’années à son goût et maintenant, c’était Lilith qui allait voir les foudres d’Andréa s’abattre sur elle. La colère ne tarderait pas à monter, mais il désirait la laisser grimper lentement jusqu’à son point culminant.
tu te sens obligée d’être au courant de mes moindres faits et gestes à la minute près ? tu peux pas m’laisser respirer une bonne fois pour toute.
Il soupirait avec exagération, parce qu’il voulait la voir perdre le nord, elle aussi. Qu’elle sorte des limites de cette carapaces qu’elle s’était forgée. Andréa, la princesse aux allures de première Dame. Ismaël, il n’aimait qu’elle soit trop lisse la dernière des triplets. Il titillait en permanence son côté le plus sombre, comme elle savait si bien le faire avec ses propres démons à lui.
qu’est-ce qu’on en a à foutre des filles que je fréquente sérieusement, c’est pas moi qui suit voué à un grand avenir au sein de cette famille. tout le monde sait que pour moi c’est fini depuis que j’ai mi un pied en prison. c’est toi, l’avenir de l’empire. alors arrête. qu’elle soit escort, strip teaseuse, ou qu’importe, ça ne changera rien à ton ascension vers le trône Andréa. l’air beaucoup trop sérieux tout à coup, il continue, alors si t’es venue seulement pour ça, je t’en prie, tu peux repartir. tu connais le chemin. d’un geste de la main il lui indiquait la porte.