Un joli pot de fleurs mauves sur la table vient compléter la flore très présente dans ce salon de thé. J'aime cette ambiance de jungle bucolique, le choix de thés et de cafés, mais aussi de pâtisseries maisons. Dans ce lieu un peu magique, on peut même acheter des plantes. La musique est aussi paisible que le lieu, sans pour autant tomber dans le thème d’ascenseur.
Je suis en avance, par le hasard des choses, d'une journée au programme peu ficelé. Je l'attends tranquillement, sans rien avoir commandé, simplement ravie d'admirer ce lieu et d'en percer les mystères, de noter ce qui a changé depuis la dernière fois. Archie... Cela fait si longtemps. Malgré les quelques échanges par téléphone ou par messagerie depuis que nous avons renoué contact... Qu'il a renoué contact. Je suis un peu inquiète, angoissée de ce que les affres du temps ont fait de notre relation, de notre amitié. Ce n'est jamais facile de revoir quelqu'un après tant d'années, je n'aime pas les silences gênants, l'absence de conversation. Surtout quand la dernière fois que tu l'as vu, il t'a fait une déclaration d'amour que tu n'as pas accepté. Je me suis souvent demandée quelle vie nous aurions eu si je l'avais choisi lui, j'y repensais dans les moments où ça n'allait pas, jamais dans les moments où tout allait bien. Ce ne sont pas des regrets, mais parfois je me demande juste si un autre instant aurait pu jouer en sa faveur, ou s'il devait en être ainsi. Ces questions sont futiles maintenant, une histoire si vieille qu'elle ne compte plus. Je crois. Je caresse les pétales du bout des doigts en souriant, songeuse. A l'idée de le revoir, c'est la joie qui l'emporte sur le reste, bien évidemment. Je veux tout savoir de sa vie. Je chérie son amitié.
Derrière les fleurs, il apparait, presque inchangé à part quelques cheveux en moins. Je me lève pour l'accueillir, hésitante sur la façon de faire. J'ai envie de le prendre dans mes bras pour toutes ces années d'absence, la réserve l'emporte. Je lui souris chaleureusement.
Sujet: Re: Les iris bleues [Archie & Maxine] Lun 21 Oct - 1:41
◈ ◈ on ne sait rien de ces urgences, qui nous font perdre la cadence, qui font les rêves difficiles.
C’est une drôle de chose, le temps. Il se moque de tout, ne suit aucune règle, s’étirant parfois à l’infini, langueur mortelle, ou bien filant entre les doigts, farce cruelle. Il va y avoir combien? Au moins 10 ans qu’ils ne se sont pas revus? Du moins qu’ils n’ont pas pris le temps de se parler, depuis cette déclaration faite, l’ultimatum posé, sans en être un complètement. Le choix qu’il lui avait demandé de faire. Elle l’avait fait. Pas en sa faveur, mais il avait eu sa réponse et avait promis de respecter sa décision. Il était parti, une fois de plus, avait mis les voiles vers ces contrées lointaines, oubliées du progrès médical et s’y était jeté à corps perdu. Par passion, mais aussi pour oublier. Le retour, pas totalement à la case départ, ou peut-être que si? Non. Il n’est plus le même homme, et elle n’est indubitablement plus la même femme. La vie a poursuivi son cours, elle les a changés, forgés. Chacun a eu ses croix à porter, mais ils sont toujours là, toujours l’ombre dans la vie de l’autre, sous la forme d’un souvenir, d’un doute, d’un regret? L’incertitude. Et s’ils avaient construit leur vie ensemble, où en seraient-ils aujourd’hui? Les questions ont dansé dans son esprit, comme les notes tenaces d’une mélodie dont on se souvient sans même s’en rendre compte. Il regarde l’heure à sa montre et range sa blouse dans son casier avant de sortir de l’hôpital en sifflotant. Un petit quart d’heure plus tard, il pousse la porte de ce salon de thé où ils s’étaient donné rendez-vous. L’endroit est agréable et invite au calme, il est baigné de lumière et une musique discrète donne cette ambiance presque un peu familiale. Il la repère rapidement, assise à une table, jouant avec les pétales de ces fleurs pervenche. Lorsqu’il arrive à sa hauteur, elle s’est levée et son regard est de nouveau habité de cette lueur qu’il avait aimée. Son sourire est chaleureux, mais la réserve l’empêche de se montrer plus effusive et il reproduit son accueil poli, déposant un simple baiser, un effleurement sur sa joue. Elle n’a pas tellement changé, il y a juste cette gravité dans le fond de son regard, la tristesse infinie qui ne s’en va jamais. - Plaisir partagé. Tu es toujours aussi resplendissante, envers et contre tout. Il se débarrasse de sa veste et de son écharpe pour s’installer en face d’elle.
Sujet: Re: Les iris bleues [Archie & Maxine] Mer 23 Oct - 19:27
Je lui souris, un grand sourire, beau et sincère, jusqu'aux zygomatiques. Même s'il y a toujours ce contraste avec mes iris d'un bleu glacial et triste. Ces yeux qui ne sont jamais joueurs, comme si je menaçais de tomber en larmes à chaque instant. Pourtant je me sens forte, j'ai si peu pleuré et enduré bien assez. Rieurs, ils le seraient presque aujourd'hui, face à ce mirage du passé qui ne traine avec lui que de jolis souvenirs. Jeunesse New-yorkaise, une belle amitié qui ne lui a pas suffit, un petit groupe d'amis pour affronter les études et découvrir la vie. C'était simple, mais c'était bien. Et puis il est parti, à cause de moi, et le petit groupe n'a plus vraiment été. Ou différemment.
- Merci... Toi aussi, tu es toujours si charmant... Je sens mes joues rougir, un peu bêtement. Mes mots sont sincères, je les sens pourtant douloureux, en écho à une plaie qui est restée ouverte. Je peux me tromper. Je le trouve beau, peut-être encore plus qu'avant même s'il n'est pas bien différent. Les rides rendent beaux. Et c'est sans doute parce que derrière les rétines, celle qui dit ça a vieilli. Et je me demande, comme si ça avait de l'importance, si ma vision du monde a plus changé que lui, physiquement, pendant toutes ces années. La réponse devrait pourtant être facile à trouver tant ce que je vois est couchée sur le papier jour après jour. Je n'ai qu'à regarder mes toiles, mon coup de poignet et en discerner les évolutions. Tout est inscrit.
Derrière ces compliments, immanquablement, je me demande si le désir qui existait jadis est encore là. C'est idiot. C'est si idiot. Pourtant cela me préoccupe... Parce que je voudrais que ce soit le cas, sans qu'il ne soit question de rien d'autre. Me dire que le temps n'a pas changé ça, que les mots doux d'hier seront ceux de demain, et les gestes tendres sauront à nouveau exister. Alors que je ne saurais même pas dire si je saurais y répondre. Alors que je ne voudrais pas lui briser le cœur, encore. Égoïstement et parce que j'ai besoin de sa lumière. Ma raison espère qu'il n'est pas revenu à New-York juste pour moi. Je souhaite que ce ne soit pas un mauvais coup du destin alors que j'ai enfin ré-ouvert mon cœur à d'autres perspectives. Je dois bien admettre que les astres s'alignent étrangement avec son retour et j'ose voir des signes là où ce n'est peut-être qu'un simple hasard.
- Alors, ton petit colocataire ? Tu as bien des photos non ? Est-ce que tes tapisseries survivent ? Je veux tout savoir.
Pourquoi pas après tout renouer sur des choses si basiques, comme s'il ne s'était pas passé une décennie depuis notre dernière entrevue et que son chat est la seule nouveauté qu'il aurait à me raconter. Même si je veux tout savoir sur tout. J'ai le temps, tellement, presque trop. Toute la soirée, toute la nuit, toute la vie même. Il n'y a personne qui m'attende, c'est bien ça aussi la douleur infinie qui transperce mon regard. Une solitude immense. Une absence de responsabilités.