like ghosts in the night (callum)

l'alarme résonne dans la boite crânienne, signe d'une urgence vitale. une urgence que rien ne peut combler aussi rapidement qu'une dose de son héroïne. le matin ne va pas tarder à se lever, une nouvelle journée pointe le bout de son nez, pourtant les mains tremblent déjà. elle a voulu jouer à la fille forte, celle qui est capable de passer au-delà de son addiction les yeux fermés. grave erreur, les premières heures ont été faciles, mais c'est seulement grâce au sommeil. la panique a vite cédé sa place à la tension, la même qui raidit ses petits muscles de fille qui se croit trop grande. les doigts nerveux pianotent sur le clavier de son téléphone pour envoyer un message à la seule personne capable de l'aider dans cette crise à venir. elle se jette directement dans la gueule de l'animal, à corps et à coeur perdus. la réponse n'a que peu d'importance, la brune sait parfaitement qu'il sera au rendez-vous, de gré ou de force. elle prend tout juste le temps d'enfiler un t-shirt trop grand, souvenir d'une conquête passée sur son short en jean. la tignasse est encore en bataille, victime de la nuit trop agitée, la main qui passe dedans n'arrange pas son état, mais elle s'en fiche bien will. rien ne compte à cet instant, seulement son but ultime, sa dose tant aimée. ses pieds s'aventurent dans la ville à la recherche du point de rendez-vous habituel, les lumières et l'ambiance conviviale laisse vite sa place à l'autre facette de queens, les pavés aussi sales que les regards qui trainent en silence. les sifflements des chiens passent au-dessus de will, c'est son être tout entier qui est concentré pour arriver plus vite à destination. agneau au milieu des loups, proie facile pour n'importe quel pervers un peu fou. ce n'est pas ces loups qui l'intéressent, elle est venue pour en voir un tout particulièrement, le seul capable de la briser en milles morceaux s'il veut. une dose d'arsenic en permanence dans ses veines. le recoin sombre apparait enfin sous son regard acier, la faible lueur de la nuit éclaire l'endroit, juste assez pour distinguer une silhouette qui n'arrive pas. elle perd patience la brune, tigresse en cage qui attend sa ration journalière. la cancéreuse à ses lèvres n'atténue pas ce manque qui lui serre les tripes, mais au moins elle a un peu moins envie de se jeter à la gorge du premier passant innocent. une minute, deux minutes, dix minutes. un nouveau message incendiaire a le temps de partir avant l'arrivée du dealeur. enfin. ça ne décontracte en rien la mâchoire de will qui attaque les hostilités sans attendre qu'il arrive à sa hauteur. « j'te paye pas pour arriver en retard. » les yeux roulent dans ses orbites. elle ne l'avouera certainement jamais, mais elle ne méprise pas sa présence autant que ce qu'elle peut prétendre. « t'as ce que je t'ai demandé au moins ? » l'urgence est vitale, le contrôle sur son propre corps s'affaiblit au fil des minutes qui passent. elle se débrouillera pour le payer plus tard, l'argent peut bien attendre qu'elle s'injecte le produit vendeur de rêve, celui qui la fait se sentir un peu plus vivante.

Loup, garou par certains aspects, Callum foule d’ores et déjà les pavés des rues. Il s’est couché tôt, abattu par l’absurdité du monde auquel il appartient, et s’est levé tôt. Il aurait bien pris une grande bouffée d’air frais pendant qu’il peut encore, mais tout autour de lui est déjà lourd. En ce moment, il a la tête ailleurs. Il a envie de tout envoyer valser, Callum. De prendre un billet d’avion pour l’autre bout du monde, mais il ne peut pas. Il est condamné à rester là où il est né.

Pour alléger le poids qui pèse sur son cœur, il allume une cigarette et recrache sa fumée vers le ciel, le soleil se lève après lui. Il est seul au milieu des rues à se demander à quoi rime sa vie. Quand il pense comme ça, ça n’annonce jamais rien de bon. Il a besoin d’autre chose, il a besoin de faire et de songer à autre chose. Et c’est à ce moment-là que son jouet préféré se décide à être en manque. De lui ou de ce qu’il vend ? Il espère que c’est un peu des deux. Voilà que la solution s’apporte elle-même sur un plateau d’argent. Will. Il a envie d’être sa malédiction et de s’abattre sur elle. Elle a intérêt de vivre, la camée, parce qu’il ne va pas la rater. Bijou précieux qu’il veut posséder et torturer entre ses mains. Il ne se presse pas, non, pas question qu’il réponde. Il va la faire attendre, Will. Pourvu qu’elle soit d’une colère noire.

A son rythme, il parcourt chaque kilomètre jusqu’à leur point de rendez-vous. Il a vu le recoin sacré, mais il ne se hâte pas. Prédateur qui tourmente sa proie. Avec ses clients, Callum est maître du jeu. Il contrôle. C’est qu’il aime ça, avoir le pouvoir sur d’autres âmes que la sienne. Quand il s’agit de Will, il jouit d’une position de bourreau. Il arrive à sa hauteur et ses yeux sont prêts à le fusiller. Il l’a fait attendre, mais il s’en fiche, Call. Il faut qu’elle paie de sa personne. « Ferme-là, Will. J’ai pas que ton putain de manque à assouvir ». Il s’approche et sort la marchandise pour la faire glisser entre ses doigts comme s’il tentait d’attirer une bête sauvage. « Je tiens toujours mes promesses. » dit-il avec un sourire satisfaisait. Le bruissement du papier a réveillé l’animal, il a les yeux brillants. « Et toi, t’as de quoi me payer ? ». Ce ne sera jamais assez. La dette qu’elle lui doit ne se limite pas à ses produits illicites. Qu’importe la somme qu’elle peut avancer, il en voudra plus. Joli poupée va devoir s’aligner.

il est loin d'être le seul dealeur de la ville, dès que les rues s'assombrissent un vendeur de rêve se planque dans un coin. il n'est pas forcement le meilleur, encore moins le plus arrangeant. pourtant elle retombe volontairement dans son piège plusieurs fois par semaine, dès que le moindre petit manque vient contrarier sa journée. c'est un mal qui fait du bien, une planche de braise sur lequel elle avance volontiers. le même manège se répète chaque nuit, will cède en premier pour envoyer un message dans la plus grande des urgences avant d'attendre pendant plusieurs heures, emprisonnée avec son corps et ses propres démons qui en profitent pour débarquer au grand galop. ce soir encore une fois tout est pareil, il la laisse pourrir là pendant qu'elle se tortille sous la douleur du manque, même son palpitant fatigué hurle à la mort. elle rêve d'une dose, n'importe quelle drogue fera l'affaire, une bouteille d'alcool en entier s'il faut. n'importe quoi pour oublier. elle force pourtant ses jambes à rester debout, l'apparence reste fière, hors de question de se montrer si vulnérable quand il sera décidé à débarquer. les pas résonnent enfin jusqu'à ce qu'il se présente sous ses yeux avec toute son insolence, will est elle est la première à sortir les crocs, irritée par une attente qui lui a semblé interminable. encore une fois ils vont se déchirer, tenter de se briser un peu plus à chaque fois pour oublier qu'ils sont seuls. il ne tarde pas à rétorquer le loup, agressif, obscur, fidèle à lui-même. ça ne suffit pas à faire baisser les yeux de la brune, trop enragée en voyant qu'il s'amuse avec sa came comme un vulgaire bout de viande face à un fauve attaché. « file-moi ça putain, t'auras ton fric plus tard. » elle se débat comme elle peut avec ses forces trop maigres, tambourine le torse avec ses petits poings comme si ça allait changer quelque chose. comme s'il allait céder si facilement. « t'es qu'un enfoiré call' » et tant pis si sa voix réveille les habitants de la rue morte en apparence, il faut qu'elle extériorise cette colère avant d'imploser. elle se résigne à calmer ses poings devenus douloureux mais inutiles, relance le duel qui se joue entre deux regards aussi sombres que la nuit. « tu l'as tout le temps ton fric, t'es pas foutu de me dépanner une fois ? » il y a les yeux qui lancent un défi, le corps qui se rapproche sans même s'en apercevoir. sa came elle en a besoin plus que tout, tant pis si elle doit faire des sacrifices pour parvenir à ses fins.

leur relation ressemble à un train qui file à toute vitesse, le mur comme destination. c'est un éternel jeu, une lubie dangereuse qui ne date pas d'hier. le combat entre deux fiertés mal placées, deux caractères de feu qui peuvent bien provoquer un feu ravageur à force de faire des étincelles. c'est à celui qui aura le mot final, celui qui fera craquer l'autre en premier. c'est malsain à en mourir, pourtant ce n'est pas une option entre eux. will se persuade qu'elle ne fait ça que pour le plaisir de le contredire, de le rendre un peu plus fou à chaque fois. ce n'est pas parce qu'elle apprécie sa présence virile, sûrement pas. elle se le répète en boucle pour s'en persuader. même si les regards percutants ne se lâchent pas, que les langues crachent toute la haine retenue depuis trop longtemps. même si elle peut jurer que son coeur a loupé un battement en sentant les doigts du dealeur se refermer sa gorge, provoquant une décharge électrique dans tout son corps. elle ne se démonte pas pour autant, gamine effrontée. il n'est pas question qu'il lise une quelconque faiblesse en elle, celle du manque est déjà bien trop à nu. elle a bien vu le regard de callum sur la ruelle avant qu'il fonde sur elle comme un fauve sur sa proie. son dos vient percuter le mur humide, la brune profite de cette proximité pour afficher un sourire sadique sur ses lèvres fines, bien vite effacé par la main du loup qui vient se coller à ces dernières. ce soir ce n'est pas elle qui pliera en premier, elle l'a déjà bien trop fait. ses yeux roulent dans leur orbite quand elle observe le prédateur détailler son corps captif juste avant de remettre une distance entre eux. enfin le sourire peut revenir à sa place initiale, les mots ne tardent pas à suivre. « qu'est-ce qu'il se passe thunder ? t'as peur pour ton cul de dealeur ? » le jeu commence réellement quand les menaces fusent. il ne connait que trop bien son point faible, il sait qu'elle ne le laissera pas partir avant d'avoir eu la dose tant attendue. la balle est de retour au centre, à son tour de jouer. elle revient briser le peu de distance entre leurs corps, les pupilles fermement plantée dans celles du dealeur. il la rend totalement dingue, il l'obsède autant qu'il l'énerve. pour le moment c'est la colère qui prend le dessus quand sa main vient empoigner l'entrejambe de l'intéressé sans aucune forme de douceur. juste du défi à l'état pur, elle ne sait que trop bien le fonctionnement des hommes, pourquoi ne pas en profiter. will incline légèrement son visage sur le côté, un sourcil haussé en attendant une réaction. inconsciente. « j'ai plus envie de jouer, file moi ma dose et j'me casse. » bien sûr qu'elle a envie de jouer, de se perdre dans cette rage intérieure qui les pousse à vivre toujours plus fort. la partie est loin d'être terminée pour autant, il a trop de caractère pour se laisser faire de la sorte. c'est ce qui la rend toujours un peu plus folle.