underpressure (pippa)

assis au fond du fauteuil en cuir, une main serrée autour du verre de whisky, l'autre qui tient la cigarette du bout des doigts, je contemple mon empire comme le roi perché sur son trône, du coin du bar, le coin où l'on peut voir tout le monde, et où personne ne peut nous voir sans vouloir vraiment y regarder. j'observe tout, finement, sans pourtant en avoir vraiment la tête à ça. je suis loin, bien loin d'ici, à des années lumière de comprendre ce qu'il se passe quand je vois leo flanqué debout, à mes côtés, se raidir légèrement, presque imperceptiblement, tout à coup, en l'espace d'un dixième de secondes.
j'comprends rien, et connement, j'me dis qu'il peut bien gérer.
j'me mets pas à l'affut plus que ça. leo, il est toujours sur le qui-vive, tout le temps. c'est pas un défaut en soi, ça m'a sauvé la vie bien des fois. mais ça me permet aussi de me détendre, de ne pas me soucier de ce qu'il se passe autour, parfois, de me dire que si c'était grave, il me préviendrait, et puis c'est tout.
alors non, j'me doute de rien, j'vois rien. j'vois rien, jusqu'à la chevelure de feu qui envahit mon champ de vision. ces cheveux longs qui descendent en cascade sur ces épaules tatouées. ces caractéristiques précises que je reconnaitrais entre mille. tout ce que j'ai touché, senti, aimé avoir entre mes bras pendant si longtemps.
tout ce que j'ai éloigné de moi, pendant si longtemps.
pippa.
pippa la belle, bien trop belle fleur pour ne pas la remarquer parmi toutes ces têtes fades, insipides. la délicate et sauvage à la fois. celle qui mérite beaucoup trop de bonnes choses pour se permettre de la briser, de risquer de lui arracher quelques pétales, même un seul.
pippa, celle qui pourrait de nouveau faire battre mon cœur, s'il se laissait faire, qui pourrait faire fondre la pierre, briser la glace. celle qui pourrait même m'en donner un, de cœur, s'il était venu à disparaître à tout jamais.
mais j'la laisserais pas faire, pippa. j'la laisserais pas s'approcher, me parler. pas même me regarder.
- va lui offrir un verre, et fais-la sortir d'ici.
par n'importe quel moyen, leo, démerde-toi, j'en ai rien à foutre. fais-la partir, c'est un ordre. qu'elle s'en aille, loin, et qu'elle ne revienne pas.
j'en oublie même, tant absorbé par mes pensées, que pippa, elle l'a déjà vu, leo. elle sait qui c'est, elle le sait parfaitement. mais non, c'est loin de me sauter aux yeux.
allez bon sang, casse-toi. dégage, ça vaut mieux pour toi.
ça vaut mieux pour nous.

qu’est-ce que tu faisais là, pippa ? c’était la question que tu te posais, en regardant autour de toi. qu’est-ce que tu espérais ? qu’il serait là, à t’attendre ? non. évidemment que non. on parlait de celio franzone. c’était pas n’importe qui. tu soupirais doucement et tu glissais ta main dans tes cheveux, pas très à l’aise. c’était pas ton truc, les club. ça n’avait jamais été ton truc. finalement, quelqu’un s’approchait de toi. « je suis pas venue ici pour trouver un mec, ne te fatigue pas. » tu soufflais alors en tournant la tête vers l’homme en question, avant de te figer. leo. le bras droit de celio. toujours, malgré les années. il fallait croire qu’il lui était fidèle. il fallait croire que tout n’avait pas tant changé que ça. leo te proposait un verre et tu fronçais les sourcils, il ne semblait plus se rappeler de toi. ou alors il le faisait exprès. celio était forcément derrière ça. « il est où ? » tu demandais alors en arquant un sourcil. il savait de qui tu parlais, il était loin d’être con. « je dois le voir, c’est important. » tu soufflais en haussant un peu les épaules et en soupirant. tu n’avais clairement pas envie de te battre. c’était à celio que tu devais parler, c’était beaucoup trop important. « tu devrais partir, pippa. il ne veut pas te voir. » tu arquais un sourcil et tu secouais la tête en riant nerveusement. c’était pas la putain de question. tu soupirais longuement et tu terminais par sortir ta plaque d’agent du fbi. « t’es certain qu’il veut pas me voir ? » tu demandais en penchant la tête sur le côté, le fixant dans les yeux longuement. tu savais que la plaque allait faire son effet, et tu savais qu’il comprenait, plus ou moins, que tu étais là pour aider celio. pour le prévenir. le jeune homme abdiquait et tu rangeais ta plaque, te pinçant les lèvres en terminant par le suivre, à l’écart. là où on voyait tout sans qu’on ne soit vu. il expliquait quelques mots à celio, tandis que tu plantais ton regard dans celui de l’italien et tu soupirais un peu, essayant de contrôler les battements de ton coeur. pourquoi, même après tout ce temps, il continuait de te faire ce putain d’effet ? « on doit parler. » tu annonçais alors en t’approchant de quelques pas.

j'attends, moi, j'attends que ça, que leo la fasse partir sans ménagement, qu'elle accepte bien gentiment le verre qu'il lui offre et qu'elle parte sans demander son reste. pourtant, j'y crois pas. j'y crois pas une seule seconde. elle acceptera jamais tout ça. ni le verre, ni le fait de partir. pas pippa. et pire, encore, j'crois que j'aimerais qu'elle n'accepte pas.
j'aimerais un peu, au fond de moi, qu'elle reste, qu'elle vienne me voir, qu'elle me saute dessus, qu'on se retrouve et qu'on ne se lâche plus.
mais ça serait mauvais. pour elle, comme pour moi. alors j'observe tout, de mon coin, de mon trône, j'observe la scène. leo qui a l'air de se faire refouler, à en voir la tête qu'elle fait, à en voir son visage.
je m'y attendais.
ce à quoi je ne m'attendais pas, par contre, c'est que leo cède, qu'il l'accompagne jusqu'à moi, sans rechigner, sans forcer un peu, sans tenter de la faire partir en usant la force, même. c'est pas de leo.
putain, y a sûrement un problème.
je soupire, m'affale un peu plus dans mon fauteuil et finis mon verre d'une traite, un peu nerveusement. jusqu'à ce qu'ils arrivent, que leo me parle, rapidement. je me crispe.
je me crispe et me noie dans ses yeux, dans son regard qui s'accroche au mien et qui refuse de le lâcher. mon regard qui devient beaucoup plus sombre.
elle reste debout. je reste assis, sans l'inviter à me rejoindre.
- j'ai rien à te dire, pippa. leo t'a demandé de partir, et tu devrais le faire.
tu devrais l'écouter, crois-moi. ça risque d'être plus dur, avec moi. ça risque d'être plus dur pour moi, de te faire partir. ça risque d'être plus dur pour nous deux, quand je vais y arriver, enfin. ça va nous faire mal, à tous les deux, alors profite, pars tant qu'il est encore temps.
de toute façon, j'parle pas aux flics, moi.
j'parle pas aux flics, et ça me déçoit énormément que t'en fasses partie, maintenant. j'aurais pu le savoir avant, si j'avais fait mes recherches. j'aurais été déçu avant, mais j'aurais eu le temps de m'en remettre avant de te revoir enfin.
mais là, j'ai pas le temps, et la colère s'empare de moi.
je me lève et anéantit l'espace entre nous.
- tu sais quoi, j'vais te laisser une chance de parler, mais t'as intérêt à faire vite avant que je me fâche. dépêche, j'ai pas le temps pour toi.
dépêche surtout, avant que je craque, avant que ton odeur envahisse encore plus mes narines qu'elle ne le fait déjà, et que je finisse par te serrer dans mes bras.

vous vous jaugiez du regard, longuement et tu te pinçais les lèvres alors qu’il terminait par s’adresser à toi. pourquoi t’avais pas simplement fait ton boulot ? pourquoi t’avais simplement pas indiqué à tes collègues comment le coincer pour de bon ? putain, t’en savais rien. t’aurais dû, ça t’aurais évité des emmerdes. mais la vérité, c’est que tu en avais été incapable. quand tu avais compris il y a quelques jours, que leur cible était celio, t’avais fait mine de ne rien trouver sur lui. les ralentir, lui donner du temps, c’était tout ce à quoi tu aspirais. et maintenant, tu regrettais presque. qu’est-ce que tu en avais à foutre ? c’était de l’histoire ancienne tout ça. tu le regardais et tu soupirais finalement quand il rompait la distance entre vous, et tu gardais ton regard dans le sien, cillant à peine. « fut une époque où tu étais bien plus avenant que ça, celio. » tu soufflais alors en arquant un sourcil. t’aurais sans doute jamais oser lui dire ça, auparavant. mais tu avais changé, tu n’étais plus la gentille pippa, celle qui disait oui à tout et qui se taisait. tu n’étais plus la pippa qui avait peur. et il allait vite s’en rendre compte. tu t’éclaircissais la gorge et tu soupirais finalement. « le fbi est à ton cul. je les ralentis mais ils finiront par te trouver. » tu soufflais alors en l’observant de longues secondes. toujours aussi beau, toujours cette aura puissante et magnétique, si caractéristique de sa personne. tu sentais son haleine, le whisky pur, mêlé à son parfum qui n’avait pas changé. et il devait clairement se demander pourquoi tu t’emmerdais à le protéger. et tu te le demandais toi-même. « je sais tout, celio. pas eux, pas encore. s'ils te trouvent… tu prendras perpétuité. » tu soufflais pour le mettre en garde, analysant son regard. tu savais tout. absolument tout. ça avait été si simple, à vrai dire. ses pare feux, c’était toi qui les avaient installés. tu n’avais pas mis bien longtemps pour infiltrer ses ordinateurs et trouver de multiples preuves de tous ses crimes.

elle est là pippa, sous mes yeux, elle est bel et bien là, elle est encore là, si proche que je sens son parfum si singulier, mêlé à son odeur à elle, sa touche personnelle qui m’enivre, ses yeux qui percent les miens comme s’ils y pouvaient lire clairement, son visage, ses moindres traits qui me réchauffent le cœur quand ils ne devraient pourtant pas particulièrement.
et pourtant. pourtant la pippa que j’ai en face de moi, c’est pas la même. c’est pas la même qu’avant, elle est différente, elle a changé, en témoigne la façon qu’elle a de me parler, le ton dans sa voix.
putain, qu’est-ce qu’il a bien pu t’arriver pippa, pour que tu deviennes comme ça?
j’ai déjà été plus avenant, c’est vrai. mais au fond, est-ce que je l’étais vraiment? à nos débuts, est-ce que je l’étais tout court? pas que je sache.
je lève les yeux au ciel. en attendant, n’oublie pas ton compte à rebours. j‘compte pas attendre toute la nuit que tu parles.
et ça tombe. mon visage reste impassible, comme si elle n’avait pas parlé. je croise les bras, j’attends une suite en silence, alors que des tas de choses me viennent en tête.
pourquoi est-ce que t’es au fbi?
pourquoi est-ce que je croirais ce que tu dis, d’ailleurs?
pourquoi est-ce que t’irais les ralentir?
pourquoi t’en profites pas pour me coffrer?
pourquoi tu fais tout ça, pippa? pourquoi tu fais tout ça pour moi?
tu sais tout et pourtant t’as l’air d’ignorer tout un tas de choses sur moi.
- je ne vois pas de quoi tu parles. j’vois pas ce que tu pourrais savoir sur moi, ni pourquoi j’aurais le fbi au cul ou bien je risquerais perpétuité.
attends, t’as quand même pas cru que j’allais tout t’avouer et te donner mon business plan, comme ça, d’un coup?
- depuis quand c’est devenu illégal d’être propriétaire de bars et clubs?
je lève les yeux au ciel et retourne m’asseoir. leo à côté de moi, se retient de rire, je le vois dans son sourire en coin, celui qui dit ‘putain t’es con celio, t’as du culot de lui parler comme ça’. j’ai du culot, c’est vrai, mais c’est pas nouveau.
- en attendant, j’ai jamais apprécié qu’on vienne fouiner dans mes affaires, encore moins les flics, donc tu seras mignonne de ne plus mettre tes pieds dans mes propriétés. t’y es plus la bienvenue.
c’est pas vrai pippa, c’est pas vrai. t’es encore la bienvenue, j’le jure. tant que tu laisses ton badge dehors.
j’peux pas me permettre de finir en taule juste pour ta peau douce, tes lèvres charnues et tes mains délicates, peu importe combien j’en ai envie.

il ne manquait franchement pas d’air, à te regarder comme si t’étais conne et que tu n’avais rien compris. tu avais envie de l’insulter, et même leo semblait être abasourdi qu’il s’adresse à toi de cette façon. tu esquissais un sourire faux en secouant la tête et tu soupirais longuement. « tu te fous vraiment de ma gueule. » tu soufflais en soupirant et en fermant les yeux. tu l’observais, le scrutais, essayais de comprendre. tu avais appris tellement de choses ces derniers temps. la balle qu’il avait mis entre les deux yeux de son ex petite-amie. tout le reste. « très bien. je les laisserai te coffrer dans ce cas. et un jour faudra que t’expliques à milo pourquoi il a plus ses parents. » tu sifflais en fermant les yeux quelques instants et en soupirant longuement. bordel, et dire que t’aurais pu être la mère parfaite pour ce gamin. dire que ça en était pas si loin, à une époque. tout avait tellement changé. toi en premier lieu. tu l’observais de longues secondes et tu essayais de rester impassible, malgré ton coeur qui battait trop fort. malgré son odeur qui venait chatouiller tes narines et qui te ramenait à des souvenirs bien trop agréables. « un jour tu lui diras la vérité ? que t’as mis une balle dans la tête de sa mère ? » tu soufflais, de manière totalement effrontée. tu le provoquais purement et simplement, là. tu le provoquais parce que tu cherchais une putain de réaction. allez celio, putain. fais pas comme si ça te touchait pas, fais pas comme si j’avais jamais compté pour toi. tu le regardais longuement et tu terminais par t’éloigner d’un pas. « j’étais venue en amie, tu sais. je suis pas celle que tu dois craindre dans l’histoire. si j’avais voulu, tu serais déjà au fond d’une cellule. » tu soufflais en plantant ton regard dans le sien en te mordillant la lèvre, le détaillant un peu plus précisément. ses yeux, sa bouche, son visage. tu avais l’impression d’avoir encore tout en tête. les sensations de ses mains sur toi, le goût de ses lèvres alcoolisées. ça te rendait dingue, à l’époque. et ce soir, il te rendait dingue à nouveau.

oui, je me fous vraiment de ta gueule. et puis très ouvertement en plus, comme tu peux le remarquer. tout le monde l’a remarqué, en fait. je me fous de ta gueule, et puis je te prends un peu pour une conne aussi, pippa. mais comprends-moi. j’peux pas reconnaître ce que j’ai fait, sachant qui tu étais et qui tu es devenue, surtout. imagine si quelqu’un du fbi était venu te parler de toute l’illégalité dans laquelle tu trempais? t’aurais fait quoi à ma place, t’aurais tout avoué, ou bien tu te serais un peu foutu de sa gueule au passage?
ouais, c’est bien ce que je pensais.
j’ai envie de lui rétorquer, la tête haute, qu’elle a qu’à les laisser faire, les laisser m’embarquer, j’accepterais bien gentiment, je les attendrais avec mes mains dans mon dos. mais elle me coupe le souffle. elle s’arrête pas là, elle continue. elle parle de milo, et mon sang ne fait qu’un tour.
milo, seul, abandonné, sans parents, et elle, satisfaite. elle m’a mis le démon, ça y est. autre que sombre, mon regard est complètement noir. et comme si ça suffisait pas, elle en rajoute une couche. je l’attrape par le poignet que je serre un peu et la tire sèchement jusqu’à moi.
pippa, tu sais que milo, c’est mon gros point faible.
- ne parle pas de ce que tu ne sais pas, pippa. et ne parle surtout pas de mon fils. jamais.
tout mais pas ça, et tu le sais très bien.
mais elle m’a provoqué, très volontairement, j’en suis persuadé, et ça a marché. j’ai directement mordu à l’hameçon. j’ai craqué. moi qui voulais éviter de trop l’approcher ou même de la toucher, c’est vraiment trop tard pour le coup.
et à cet instant, je n’ai qu’une seule envie, l’embrasser.
glisser mon autre main à sa nuque, mes doigts qui attrapent ses petits cheveux, ma main qui fait pression et mes lèvres qui viennent se coller désespérément aux siennes, presque violemment. baiser dans lequel on pourrait sentir le manque et la tristesse aussi bien que la rage.
et ne plus la lâcher, plus jamais.
- tu me connais mal, pippa. j’aurais jamais été jusqu’au fond de la cellule, et j’irais jamais. t’as pas bien compris encore à qui tu parles, je crois. j’finirais pas en prison. jamais.
il ne faut jamais dire jamais, mais moi j’ai la prétention de le faire. jamais en prison. jamais.
et maintenant qu’on est là pippa, on fait quoi? je fais comment pour te faire à nouveau confiance? qui me dit que t’as pas des mouchards sur toi, et que t’attends un faux pas, une confession pour me citer mes droits.
ça n’arrivera pas.

tu l’observais de longues secondes et tu soupirais longuement, avant de sursauter un peu quand il prenait ton poignet et qu’il te tirait vers lui. le point sensible. milo. tu bougeais un peu le poignet pour te défaire de son emprise, ne le quittant pas du regard. ce contact t’avait électrisé. tu soupirais et tu croisais les bras sur ta poitrine. « il a toujours été ton point faible. t’as oublié à quel point je te connaissais bien ? » tu demandais en penchant un peu la tête sur le côté. et en le provoquant, t’avais déclenché la réaction que tu attendais tant. il avait craqué le premier. tu plongeais ton regard dans le sien et tu soupirais, alors que leo s’était retiré un peu plus loin. fallait dire que la tension était sans doute palpable, quelle qu’elle soit. tu soupirais en t’éloignant légèrement et tu l’écoutais. « mais je m’en fiche. dis moi ce que tu veux celio, je suis juste venue te mettre en garde. et maintenant que c’est fait, tu en fais ce que tu veux. » tu murmurais en soupirant et en haussant les épaules. t’en avais déjà bien trop fait, dans le fond. et tu voyais bien son regard suspicieux. tu te pinçais les lèvres et tu fermais les yeux, glissant tes doigts dans tes cheveux flamboyants. « je suis juste venue t’aider, arrête de me regarder comme la dernière des traitresses. » tu ajoutais sur la défensive en fronçant les sourcils et en soupirant longuement. t’avais toujours voulu que son bien. et c’était encore le cas. t’aurais pu le faire coffrer depuis bien longtemps, dans le fond. t’aurais pu le balancer aux flics depuis des années. mais tu n’avais jamais rien fait, et vous saviez tous les deux pourquoi tu ne l’avais pas fait. tu étais littéralement tombée pour lui. tu étais tombée amoureuse, sans prévenir, comme ça. parce qu’il avait été là quand tu avais besoin, parce qu’il avait su créer la passion au sein de ton ventre. il t’avait fait perdre la raison. plus d’une fois. et tu savais parfaitement qu’il suffisait d’un rien pour que tout recommence. qu’il suffirait d’un regard, d’un mot, d’un geste pour que tu replonges comme une véritable camée qui n’avait jamais été véritablement sevrée. une camée privée de sa drogue pendant quelques années, mais une camée qui n’avait jamais réellement guérie de son addiction.

elle tire, pippa, elle se défait de mon étreinte, croise ses bras, et j’ai envie de hurler, de lui ordonner de revenir là, de se coller à moi. j’ai envie de l’engueuler d’avoir osé faire ça. avant, elle aurait jamais fait un truc pareil, elle aurait pas bronché, rien. et de toute façon, elle aurait même pas cherché à me provoquer.
et c’est bien tout ça qui me fait peur, pippa. c’est le fond du problème putain. t’as changé, t’es plus la même. et tu me connais par cœur, en plus de ça.
aujourd’hui, j’sais plus de quoi t’es capable. j’sais pas pourquoi t’es réellement là, si tu veux vraiment me sauver ou si tu cherches un moyen de mieux m’enfoncer.
peut-être pour te venger de t’avoir abandonné?
j’en sais rien. j’en sais putain de rien, mais ce que je sais, c’est que j’suis en rogne maintenant.
j’suis en colère qu’elle agisse comme ça avec moi, premièrement. puis j’suis en colère qu’elle sache, aussi, qu’elle soit au courant de tout, dans les moindres détails, si ce qu’elle dit est vrai. et visiblement, c’est le cas. mais elle sait des trucs qu’elle n’a probablement pas appris par le fbi.
et j’ai le tilt, d’un coup. elle a fait la fouine.
je fronce les sourcils.
- comment est-ce que tu veux que je te regarde, hm? tu t’es vue? tu fais la maligne avec ton badge, elle est passé où, la pippa, qui passait son temps sur son ordinateur, sagement?
tu sais, celle qui hackait tout et tout le monde, juste pour s’amuser. celle à qui j’ai dit un jour, que si je lui faisait une crasse, elle n’aurait qu’à vider mes comptes pour se venger, parce que je savais pertinemment qu’elle s’en était déjà donné l’accès.
- ah attends, je sais où elle est passée. elle a été fouiller dans mes affaires, c’est ça? ça t’a amusée, d’aller déterrer tout ça? alors dis-moi, comment tu veux que je te regarde alors que j’peux pas avoir un seul instant la certitude que t’as pas fait tout ça pour ton nouveau boulot, uniquement, pour compléter votre dossier, pour te faire bien voir?
ça serait si facile. il te suffirait de leur donner toutes les preuves et toutes les connexions entre le réseau et moi, et t’aurais directement une promotion, j’en suis certain.
alors moi, j’peux pas avoir de certitude. j’peux juste avoir le naïf espoir qu’en souvenir du bon vieux temps, de la belle époque, que tu m’feras pas ça, pas à moi.
juste l’espoir que je t’ai manqué, et que juste ça, ça va tout changer.
parce que si je dois être honnête, j’avouerais qu’à moi, tu m’as manqué. tu m’as terriblement manqué. ta voix, ton odeur, ton sourire, tes cheveux, ta peau, ta chaleur. tout chez toi m’a manqué et j’en peux plus moi, d’être dans cet état.
- t’avais autre chose à dire, ou c’était juste ça?
tu veux un verre, pippa? tu peux rester, finalement.

tu le sentais déstabilisé. comme si il s’attendait à retrouver la pippa d’il y a trois ans, comme si cette pippa n’avait pas changé. tu soupirais longuement et tu frottais doucement ton bras de ta main, un vieux toc que tu avais et qui te permettait de garder le contrôle de la situation. il allait s’énerver et tu le savais très bien. tu fronçais les sourcils à ses mots et tu riais nerveusement, t’étouffant un peu. quel culot il avait de te dire ça. « si tu étais resté, tu le saurais. » tu sifflais simplement en le regardant droit dans les yeux, alors que tu voyais leo relever la tête vers vous. simple, efficace. la punchline parfaite. « si tu ne m’avais pas ignoré ou éloigné de ta vie, celio, je serai peut-être restée la même. si j’avais pas été battue et violée pendant trois semaines en pleine jungle, je serai peut-être restée la même. pas de bol pour moi. » tu ajoutais sur un ton glacial. la pippa qu’il connaissait avait terminé de mourir avec son départ et son éloignement. il avait terminé de la terrasser. c’était de sa faute. tu fronçais à nouveau les sourcils quand il te parlait de ce nouveau job, du fbi et du fait que tu avais fouiné dans ses affaires et dans sa vie. « ce qui s’est passé c’est qu’on m’a donné une foutue affaire à résoudre. et à force de chercher, j’ai tilté. tout ramenait à toi. ce que je fais là, c’est simplement te prévenir que le fbi enquête sur toi. que je leur ai pas donné la moindre info sur toi. pourquoi ? je me pose sérieusement la question. » tu sifflais en croisant les bras sur ta poitrine et en l’observant pendant de longues secondes. t’aurais peut-être mieux fait de leur donner toutes les infos que tu avais. t’aurais pu être aveugle, ne pas faire les liens. t’aurais pu le laisser dans sa merde. t’aurais dû le laisser dans sa merde. tu le jaugeais toujours du regard et tu arquais un sourcil à sa question, alors que leo étouffait un rire derrière vous. « j’étais juste venu pour ça. et la prochaine fois porte tes couilles au lieu d’envoyer ton toutou. » tu soufflais en haussant les épaules et en les regardant tour à tour. et maintenant, pippa ? et maintenant ?