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 un cadeau de la providence (hadesha)

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Message Sujet: un cadeau de la providence (hadesha)   un cadeau de la providence (hadesha) Empty Jeu 30 Mai - 5:40


C'était sans doute un jour de chance.
La journée se pourrissait en minutes qui se perdaient à force de se courir les unes après les autres. De s'entre-dévorées comme des bêtes immondes. Comme ses hommes qui les avaient inventées. Le goêlier, portant étrangement(peut-être pas tant que ça finalement) le même patronyme que l'un de tes exs, s'amusaient à scruter par dessus ton épaule. S'amusait à gratter son carnet noir trop près de ton oreille, gribouillant sur ta patience à gros traits nerveux. Tu serrais les dents, pincais tes lèvres à les brisées de frustration. Très bien l'ambiance de travail. Pas le droit de vérifier si celui que tu devais appeler ton amoureux avait daigné te donner quelques notes d'attention. Tu commençais à avoir vachement hâte que ses requins en cravates se pointent les nageoires pour leur réunion. Une réunion pour prévoir quand serait la prochaine réunion planifiant la subjacente réunion pour réunioner. Ce genre de conneries de conseil d'administration qui se retrouvaient à dévorer des sandwichs trop cher et au final ne jamais parler des choses importantes, genre l'augmentation de ton salaire, par exemple. Tes épaules se tendaient, hypervigillence, mal de nuque et de vie. L'heure du café sonnait. Ils voulaient que tu prennes tes pauses, hein ? Flippaient aussitôt que tu dépassais les heures réglementaires et qu'ils risquaient de te payer le double pour le même boulot. Oh, ba, tu les prennais, ses moments de délices avec le café et tout ce de bon, venant avec.

Surtout qu'aujourd'hui, tu ne sais pas, ils sont tous cons. Sur place, au téléphone. Cons. Cons comme des vrais connards. Cons dans le genre qui se prennent trente billets alors qu'ils voulaient en prendre trois et quelque part dans le cyber-espace, c'était ta faute. Tu devenais tendrement passive agressive quand une vieille pie s'époumonnait sur toi. « Oui, oui... comme j'vous... si vous m'écoutez trente secondes madame, je vais vous expliquer... Vous m'écoutez ? Bon ! Donc allons y...  » Et au final elle n'écoutait pas. Trop paniquée de ne pas avoir pris les billets VIP. Et quand tu perdais patience, tu leur demandais de garder la ligne, votre appel est important pour nous, ne quittez pas. « MAIS ELLE EST CONNE. Comment elle peut être conne comme ça. Bordel. Vous êtes conne, madame. Vous avez bouffé le reste de vos propres neurones pour déjeuner, c'est bien ça ? Fuck !  » Que tu rages en soupirant, frottant ton front contre tes mains. Tu foutais quoi là, sérieux, quand t'étais promise à faire tellement plus, à faire de l'art, toi-même. Du genre qui changerait la vie de tout le monde. Tu pouvais y arriver, même sans ton Émile. Tant pis, t'en aurais milles des gars comme Émile, dont tu ne voudrais pas quand tu serais au sommet de la pyramide, quand on te couronneras de reconnaissance. Ça te donnait presque envie de recommencer à écrire des poèmes cinématrographiques, de vomir sur la page blanche tout ton stress, ton manque d'estime, ton marre de vivre. Tes yeux couraient, comme si tu savais, vers l'heure qui s'avalait toujours tout seul. Plissant les sourcils, c'est à cette heure-là habituellement que le diable venait te tenter. Et cette après-midi, ça te tentais. Tu réglais madame la chipie avec un ''je vous rappelle dès que le problème est réglé, bonne journée''. Byeeeee bisshhh. Remi-directeur-trop-général-pas-si-génial quittait enfin ton comptoir pour sa précieuse réunion. Pas trop tôt. Tu retrouvais tous tes sourires jetés au recyclage. Le café, la cigarette ou le maître des enfers, tu ne savais pas ce qui faisait le plus briller le soleil duquel tu volais trop près. Peut-être que les voluptes des souvenirs de son sourire te rendaient légère, peut-être. Tu dansais sur la vieille musique française qui s'échappait de ton ordinateur et dont tu ne comprenais pas un mot, déposant la petite affichette ''de retour dans 15 minutes''. Un latté à la vanille plus loin et tu baignais dans le soleil devant votre temple de la culture. Les yeux presque fermés, le sourire au coin de la bouche, les vieux frenchs qui te murmurent des douceurs. Tu l'attends peut-être un peu, le vieux loup de mer. Envie d'en sourire jusqu'à ce que le ventre te chatouille. Avec tout ça, t'avais complètement oublié de vérifier sur ton portable si quelqu'un t'aimais. Peut-être qu'aujourd'hui, tu n'en avais rien à foutre. Convaincue qu'avec tes trois addictions entre les doigts, la misère goûterait le paradis.

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Message Sujet: Re: un cadeau de la providence (hadesha)   un cadeau de la providence (hadesha) Empty Jeu 30 Mai - 18:45

un long soupir de désespoir simulé. et c'foutu texto qu'il vient d'lui envoyer. me dit pas que le bar est en train de cramer ? la tanière qu'il a laissée aux plus jeunes des solomos. rhéa qu'il prend pour la moins délurée -il s'est sûrement planté. de longues minutes qu'il a coupé le moteur de la triumph, à quelques pas de c'rendez-vous presque mensuel. voire hebdomadaire. la bécane sur laquelle il est assit et le musée pour arrière plan. il porte encore sur son dos le cuir des hell's angels. alors qu'il n'en fait plus partie depuis des années. un putain d'neurone qui s'est pas encore brisé. un cordon qu'il a pas encore réussi à couper. un club qu'il arrive pas à laisser couler. son neveu qu'il aimerait voir commander. mais cette brunette dont il est encore entiché. il repense au bon vieux temps. celui où les bikers n'étaient des vieux alcoolo aux barbes hirsutes et aux bedaines trop serrées dans leurs t-shirt délavés sous le cuir. où les gamins tétaient encore. au lieu d'se prendre pour les plus forts. puis soudainement, l'envie de gerber. il balance son mégot. son téléphone qui crache une unique sonnerie. euh. crios vient de foutre son poing dans la gueule d'un type, ça compte ? il m'avait collé une main au cul. c'était donc mérité. les yeux du loup qui roulent dans leurs orbites et ses canines qui s'embrassent. il veut pas en savoir plus. et dans un grognement, il enterre son téléphone au plus profond d'la poche de son jean. la réponse attendra. l'olympia aussi.

se laisser porter
au grès du vent
d ' é t é.
personne penserait
qu't'es un brin
c u l t i v é.


le casque sous l'bras et une énième garrot entre les doigts -il fait plus gaffe au nombre de cancers qu'il a déjà bouffé de son plein grés-, il avale les quelques pas qui le séparent du trottoir d'en face. et debout, droit devant, avachie contre la brique tiède, y'a cette silhouette de p'tite nenette. parfait cliché de c'que ses yeux de mâle adulte imagine de la décadente jeunesse. les cheveux colorés et attachés dans une sorte de chignon qui s'veut faussement négligé. l'uniforme professionnel revu avec l'ourlet aux chevilles et l'bouton défait sur le décolleté -c'est outrageux comme une envie d'y gouter. le café dans une main et la clope dans l'autre. plus qu'une dizaine de mètres et c'est l'sourire assuré.

il attire le regard de la gamine par un lancé bien placé ; en plein dans sa face poudrée qu'le paquet de clopes vient s'échouer. avant d'rejoindre le sol par manque de dextérité -et surtout d'main libérée. un regard qui passe de l'agresseur à l'objet du délit. p'tit carton gribouillé au marqueur. dessinée en bd, une gamine aux sourcils froncés et à la colère facile. une énervée aux traits exagérés, planquée derrière sa caisse automatique, qui gueule dans sa bulle un courtois fuck u with ur damn venus of milo ! and it's not the real asshole ! se reconnaitra qui voudra. cadeau. mais que si tu m'fais l'entrée gratuite aujourd'hui. il l'apostrophe en s'approchant, assez fort pour que sa voix caverneuse couvre celles qui lui chantonnent dans les oreilles. t'as pas mieux à foutre que d'te pourrir la santé ? comme par exemple permettre à toutes ces âmes avides de savoirs de pénétrer dans ce temple de l'histoire et d'la connaissance. il s'adosse près d'elle et avec sa propre cancéreuse -ironique sachant qu'il vient de critiquer celle qu'elle tient entre ses doigts- il fait mine de compter les regards bovins entassés dans cette file d'attente beaucoup trop longue.

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Message Sujet: Re: un cadeau de la providence (hadesha)   un cadeau de la providence (hadesha) Empty Jeu 30 Mai - 21:36


C'était sans doute un jour de chance.
Tu sirotes sous le soleil, ça goûte le trop de lait à la vanille, l'expresso et le réconfort. C'est con. Tu sens la nicotine qui nique ton sang, la fumée qui encule tes poumons, génial. T'avais dit à papa que tu ne fumerais plus, maman aussi, mais c'est pas facile. T'arrêtes pas d'essayer d'arrêter. Pas aujourd'hui ma belle. Trop petit bélier, trop de feu, trop influençable. Un jour tu seras cette fille trop saine qui a un ventre tellement plat qu'il rentre à l'intérieur, des cuisses tellement petites que y'a un trou à bites entre elles quand tu les touche ensemble, la meuf qui médite deux fois par jour et qui a une alimentation à base de salade et d'amour-propre, qui lève le nez sur l'alcool et tout ce qui peut être nocif pour ton temple. Un jour. Pas aujourd'hui ni demain, peut-être une autre année. Peut-être l'an prochain, quand l'hiver sera revenu tuer tout le monde avec le froid et quelques flocons. Tu te feras des promesses bien bourrées, de celles que personne tiens. Personne ne tiens jamais ses promesses, de toute façon. Mais y'a Edith, ta pote Edith qui te murmure à l'oreille qu'elle ne regrette rien, non rien de rien. Et t'aimerais bien la croire. T'aimerais bien ne rien regretter aussi. Sauf que c'est pas le cas.

Sauf peut-être celles silencieuses, murmurées, dites tout bas, sans trop d'espoir. À la semaine prochaine. Un clin d'oeil, un sourire en coin, des petits oiseaux qui chantent dans le ventre, parce que c'est nouveau, c'est fun, parce qu'il est comme du bon vin vieillit. Parce qu'il a de la racine de mauvais garçon rédempté. Parce qu'il est un homme à part entière et que tu commences à en avoir marre des petits garçons qui arrivent à trente piges. Tu ne lèves même pas les yeux quand t'entends le ronronnement familier de sa moto. C'est peut-être pas lui, y'en a beaucoup des motards dans le coin, surtout quand l'été se décide enfin à venir vous rejoindre dans le coeur du Queens. Ça grogne, les bécanes, les bagnoles, ça siffle sous les cuisses des filles, les flics surveillent tout avec leurs t-shirts de flic. Ils s'amusent à faire un petit ménage de printemps. Descentes louches à quatre coins des quartiers. Ils pourraient pas venir chez tes voisins ? Y'aurait moins de trafique pour toutes les merdes qu'il vend. Et dire qu'il t'a déjà invitée à monter boire une bière un aprèm'. Tu te félicites encore d'avoir dit non. T'avais déjà suffisamment d'ennuis comme ça. Justement, parlant d'ennuis, t'en voyais le bout de la barbe. Le paquet de clope se présentait avant lui. Le paquet frôle ton menton, manque se loger dans l'espace ouvert aux rayons de soleil qu'offre ton décolleté, le rate de près pour se retrouver au sol. Tu fronces tes sourcils en relevant le regard vers lui, faussement vexée. Ils disent que t'es mignonne quand tu fais la grognonne.

« Mais ce lancer de merde, j'suis déçue M'sieur, vous n'savez plus viser ? C'est les cataractes ? » Que tu le nargues en te penchant pour rattraper le paquet, le fourrer dans ta poche alors qu'il te répond. « Oh, mais cet amour est transactionnel, hein, c'est ça ? » Que tu râles, retirant ton unique écouteur pour lui adresser un doux sourire en coin. Il vient se poser près de toi et rien que ça. Rien que ça c'est assez pour te donner un sourire qui ne part plus. T'as plus de mains disponibles, mais y'as quand même de pouce de celle tenant ton tabac qui vient doucement taquiner son ventre. « Regardez-moi le cendrier qui s'moque de la tabatière. Tu sauras que j'ai arrêté de fumer. » Que tu le nargues avant de prendre une goulée de produits chimiques en fumée grise. « Ils ont qu'à aller au MAC s'ils veulent du service express, ici on n'a pas le budget. » Tu te bouges pour jeter un oeil et ton collègue s'est occupé des quelques clients, surf désormais sur youtube pour regarder des vidéos de menuiserie et de jardinage. Tu roules des yeux, buvant une gorgée de café avant d'abandonner la tasse sur le rebord de la vitrine pour au moins avoir une main de libre si l'envie te reprend de le taquiner. Et elle reprendra. Tu la sens déjà gratouiller dans ton ventre comme un petit chat qui veut sortir, se prendre pour une tigresse contre le titan. C'est bien parce qu'avec lui tu ne penses plus aux merdes. À ton père malade, ta mère stressée, ton petit ami divisé, et tout le reste de ton bordel grandissant. Il n'y a que lui, que tes doigts qui glissent dans sa barbichette parce que t'as le droit et parce que t'es un peu soulagée que la gamine ne soit pas avec lui. Que tu puisses l'avoir rien que pour toi. T'es pas spécialement possessive, tu ne possèdes probablement même pas beaucoup des pensées de ton étrange ami, mais t'aimes te l'approprier, lui voler des petits bouts de sa vie, pour éclairer la tienne. De ses petits pas grand-chose qui font tenir bon.
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Message Sujet: Re: un cadeau de la providence (hadesha)   un cadeau de la providence (hadesha) Empty Mar 25 Juin - 8:23

c'est la fumée d'tes merdes qui m'brûle les rétines. un coup de menton vers la nicotine en tube qui jaunit les doigts d'la gamine, peu à peu. et son échine qui épouse avec brutalité le briques trop vieilles de cet édifice qu'on n'peut dater. il regarde les mains de sasha ; encore filiformes. un jour elle s'réveillera avec les mêmes poignes abîmées qu'son acolyte plus âgé. le même cuir tanné, les mêmes pulpes fissurées et les mêmes foutus ongles flingués. il sent à peine sous ses doigts les courbes qui se tordent. heurte son corps cabossé à leurs vies à peine commencées. un putain d'vampire aux crocs acérés ; leur prendre un brin d'plaisir pour toucher l'immortalité. t'apprendras bien vite que tout s'achète ma jolie. absolument tout. même les sourires qu'elle lui offre. même les regards qu'elle lui balance. y'a d'ailleurs rien qui s'paie plus cher que d'se sentir aimé.

elle lui flatte la panse comme on flatte les flancs d'un cabot. y'a des rires qui s'échappent de leurs gorges éraillées. il s'recule pas, s'laisse effleurer, s'laisse toucher. j't'emmerde sasha. ça la f'ra rire, le sifflet coupé et les insultes comme inutile bouclier. pas comme s'ils s'étaient promis d'se respecter. pas comme si leurs délires d'vieux geeks étaient sensés. ouais, enfin j'suis pas certain qu'on leur serve le même type de culture américaine là-bas. une bouffée de cancer, une de plus, qui vient s'échouer au fond d'ses poumons. qui épaissit la grasse qu'il trimballe dans ses bronches. qui l'rapproche un peu plus de l'asphyxie.

vivre pour s'flinguer,
crever pour exister.


le téléphone qui sonne au fond d'la poche. une fois. deux fois. circé qui finalement baisse les bras. comprend rapidement qu'ce n'est pas l'bon choix. il sait pas dans quel état l'appart' il retrouvera. sa fausse paternité qu'il laisse crever dans un écran de fumée. ses bras qu'il laisse tomber pour ne pas être le père qui leur a manqué. le cancer dans la bouche, il s'tourne vers sasha. qu'est-ce que tu fous à t'faire chier ici ? il désigne de l'index le vieux bâtiment défraichi. sasha elle est vive. sasha elle est fière. elle a pas la gueule d'une caissière qui s'fait chier. c'est pas comme si ça avait des airs de vocation. l'attention qui s'reporte loin sur l'trottoir d'en face. elle a l'ambition piétinée. solomos prend une bouffée de mort, l'dos toujours vissé dans l'inconfort des briques bon marché.
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