les bassent hurlent un bon son de hip-hop résonnant dans toute la baraque.
c’est une de ces soirées où personne se connaît vraiment. des potes ramenant des potes, une cohue qui n’en finit plus. ça empêche pas la bonne ambiance pourtant, des discussions à tous les coins, par-dessus la musique, quand l’alcool coule à flots et le son encore plus. t’arrives à peine à circuler entre la piste de danse improvisée et t’as même bousculé un couple s’emballant dans l’escalier. t’as rencontré deux ou trois frères que t’avais pas vu depuis un bail, sans doute ta sortie de taule, quand les emmerdes te jouaient encore de sales tours. mais tu crois en avoir fini avec ce temps-là et tu te faufiles dans la foule, jouant au loup solitaire en attendant que le reste des gars se pointent. jamais vraiment ponctuel et pourtant toujours le premier sur les lieux, à croire qu’tes gars se font les ongles avant de sortir en soirée. soucieux de faire bande à part un peu trop longtemps, t’as le gobelet en plastique qui se vide un peu trop vite. ce soir, c’était censé être une soirée de reconnaissance. approcher un gars pour d’shaun et collecter les infos, une vieille histoire de territoire, gars qui fait trop l’malin. pas de connerie. pas de dérapage. rien qu’une p’tite discussion d’hommes à hommes, histoire de remettre les pendules à l’heure. et c’est pas qu’tu
flippes de t’retrouver seul comme un con sur un territoire qu’est pas l’tien, biggie, mais t’es pas con et t’sais bien comment ça se passe, si on te chope avant d’pouvoir les choper. dans votre monde y a qu’la loi du plus fort qui s’en sort et t’es pas sûr d’être nommé favori ce soir, au milieu de tous ces gens qu’ont rien d’premiers de la classe.
t’en laisses rien paraître pourtant. l’même calme dans toutes les situations, t’as l’oeil aiguisé pourtant, qui perd rien d’la situation. d’ces couples se chauffant sur le dancefloor. d’ces filles à la recherche d’un street daddy, friqué à la coke et aux escorts. d’ces poignées de mains échangées, un peu de weed contre une poignée de fric. d’ces flingues que tu vois dépasser des jeans, à peine cachés par les t-shirts. pas qu’ça les effraie, ça non.
y a pas un flic à la ronde dans les ghettos comme les vôtres, parce que personne se soucie des gens comme vous. d’la mauvaise graine qui pourrit sur le trottoir. et si vous êtes laissés pour compte, c’est parfois sans doute une aubaine. ça fait fleurir les affaires, ça scelle les deals, ceux qui deviendraient compliqués si vous étiez dans l’viseur des ces enfoirés.
et le reste du temps, c’est juste qu’une putain d’fatalité. un truc ancré dans vos crânes depuis qu’vous êtes tout gamins.
personne viendra vous sauver. un peu comme là, quand tu l’vois même pas venir. la baston qui se crée sous tes yeux, au beau milieu du dancefloor. la cohue qui s’en mêle et puis l’coup d’feu qui part, achevant de semer le chaos.
t’entends que les cris et la foule qui décampe. t’as pas l’temps d’réagir biggie. pas l’temps d’faire quoi qu’ce soit. parce que t’entends déjà les sirènes des flics, au loin, et tu t’revois comme un con derrière les barreaux alors qu’t’avais juré,
plus jamais ça.alors tu fais comme tous les autres connards, finalement.
toi aussi tu décampes.
quelques rues seulement, le temps de retrouver bébé.
t’es bien sûr d’te faire griller dans ta camaro flambant rouge mais t’as pas vraiment l’choix gamin. pas question qu’tu la laisses là.
t’es déjà en train d’faire vrombir le moteur, prêt à partir en trombe quand tu crois l’apercevoir, là, au milieu d’inconnus qui se dispersent autour de toi. t’es pas bien sûr que c’est elle mais tu pourrais presque le jurer, cette même blonde que tu ne connais d’ordinaire que trop bien à force de trop la voir te faire la misère.
qu’est-ce que tu fous là putain ?? t’es furieux quand tu l’balances, presque inquiet d’la savoir dans ce genre de soirée où rien ne se passe jamais bien, mais t’as pas le temps d’attendre la réponse dans le fond. trop paniqué à l’idée d’te faire avoir comme un blanc-bec. par les flics, ou bien d’voir le mec te filer sous le nez.
grimpe. le ton est sec, pressé. t’as pas vraiment envie d’l’avoir dans les pattes rhéa, pas ce soir, pas quand tout déconne alors que la soirée promettait d’être calme. mais t’as été chargé d’une mission et même sans tes frères t’vas devoir la finir. s’il s’envole, pas sûr qu’vous puissiez lui mettre la main dessus avant un long bail.
grimpe j’te dis, ou j’te laisse sur le trottoir. t’as les mots nerveux et l’regard d’un chien enragé. avec ou sans rhéa, tu resteras pas là.
@rhéa ballarini