surprise | nate

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SURPRISE
@nate harrington

Laisser ton fils à quelqu’un d’autre, ça te fait tout de même très bizarre, tu n’as pas l’habitude. Bien que tu le laisses souvent aux baby-sitter et aux crèches, mais là il s’agit de ton frère, et vous n’aviez jamais eu de petit dans votre famille, c’est pas lui qui était l'aîné. Il t’avait jamais vu grandir comme toi tu le voyais depuis vingt sept ans. « Ok. Je vais faire de mon mieux. » Tu souris, à la limite du rire, en voyant que ton frère n’était pas plus sûr de lui que toi. Au début, tu ne savais pas du tout comment t’occuper d’un gamin, mais avec le temps, tout s’était arrangé et tu y avais même pris goût, tu étais devenue une vrai maman. Bien sûr, avec ses hauts et ses bas. Tu le restais quand même à vie maintenant. « C’est pas très compliqué, t’inquiètes pas. - Bonne nuit, chéri !  » que tu lances tout d’abord à ton frère, pour le rassurer et puis finalement tu t’adresses à ton garçon, en te retournant et en lui souriant. Finalement, tu sors de la pièce. Tu aurais pu t’en aller sans observer la scène, or tu restes un moment, juste quelques minutes du début pour voir comment s’en sortait Nate. Ils avaient l’air de bien s’entendre, pour une première fois en vrai.
Le livre, tu l’avais pioché presque au hasard. De toute façon, vous en aviez des tonnes dans la bibliothèque, des livres pour enfant. C’était toujours mieux que des jeux vidéos. Et puis tu sentais que Jimmy adorait la lecture, qui sait, il deviendrait peut-être un écrivain plus tard. Jimmy Harrington, ça sonnait bien comme nom d’auteur de polar. Il pourrait même s’inspirer de ta propre vie et ça ferait un carton avec tant de malheurs. Les malheurs de Romy. Un peu bâclé comme titre, mais c’était la vérité. Personne ne saurait que c’est toi à part les proches et ceux qui faisaient partie de cette aventure. Oui, ta vie était une aventure.
Alors, pour en revenir au livre, Rémi la souris qui vivait à l’envers, ça te faisait penser à Nate, mais aussi à toi, d’un autre côté. Tu ne rentrais pas dans une case comme cette souris. Bien sûr, tu n’avais pas choisi ce livre pour envoyer un message de détresse à ton petit frère, et puis, il ne remarquerait même pas la ressemblance,  tu en étais sûre.

Finalement, tu laissas la porte légèrement entrouverte au cas où une crise retentirait, on ne sait jamais, et tu t’en allas dans la cuisine pour préparer à manger. Tu avais choisi des spaghettis accompagnées d’une sauce. Pas compliqué et très rapide, car le livre ne durait pas non plus deux heures. Jimmy s’endormait toujours à la moitié. Tu sortis une assiette, des couverts, un verre, une carafe d’eau. Et étala la nourriture sur l’assiette. Les bonnes odeurs feront peut-être sortir Nate de sa cachette. Comme une souris et son fromage. Bref, assez parlé de Rémi.
Quelques minutes plus tard, les pas élégants de ton frère se firent entendre sur le sol de ton loft, que tu allais maintenant partager à trois. Déjà que c’était compliqué cette situation à deux, ça allait l’être encore plus avec un adulte. Tu sais que Jimmy aurait préféré qu’il s’agisse de son père. Mais ce lâche ne referait jamais surface, contrairement à la famille. C’est plus fort que tout.
« Pas mal ce bouquin... » qu’il te lance en arrivant dans la même pièce que toi. Et il ajoute, « T’avais raison, il s’est endormi avant la fin. » Tu ne remarquais même pas son mal être qui était soudain arrivé. Sa toux pour se remettre d'aplomb. En quatre ans, ton sens inouï pour déceler les sentiments de Nate avait sûrement disparu. Trop lointain pour l’exercer. « Toujours. J’ai jamais pu terminer une histoire avec lui. » Et c’est pas faute d’avoir essayé. Chaque fois, le lendemain matin, le petit arrivait pour demander ce qu’il se passait à la fin du livre raconté la veille. Tu étais bonne pour lui résumer rapidement pour ne pas perdre trop de temps dans ta journée de travail. Et puis la plupart du temps, il l’imaginait tout seul. C’était aussi ça d’être fils unique et de ne pas avoir de frère et soeur avec qui jouer. « Il a vraiment l’air adorable, Jimmy. Il est pas trop difficile ? » Tu hochas la tête en guise de non. « C'est un ange. » Tu avais eu beaucoup mal quand il était plus jeune, maintenant, il s’était calmé. Mais le pire avait été l’année de ses deux ans. L’absence du père s’était faite ressentir. Maintenant, il avait pris l’habitude de cette vie et avait bien grandi. Toi aussi, d’ailleurs.

Et la question fatidique t’arrive en pleine face, pas le temps de te préparer. Tous les gens que tu côtoyais l’avait posé une fois. « Tu lui a dit quoi... hum, pour son père ? » Tu soupires doucement, prenant place sur le comptoir. « Commence à manger avant que ça refroidisse, j’espère que ça te va, j’ai pas grand chose dans les placards. Je suis censée faire les courses demain matin.  » que tu répondis, complètement hors sujet, comme pour repousser ce sujet encore un peu plus. Rien que de penser à lui, ça te rendait folle. Et ça te donnait envie de boire un bon coup. Mais tu tenais bon, à chaque fois, depuis quatre ans. « Je lui ai dit qu’il était parti pour le travail. » Un rire noir s’installa, sans que tu puisses rien y faire. L’absurdité du mensonge te faisait du mal à chaque fois, car il y a bien un jour où il le remettrait en question. « Je savais pas quoi lui dire. » Tu enfouis ton visage dans tes mains, ça ne te rendait jamais trop heureuse de parler de ça. « Il l’a jamais vu de toute façon…. T’aurais voulu que je dise quoi ? » que tu lances, sans rage contre Nate, mais contre ce père évaporé.

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SURPRISE
@nate harrington

Quelle dure soirée. Toi qui pensait la passer comme d’habitude, après avoir endormi Jimmy, tu aurais filé dans ta chambre pour regarder un film. Là, contre toute attente Nathaniel était revenu, il venait de bousiller tout quotidien en quelques minutes. Parce que tu pourrais pas vivre comme tu le faisais maintenant avec lui dans les parages, faudra que tu te réadaptes. C’était pas grave, tu préférais qu’il soit là avec toi plutôt qu’à des milliers de kilomètres et qui plus est dans un pays étranger.
Après un début compliqué, vous vous étiez tous les deux détendus. Toi, surtout. La colère avait laissé place à du soulagement. La présence de ton fils t'apaisait dans n’importe quelle situation et dans ta vie de tous les jours, la preuve, tu n’avais ni crié, ni juré, ni frappé un objet ou même ton frère. Même s’il fallait l’avouer, il le mériterait.
Accoudée au comptoir de la cuisine, en face Nate, tu avais toujours ton visage enfoui dans tes mains, pour cacher ta réaction dès que le sujet du père avait été mis sur la table. Parfois, tu te demandais pourquoi tu n’aimais pas que les femmes, la question aurait été rapidement réglé. Tu aurais pas eu d’enfant. Pas d'inquiétudes à avoir. Mais malheureusement, tu pouvais pas choisir entre un sexe, c’était la personnalité et la beauté de la personne qui t’attirait. Ton frère pouvait très bien le comprendre lui aussi. Tu lui demandes ce qu’il aurait voulu que tu dises à Jimmy, J’sais pas. Il faudra bien lui dire la vérité un jour. Mais je pense pas que t’aie besoin de ce connard. T’as assez de ressource pour trouver de l’aide ailleurs. La preuve, t’as bien réussi jusqu’ici. Un rire nerveux sorti de tes entrailles, comme lui l’avait fait quand tu avais annoncé le mensonge que tu avais divulgué à ton fils : ‘le travail’. Mais toi c’était la preuve dont il parlait qui te rendait nerveuse, angoissée. Tu relevas la tête, sans montrer quoi que ce soit. Tu ne pouvais pas lui dire. Pas aujourd’hui. Peut-être plus tard. Et il continua, comme pour enfoncer le couteau dans la plaie, sans qu’il le sache. Je suis genre... vachement fier de toi. Tu avais l’impression de lui mentir à lui aussi, pourtant tu voulais pas que votre famille finisse comme ça. A cacher des secrets innombrables. Non, pas de ça entre vous. Mais, t’avais pas le courage de dire la vérité maintenant. Ton fils, il était trop petit pour comprendre. Quant à Nate, il s’en voudrait tellement, et puis surtout, il t’en voudrait à toi. D’avoir essayé d’abandonner encore une fois. Encore plus s’il savait qui t’avait repêché ce jour-là.
Qu’il dise qu’il était fier de toi, ça aurait dû te faire du bien, vraiment du bien, même si t’avait beaucoup évolué, y avait pas à être fière. T’étais pas encore sortie d’affaire, même après la désintox, l’arrêt de la cigarette, les AA, la diminution des médocs. T’avais toujours ces pensées en toi. Qui attendaient le moment propice pour sortir. T’as pas le temps de répondre, de te justifier, d’en placer une et tant mieux. Il te sauve la mise sans le savoir, en ajoutant, Et j’ai hâte d’apprendre à connaître Jimmy. Si tu m’en laisses la chance. Un sourire s’échappa, bien sûr que tu allais lui donner cette chance. Il te prenait pour qui ? T’étais pas une soeur si ignoble que ça. Puis c’est pas des blagues, tu m’as vraiment putain de manqué. Lui aussi.
Finalement, tu te relèves. Prête à répondre. A dissimuler une partie de la vérité. J’espère que tu regretteras pas d’être revenu, alors. Tu déposes un baiser sur sa joue, pour le remercier d’être là. Avec toi. Je t’aime, petit frère. J’vais aller me coucher, tu seras toujours là demain matin j’espère. Un sourire prend place à nouveau sur ton visage et tu t’en vas vers ta chambre, le laissant terminer son repas tranquille.
Et t’évitant de déballer des choses qui pourraient fâcher.
Et tu pensas qu’il fallait vraiment que tu parles à Gabin le plus vite possible. Pour garder le secret quelques jours de plus.
Ou pour toujours.
Bonne nuit ! que tu lances en refermant la porte derrière toi. La nuit te porterait sûrement conseil.