I've found a reason for me To change who I used to be. (Katheryn)

♛ I've found a reason for me To change who I used to be.

Isabella arrive en trombe à l’hôpital. C’est peut-être la première fois, depuis son mariage avec Luke, qu’elle est reconnaissante d’avoir un chauffeur à sa disposition. Elle a sauté de la voiture en le remerciant tout juste avant de se précipiter jusqu’à l’intérieur de l’établissement. Elle n’est pas venue ici depuis longtemps, depuis… Le décès de son frère. C’est loin d’être un endroit qu’elle affectionne, au contraire, mais elle en fait totalement abstraction à ce moment. Tout ce qui compte, pour elle, c’est d’avoir des nouvelles de Kristina. La voir. Elle n’a plus reçu aucun message depuis celui, alertant, qu’elle lui a envoyé un petit moment plus tôt. Ce n’est pas faute d’avoir essayé de la joindre, mais en vain. Elle ne sait pas exactement ce qui s’est passé, Isa. Elle sait juste qu’il y a eu une fusillade au sein de l’université de sa petite protégée. Elle a tenté d’obtenir quelques informations le long du trajet sur le web. Elle a même tenté de joindre l’accueil de la faculté, en vain, bien sûr. Mais elle ne sait rien. Simplement qu’il y a eu des morts, beaucoup de morts, et des blessés. Et si Kristina est à l’hôpital, c’est qu’elle est l’une d’entre eux. Alors elle a peur, Isa, elle a terriblement peur. Au fil des mois, la belle rousse est devenue l’une de ses plus chères amies, si ce n’est la meilleure, la seule. Elle ne peut pas concevoir qu’il lui soit arrivé quelque chose. Elle a déjà tellement souffert, elle a trop souffert pour que le sort ne s’acharne une nouvelle fois sur elle. Mais Isabella est bien placée pour savoir que la foudre ne se gêne pas, parfois, pour retomber au même endroit, deux, trois, quatre fois… Elle redoute terriblement que la mort ne vienne frapper une fois encore l’une des personnes qu’elle aime.

A peine arrivée, elle jette un bref coup d’œil dans la salle d’attente, comme pour espérer voir la chevelure flamboyante de Kristina, mais non. Il y a quelques personnes, mais pas elle. Sans plus attendre, la jeune femme approche alors de l’accueil. – Bonsoir, je suis là pour Kristina Ainsworth. Puis-je savoir où elle est ? Le ton de sa voix est calme, mais son regard, lui, est extrêmement inquiet. Cela n’atteint visiblement pas la réceptionniste qui, platement, lui demande. – Est-ce que vous êtes de la famille ? Isabella retient un soupir. Sa nervosité est de plus en plus palpable. – Je suis la personne à contacter en cas d’urgence. Isabella Kingston. Elle précise volontairement son nom, dans l’espoir que la notoriété de son époux puisse l’aider. Et c’est le cas. – Oh, c’est à votre famille que cet hôpital doit son dernier étage. Elle retient un nouveau soupir. Elle déteste cette façon de privilégier les gens selon leur réputation mais… Ça lui sert, indéniablement. Elle ne dit rien alors que son interlocutrice se décide enfin à consulter son ordinateur. Après quelques instants de supplice supplémentaire, elle lui donne enfin le verdict. – Elle est en consultation avec un médecin. C’est tout ? – Est-ce qu’elle va bien ?! – Je regrette, je n’ai pas d’information supplémentaire. Cette fois, Isabella lâche un profond soupir. – Je vous invite à patienter. Elle sortira certainement d’un instant à l’autre. – Bien. Loin d’être rassurée, Isabella rejoint finalement les sièges à quelques mètres du bureau d’accueil, en face d’une femme blonde d’une petite quarantaine d’années. Elle sent que l’attente va être insoutenable.

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Installée sur cette chaise inconfortable, l’esprit totalement en vrac, Isabella pense à sa meilleure amie. A la dernière fois qu’elle l’a vue. Elle était triste, un peu perdue dans ses sentiments si forts pour son enseignante, mais résignée aussi de se sentir rejetée une fois de plus. Ce soir-là, elle lui avait assuré qu’elle trouverait le bonheur un beau jour, qu’elle ne devait pas s’inquiéter. Que tout irait bien. Mais tout ne va pas bien. Kristina est quelque part dans cet hôpital, peut-être dans un état critique, peut-être qu’elle est en train de perdre la vie peu à peu. C’est affreux. L’idée même la rend folle. Elle tente pourtant de garder contenance, Isa. Elle prend une profonde inspiration et essaie de faire appel à sa raison. Le message de Kristi. C’est elle-même qui l’a informée, en lui disant qu’elle ne doit pas s’inquiéter, car elle va bien. Mais alors… Pourquoi est-elle avec un médecin ? Un service rapide a dû être mis en place par les ambulanciers pour les simples consultations. Et, à nouveau, elle se pose des centaines de questions. Elle est comme ça, Isabella. Quand elle ne contrôle plus la situation, elle se sent démunie, sans défense. Et terrorisée, aussi. Elle pourrait se torturer l’esprit encore longtemps, jusqu’à retrouver son amie, si elle n’entendait pas soudain une voix féminine s’adresser à elle. La Latina relève les yeux en direction de cette voix, celle de cette femme assise en face d’elle. Elle paraît tout aussi inquiète qu’elle mais, aussi, bouleversée. Elle a l’air d’avoir vécu un moment terrible. Peut-être a-t-elle assisté à ce massacre ou… Peut-être qu’elle a un enfant, quelque part dans cet hôpital. Isabella trouve enfin l’usage de la parole à cette pensée. – Oui, une amie. Très proche. Elle était dans l’université où a eu lieu… Cette fusillade. dit-elle la voix faible. Depuis le début, elle n’a pensé qu’à Kristina, mais elle se rend compte de l’horreur de la situation. Tant de personnes ont dû vivre, horrifiées, ce moment qu’elles n’oublieront jamais. Elle ne connaît pas beaucoup de détails, elle sait juste que c’est un étudiant qui a ouvert le feu. Tant de vies gâchées… C’est injuste. Elle pousse un soupir presque  imperceptible alors qu’elle reprend à l’attention de la femme qui lui fait face. – Je suppose que vous êtes aussi là pour un proche… C’est tellement dur, tout ça. Elle déteste se sentir si impuissante, elle déteste attendre ici, dans cette pièce si froide, elle déteste les hôpitaux. Tout ce qu’elle veut, c’est voir arriver sa petite Kristina pour ôter cette boule d’angoisse dans son ventre.

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L’angoisse qui la submerge est difficile, l’attente insoutenable. Elle ne sait pas combien de temps elle va pouvoir supporter cette situation, Isabella. Elle n’est pas du genre à faire éclater un scandale, elle a conscience que toutes les personnes présentes dans cette salle d’attente sont exactement dans la même situation qu’elle. Mais elle a du mal… Beaucoup de mal à tenir en place. Elle songe même à contacter Sullyvan, un instant, pour qu’il puisse lui en dire plus. Il serait la personne la mieux placée pour lui donner des informations sur sa meilleure amie. Leur meilleure amie. Mais peut-être n’est-il même pas au courant… Et elle ne veut pas lui faire peur, à lui aussi. Il doit se concentrer sur ses patients. Mais l’attente n’est pas moins insupportable pour autant. Heureusement pour elle, en quelque sorte, il y a cette femme qui lui parle. Elle n’est pas d’humeur à avoir une longue conversation sur la tragédie qui s’est déroulée mais… Peut-être qu’elle peut avoir plus d’informations. Et cette femme, elle aussi, semble avoir besoin d’un peu de compagnie. Elle a l’air complètement paumée, comme si elle avait vécu un traumatisme elle aussi… Peut-être bien que oui. A ses paroles, Isabella hoche la tête, fébrilement. – Oui mais… Je n’ai plus de nouvelle d’elle depuis un petit moment. Et c’est terrifiant. Elle déteste cette attente. Elle sait être patiente, mais pas quand ses nerfs sont mis à rude épreuve, pas quand il s’agit de la santé de l’une des personnes qu’elle aime le plus au monde. Sortant de ses pensées, elle entend alors son interlocutrice lui apprendre qu’elle est professeur au sein de l’université. Ses lèvres s’entrouvrent de surprise. – Oh… Vous y étiez alors… lâche-t-elle faiblement, sincèrement navrée pour elle. Elle comprend mieux pourquoi elle a l’air aussi mal. Mais sans attendre, elle saisit l’occasion qu’elle lui donne d’en savoir peut-être plus. – Kristina. Kristina Ainsworth. Est-ce que vous la connaissez ?

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C’est extrêmement difficile de rester ici, dans cette salle d’attente, sans rien pouvoir faire. Elle déteste se sentir impuissante, Isabella. Elle a toujours détesté cette sensation, et pourtant, Dieu sait qu’elle la connaît. Être ici lui rappelle des souvenirs douloureux, avec son frère, avec sa mère. Elle les a tous les deux perdus. Elle ne veut pas perdre aussi Kristi, non, elle ne peut même pas l’envisager. Mais peut-être que, grâce à cette femme, elle va pouvoir en savoir plus. Elle est professeur au sein de l’université, et visiblement, elle était aussi à l’intérieur quand la fusillade a eu lieu. Elle le confirme d’ailleurs rapidement, cet air encore douloureux sur le visage. Isa ne peut même pas imaginer l’horreur à laquelle elle a dû assister. Voir des personnes tomber les unes après les autres, voir des corps qu’elle connaissait, qu’elle voyait tous les jours, au sol, mortes. C’est affreux, ce qui s’est passé. – Je suis désolée pour vous, ça doit être extrêmement difficile. Mais l’information qu’elle n’oublie pas, c’est qu’elle connaît peut-être aussi Kristina. Le cœur rempli d’espoir, la Latina lui donne son nom, avec le souhait incommensurable de l’entendre lui dire qu’elle va bien. Et, déjà elle l’entend dire qu’elle la connaît. Elle fait presque un bond, Isa. Alors qu’au contraire, l’autre femme paraît se perdre soudainement dans ses pensées. C’est troublant, mais elle n’y accorde pas plus d’importance parce que tout ce qu’elle espère entendre arrive enfin. Elle va bien. Sa meilleure amie va bien. – Oh, Dieu merci… lâche-t-elle dans un souffle, laissant échapper une profonde expiration, comme si elle ne respirait plus tout à fait jusqu’à présent. Bien sûr, elle veut voir la belle rousse de ses propres yeux pour s’en assurer complètement. Mais cette femme vient de lui ôter un poids énorme du cœur. – Je vous remercie, j’avais vraiment besoin de l’entendre. Elle s’enfonce un peu plus confortablement sur son siège, essayant de retrouver son calme. Un petit silence s’installe, silence durant lequel Isabella songe à la réaction étrange de son interlocutrice. Elle repose les yeux sur elle, l’observe un instant. Se pourrait-il que… Cette femme soit Katheryn ? Elle hésite un instant, mais décide d’en avoir le cœur net, tout en jouant l’assurance. Juste au cas où. – Je ne me suis pas présentée. Isabella Kingston. Ne reste plus qu’à savoir face à qui elle se trouve.

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C’est une situation terrible, pour cette femme, pour tous les professeurs, pour tous les étudiants. Tourner la page sur cette histoire ne sera pas facile, assurément pas. La Latina se sent idiote d’être ici, sans rien pouvoir dire ou faire pour réconforter son interlocutrice. Mais elle ne la connaît pas, Isa. Et, tout en sachant faire preuve de douceur et de compassion face à une personne en détresse, elle n’a aucune idée de la manière dont elle doit réagir face à un mal-être présent, mais caché. Pour éviter de faire preuve de maladresse, elle préfère garder le silence tandis que l’autre femme lui propose finalement de lui donner le nom de sa meilleure amie. C’est avec un soulagement incommensurable qu’elle l’entend lui assurer que Kristina va bien. Toute son angoisse diminue, sans toutefois disparaître totalement. Pour cela, elle a besoin de constater de ses propres yeux l’état de la jeune femme. Mais un poids énorme vient de lui être ôté grâce à cette femme dont elle ne sait toujours pas le nom. Elle acquiesce en entendant les paroles de celle-ci suite à ses remerciements, bien d’accord avec elle. – Oui, c’est certain. murmure-t-elle dans un souffle, avant de reprendre finalement la parole pour tenter de lui offrir la pareille. Même si, malheureusement, il n’y a sûrement rien qu’elle puisse faire. – Et si… Vous avez besoin de quoi que ce soit, vous aussi, n’hésitez pas. Libérée de ses peurs, Isa se décide néanmoins à se présenter à son interlocutrice. En vérité, ce n’est pas uniquement une question de politesse. Elle ne peut s’empêcher de faire le lien entre le trouble de cette femme et… Celle dont lui a tant parlé Kristi. Elle pourrait tenter de se défaire de cette intuition, mais elle a besoin de savoir. Et le nom, arrive. Comme une évidence. Katheryn Wardwell. A ces mots, Isabella est surprise, comme si elle ne s’y attendait pas totalement. – Oh… Je suis… Ravie de vous connaître. lance-t-elle simplement même si, étrangement, cela ne sonne pas tout à fait vrai. Le ton de sa voix est relativement neutre, mais son regard est beaucoup plus révélateur. Car elle ne peut s’empêcher de se dire que c’est elle, cette femme qui a tellement fait souffrir sa meilleure amie. Elle devrait s’arrêter là. Elle ne devrait pas en dire plus. Mais son instinct protecteur est bien présent. Plus encore avec Kristi qui a déjà tant souffert. Trop souffert. – Kristina m’a énormément parlé de vous. ajoute-t-elle en se redressant, pour mieux ancrer son regard dans le sien.