22nd Street

{ 22nd street }
☾ w/@dusan valko

Des teintes de désir dans l'air,
Des teintes de plaisir pour défaire
Les regards indiscrets posés sur ton cou
Et les méfaits qui font vaciller tes genoux.

Seule dans un restaurant étoilé, la jeune femme a pris le temps de se faire plaisir pour la soirée. Ses revenus au Dark Mist sont incohérents. Il arrive qu'elle ne perçoive rien et il arrive qu'un chèque bien trop pimenté finisse dans sa poche en fin de soirée. Evidemment qu'elle a halluciné en voyant la somme à quatre chiffres inscrite sur le papier. Et évidemment qu'elle a envisagé d'appeler Adonis ou Sahel pour célébrer. Mais la belle avait surtout besoin d'un moment bien loin de l'agitation des artistes. Alors elle a pris un taxi et elle a demandé qu'on l'emmène dans un restaurant au choix mais dans un bel endroit. Le chauffeur n'a pas aimé qu'on lui laisse carte blanche. Puis il a compris que c'était l'occasion de faire tourner le compteur en emmenant sa cliente plus loin que le centre-ville. Elle revenait de l'extérieur, c'était donc une belle course à faire. C'est ainsi qu'il la dépose dans un endroit qu'elle ne connaît pas. On lui ouvre la porte et elle sourit. Elle porte cette robe rouge dont Adonis lui a parlé l'autre jour. Cette robe rouge qui était la sienne lors de leur première rencontre. C'est de ça qu'elle a besoin, de se plonger dans les effluves du passé et de redevenir une adolescente qui se découvre.

On lui ouvre la porte et elle sourit au garçon qui porte un costume trop serré pour l'occasion. Un petit clin d'oeil adorable, Beatrice est douceur. Installée près de la baie vitrée, elle regarde les véhicules et les hommes défiler. Les clients du restaurant sont trop guindés, trop riches, trop... peu naturels. Elle sourit en en voyant un entrer qui semble différent. Jeune, bien accoutré, il s'installe près du bar. Quel est ce malaise que je lis en toi? Elle hésite à se comporter comme une petite richarde et à lui envoyer un verre de champagne pour l'inviter à sa table. Cela ne lui correspond pas. Pourtant elle aime faire revivre des scènes cultes de films. Cependant, au lieu de ça, elle se lève et se dirige vers l'inconnu. Avec un toupet qui la caractérise bien, elle s'introduit. « J'ai l'impression que tu m'attends. » Son regard se pose sur son corps de manière flatteuse. Il est plutôt joli garçon. Trop jeune pour elle mais Beatrice n'est pas le genre à s'attacher à ce genre de détail. L'amour n'a pas d'âge et pas de genre. Et ici, il n'y a encore rien. Rien d'autre que le plaisir de la rencontre, du jeu. « Je m'ennuyais seule dans mon coin. Je t'offre un verre? » Avenante, elle bat des cils et lève déjà le bras pour permettre au barman de saisir qu'elle va passer commande. Elle a pris son verre de Merlot avec elle et n'a besoin de rien. Elle laisse juste son jeune ami indiquer ce qu'il prendra.

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☾ w/@dusan valko

L'acceptation pour seule réponse
Car la jeunesse jamais ne renonce
Aux plaisirs de l'ivresse printanière
Quand on vous offre le premier verre.

Elle sourit délicatement. L'inconnu n'est pas contraire. Il accepte de jouer le jeu de la rencontre attendue, de la relation destinée. Beatrice était partie pour passer la soirée en solo mais l'âme de l'homme l'a appelé. C'est comme s'il avait quelque chose à vendre au plus offrant mais qu'il gardait certaines parts de lui, bien enfouies, bien cachées. Elle le regarde commander du champagne et se félicite d'avoir les moyens de payer. Après tout, elle sait que même si son nouveau chèque est inattendu, elle a suffisamment économisé ces dernières années. L'étudiante en chimie ne dépense pas beaucoup. Et les rentrées financières s'accumulent sur les comptes illégaux et derrière les toilettes, là où Coban n'ira pas chercher. Parce que cacher du fric derrière la cuvette des toilettes c'est bien trop cliché.

« Ah bon? Je t'ai déjà dit des choses? » Elle sourit, ravie de découvrir un partenaire de jeu désireux de modeler la réalité. Beatrice ne comprend pas la méprise, ne voit pas qu'il y a erreur sur la personne. Non, tellement éprise de ce moment suspendu, elle n'a qu'une envie : l'emmener plus loin dans cette histoire qu'ils semblent écrire à deux en ce moment même. « Ma table est effectivement près des fenêtres. Mais pas au milieu de la foule. J'aime regarder les passants, pas m'y mêler. » Elle le conduit jusqu'à la table qu'elle vient de quitter et remarque qu'elle y avait laissé le reste de sa bouteille de Merlot, à moitié sifflée. Ce n'est pas très sage de la part d'une femme de son âge. Mais on n'est jeune qu'une fois. Elle se ressert dans un verre vide et pose ses lèvres dessus tout en dévisageant son invité. « T'as l'air préoccupé. » Son ton est doux, elle l'invite à se confier. Bea sait à quel point il peut être bon parfois de s'épancher, de vider son sac dans les oreilles de quelqu'un qui ne nous jugera pas. Elle a déjà mangé son entrée et le repas ne va plus tarder. Elle se demande s'il voudrait l'accompagner. « Ca te dit de partager mon assiette? » C'est peut-être trop romantique pour deux inconnus. Mais Beatrice se moque des convenances et des traditions. Elle a commandé un assortiment de pâtes prévu pour deux personnes normalement. Le serveur a roulé des yeux quand elle a fait son choix et lui a dit que ce n'était pas destiné aux personnes seules. Beatrice lui a alors gentiment rappelé que si elle voulait payer un plat pour deux personnes, il devait se contenter de le lui apporter et non pas la juger. Voilà que la loi de l'univers faisait son travail car elle n'était plus seule. Et quand les assiettes font leur apparition sur la table, le serveur la regarde avec mépris. Comme si j'avais invité un ami pour justifier que je voulais manger plus. Connard. Mais elle ne dit rien, elle sourit pour faire bonne figure et quand le serveur déguerpit, elle lance à son convive. « Je déteste ce genre d'endroits. La nourriture y est bonne, enfin elle a intérêt à l'être vu son prix. Mais les gens y sont si... coincés, peu naturels, on dirait des robots qui ne savent rien faire d'autre que juger. T'en penses quoi? » Elle ôte les verres qui les séparent pour lui donner plein accès aux plats. Les odeurs sont magnifiques et elle se réjouit malgré ses commentaires de goûter aux pennes à la crème et aux truffes.

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☾ w/@dusan valko

C'est comme s'il y avait un double jeu.
Comme s'il savait quelque chose qui lui échappait.
Comme si le mystère le rendait nerveux,
Comme s'ils allaient accomplir un quelconque méfait.

« Je comprends. Je n'aime pas ça moi non plus.  » Puis, elle se rend compte qu'elle tente de séduire et donc qu'elle ment. « Mmmh, en vérité, non. J'adore la foule. J'aime être au centre des gens, entourée de milliers d'humains qui vacillent, qui papillonnent, qui rayonnent. J'aime me sentir en vie parmi tous ces électrons vivants.  » Elle sourit, ravie d'avoir dit ce qui se trouve en elle et non pas un mensonge destiné à plaire à son invité.

Les plats arrivent et ils dégustent avec élégance ce qui se présente sous leurs yeux. Beatrice invite mais elle n'est pas pour autant coutumière de ce genre d'endroits. La haute gastronomie, cela ne lui ressemble pas. La belle est plutôt pizza du coin avec Coban, son coloc. Elle est plutôt fastfood dans le sous-sol du Sempiternal avec Ado ou Sahel. Et là, alors qu'elle mange de la nourriture raffinée avec un jeune homme bien sapé, elle se sent comme une riche cougar qui aurait invité un escort à l'accompagner. « C'est certain!  » Elle regarde autour d'eux et capture ce "tout ça" des yeux. « Si j'étais riche et que j'avais le pouvoir de faire ce que je veux, je réclamerais qu'on dise à ce monsieur de sortir d'ici.  » Elle indique la direction d'un homme aux traits sévères qui est plongé sur son ordinateur portable, probablement un homme d'affaires. « Et je dirais au serveur d'aller trouver cette femme et de lui indiquer qu'un anonyme lui a envoyé une bouteille de champagne.  » La femme en question a le visage triste et regarde par la fenêtre tout comme Beatrice le faisait plus tôt avant d'aller chercher de la compagnie auprès de Dusan dont elle ne connaît même pas le prénom. « Ha! Tu as retenu ça, n'est-ce pas?!  » Elle lui adresse un clin d'oeil en repoussant l'assiette devant elle, déjà repue. L'entrée avait été fort bonne et fort consistante. Les pâtes succulentes mais l'estomac de la Vaughan ne supporte pas tant de mets en une fois. Puis elle sait qu'un sorbet les attend en dessert et bien que cela passe tout seul, elle préfère lui laisser de la place. « Ca dépend des jours. J'aime me perdre dans la foule, baigner sous les projecteurs d'un DJ fou ou sous les ondes d'une musique qui m'entraîne. Mais j'aime aussi les moments plus calmes et plus doux.  » Comme celui-ci. Elle sourit et attrape son verre de vin blanc qu'elle porte à ses lèvres avant de lui demander « C'est drôle, j'ai pas envie de te dire mon prénom, de peur de gâcher ce moment différent des autres. Mais j'ai envie de connaître le tien. » Elle sourit en versant du vin dans le verre de son invité. Avec les pâtes, il faut qu'il goûte ce chef d'oeuvre, c'est obligé.