son of a preacher man ;phèdre

tu râles, grince des dents, enfouis ta tête un peu plus profondément dans l’oreiller. Ça bourdonne à coté de toi, foutue abeille coincée dans l’écrin de technologie qui vibre sur la table de nuit. il vient de là, tout le boucan qui te pousse à te réveiller, grimacer encore un peu. T’es crevé, t’es rentré tard et tu comptais pas te réveiller si tôt. et ce téléphone ne cesse de vibrer empêchant le moindre morceau de sommeil de rester accrocher à ton crâne et tes paupières. tu te redresses enfin, attrape l’appareil toujours vibrant. ta mère. c’est ta mère qui t’appelle. et tu fais le lien, très rapidement, un appel de ta mère un dimanche matin, c’est forcément que tu as loupé quelques choses.

tu te redresses, sans répondre, rejetant l’appel et balançant le téléphone sur le lit, un peu plus loin.
ça y est, tu sais ce que t’as oublié.
la putain de garden party.
Tu n'as pas envie d’y aller, tu détestes ça, devoir serrer des mains et revendre des sourires de si bonne heure le week-end. tu détestes faire ça, surtout quand t’es crevé. tu te traines jusqu’à la cuisine pour t’enfiler un ou deux café, te traine sous la douche pour espérer te réveiller, te traine jusque dans ta chambre pour retrouver le colis qui t’a été envoyé quelques jours plus tôt. un mot, écrit a la main, de ta mère. Plutôt rare pour être conservé, tu devrais même probablement l’encadrer. une boîte, un costume, blanc. tu détestes porter du blanc. tu l'enfile quand même pour traverser le quartier et rejoindre ta famille.

après midi ensoleillé, tu croises toujours les mêmes personnes, les mêmes têtes, sert les mêmes mains. tu joues le rôle, encore à la perfection, figuration tandis que ton frère y échappe, encore une fois. ta mère te félicite d’être à l’heure, d’avoir mis le costume qu’elle t’a envoyé, d’être à peu près frais et de bonne humeur. ton père lui, te fait la morale, parce que t'es pas assez souriant, pas assez enjoué d’être là, parce que putain il compte sur toi pour enrichir son réseau, le développé toujours un peu plus. il t’encourage, en te rabaissant, comme toujours, une grande tape dans le dos pour que t’aille t’amuser.

tu la repères, un peu plus loin, alors que ce vieil ami de ton père te bassine les oreilles sur son dernier voyage à Aspen. il te raconte comment il a offert à son rejeton l’un des plus grands chalets de la station, les journées qu’il passe en bas des pistes, parce qu’il est hors de question de monter sur des skis. pas à son âge. tu l’écoutes d’une oreille distraite, hoche la tête de temps en temps pour montrer que tu ne t’es pas endormis. tu ne la lâches pas des yeux, disparais en excuse, “désolé, je dois aller voir une vieille amie”, et par amie, t’entend Phèdre. qui d’ailleurs n’est pas vraiment une amie. qu’est-ce qu'elle est au juste ? une connaissance ? une ex peut-être ? elle est ce genre de personne qui gravite dans ton cercle sans pour autant pouvoir y coller une étiquette. tu savais qu’elle serait là, elle t’en avait parler, entre deux insultes sur ta mère, ou sur les conditions de ta venue au monde. vos relations ne sont pas très bonnes, et ce depuis un moment. pourtant tu t’aventures quand même, arrive derrière elle, un verre de champagne à la main. “je me souvenais pas que le blanc t’allait aussi bien”, tu joues, encore, joue au con River, toujours. provoquant quand tu la frôles, te pose à côté d’elle, t’impose plus tôt. une gorgée de pétillant, “alors Batten, tu t’amuses ?”, parce que toi, toi tu t’ennuies, et tu sais qu’elle pourrait y remédier…

@phèdre batten