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 Le silence est mort et le tien me glace [Médée]

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Message Sujet: Le silence est mort et le tien me glace [Médée]   Le silence est mort et le tien me glace [Médée] Empty Mar 16 Fév - 17:54







Il a fallu annuler tous ses rendez-vous, demander à ses hommes de confiance de prendre la relève pour les rencontres les moins sensibles où sa présence n’était pas absolument nécessaire. Assise à l’arrière de la Bentley noire qui la conduit à l’aéroport, Irène appelle ses clients les plus prestigieux pour reporter les dîners, reprogrammer les réunions, jouer d’un rire factice et d’une phrase doucereuse pour s’assurer toujours les faveurs de ses interlocuteurs qu’elle délaisse bien malgré elle. La finesse et la séduction… Irène a toujours su comment murmurer aux oreilles des bonnes personnes. Mais si cette qualité est essentielle pour espérer maintenir sur pied une affaire aussi grande que la sienne, elle devient vitale quand il s’agit de conserver l’appui des puissants malgré sa propension à revoir ses engagements quelques heures seulement avant de les honorer.

Peu sont ceux qui s’émeuvent de savoir l’avocate aux prises avec quelques imprévus fâcheux. Après tout, l’ensemble de ses connaissances, à l’exception des plus naïves, se doute de la réalité de ses affaires et des complications qu’elles peuvent engendrer. Alors, leur indulgence se mesure à leur satisfaction de savoir leur sale besogne prise en charge, qu’importe si cela nécessite de voir la cheffe de famille reporter un ou deux déjeuners. Mais bien peu d’entre eux s’imaginent la nature exacte de l’imprévu qui a bouleversé l’agenda de la matriarche aujourd’hui car, si les tourments familiaux ont toujours existé, même chez les Marlowe, tous les membres de la famille ont appris très vite à ce qu’ils demeurent étouffés dans le cercle très restreint qu’ils composent. Qui viendrait-donc penser que c’est pour voler au secours de sa fille qu’Irène Marlowe a demandé de n’être dérangée qu’en cas d’urgence véritable ces trois prochains jours ?

Elle remercie son chauffeur en descendant du véhicule et ses talons claquent énergiquement sur le sol immaculé de l’aéroport alors qu’elle se présente à la porte d’embarquement une petite dizaine de minutes avant son décollage pour le Canada. Assise en première classe dans un fauteuil qui paraît presque trop grand pour elle, Irène a le regard posé distraitement sur les irrégularités du cuir du siège devant elle. L’ongle de son pouce caresse sa lèvre inférieure en une douceur mensongère car, sans dans sa tête, le chaos gronde.

Voilà des années que sa fille aînée ne l’a plus appelée, des années qu’elles ne se parlent plus que pour évoquer les affaires mafieuses dans lesquelles elles trempent. La froideur de leur relation n’a jamais tiédi depuis que Médée a grandi, enterrant ses espoirs de petite fille pour voir enfin toute la cruauté du comportement de sa génitrice, la passivité dont elle a fait preuve face à la dureté de son père et le cynisme avec lequel elle l’a préparée aux épreuves de ce monde. Irène ne s’est jamais caché la rudesse de l’éducation qu’elle a donné à ses enfants. Mais elle a toujours été convaincue de sa nécessité et, aujourd’hui encore, elle ne doute pas un instant de la légitimité de ses choix. Pourtant, elle ne peut s’empêcher de trembler devant la rancœur de sa fille et, à chaque rejet qu’elle subit, c’est une douleur lancinante qui revient poindre dans son estomac, comme un rappel des sacrifices dont elle continue de sentir la brûlure chaque fois que Médée la replace devant ses manquements de mère.

Alors, ce matin, le message de sa fille a eu l’effet d’un uppercut, un coup en plein ventre quand elle a compris que sa détresse était assez forte pour qu’elle en vienne à l’appeler, elle. Depuis des années, Médée ne compte que sur son frère pour la relever dans les moments les plus difficiles. Se peut-il que le duo ait fini par s’autodétruire, que frère et sœur se soient déchirés à force de trop partager ? Voilà longtemps que les commérages trempent James et Médée dans l’opprobre. Irène n’a jamais voulu y prêter trop attention, reconnaissant là les rumeurs qui naissent dans tout corps de métier et dans tout groupe social dès lors que deux âmes fusionnent assez pour que leur lien soit visible de tous. Toutefois, elle ne peut pas ignorer qu’elle aussi voie leur fusion d’un œil inquiet depuis quelque temps, tant celle-ci semble tout dévorer, jusqu’aux sphères les plus intimes de leurs vies. Est-ce ce lien qui étrangle désormais Médée au point qu’elle vienne demander son aide, chercher un appui sur l’une des dernières personnes capables de raisonner son frère ? Irène ne sait ce qu’elle doit croire, mais durant les six heures d’avion qui la mènent à Vancouver, cette seule idée accapare toutes ses pensées.

L’ascenseur grimpe l’immense building pendant une éternité. Les yeux rivés sur le décompte des étages, les mains serrées sur la hanse d’un petit sac de voyage qu’elle a préparé à la hâte, Irène peine à maquiller l’angoisse qui s’est emparée d’elle. Sa respiration est rapide, sa position instable. Ses escarpins bougent en une série de petits mouvements qui ne cessent de la faire changer d’appui. Elle se demande dans quel état elle trouvera sa fille, ce qu’elle acceptera de lui livrer, ce qu’elle attend d’elle. Le simple fait qu’elle ait bien voulu la voir laisse la matriarche dans un entre-deux très pénible, un soulagement mêlé de crainte : celle de voir tous ses espoirs piétinés à l’instant où elle franchira la porte du penthouse, de se voir repoussée une nouvelle fois maintenant que de longues heures ont passé et que Médée a eu le temps de réfléchir. Acceptera-t-elle seulement de lui ouvrir ?

Arrivée devant la porte de l’appartement, Irène se fige, ses doigts en suspens sur la poche de son blaser. Les clés sont à l’intérieur. Elle pourrait ouvrir sans difficulté. C’est elle, la propriétaire. Mais elle n’ose pas.

Alors, après une dernière inspiration, elle frappe deux fois, deux coups assez déterminés pour donner l’illusion d’une confiance finalement bien vacillante. Elle n’entend rien de l’autre côté du battant. Elle espère simplement que Médée ne s’est pas évaporée avant qu’elle n’ait le temps de la rejoindre.

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Message Sujet: Re: Le silence est mort et le tien me glace [Médée]   Le silence est mort et le tien me glace [Médée] Empty Mer 17 Fév - 15:42



vancouver lui semblait être la planque parfaite,
pour quelques jours, quelques semaines, peut-être même des mois si l'envie lui prenait. personne ne viendrait la chercher ici, puisque personne ne connaissait cet appartement que gardait secrètement sa mère. un penthouse dont elle avait réussi à se procurer les clefs des années auparavant, comme si elle avait toujours su qu'elle en aurait besoin. mais elle n'aurait jamais dû écire à sa mère, dévoilé son point de replis à cette femme en qui elle n'avait plus confiance.
médée l'avait regreté, aussitôt son message envoyé, comme elle avait regretté de lire qu'elle prendrait le premier vol dans la matinée. elle ne s'était pas fatiguée à écrire quelques lignes pour la rassurer, pour lui prier de ne pas la rejoindre, elle savait sa mère plus têtue qu'elle ne l'était elle-même. sa décision devait être prise depuis son premier texto. les années s'étaient écoulées dégradant de plus en plus la relation mère-fille, jusqu'à atteindre un point de non-retour qu'aucune ne pourrait effacer. pourtant, elle venait de jeter une bouteille à la mer avec l'espoir qu'Irène sans saisisse. elle était la seule à pouvoir remettre de l'ordre dans ses idées noires, la seule qui pourrait comprendre l'ampleur des dégats infligés par ce frère qu'elle ne savait plus aimer.

marlowe n'a pas fermé l'œil de la nuit, ses doigts encore accrochés à un verre de whisky vide depuis des heures. son esprit torturé par sa dernière conversation avec james, elle a tenté de rejeter chacune des émotions l'ayant traversé. elle s'est murée dans un silence de plomb, bientôt mis à mal par les coups qui frappent contre la porte. elle est là, pourquoi n'entre-t-elle pas ? la blonde reste assise de longues minutes, pensive, peut-être n'est-elle pas obligé de s'infliger une énième conversation douloureuse. peut-être peut-elle faire la morte, Irène tournerait ainsi les talons pour rejoindre new-york, cette ville où elle trouvera mieux à faire. elle finit par se redresser, le verre toujours à la main. elle porte encore les vêtements de la veille, son visage entier retranscrit le manque de sommeil et l'apocalypse qui se joue sous l'épiderme. les quelques pas qui la séparent de l'entrée lui paraissent être une épreuve et quand elle ouvre, c'est d'un œil suspect qu'elle la toise. irène, comme son propre reflet déformé. son regard s'attarde sur le bagage qu'elle tient fermement. tu comptes rester ici combien de temps ? elle siffle, emmenant le verre à ses lèvres et rageant en le trouvant vide, elle lui tourne le dos pour disparaître dans l'immense salon. c'est donc ici que tu caches tes vilains secrets ? lance-t-elle en l'entendant arriver derrière elle, sans même se retourner. ses doigts déjà occupés à verser l'ambre au fond du cristal. elle a trop bu. beaucoup trop pour ne pas se faire piquante.



@irène marlowe
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Message Sujet: Re: Le silence est mort et le tien me glace [Médée]   Le silence est mort et le tien me glace [Médée] Empty Sam 27 Fév - 19:48







L’attente est longue de l’autre côté de la porte. Un instant, Irène pense même qu’elle est arrivée trop tard ; qu’après un temp de réflexion, Médée a regretté de lui avoir avoué le lieu de sa retraite et s’est enfuie où elle ne pourrait pas la trouver. C’est sans doute l’issue la plus probable de la conversation qu’elles ont eue en début de matinée : un moment de faiblesse bien vite refoulé par cette fille trop fière et trop marquée par des années de déceptions répétées face au comportement de sa mère. Irène sait tous les reproches qu’elle tait dans le seul but de maintenir cet équilibre familial délicat, car toutes deux sont trop conscientes du rôle indispensable tenu par chacune. Mais l’entente n’est que silencieuse, conservée par cette distance qui s’est glissée entre elles au fil des années. Peut-elle perdurer si elles se rapprochent comme elles s’y risquent peut-être aujourd’hui ? Irène est incapable de le dire et alors que les secondes continuent de s’égrainer avec une cruauté manifeste, elle sent la tension qui tire encore dans ses lombaires comme une mise en garde pour l’empêcher d’espérer trop de cette journée.

La clé toujours dans sa poche de blaser implore qu’on l’utilise enfin. Un long moment, Irène y pense, hésite, se persuade finalement de ne la glisser dans la serrure qu’une fois certaine que Médée n’est plus dans l’appartement. Elle ne veut pas s’imposer plus qu’elle ne le fait déjà. Elle ne veut pas refuser à sa fille cette fuite qu’elle a décidée depuis des années. Si Médée veut encore la garder en dehors de sa sphère, si elle n’est pas encore prête à lui ouvrir cette porte, Irène se tiendra éloignée, le cœur fendu mais toujours battant, prêt à attendre encore une autre éternité pour que son aînée la laisse de nouveau l’atteindre. Immobile derrière le battant clos, Irène réalise toute la symbolique du moment auquel elle se soumet, au point qu’elle ne frappe même pas une seconde fois sur le bois. Sa demande a déjà été entendue si Médée est bien à l’intérieur. Irène ne poussera pas davantage.

L’attente ronge l’espoir de la matriarche jusqu’à manquer de l’avaler tout entier. Ainsi, quand le loquet claque et que la porte tourne enfin sur ses gonds, c’est une surprise véritable qui se lit sur le visage d’Irène qui découvre son enfant épuisée, le teint blême, la main serrée autour d’un verre vide qui n’a pas dû connaître beaucoup d’eau ces dernières heures. Son cœur heurte douloureusement sa poitrine, ôtant de sa bouche les quelques mots qu’elle aurait aimé savoir prononcer. Face à elle, Médée la jauge, visiblement hésitante, avant de baisser le regard sur le sac de voyage qu’elle tient toujours entre ses doigts. La question qui suit frappe sa mère de sorte qu’elle répond à contre-temps, mais avec une douceur intacte :
- Le temps que tu voudras.
Médée grimace. Son verre monte à ses lèvres pour ne leur donner qu’une goutte abandonnée en un geste désorienté. Combien en a-t-elle vidé avant celui-ci ? Bien trop pour être raisonnable, c’est une certitude. L’inquiétude pince son cœur, mais Irène ravale toutes les critiques qu’elle pourrait faire. Après tout, elle n’est pas la dernière à venir chercher certains soirs le réconfort que seul le liquide ambré d’un whisky sait apporter.

Finalement, Médée se détourne, laissant la porte ouverte en une invitation silencieuse, sans doute résignée, pour laisser entrer sa mère. Irène pénètre alors dans le penthouse resté déserté depuis de longs mois. Elle ne s’y rend pas souvent. Les affaires sont trop prenantes, pire encore depuis la montée des tensions avec les Ferreira. Mais cet appartement est un refuge loin de tout qu’elle aime savoir disponible dans les moments les plus difficiles.

Le tintement du verre fait lever les yeux d’Irène sur sa fille qui se sert une nouvelle dose d’alcool. La veuve retient le geste qu’elle aimerait faire pour l’arrêter, allant même jusqu’à la rejoindre pour se servir à son tour. La voix de sa fille siffle, incisive. Irène a retrouvé quelque peu sa contenance et l’habitude de leurs échanges tendus. Elle ne s’émeut donc pas de la morsure qui teinte les mots de Médée et y répond avec un triste naturel :
- Certains, oui. Je me suis dit qu’il serait toujours utile.
Puis, elle ajoute en croisant le regard de sa fille :
- Je suis heureuse que tu l’aies trouvé.

Quelques secondes se perdent dans un silence oppressant mais attendu. Mère et fille ne se sont plus parlé depuis si longtemps… La spontanéité n’est plus, comme toutes ces choses que les membres d’une même famille n’ont normalement pas besoin de formuler pour que les autres comprennent. Entre elles, quelque chose s’est cassé sans qu’elles ne parviennent encore à en rassembler tous les morceaux. Alors, les silences se multiplient et les efforts s’alourdissent à mesure qu’elles doivent les accumuler pour réussir à se parler.

Pourtant, Irène sait qu’elle n’est pas venue pour rien et si Médée a bien voulu lui ouvrir, c’est qu’elle a consenti elle aussi à exorciser jusqu’au bout ce mal qu’elle a laisser paraître en filigrane de ses messages ce matin. Se peut-il que la déchirure qui s’opère avec son frère soit semblable à celle qui les sépare toutes les deux depuis des années ? Irène n’ose y croire. Mais, si c’est bien cette vérité qu’elle est venue chercher, c’est avant tout la douleur criante qu’elle lit sur le corps de sa fille qu’elle veut tenter d’apaiser si ce pouvoir est encore sien.

Elle porte alors son verre à ses lèvres pour trouver dans le whisky tiède les dernières bribes de courage qu’il lui manque. Puis, elle souffle, toujours sans la moindre agressivité :
- Nous ne sommes pas obligées de parler si tu ne le veux pas. Ou pas tout de suite. Nous avons le temps. Autant de temps que tu le souhaites.

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Message Sujet: Re: Le silence est mort et le tien me glace [Médée]   Le silence est mort et le tien me glace [Médée] Empty Sam 6 Mar - 19:06



rien. absolument rien ne serait en mesure de rattraper cette relation mère-fille éteinte depuis trop longtemps. puisque médée se souvient de tout. des regards appuyés de sa mère face aux atrocités du père, de son dos disparaissant à l'angle d'un couloir, de ses mots qu'elle ne prononçait pas. médée se rappelle de tout. de cette injustice ressenti depuis le plus jeune âge, de cette peur qui l'habitait et qu'irène ne venait jamais calmer. alors la fille marlowe s'est construite sans elle, loin d'elle, acceptant sa présence pour le seul bien des affaires familiales. pas un mot de plus, pas de textos échangés, pas d'appels, pas de sourire lorsqu'elles étaient enfermées seules dans la même pièce. de cette femme, médée ne voulait plus rien savoir. ni ses états d'âmes et encore moins les raisons l'ayant poussé à se comporter de la sorte. pourtant, aujourd'hui, c'est vers elle qu'elle s'est tournée. puisqu'il n'y a qu'elle, pour enrayer la machine infernale. il n'y a qu'elle, qui trouvera les mots, qui parviendra à mettre un terme à tout ce cirque qui la rend malade.

dans ses mains le verre tremble, sous la colère sans doute, la fatigue aussi. et quels sont les secrets que madame marlowe désire cacher aux yeux de tous ? qu'elle demande, ses yeux fixés sur la ville qu'elle n'apprécie même pas. le canada et ses températures négatives ne l'ont jamais attiré. je suis heureuse moi aussi, d'avoir mis la main dessus. ce n'est qu'une preuve supplémentaire de ton incompétence. médée est hargneuse, jette sa haine contre cette femme assez solide. le respect est là, quelque part, caché sous toutes les couches d'amertume. la blonde se tourne enfin vers sa mère, l'observe de longues secondes et se demande si elle aurait pu l'aimer. autant qu'elle aime son frère. sans doute, puisque aujourd'hui c'est leurs têtes à tout les deux qu'elle voudrait voir tomber. pour tout ce qu'ils lui on offert et tout ce qu'ils ne pourront jamais lui offrir.

elle ricane aux mots d'irène, s'abreuve du whisky pour ne pas fondre en larmes. qu'est-ce qu'il y aurait à dire de toute manière ? sa mâchoire se crispe, elle inspire, que les gens qui m'entourent ne sont bons qu'à creuser ma tombe ? elle arque un sourcil, s'éloigne du corps de la génitrice car la proximité l'incommode. je ne veux plus le voir. je ne veux plus. je ne peux plus. cette fois, il est allé trop loin. je ne suis pas capable de me sortir de cette histoire toute seule irène. il faut que tu fasses quelque chose. elle ne demande pas, elle ordonne comme à son habitude. je ne supporte plus de me trouver en sa présence, c'est trop. tu comprends ? elle fait volte-face, ses iris clairs s'ancrant à ceux de sa mère.


@irène marlowe
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Message Sujet: Re: Le silence est mort et le tien me glace [Médée]   Le silence est mort et le tien me glace [Médée] Empty Ven 12 Mar - 14:11







La brûlure de l’alcool n’est rien face à celle que lui infligent les mots de son aînée. Chaque syllabe bouillonne du fiel que Médée garde enfoui dans son cœur depuis des années, macérant comme un poison dont elle s’enivre plutôt que de risquer d’emporter toute sa famille dans les abysses en voulant faire ployer sa mère. La résistance de sa fille est aussi solide que coûteuse : elle se paye en années de colère, d’incompréhension et de rancœur que les deux femmes acceptent enfin de se laisser voir en se retrouvant face à face, seules, sans qu’aucune diversion ne puisse leur éviter la confrontation qui s’annonce.

Le ton de Médée est sec, sans concession, volontiers railleur dans une dépréciation constante qu’Irène encaisse sans vaciller. Elle sait que fléchir ne ferait qu’enrager davantage sa fille, mise face à la preuve indiscutable de la faiblesse dont elle l’accuse depuis qu’elle est entrée dans l’adolescence. Il est inutile de décevoir ses enfants davantage que ce que la vie impose déjà.
- Souhaiterais-tu vraiment les entendre ? Après tout, tu n’as pas eu besoin d’eux pour me détester. Et, s’ils pouvaient fragiliser certaines de tes convictions, les écouterais-tu seulement ?
Sa voix reste immuablement posée, sans une once d’agressivité. La question est sincère, étonnamment franche face à cette fille qu’elle sait pourtant avoir perdu. L’espoir de la retrouver s’est éteint il y a longtemps déjà. C’est peut-être un autre apaisement qu’elle cherche au fond de son cœur : celui qui lui permettra de se dire que Médée sait tout et décide en pleine conscience, loin des visions fantasmées que ses blessures ont pu glisser dans sa tête. Les choses ne se règleront ni aujourd’hui, ni demain. Mais dans six mois, dans dix ans, qui sait ? Peut-être pourront-elles au moins savoir définitivement l’origine de cette cassure qui les a opposées.

La morsure suivante trouble quelque peu la respiration de l’avocate. Son regard revient se poser sur sa fille, se nourrir de sa haine pour se gonfler de courage. Le timbre est légèrement plus ferme, mais son visage ne se crispe pas.
- Penses-tu vraiment que je voulais qu’il reste secret pour mes propres enfants ? Que je voudrais d’un abri entièrement dédié à ma seule retraite, qui vous échapperait à ton frère, ta sœur et toi, même quand vous en auriez besoin ? Tu connais mes défauts mieux que quiconque, Médée. Tu n’y as jamais été aveugle. Mais tu sais aussi ce que je défends plus que tout au monde.
La demande est tacite, restée silencieuse par pudeur, mais c’est bien cette reconnaissance qu’Irène espère voir dans les yeux de sa fille, cette certitude qu’au milieu de tout ce ressentiment, Médée sait l’amour de sa mère et qu’en dépit de tout ce qu’elle a pu leur faire subir ou les laisser endurer, tous ses choix n’ont été faits que dans le but de les mettre à l’abri de toutes les menaces, à commencer par celle d’une vie creuse, pauvre et sacrifiée pour embellir celles d’autres hommes aux destinées plus heureuses.

Irène porte son verre à ses lèvres, s’offrant une nouvelle gorgée de whisky. Elle ne repousse pas longtemps le sujet pour lequel elle et sa fille se sont retrouvées ici. Le poids du non-dit est sans doute plus lourd encore que la peur des blessures qui viendront inévitablement quand celui-ci sera dévoilé. Irène sait combien Médée est bouleversée. Le simple fait qu’elle l’ait appelée, elle, l’ennemie si clairement désignée depuis des années entières, démontre cette ruine qui est la sienne et les dernières accroches qu’il lui reste, aussi douloureuses soient-elles. Alors, sa mère tend la main, avec toute la douceur qu’elle est en mesure d’invoquer. Mais le ricanement glacial de Médée lui rappelle toute la dangerosité de la discussion dans laquelle elles se lancent.

La souffrance de son aînée vibre jusque dans sa poitrine, faisant trembler ce cœur de mère qui n’a jamais cessé de battre pour aucun de ses enfants, même la plus difficile. Médée semble déjà résignée, si profondément blessée qu’Irène s’inquiète de ce qu’elle sera peut-être incapable de faire, inapte à réparer. La relation qui unit frère et sœur depuis le début est si puissante, si inaccessible à tout autre qu’Irène se sent désarmée. Mais elle écoute, avec toute l’attention qu’une mère peut donner. Elle voudrait comprendre, loin des rumeurs et des impressions très subjectives, ce qu’il se passe dans cette fratrie qui semble s’autodétruire à trop vouloir fusionner.

Les yeux bleus de sa fille viennent soudain croiser les siens et le cœur d’Irène rate un battement, troublé par ce seul contact qu’elle croit ne plus avoir connu depuis bien trop longtemps. La voix de la matriarche tremble un peu désormais.
- Que s’est-il passé, Médée ? Je dois comprendre…
Quelques secondes s’enfuient.
- Je ne peux pas vous aider si je ne sais pas ce qu’il se passe. Cet univers n’acceptait que vous deux. J’en suis toujours restée à l’écart, comme votre sœur. C’était l’équilibre que vous aviez trouvé. Je ne peux pas intervenir si tu ne m’ouvres pas cette porte-là.
Elle aimerait la toucher, poser une simple main sur son bras. Mais elle s’y refuse. Sa voix s’abaisse alors, touche des notes graves qu’elle n’adopte que rarement.
- Dis-moi ce qu’il a fait.

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Message Sujet: Re: Le silence est mort et le tien me glace [Médée]   Le silence est mort et le tien me glace [Médée] Empty Mar 16 Mar - 14:35



peut-être est-elle trop dure avec irène.
peut-être devrait-elle lui laisser, une fois seulement, le bénéfice du doute. qu'elle lui explique ce qui l'a poussé à agir de la sorte. pourquoi a-t-elle laissé son mari martyrisé à ce point son enfant ? pourquoi ne s'est-elle jamais interposée entre lui et elle ? pourquoi lui a-t-elle laissé subir toute cette violence ? elle n'en garde pas de marque physique, seulement psychologiques. s'est forgée sur les principes d'isaac au point de devenir cet être complétement vide. ce n'est pas seulement lui le fautif, ce n'est pas lui qui a anéanti toutes les émotions qui auraient pu traverser son organisme. ce sont eux, eux tous. de son père à sa mère en passant par son frère. ou alors est-elle née comme ça ? vidée pour l'éternité. les questionnements internes sont accentués par tout l'alcool qu'elle ingurgite depuis deux jours. il met son cerveau à rudes épreuves.

non, tu as raison. je ne veux rien connaître de tes petits secrets. qu'elle siffle à l'encontre de sa mère. qu'importe, ils ne résoudront rien, certainement pas l'image qu'elle peut avoir d'elle. Sa mâchoire se crispe aux mots de la génitrice, arrête. arrête de dire des conneries. j'sais surtout ce que tu ne défens pas. moi. moi. moi. tu ne m'as jamais défendu. tu m'as laissé seule face à un monstre, jusqu'à ce qu'elle naisse, le dernier bijou des marlowe. il n'y a pas de jalousie, elle n'a jamais envié sa petite soeur qu'elle a accepté comme un cadeau. isaac n'était plus le même, isaac est devenu un autre à la naissance de sa dernière fille. la vieillesse sans doute. l'impression d'avoir râté sa vie. elle ne sait pas et elle ne saura jamais. le résultat est le même, deux enfants déviants pour un seul qui tient réellement la route. finalement, elle commence à parler de james, se perd dans ses paroles, émet des phrases qui n'ont pas le moindre sens, elle tourne autour du pot pour ne jamais avoir à dévoiler toute cette horreur qui grandit en elle. rien n'est normal. elle mériterait la mort pour de telles pensées.

épuisée, médée se laisse tomber dans un fauteuil, son regard toujours ancré à celui de sa mère. elle peine à masquer la souffrance qu'elle ressent. la petite fille qui vit en elle aimerait se lover contre la poitrine de sa mère, pleurer à chaude larme pour assumer la faiblesse qui l'anime. mais elle reste statique, ricanant aux mots d'irène. ne me dit pas que tu ne sais pas. ne me dit pas que tu ne sais rien. beugle-t-elle avant de masser sa tempe douloureuse. c'est évident. ça devrait l'être surtout pour toi. puisqu'une mère sait tout, agissant dans l'ombre mais consciente des réels problèmes. c'est un lâche. un putain de lâche. il s'est tapé la seule femme qui avait un semblant d'importance pour moi. tout ça, tout ça parce que je voulais que tout s'arrête. qu'il me laisse enfin, vivre ma putain de vie. elle n'aime pas geindre de la sorte, mais ne parvient plus à se contenir, la colère sous l'épiderme. il insinue des atrocités. il pense que c'est lui. il pense que c'est lui que je veux. mais c'est impossible. elle crache enfin le morceau, ne sent même pas ses yeux s'embuer de larmes maintenant qu'elle a prononcé tout ce qu'elle ne voulait pas voir.


@irène marlowe
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