My salvation. (joey)

Deux semaines. Deux semaines maintenant qu’Alessia était sortie du centre psychiatrique dans lequel elle avait été internée. Elle avait tenté de se suicider. Elle avait tenté de mettre fin à ses jours parce que la réalité était devenue bien trop insupportable. Elle qui, auparavant, était une jeune femme forte et rayonnante, avait été brisée de trop nombreuses fois. Elle avait beaucoup trop encaissé. De la mort de ses parents, à son placement en foyer d’accueil où elle avait été maltraitée durant une longue année. Se retrouver à la rue à seulement dix-huit ans, et finalement être sauvée par un homme pendant de belles années, pour qu’il abuse d’elle et finisse par la briser de nouveau. Suite à cela, elle s’était retrouvée internée dans cet hôpital pour se reposer et surtout… Guérir de sa dépression.  C’était ce que lui avaient dit les médecins, là-bas. Mais après plusieurs mois enfermée, elle avait finalement était libérée et… Désormais, elle devait reprendre sa vie là où elle s’était arrêtée. Le seul problème, c’était qu’elle n’avait jamais vécu.  Elle s’était simplement contentée de survivre. Et si elle était sortie de ce centre, elle n’en était pas moins instable pour autant. En réalité elle était même plus perdue qu’elle ne l’avait jamais été. Mais elle ne pouvait pas le montrer. Elle ne devait pas le montrer, Alessia. Elle ne voulait pas que quiconque puisse voir à quel point elle pouvait avoir souffert.  Et surtout, elle ne parvenait plus à avoir confiance en qui que ce soit. Encore moins aux hommes, après ce que Dean lui avait fait. Cette personne en qui elle avait donné toute sa confiance et qui avait fini par la trahir. Alors ce qui lui était arrivé il y avait quelques jours de cela n’était peut-être pas si surprenant. Lors d’une soirée dans un bar, un peu trop arrosée du côté d’Alessia, elle avait été abordée par une femme. Joey. Une magnifique brune, la quarantaine, visiblement sous son charme et souhaitant repartir avec elle. Et elle s’était laissée entrainer, Alessia. Pour la première fois de sa vie, avec une femme. Elle avait encore du mal à croire qu’elle avait eu une aventure avec une femme et pourtant s’était arrivé. Et la présence de Joey lui avait réellement fait du bien, l’espace d’une soirée. Peut-être parce que cette belle brune ignorait tout d’elle. Peut-être parce que Joey ne la voyait pas comme une folle ayant subi des maltraitances toute sa vie et tout fraichement sortie d’hôpital psychiatrique. Mais peu importe, même si elle ne comprenait pas vraiment ce qui se passait entre elles, elle avait passé un bon moment, Alessia. Alors elles s’étaient échangées leurs numéros de téléphone et ce soir, elle avait reçu un message de Joey qui l’invitait chez elle. La jolie brune hésita alors quelques secondes, avant de finalement prendre ses affaires et de la rejoindre. Une fois devant chez elle, elle sonna à la porte, se mordillant légèrement la lèvre. Et après quelques secondes, elle vit Joey apparaître. Salut toi… ! Elle lui fit alors un beau sourire. Quelque peu intimidée de la revoir, parce que cette fois, elle n’était pas ivre, Alessia. Elle était parfaitement elle-même. Tout du moins, la bonne partie d’elle.

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   Affalée sur le canapé, le bras pendu jusqu'à ce que ma main touche le sol, c'est un klaxon dehors qui me surprend, qui me réveille, ou tout simplement c'était un message de Dieu pour que je me réveille. Je n'ouvre pas tout de suite mes yeux. Je n'ai pas envie de savoir si on est déjà le soi ou si il fait encore jour dehors. J'ai l'impression qu'il y a encore de la lumière et ce n'est pas celle du plafonnier. Je pose ma main sur mon front. Il est chaud. Il fait chaud dans l'appartement. Il va falloir que j'ouvre la fenêtre, j'ai horreur d'être rouge tomate même lorsque personne ne me voit. Doucement, je reprends possession de mes esprits et je me redresse. J'ouvre les yeux, l'heure du verdict à sonner. Mon regard se jette sur la fenêtre. J'ai perdu presque ma journée entière. J'aurais pu faire tellement de chose aujourd'hui comme sortir en ville, même seule ce n'est pas un problème, sortir dans un bar, retrouver un homme pour cette nuit. Une nouvelle fois ma main rencontre mon front pour mettre mes cheveux en arrière. Je me penche pour attrape mon téléphone qui a du voler pendant que je dormais puisqu'il a atterit par terre. L'écran s'allume sur la dernière conversation de messages que j'ai faîte, une avec Nora. Elle me demandait si elle pouvait venir, et franchement, je n'avais pas envie de la voir. Quand je repense à elle, je l'entends encore hurler dans le couloir de l'hôpital de lui rendre sa mère, de lui rendre la personne que j'étais. Puis quand elle est là, je la déçois, ça se voit dans son regard, elle attendait tellement plus de moi, peut-être que je lui dise que je l'aime mais pourquoi lui mentir ? Elle n'est plus rien pour moi. C'est triste voir méchant de dire ça, mais elle a des souvenirs avec moi que je n'ai plus. Je ne sais même plus comment on doit aimer sa fille, son enfant. Normalement, les mères ont des anecdotes sur leur accouchement qui finissent toujours par « c'était magnifique quand je l'ai vu pour la première fois ». Moi, la première fois que je l'ai vu, elle avait quinze ans, elle ne criait pas comme les nouveaux-nés des émissions télé. Et merde, me voilà à penser à elle, tout ce que je ne voulais pas. Alors je me lève, je marche dans l'appartement. J'ai dormis pour cette nuit, déjà, enfin presque. Je suis complètement inversé à cause de la boulangerie, du pain qui doit cuire tôt le matin. Je perds ma vie, enfin, pas vraiment mais cette impression est toujours présente. Seule, je n'ai même pas envie de me mettre devant Netflix. Seule, je vais m'ennuyais ce soir et il est trop tard pour moi pour aller dans un bar, puis, je n'ai pas envie de sortir. Je n'ai pas envie de plaire à quelqu'un de nouveau. Alors tournant dans mon appartement, mon cerveau pense à un prénom. Alessia. Je regarde dans mes contacts et je me remercie de ne pas avoir effacé son numéro. Je lui ai déjà plu une première fois, même si toutes les deux, on n'avait pas vraiment les pieds sur terre. C'est comme si mes doigts écrivaient ce message tout seul, sans ma réelle approbation. Et voilà que je lui demande de passer. Les mains sur les hanches pour attendre la réponse, je me dis que j'ai du boulot à faire avant qu'elle arrive. Elle ne met que quelques secondes pour me répondre qu'elle vienne. Je dois me mettre à faire quelque chose pour arranger l'appart et ma tête, là ce n'est pas possible. Primordial, je sors une bière du frigo que je commence à boire et que je finis en rangeant l'appartement. Du pied, je pousse ce qui n'a pas le mérite d'être vu sous les meubles et le canapé. Dans ma chambre, je sors une robe et je vais prendre une douche vite fait. Les cheveux encore humide, j'ai la flemme de sortir le sèche cheveux, la température aidera à les sécher. J'ouvre finalement la fenêtre pour rafraîchir le lieu. On sonne à la porte. Je dégage la bouteille de bière pour ne pas qu'elle croit que j'ai commencé la fête sans elle. Je trottine vers mon placard à chaussures pour dégager les chaussons de grand-mère pour des talons. Puis j'ouvre la porte. Son visage. Son sourire. Ses yeux. Je suis à peu près sobre et je retombe sous son charme. Un peu gênée, on se regarde puis je la prend dans mes bras. On peut bien faire ça, après tout ce que nous avons fait la dernière fois, ce geste est totalement anodin.

– Salut Alessia. Vas-y rentre. Comme j'ai sûrement dû te dire la première fois, fais comme chez toi.

La porte venait à peine de s’ouvrir et, cette petite gêne, cette timidité, ne durait que quelques secondes seulement. Elle fût directement effacée par leurs deux regards plongés l’un dans l’autre. Par leurs sourires réciproques en se retrouvant face à face. Et finalement, par Joey, qui s’était approchée pour la prendre dans ses bras. Un contact soudain auquel Alessia ne s’attendait pas, et qui pourtant, avait fait naître un sourire bien plus sincère encore sur son visage. Elle la serra alors dans ses bras à son tour, réalisant que ce qu’elle ressentait au près d’elle était une sensation tellement particulière, une sensation qu’elle n’avait plus eu depuis très longtemps. Avec elle, elle n’était pas complètement terrifiée. Elle n’avait pas peur d’être brisée une fois encore, une fois de trop. Peut-être parce qu’elle était une femme. Peut-être parce que cela était tout nouveau pour elle. Et ce malgré le fait qu’elles se connaissaient à peine, ce malgré leur différence d’âge. Mais cela ne comptait pas, elle avait toujours été ouverte Alessia, et tout ce qu’elle avait vécu au cours de son existence avait renforcé le fait que tout cela n’était pas important. Ce n’était que des conventions imposées par la société. Et elle, elle était tout sauf conventionnelle. Sa vie entière était tout sauf conventionnelle. Et du peu qu’elle avait vu de Joey, elle avait le sentiment qu’il en était de même pour elle. Qu’elle n’avait pas, ou n’avait pas eu, une vie toute jolie, toute bien rangée. C’était peut-être une autre raison qui l’avait poussé à la rejoindre ce soir chez elle. Mais Aless devait bien avouer qu’elle se demandait ce qui l’avait poussé elle, à l’inviter ce soir. A vouloir la revoir. Si elle avait été bien trop ivre pour se rendre compte quoi ce que soit, la jeune femme avait tout de même eu la sensation que sa nouvelle…amie… était bien une adepte des aventures d’une nuit. Pourtant elle l’avait invitée, ce soir, et elle était magnifique, comme la première fois qu’elle l’avait vu. Elle avait un charme particulier aux yeux d’Alessia. Peut-être parce qu’elle était plus âgée, justement. Peut-être qu’elle ne se serait pas laissée séduire par une jeune femme de son âge. Elle l’ignorait, mais quelque chose chez elle avait éveillée son intérêt. Dire qu’elle lui faisait confiance serait un mensonge, parce qu’elle n’avait confiance en personne, plus maintenant, mais elle avait sincèrement envie d’apprendre à la connaître. Même si malheureusement, Joey ne pourrait jamais vraiment la connaître, elle. Elle n’aurait certainement pas envie de connaître une fille tout droit sortie d’un hôpital psychiatrique, une fille bien trop abîmée par la vie. Personne n’aurait envie d’une fille comme elle dans son existence, un cauchemar déguisé en paradis. Alessia se détacha finalement des bras de Joey, attrapant tout de même sa main dans la sienne en lui répondant. Merci Joey. Elle esquissa un joli sourire avant de reprendre. Comment tu vas ? Elle entra dans l’appartement avec elle, regardant autour d’elle. Elle n’avait pas imaginé la revoir ce soir et elle s’était décidée à la rejoindre sur un coup de tête, mais elle ne regrettait pas d’être venue. Surtout que, d’elle-même, elle n’aurait jamais pu faire le premier pas vers elle.

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   Alessia elle est différente, depuis le début. D'habitude, je vais plus vers les hommes que vers les femmes, même si il m'arrive de passer la nuit avec quelques uns d'entre elles, mais c'est rare. Par rapport aux hommes, les femmes je les choisis. Les hommes, ça vient comme ça, le feeling passe alors c'est bon, je me contrefous du physique, des pensées, des valeurs. Mais les femmes, je les observe, leur physique m'attire, je regarde comment elles agissent. Alessia, je l'ai longtemps regardé dans mon coin de bar. Puis je me suis lancée et je suis allée la voir. Comme d'habitude, nous avons un peu parlé, fais connaissance même si aujourd'hui j'ai complètement oublié son âge et son métier. En ce qui concerne l'âge, elle est plus jeune, ça se voit sur son visage, elle n'a pas les même traits que moi, ceux que je traîne depuis quarante ans maintenant. Dans ma tête, je suis jeune mais mon corps ne suit pas et je le sais. J'ai du mal à sortir autant que je le souhaite, je suis plus facilement fatigué. Mais contrairement aux autres femmes, tout m'a attiré chez elle. Et ce n'est pas parce que j'étais un peu bourrée parce que là c'est totalement pareil. Durant mon adolescence, trop attentif aux muscles des hommes je me rend compte que j'ai loupé sûrement beaucoup de beaux corps féminins. Je me demande si pendant les dernières années là j'ai eu des relations avec des femmes. C'est compliqué de ne plus se rappeler, de se poser des questions qui resteront pour toujours des mystères, surtout que je doute que Nora connaisse ma vie sexuelle. Puis Alessia, elle est différente parce que je l'ai amené chez moi la première fois. Jamais je fais venir chez moi, déjà parce que c'est pas super jolie, c'est un appartement assez minable au dessus de mon commerce. J'aurais une grande maison, un grand jardin, une piscine je serais fière de le montrer, mais pas cet appart'. Puis j'aime découvrir de nouveaux endroits, de nouvelles maisons, de nouveaux appartements, de nouvelles familles. Oui, parce que je suis déjà tombé nez à nez avec un enfant à un garçon, c'était assez gênant. Je ne sais pas pourquoi elle je l'ai autorisé à venir ici. Est-ce que je m'en fiche de son jugement ? Ou est-ce que simplement je ne veux pas connaître son endroit à elle ? C'est bizarre, surtout qu'aujourd'hui je l'invite à nouveau. J'aurais pu lui donner un lieu de rendez-vous extérieur et pas ici. Peut-être que je veux qu'elle me découvre ? Je ne sais pas. Mais à vrai dire, ce soir, c'est pour ne pas être seule et pour ne pas simplement couché avec la personne, en plus je reste chez moi.  Son sourire qui s'affiche après notre étreinte est sûrement l'une des choses les plus magiques au monde. C'est satisfaisant de savoir que la prendre dans mes bras semble la rendre bien. Je ne prend jamais personne dans les bras. Je n'aime pas ça. Puis, je n'ai personne à prendre dans les bras. Nora a déjà essayé de le faire, je lui ai interdis de le faire à nouveau. Ca l'a attristé mais ce n'est pas pour ça qu'elle n'essaie pas de le faire ou de me faire des bisous. Encore une fois, je ne sais pas pourquoi elle fait ça même si je pense qu'elle espère que ça fasse un déclic dans ma tête. J'aimerais que ce déclic se fasse mais je me dis que tout ça, ça supprime toutes les mauvaises choses que j'ai pu faire et qu'aujourd'hui est un nouveau départ. Je dois me sentir chanceuse, ce n'est pas tout le monde qui peut recommencer les choses. En parlant de cette histoire d'amnésie, Alessia n'est pas au courant et je ne veux pas qu'elle le soit. Je sais que je n'ai pas à le dire, mais parfois, prise dans une conversation je pourrais le dire alors je dois contrôle ce que je lui dis. Sa voix m'avait manqué aussi. Je la laisse entre dans l'appartement et je referme la porte derrière elle.

– Je vais bien merci. J'ai dormi comme un loir tout l'après-midi.

J'ai voulu faire naturel à dire ça mais je doute que ce soit la bonne approche. Elle va me prendre pour quoi ? Une flemmarde ? Est-ce que je lui avais dis mon métier ? Et est-ce qu'elle s'en souvient ?

– Et toi ? Dis-je pour passer à autre chose.

De la main, je lui fais signe de s'asseoir sur le canapé. Elle a de la chance, il est confortable, bon en tout cas, moi j'y dors bien. Restant debout, je fais craquer mes doigts. Le stress. Ce n'est pas souvent que j'ai une personne presque inconnu chez moi. Presque inconnu parce que je ne sais pas pourquoi mais alors je me souviens très bien de son corps.

– Tu veux quelque chose à boire ? J'ai des bières, de la vodka et après je ne sais pas. Mais demande moi, je trouverais peut-être dans les placards.

C’était assez déconcertant, cette sensation. Cette sensation que rien d’autre, à part la personne avec qui elle était, ne comptait à ses yeux. Alessia regardait autour d’elle, elle regardait Joey, et elle se fichait pas mal de l’endroit où elle habitait. Au contraire, même, elle s’y sentait bien. Elle se fichait pas mal de savoir que Joey devait avoir une quarantaine d’années et qu’elle n’en avait que vingt-quatre, parce qu’elle la trouvait parfaitement magnifique telle qu’elle était. Non, tout ce qui comptait à ses yeux ce soir c’était elle, c’était Joey et uniquement ce qu’elle était au plus profond d’elle. Elle voulait la découvrir, et elle n’était pas du genre à juger quoi que ce soit, Aless. Pas après la vie qu’elle avait eu. Et puis, la belle brune était troublée parce qu’elle parvenait bien à déceler dans le regard de Joey, dans sa manière de se comporter, qu’elle lui plaisait. Elle lui plaisait vraiment. Et elle ne comprenait pas pourquoi. Elle ne comprenait pas pourquoi elle lui plaisait à ce point alors qu’elle n’avait rien d’exceptionnel. Oh, évidemment, a vu d’œil, elle avait tout d’une jeune femme que l’on avait envie d’approcher. C’était certain. Mais lorsqu’on commençait à la connaître, on avait plus envie de la fuir qu’autre chose. Du moins, elle en était persuadée. Elle n’imaginait pas une seconde que quelqu’un puisse l’aimer pour ce qu’elle était. Que quelqu’un puisse chercher autre chose que d’aller loin, très loin d’elle. Après tout ce qu’elle avait traversé au court de son existence, elle était bel et bien ce que l’on pouvait appeler une fille à problème. Et rajouter des problèmes dans la vie de Joey était bien la dernière chose qu’elle souhaitait. Voilà pourquoi elle préférait que cette dernière n’en sache pas trop sur elle. Ignorant totalement qu’elle avait elle-même quelques petites choses à cacher. A ses premières paroles, Alessia la regarde alors, un petit sourire attendrie sur les lèvres, avant de lui répondre. Tu étais fatiguée ? Dans tous les cas, si elle l’était, la jolie brune était là pour elle ce soir. A sa question, elle hésita quelques secondes, avant de finalement lui répondre la vérité. Ce qu’elle avait sur le cœur. Je vais bien. J’ai été… Agréablement surprise, que tu m’appelles ce soir. Non, elle ne s’y attendait pas, c’était une certitude. Mais elle en était vraiment heureuse. Elle savait qu’elle était sortie de l’hôpital depuis deux semaines et qu’elle devait maintenant reprendre une vie normale, tout du moins essayer, pour ne pas replonger. Et en quelque sorte, sans le savoir, Joey l’y aidait.

Aless s’installa alors sur le canapé, comme le lui indiquait son hôte, appuyant son coude sur le haut du canapé. Elle lui répondit alors avec légèreté. Une bière, ce sera très bien, merci ! Affirmait-elle sans réfléchir. Elle n’était pas une princesse du genre à faire des chichis, elle en était même tout le contraire, Alessia. Ou alors, si elle était une princesse, elle était une princesse déchue. Tomber bien trop haut de son trône. Non, en réalité, elle n’en avait peut-être pas l’air mais elle était plus une cendrillon. Elle laissa Joey récupérer les boissons, avant de finalement lui tendre la main pour qu’elle la rejoigne sur le canapé. Cela lui faisait tout drôle de se retrouver avec une parfaite inconnue, et pourtant, il y avait tout de même cette sorte de tendresse qui régnait entre elles.

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   Il y a quelque chose de plus chez Alessia que certaines personnes n'ont pas. C'est ce petit truc qui est capable de faire tomber sous le charme d'une personne. Chez Alessia, c'est physique, dans un premier temps. C'est peut-être pour ça que je lui ai demandé de venir ici ce soir, peut-être pour savoir s'il y a un deuxième temps, si sa personnalité est aussi jolie que la personne physique qu'elle est. Malheureusement, avec les verres d'alcool, j'ai oublié certaines choses ou juste j'entendais sans vraiment écouter. J'aime bien connaître quelques trucs sur la vie des filles avec qui je couche, cependant j'oublie assez rapidement puisque je ne compte pas les revoir plus tard. C'est comme pour une évaluation, on connaît tout sur le bout des doigts et dès qu'on rend la copie, qu'on passe la porte, on oublie tout. Voilà en quoi elle est spéciale Alessia, elle a la chance de venir ici, d'entrer dans mon intimité. Je n'aime pas cet endroit, il n'est pas beau, à peine décorer. Quand je suis rentrée de l'hôpital, il y avait des photos de Nora partout, et aujourd'hui plus rien. Je ne pouvais pas regarder une nouvelle fois le sourire de ma fille, parce que je lui ai enlevé ce sourire et ça fait de moi une horrible personne. J'aurais dû prendre sur moi, je le sais, les docteurs me l'ont dit, le père de Nora aussi. Mais personne ne s'est jamais mis à ma place et c'est horrible de voir des yeux qui nous admire alors qu'on ne sait même pas pourquoi. Mes yeux se mouillent légèrement et ce n'est pas bon pour moi, ni pour Alessia. Elle n'a pas à savoir ce genre de chose. Cependant, quand je la regarde, je me demande pourquoi je l'ai invité. Je n'ai pas envie de la voir nue, je n'ai pas envie que nos corps se touchent. Je veux juste qu'elle soit là. Mes larmes s'éloignent pour laisser place à un rire.

« Oui, avec mon travail, je suis réveillé vers quatre heures du matin, alors à quatorze heure il n'y a plus personne »

C'est une mauvaise habitude que j'ai pris de dormir l'après-midi mais le plus souvent, je ne me rendait même pas compte que je m'endormais, c'était plus fort que moi. Je lève un sourcil quand elle me dit qu'elle a été surprise que je la contacte à nouveau. Au final, je crois que j'aurais été surprise et beaucoup moins courageuse qu'elle puisque je ne serais pas sortie. L'envie de la voir c'était faîte d'un coup en moi. C'est bizarre cette sensation où on a tellement envie de voir quelqu'un qu'on sera triste si on ne la voit pas en face de nous. Et je n'avais pas envie d'être triste ce soir. Je n'ai pas réfléchis en lui envoyant le message et peut-être que c'était mieux comme ça. Si j'avais réfléchis, je n'aurais pas son jolie visage devant moi.

« Je suis pleine de surprise. » dis-je pour faire passer quelque chose qui pourrait devenir gênant, surtout pour moi, en un moment agréable.

Je sors du frigo deux bières. A mes yeux, c'est la meilleure boisson. Elle réunit tout le monde, elle met tout le monde d'accord. Je reviens dans la partie salon, si on peut appeler cela comme ça. A mon arrivée, elle tend la main vers moi et je ne trouve rien de mieux que de lui mettre la bouteille entre les doigts. Je fais le tour du canapé et je m'assois à côté d'elle. Ca fait bien des années que je ne me suis pas trouvé dans cette situation. J'aime tellement être seule d'habitude que je ne parle presque à personne. Mais me voilà, avec Alessia, la dévorant doucement du regard. Je tend le bras vers elle, avec ma bière en main pour qu'on fasse s'entrechoquer nos boissons.

« A notre belle soirée en perspective. Je suis contente que tu sois là ce soir. Pour être sincère, je ne pensais pas que tu allais venir. »

Elle observait Joey, elle l’observait évoluer dans son environnement. Dans son intimité, plus précisément. Et elle avait la réelle impression de la redécouvrir, Alessia. Elle savait bien que c’était exactement la même Joey qu’elle avait rencontré précédemment. Elle savait bien qu’elles avaient déjà eu l’occasion de discuter toutes les deux. Pourtant, la belle brune avait ce sentiment de nouveauté. Elle la voyait sous un autre angle. Parce que ce soir, elle n’était pas ivre. Pas comme la dernière fois. Pas comme toutes ces autres fois où elle avait un peu trop facilement abusé de la bouteille. Non, ce soir elle était elle-même, du moins en partie. Face à Joey qui devait l’être, elle aussi. Alors elle l’observait parce qu’elle ne voulait rien rater de ses petits gestes, ses petites manies. Mais alors que son regard était bien fixé sur son hôte, Alessia remarqua quelque chose de différent chez elle. Soudainement, c’était comme si elle s’était perdue dans ses pensées. Dans des pensées qui avaient l’air bien sombres. Et, mieux que personne, elle pouvait le percevoir. Parce qu’elle avait l’impression de se reconnaître elle-même. D’abord, lorsqu’elle était en foyer, lorsqu’elle se perdait dans des souvenirs pour échapper à la difficile réalité qu’elle devait affronter tous les jours. Et puis, plus récemment, lorsqu’elle était internée. Lorsqu’elle n’arrivait pas à ôter ses mauvaises pensées de son esprit. Alors d’une douce voix, Alessia prit la parole en demandant. Joey, ça va… ? Peut-être qu’elle était préoccupait. Peut-être qu’elle avait des problèmes. Et même si elles se connaissaient encore que très peu, toutes les deux, la jeune femme voulait être présente pour elle si elle en avait besoin. Et, parce qu’après tout, cette soirée ne ressemblait en rien à la soirée précédente. L’ambiance n’était pas la même. Leur relation n’était pas la même. Elles pouvaient apprendre doucement à se connaître.  Elle esquissa alors un joli sourire en entendant ses paroles au sujet de son travail. Oui, je me rappelle, tu m’en avais parlé. Et tu as raison de te reposer, il faut pouvoir tenir le rythme. Ne pas faire de nuits complètes à la longue pouvait finir par réellement la peser et la fatiguer. Alors si il fallait qu’elle dorme un peu l’après-midi pour aller mieux, elle avait raison de le faire.

Alessia laissa Joey venir s’installer tout près d’elle sur le canapé, et elle trinqua alors de sa bière dans celle de sa nouvelle amie. Elle plongeait son regard bleuté dans celui de Joey, ne pouvant s’empêcher de sourire en entendant ses paroles. Je suis pleine de surprises également. Affirmait-elle malicieusement, avant de reprendre finalement plus sincère, lui confiant ce qu’elle avait sur le cœur. Je suis contente aussi d’être ici. Pour être sincère aussi, comme je te l’ai dit, j’ai été… Surprise que tu m’appelles. Elle marqua alors une petite pause, posant légèrement sa main libre sur le bras de Joey. Mais j’avais très envie de te voir. Elle était là, la vérité. Elle ne comprenait pas pourquoi, Alessia, mais elle avait terriblement eu envie de la revoir ce soir. Et maintenant qu’elle était là, elle ne le regrettait en aucun cas. Elle avait l’étrange sensation que sa présence ne pourrait jamais lui faire que du bien. Quoi qu’il puisse arriver.

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  jossia

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  Chez moi. L'endroit où rarement je prend le temps de m'habiller correctement. Ma hantise ? Voir quelqu'un débarquer à l'improviste chez moi. Bon, après, je n'ai pas une tonne d'amis alors je suis assez tranquille. La seule qui peut venir sans me prévenir, parce que sinon je lui ouvrirais pas la porte, c'est ma fille et concrètement, je m'en fiche qu'elle me voit avec un jogging. Une fois qu'on a vu quelqu'un dans une chambre d'hôpital avec leur blouse ouverte de partout, on peut la voir en jogging ce n'est pas choquant. Mais voilà qu'elle me revient à l'esprit. Ca m'arrive de plus en plus souvent en ce moment. Je ne peux pas dire que ça me plaît, parce que je culpabilise. Je ne devrais pas culpabiliser puisque je n'y suis pour rien. Je ne suis pas du genre à me forcer à aimer les gens. Puis je ne peux pas dire que je ne l'aime pas. Quand je la regarde, je me vois moi à son âge. On se ressemble beaucoup toutes les deux. Et ça m'attriste pour elle de lui faire vivre ça. Je ne sais pas ce que moi j'aurais fait si ma mère, suite à un accident, ne m'aurait plus reconnu. Je pense que j'aurais sûrement péter un câble dans ma tête. Je relève la tête vers elle quand elle me demande si ça va. Je vais bien. Oui, je suis avec Alessia ce soir, je n'ai pas à penser à ma famille, à ma vie d'avant.

– Oui. Je vais bien, merci.

Sa question me fait comme un électrochoc. Nora s'en va de mon esprit. Je ne veux pas paraître faible devant Alessia. Ce n'est pas une question de fierté, quoique un peu tout de même. C'est juste  que je la connais à peine. Je ne peux pas lui avouer tout ce qu'il s'est passé ces deux dernières années. Je ne peux pas lui dire « hé en fait ça ne va pas du tout, je pense à ma fille biologique, mais pour moi ce n'est pas ma fille puisque je ne me souviens pas d'elle, je ne me rappelle pas de l'accouchement, ni de l'annonce de ma grossesse. Est-ce que mon petit-ami de l'époque était content de cette nouvelle ? J'en sais rien. » Du moins, tout ça, je ne lui dirais pas tout de suite. Peut-être avec le temps. Je ne suis pas le genre de personne qui pleure. Lorsque je pleure c'est que j'ai l'impression que tout est foutu et là, rien n'est foutu. Alors, je ne veux pas qu'elle me voit pleurer. Même à mon réveil, lorsque j'ai compris que je ne connaissais pas ces gens là, je n'ai pas pleurer, à quoi bon. C'était fait de toute manière. Peut-être que j'aurais pu faire plus d'efforts pour essayer de me rappeler mais j'ai l'impression que si ça m'est arrivé, c'est pour une bonne raison, parce que j'avais des choses à oublier.

– Et toi, tu fais quoi dans la vie ? Désolé, j'ai oublié avec le temps.

Utiliser le mot oublier me fait toujours drôle, j'ai un espèce de frisson qui traverse mon corps tout entier. Mais c'est vrai, je ne sais plus ce qu'elle fait dans la vie. J'aime bien savoir ce genre de choses, je ne sais pas pourquoi. Peut-être pour faire des plans pour plus tard.

Son sourire, ses yeux qui rencontrent les mien, je me rappelle complètement pourquoi j'ai partagé une nuit avec elle. De près, elle est encore plus jolie que lorsque je la regardait dans le noir. Puis, là, on est en plein jour, du moins jusqu'à ce que l'ampoule du plafonnier me quitte. Il n'y a pas la lumière tamisée d'un bar. Il y a que celle de la pièce. Et j'ai l'impression que j'ai loupé plein de choses en étant partis le matin pour aller travailler. Alessia, j'aurais voulu resté avec elle jusqu'à son réveil, pour qu'elle me regarde encore. Il y a un sentiment si fort, si plaisant qui prend possession de moi quand elle me regarde. Quand elle me parle, je bois ses paroles. J'ai limite la bouche ouverte, comme un enfant à qui on raconte une histoire et qui ne veut pas louper la moindre miette de ce qui est dit. Je suis une enfant en sa présence et quand je me rappelle comment j'étais enfant, ça me fait un peu peur. J'étais maladroite, je n'arrivais pas à aligner deux mots. Sa main se pose sur mon bras, mon regard suit son action et je ne peux pas m'empêcher de sourire. On est différente de la dernière fois. Comme quoi il n'y a pas besoin d'une lumière tamisée pour avoir un peu d'intimité.

– Merci d'être venue.

Je veux vraiment la remercier de sa venue. Sans elle, je serais toujours affalé sur mon canapé, une bière dans la main, à regarder un programme stupide à la télé. Et je peux assurer au monde entier, que je préfère la regarder elle qu'un programme télé.

– Comment s'est passé ta journée ?

Ses grands yeux bleus plongés dans ceux de Joey, elle la regardait lui affirmer que tout allait bien. En réalité, Alessia n’en était pas vraiment convaincue mais la dernière chose qu’elle voulait était la mettre mal à l’aise ou la brusquer. Elle ne voulait pas la forcer à lui parler de choses déplaisantes, ou simplement de choses intimes qu’elle n’avait pas envie de raconter à une parfaite inconnue. Parce qu’après tout, c’était ce qu’elles étaient, des inconnues l’une pour l’autre. Pourtant, c’était… C’était si naturel entre elles. C’était si doux, si léger. Comme si elles étaient dans une sorte de petit cocon à l’abri des regards. Et cette sensation, Alessia ne la connaissait que trop peu. Elle qui avait été bien souvent dans des situations difficiles ou instables. Elle qui avait bien trop connue le malheur. Alors la belle ne voulait pas tout gâcher avec Joey. Pas alors qu’elle se sentait si bien. C’est pourquoi elle se contenta de lui faire un joli sourire. Un sourire léger qui, en quelque sorte, voulait rassurer Joey sur le fait qu’elle n’était obligé de rien, avec elle. Mais la question suivante de sa nouvelle amie était de suite plus compliquée pour la jeune femme. Ce qu’elle faisait dans la vie… Elle était… Presque honteuse, et gênée, de devoir lui répondre. Parce qu’elle savait que sa réponse pousserait Joey à s’interroger. Pour le moment je… Je fais des petits-boulots. En ce moment je fais des ménages. Et elle avait peur que Joey lui demande pourquoi. Parce que jamais elle ne pourrait lui répondre qu’elle venait de quitter l’hôpital psychiatrique et qu’elle avait besoin d’argent rapidement pour vivre. Elle qui avait pourtant fait des études d’arts par le passé. Mais elle avait eu une vie si dure, qu’elle n’avait jamais eu l’occasion de faire ce qui lui plaisait.

Rapidement, Joey, la remercia d’être venue, ce qui fit sourire Alessia. Gardant sa main sur le bras de sa belle, la jeune femme lui répondit avec sincérité. Je suis contente d’être ici. C’était bien différent de la dernière fois. C’était une certitude. Mais, ce n’était pas moins bien pour autant. Au contraire. Il y avait une grande sincérité dans leurs gestes et dans leurs paroles. Elles n’étaient pas poussées par l’alcool. Elles étaient là parce qu’elles en avaient envies, et elles se comportaient de cette manière parce qu’elles en avaient envie. Le regard de Joey intimidait quelque peu Alessia et en même temps il lui faisait du bien. Elle la regardait comme si elle était la plus belle chose au monde, ce qui ne lui était pas arrivé depuis… Cela ne lui était même jamais arrivé. Mais elle savait que Joey la regardait de telle sorte parce qu’elle ignorait tout de sa vie et de la jeune femme qu’elle était. Ma journée s’est bien passée. Et, elle se termine d’une meilleure façon encore. Affirmait-elle en jouant un peu avec le bras de Joey. Et puis après quelques instants, elle se reconcentra sur elle, reprenant la parole. Et toi ?

CODAGE PAR AMATIS

 jossia

 my salvation

 Elle me sourit, juste cela. Elle ne m'en demande pas plus sur mon état et j'en suis contente. J'ai l'impression que tout me trahis, mes yeux, ma voix, ma posture assez renfermée. Je ne veux pas être absente de cette soirée, penser à autre chose que nous deux. Alors j'essaie de m'effacer les souvenirs de Nora de mon esprit, j'essaie de voir seulement Alessia. Elle est tellement jolie que ce n'est pas vraiment dur. Oublier le reste. Vivre l'instant présent. J'ai tellement l’habitude de le faire quand je suis bourrée que quand je suis sobre j'en suis presque incapable. C'est pour ça que j'aime boire, passer du temps avec des inconnus. Ils n'ont pas de jugements sur moi, ils ne me connaissent pas, ils ne savent pas ce que j'ai vécu et dans ce cas, j'arrive à oublier ma vie. Ils me font sentir comme moi, comme une personne tout à fait normal, contrairement à tous les autres. Mes parents, quand ils ont débarqués, ils m'ont aussi jugé. Même mes amis d'avant, même s'ils ne le montrent pas, ils me jugent, ils doivent comparer qui je suis maintenant à qui j'étais avant. Alessia, elle ne me connaît pas, alors elle me regarde normalement. Quand je plonge mon regard dans le sien, je vois aucune pitié, juste de la gentillesse et de la joie. Oui, elle a l'air joyeuse là, maintenant. Elle avait déjà ce regard la dernière fois. Enfin, même si elle a l'air heureuse, je vois bien que son esprit n'est pas vide, qu'elle pense à des choses pendant qu'elle est ici, des choses peut-être plus ou moins joyeuses. Et là, j'aime bien me dire qu'elle est heureuse car elle est avec moi. Personnellement, j'aimerais lui faire ressentir la même chose, je suis heureuse parce qu'elle est là.

Elle fait des petits boulots. Je n'ai jamais eu à faire ça. J'ai toujours eu la chance d'avoir un soutien financier derrière moi. Mon père m'a beaucoup aidé à mon arrivée ici. Bon aujourd'hui, j'ai assez d'argent par moi-même pour me soutenir seule. Cependant, avec le déclin de la boutique, on ne peut pas prévoir que j'en aurais encore dans quelques mois. Elle baisse la tête quand elle me dit ça, comme si elle était honteuse de faire des ménages. Aucun métier n'est honteux. Aucun métier ne vaut plus que d'autres. Chacun se débrouille pour gagner son argent. Vu son comportement, j'essaie d'en rigoler.

– Je pense qu'il va falloir que je t'embauche, car y'a du boulot à faire ici !

L'ordre, ce n'est pas vraiment mon truc. Je n'aime pas ranger parce qu'après, je ne retrouve pas ce que j'ai rangé. En faite, être ordonné, ça s'apprendre quand on est gamin, sinon après c'est foutu !

Sa voix, son sourire quand elle me dit qu'elle est contente d'être ici me fait chaud au coeur. Je n'arrive pas à croire que quelqu'un est content de me voir, moi qui suis si désagréable avec ceux qui me connaissait d'avant, moi qui ne veut jamais revoir ceux que je rencontre depuis deux ans. En fait, j'ai peur ? J'ai peur parce qu'à un moment, je ne pourrais plus le cacher. Il suffit d'une question sur la boulangerie, sur la pâtisserie et je serais démunie car je n'aurais pas la réponse. Alessia, je ne sais pas pourquoi, mais j'ai l'impression qu'elle ne cherchera pas à aller gratter sous ma coquille. Et c'est réciproque. On cache tous quelque chose et j'irais pas chercher ce qu'elle cache si elle ne commence pas à m'en parler en première. Sa main sur mon bras, ses doigts qui touchent ma peau, ça me rend folle. J'ai l'impression que jamais personne n'a fait ça. Personne n'a pris le temps d'être avec moi, de me toucher amicalement comme elle le fait. Je préfère dire amicalement, pour ne pas me faire des faux espoirs. Pourquoi des faux espoirs ? Parce qu'elle m'attire beaucoup. Je me sens si chanceuse de l'avoir avec moi. Bien sûr, j'ai envie de l'embrasser mais je ne veux pas tout gâcher, je ne veux pas que cette soirée parte simplement en partie de jambe en l'air, j'ai envie de la connaître, qu'elle me parle, même si c'est juste pour me dire qu'il pleut dehors.

– Elle s'est bien passée aussi. Et pour te rejoindre, je peux dire aussi qu'elle finit de la meilleure façon possible.

Bon, ce n'est pas exactement ce qu'elle a dit, mais j'aime bien détourner en mon sens ses propos. Je porte mon verre à mes lèvres et bois une gorgée, pour humidifier mes lèvres et ma gorge. Je me repositionne bien dans le canapé. J'ai envie de lui poser une question mais je n'hésite pas, ce serait rentré dans sa vie et j'avais dis que je n'en parlerais pas avant qu'elle m'en parle elle-même. Je la regarde dans les yeux, cherchant un peu de confiance en moi. Mais je sais qu'on ne peut pas rester comme ça toute la soirée, à aimer le fait de se voir. J'ai envie de la connaître. Je pèse le pour et le contre de ma question, mais même s'il y a plus de contre que de pour, je me lance.

– Dis moi. Tu es jeune, tu as fais des études ?

C'est un peu direct comme question alors, tout de suite je me reprend.

– Je sais que c'est compliqué de faire des études ici, en France, c'est beaucoup plus simple et moins cher. Si… Si c'est un sujet qui te dérange, je te gêne pas pour me le dire, il n'y a pas de problème.