Trick or treat ?

Pas rassurée en présence des autres, Ivy faisait du mieux qu’elle pouvait pour garder la face. Après sa descente aux enfers, quand elle avait touché le fond et qu’elle ne pouvait plus qu’accepter de se noyer, en finir ou tenter de remonter à la surface, elle ne voulait plus voir personne, que ce soit des gens qu’elle connaissait ou des inconnus parce qu’elle avait peur de ne pas pouvoir maitriser ses émotions et d’exploser, se mettre à pleurer comme ça, sans raison apparente. Elle avait progressé à la clinique, contrainte et forcée de participer aux activités, la pâtisserie était entrée dans sa vie et elle avait découvert en elle une petite flamme, quelque chose qui l’animait à nouveau, qui la faisait se sentir vivante après avoir eu l’impression d’être morte de l’intérieur tant la souffrance était grande en elle, pendant plusieurs mois. Et les choses s’étaient enchainer ensuite jusqu’à la mener chez Jo’ malgré sa peur, toujours bien présente, du contact. Mais Ivy c’était aussi une guérisseuse dans l’âme. Pour avoir l’impression de servir à quelque chose, pour oublier un peu sa souffrance aussi, elle avait besoin de faire du bien aux autres, de les aider, de leur apporter un peu de bonheur. Une journée sans faire sourire personne était une journée perdue pour la jolie blonde et cet instinct, ce besoin viscéral presque, souvent au détriment de sa santé à elle, de ses envies aussi la forçait, malgré les chaines encore bien présentes qui la retenaient encore à lui en brûler la peau, la poussait chaque jour à accepter le contact. C’était comme ça qu’elle avait fait la rencontre de Thomas. Un beau jour d’été il était entré, un peu perdu, dans la pâtisserie sans doute alléché par les gâteaux en vitrine et tout de suite, la jeune femme avait sentit quelque chose qui émanait de lui. Sans pouvoir mettre de mot sur ce dont il s’agissait réellement, il y avait quelque chose chez Thomas qui l’attirait irrémédiablement. Sans doute que c’était parce que lui aussi était une âme écorchée, sans jamais en avoir eu la confirmation, elle en avait la certitude au fond de son coeur. Peut être qu’un jour elle en apprendrait plus sur lui, en attendant elle profitait des moments passés à ses côtés même si, dans sa tête, une petite voix lui soufflait avec vigueur de faire attention à ce qu’elle faisait, de ne pas le laisser trop s’attacher à elle parce qu’elle faisait du mal à tout ceux qui lui étaient trop proches et qu’elle ne souhaitait pas le moindre mal à Thomas. Il mettait ses émotions à rudes épreuves sans s’en rendre compte surement parce qu’il était tactile mais que le moindre geste pouvait mettre le semblant d’assurance d’Ivy a mal. Elle savait qu’elle ne bernait personne et certainement pas le jeune homme mais elle essayait avec force de se montrer sous son meilleur jour, de ne pas perdre la face. Thomas avait accepté de venir à la soirée d’halloween organisée par Jo, dans son café. Ivy avait longtemps hésité à lui faire cette proposition. Elle connaissait tous les clients présent ce soir, certains très bien même et elle n’avait aucune raison d’angoisser, de chercher une présence bienveillante auprès d’elle, Jo serait là. Mais elle avait envie, au fond d’elle, de partager un moment avec Thomas mais pas en tête à tête, elle l’avait fait une fois mais elle n’était pas vraiment prête pour ça. D’autant que plus elle apprenait à la connaitre, plus elle avait peur, se sentant de plus en plus vulnérable en sa présence, esclave des émotions contraires qui la parcouraient sans cesse. De loin, Ivy observait les autres clients s’amuser, rire, partager un moment de convivialité tous ensemble et même si elle restait à distance, assister à une telle scène lui dessinait un sourire sur les lèvres. Elle se sentait bien, à sa place en fait. Ca ne durerait pas longtemps mais c’était une sensation si agréable, surtout pour un esprit tourmenté comme le siens. « Je pense que ça peut se faire mais tu sais, je pourrais parler de toi au patron. Peut-être que tu pourrais nous fournir pour quelques inaugurations ! » Ivy avait relevé un regard étonné vers le jeune homme qui venait de terminer le cup-cake qu’elle lui avait offert. Il semblait vraiement avoir apprécié ce qu’il avait gouté et, après lui avoir dit de commercialiser ses créations, voilà qu’il lui proposait de parler d’elle au patron du musée où il travaillait pour qu’elle puisse fournir ses pâtisseries pour les soirées organisées de temps à autre par le musée. Gênée, elle sentit le rouge lui monter légèrement aux joues. C’était une perspective qui lui donnait envie parce qu’elle était une grande amatrice d’art et que faire gouter ses gâteaux, régaler les papilles des gens lui faisait plaisir mais, en même temps, rien que cette idée était une source d’angoisse terrible pour elle, imaginer soumettre ses créations au jugement de tant de monde, c’était très effrayant pour elle. « Oh… Ca serait gentil de ta part mais… tu es sûr que je pourrait être à la hauteur pour ce genre d’évènement ? » Comme d’habitude, Ivy était très modeste. Elle détestait être mise en avant, être sur le devant la scène. Elle se contentait très bien de rester dans l’ombre. Le regard des autres était une chose qu’elle était incapable d’affronter parce qu’elle savait ce que cela faisait de voir le mépris, la moquerie, le dégout dans les yeux des autres et, après l’avoir déjà vécu tant de fois, elle n’en avait plus envie, elle ne voulait plus ressentir ce que ce genre de regard sur elle pouvait provoquer en elle. Plus jamais. Pourtant la vie était ainsi faite et on ne pouvait pas toujours faire l’unanimité. Même les personnes les plus bienveillantes, gentilles n’avaient pas que des amis sur cette terre. Mais c’était quelque chose qu’Ivy avait toujours eu du mal à intégrer et ça ne s’était pas arrangé depuis son incident de parcours. Thomas avait ensuite proposé de gouter les nouvelles recettes qu’elle ferait en garantissant ensuite que son avis serait toujours objectif. Ivy avait sourit plus largement, oubliant la gène qui pouvait parfois régner entre eux. Dans ce cas c’était avec plaisir qu’elle lui ferait gouter chacune de ses nouvelles recettes. « Tu n'es pas désagréable, pas du tout. J'aime bien passer du temps avec toi. J'sais pas comment dire ça mais ta présence me rassure, elle me fait du bien. Je ne me sens pas à l'aise parmi les autres mais, avec toi, j'ai comme l'impression que je peux être moi-même.». Ivy avait tourné un regard ému vers Thomas. Ses mots, si doux, si apaisants, lui faisait du bien. Entendre qu’elle n’était pas désagréable malgré ses réactions incompréhensibles et souvent irrationnelles lui faisait chaud au coeur. Les larmes lui montaient aux yeux, l’émotion la gagnait de manière excessive alors elle détourna la regard et inspira profondément. Elle ne voulait pas pleurer, pas maintenant, pas devant Thomas. Comme elle restait silencieuse, le jeune homme avait repris la parole pour conclure. « Et toi aussi, tu peux être toi-même avec moi. Je promets de ne pas te juger. Jamais je ne ferais ça !» Elle avait finalement trouvé le courage de regarder à nouveau le jeune homme, c’était difficile de soutenir son regard mais il était sincère et elle devait essayer de prendre sur elle. Elle ne savait pas vraiment comment le remercier de ses mots si jolis à son égard, elle ne savait pas par quoi commencer. « Ce… C’est vrai ? Tu ne me trouves pas désagréable ? Oui, oui biensûr que tu peux être toi même avec moi… Je… Je ne pensais pas que je pouvais rassurer les autres… au contraire même… » Elle avait sourit avec délicatesse, un sourire qui laissait entrevoir toutes les fragilités qui tentaient de cohabiter en elle. Elle avait du mal à accepter les compliments, les mots gentils à son égard et, les mots de Thomas était au delà de ça. Elle vivait pour faire du bien aux autres, les soulager de leurs douleurs, essayer de leur changer les idées et entendre ça… il n’y avait certainement pas plus beau compliment pour elle. Elle n’était pas sûre de le mériter d’ailleurs mais si Thomas le disait, il ne mentait certainement pas. « Tu sais j’ai souvent un peu de mal à gérer mes émotions, mon corps me trahie souvent et je sais que je peut avoir l’air bizarre parfois, je vois bien que les gens me prennent souvent pour une folle… Je le fait pas exprès, j’essaie toujours de faire de mon mieux… mais ça me touche vraiment ce que tu dis. Je crois que toi aussi tu me rassures, comme l’autre fois au cinéma, si tu n’avais pas été là… je n’y serais jamais allé. » L’heure semblait être à la confidence mais bien vite, Ivy fut rattrapée par ses démons. Elle se rendit compte de ce qu’elle venait de dire et elle porta une main à sa bouche, gênée. Les mots étaient sortis, c’était trop tard. La petite voix dans sa tête lui hurlait maintenant de faire attention, de ne pas laisser Thomas entrer trop dans sa vie, trop s’attacher, prendre la place dans son existence. Elle devait lutter, mener cette bataille, même s’il aurait été plus doux certainement de se laisser bercer par le doux sourire et le regard si chaleureux du brun. Mais elle ne voulait pas qu’il souffre à cause d’elle ou même pire. « ça se voit que la pâtisserie c'est ton truc. Je ne t'ai jamais vu si souriante, si rayonnante et ça te va bien.». Un sourire plus large s’afficha sur les lèvres de la blonde. Oui, elle se sentait bien ici, chez Jo’, dans son élément malgré sa peur du contact humain. Ce n’était pas facile tous les jours mais c’était le seul endroit où elle avait l’impression d’être utile, de pouvoir aider, à son échelle minuscule, les autres. Et en cela, elle avait l’impression certainement illusoire de s’aider, elle aussi, à guérir. Elle savait qu’il faudrait plus que ça, un travail bien plus profond sur elle même parce que chaque soir ses démons revenaient de plus belle, elle n’avait pas une journée de répit mais les moments passés au travail lui faisait du bien et c’était déjà beaucoup pour elle que de pouvoir laisser un peu de côté ses souffrances, mêmes quelques heures seulement. « Oui c’est vrai, j’adore ça et je me sent bien ici. Je ne sauve pas des vies, je ne vais pas changer le monde mais j’ai l’impression d’être un peu utile quand les pâtisseries ou les boissons que je sert font sourire quelqu’un.» Ce besoin d’aider, d’avoir l’impression qu’elle pouvait faire du bien aux gens, même inconnus, c’était le coeur de la personnalité d’Ivy. Elle avait toujours été ainsi mais depuis son passage en clinique psychiatrique, elle avait compris qu’elle devait écouter cette envie là, ce besoin. Ca serait aussi une façon de rendre hommage à ceux qu’elle avait perdu, son père et son frère notamment qui eux, avait réellement donné leurs vies pour sauver celle des autres. Elle ne pourrait jamais avoir le même courage mais, à son échelle, elle avait décidé de contribuer, elle avait perdu assez d’années de sa vie et causer suffisament de souffrance autour d’elle, bien malgré elle d’ailleurs. « Un travail de fourmis oui mais j'adore ça ! ». Thomas semblait passionné par son travail et la blonde adorait écouter parler les passionnés, quel que soit le domaine, c’était toujours inspirant et instructif. Thomas avait l’air d’avoir trouvé le travail qui lui convenait et Ivy était réellement et sincèrement heureuse pour lui. « Je serais ravi de te montrer mon œuvre quand elle sera terminée !». La serveuse avait sourit largement, ravie de cette perspective et impatiente aussi un peu, même si elle avait conscience que c’était un long travail que Thomas avait à réaliser. « J’ai hâte de voir ça, je suis certaine que tu es très doué. ». Evidement Ivy était sure de ce qu’elle disait, Thomas était si gentil, si passionné et dévoué sans doute, il ne pouvait qu’être doué dans son travail, surtout pour travailler dans un musée aussi renommé que celui où il avait été embauché. « Tu fournis les conseils de jardinage aussi non ? J'ai pas vraiment la main verte ! ». La blonde avait hoché la tête positivement. Elle aimait prendre soins des autres et de tous les êtres vivants, humains, animaux, les plantes aussi en faisait partie. Dans son appartement il y avait Socrate, le petit chat qu’elle avait recueilli et il y avait aussi des plantes en tout genre, elle adorait passer des heures à les chouchouter et ces dernières le lui rendaient bien en se portant très bien. « Oui et je peut même t’acheter un livre de jardinage. J’adore m’occuper des plantes, j’en ai plein chez moi, je les trouve tellement belles. » Elle n’avait jamais suivi de cours de jardinnage ou quoi que ce soit. En réalité, Ivy s’occupait de ses plantes avec l’aide de son instinct qui ne la trompait que rarement jusque là. Parfois elle cherchait des conseils sur des sites de jardinnage mais souvent elle se débrouillait très bien seule. « Tu viens quand tu veux à la maison. En dehors des heures de travail, je ne fais pas grand chose. Et puis, il me semble que nos immeubles ne sont pas bien loin l'un de l'autre !» La jeune femme était un peu étonnée de la révélation de Thomas alors elle s’empressa de répondre. « Ah oui ? C’est vrai ? » Elle était curieuse et enjouée. il est vrai qu’elle savait vaguement le quartier dans lequel Thomas avait choisis de vivre, elle connaissait car proche de son immeuble, elle avait vu des photos de l’appartement mais elle n’avait jamais demandé précisément où il se trouvait. En tout cas Thomas avait l’air de se souvenir de l’endroit jusqu’où il l’avait raccompagnée la dernière fois.

Le plus difficile quand on aime les gens, leur faire plaisir, les faire sourire, les empêcher au maximum de souffrir mais que l’on ne s’aime pas assez c’est de savoir où son les limites à ne pas dépasser. Et ça, c’était quelque chose de très difficile pour Ivy. Elle se donnait toujours trop parce qu’elle ne savait pas faire autrement, quand elle entreprenait quelque chose, quand elle voulait aider quelqu’un, elle se donnait toujours toute entière, il n’y avait pas de juste milieu avec elle, c’était tout ou c’était rien et c’était plus souvent tout étant donné qu’elle ne savait pas rester sur ses gardes bien longtemps. Il suffisait de lui sourire, d’être gentil avec elle quelques instants et, malgré les voix dans sa tête qui lui hurlait de faire attention, de rester méfiante, elle se jetait dans la gueule du loup sans hésitations. La méfiance qu’elle avait en elle dès que quelqu’un l’abordait, sa crainte d’être avec les autres c’était peut être finalement la seule façon que son corps et son cerveau avait trouvé pour essayer de protéger Ivy qui n’écoutait que son coeur et qui, d’une façon ou d’une autre se mettait toujours en danger lorsqu’elle commençait à côtoyer les autres. Thomas ne semblait pas doté de la moindre mauvaise intention, pas une once de méchanceté n’émanait de lui et, même si parfois il mettait ses émotions à rude épreuve, elle appréciait de pouvoir discuter avec lui, d’apprendre à le connaitre. Depuis qu’elle était sortie de la clinique tout ce qui faisait la vie quotidienne en société était une épreuve pour elle. Elle avait trouvé un travail dès sa sortie, c’était la condition  indispensable à sa sortie, jamais les médecins ne l’aurait laissé sortir sans emploi, sans une activité pour occuper ses journées sachant à quel point elle avait besoin de cela pour ne pas sombrer. Elle avait bien évidement un appartement. Mais le reste, tout le reste restait difficile pour elle, faire des courses, prendre les transports en commun, téléphoner pour prendre un rendez vous. Absolument tout. Se faire des amis, rencontrer de nouvelles personnes et se lier avec elles au delà d’un sourire au moment de leur servir un café ou de leur proposer la carte des pâtisseries du jour, c’était quelque chose qu’Ivy pensait insurmontable. Avec Thomas, elle avait entrepris cela, se lier avec lui, devenir son amie, apprendre à nouveau à partager vraiment avec les autres, parler d’elle et plus seulement écouter comme elle le faisait habituellement. Ce n’était pas simple, elle était d’une maladresse déconcertante, elle le savait mais Thomas était patient et bienveillant. La preuve, il n’avait pas encore pris la fuite et il était venu aujourd’hui pour leur deuxième rendez vous. « Bien sûr que je le pense ! Et puis, si t'as besoin d'un coup de main je pourrais venir t'aider. C'est pas un soucis ! » Malgré l’appréhension que cette simple idée encore bien loin de se réaliser faisait naitre chez elle, Ivy avait adressé un large sourire à Thomas. Bizarrement, quand il disait qu’il serait là pour l’aider si un jour un tel évènement venait à se produire, elle n’avait aucun mal à le croire. Elle ne le connaissait pas encore mais jusqu’à maintenant elle n’avait aucune raison de penser que Thomas n’était pas le genre de personne à faire ce qu’il disait, au contraire d’ailleurs. « Je pensais qu’à ce genre d’évènement on mangeait surtout des trucs raffinés de grands chefs… tu crois que mes gâteaux sont suffisamment présentables ?  » Cette fois la blonde ne parlait même pas du gout. C’était une chose, certes le plus important d’ailleurs en pâtisserie et même en cuisine en général mais la présentation, l’esthétique avait aussi son importance, surtout dans les évènements comme ceux qu’évoquaient Thomas et Ivy n’était pas certaine d’être à la hauteur. Elle effectuait un travail soigné et était très méticuleuse mais de là à faire des choses suffisamment jolies et raffinées pour de grand évènements ? Elle qui avait toujours trouvé ses pâtisseries enfantines parce qu’elle aimait les jolies couleurs et les motifs en pate à sucre.
« Le premier sera certainement un peu difficile mais tu verras, les suivants se passeront sûrement mieux. Et puis, je serais là. ». Ivy avait sourit délicatement, Thomas se montrait rassurant, sûr de lui dans ce qu’il avançait autant qu’il semblait convaincu des capacités d’Ivy et de son talant pour la pâtisserie et elle en était touchée parce qu’elle le sentait sincère et honnête dans ce qu’il disait. « Si tu promet d’être là pour m’aider alors je veux bien essayer si un jour l’opportunité se présente. » Elle avait parlé avec douceur avant de baisser les yeux, légèrement gênée quand son regard avait croisé celui du jeune homme. Elle avait toujours eu du mal à soutenir le regard des autres, c’était un exercice compliqué pour elle car elle se sentait trop faible, trop fragile, elle faisait des efforts pour ne pas avoir l’air trop fuyante. Avec Thomas, il y avait quelque chose, autre chose qu’uniquement la peur, qui faisait qu’elle avait toute les peines du monde à le regarder dans les yeux quand elle lui parlait. C’était bien plus difficile qu’elle ne l’aurait pensé de réapprendre à se faire des amis, à laisser des gens partager sa vie au moins un peu. « Bien sûr que je suis certain de ce je dis. Il suffit de tomber sur les bonnes personnes et ça, c'est très compliqué.» Elle avait hoché la tête plus que d’accord avec ce qu’il était en train de dire. C’était compliqué de savoir quand on rencontrait quelqu’un si cette personne allait avoir un impact positif ou négatif dans votre vie. Ivy, elle, avait rencontré beaucoup de personnes par le passé qui avait eu un impact positif dans son existence, qui avait parfois réussi à rendre sa souffrance moins pesante, plus supportable mais à chaque fois les départs étaient un déchirement pour elle. Et à force de pertes, elle avait finit par se convaincre que la plus mauvaise personne qu’elle avait côtoyé, c’était elle même et que, malheureusement, elle ne pouvait pas s’éloigner d’elle même, qu’elle serait obligé de faire avec et qu’elle devrait, toute sa vie durant faire attention à ce que les gens ne s’attachent pas trop à elle c’est pour ça qu’elle acceptait sans un mot, même si c’était souvent difficile pour elle, de voir partir toutes les personnes qui entraient dans sa vie un jour où l’autre parce qu’elle ne pouvait pas les retenir égoïstement en sachant ce qu’elle leur faisait risquer en restant à leurs côtés. « Oui tu as raison ce n’est pas facile de savoir à qui l’on a affaire….» Elle avait marqué un temps de pause, elle aurait voulu lui dire de faire attention, qu’elle n’était pas une bonne personne, qu’elle ne lui apporterait que de la tristesse et du malheur parce que c’était ce qu’elle semait sur son passage mais, les mots avaient refusés de sortir de sa bouche, elle avait sentit sa gorge se serrer et l’émotion la gagner alors elle avait abonner l’idée de dire quoi que ce soit. Mais tôt ou tard elle devrait lui avouer tout ça, avant qu’il ne soit déjà trop attaché à elle et qu’il ne soit trop tard pour lui. « On essaie tous de faire de notre mieux !» Après avoir baissé les yeux quelques instants, la blonde avait finit par trouver le courage de les relever, se perdant quelques instants à observer les images du film qui défilaient sur l’écran géant. Puis après avoir inspiré profondément, elle confirma sobrement les propos de Thomas. « Oui. Mais c’est tellement difficile certains jours…» Ivy comprenait mieux que la majorité des gens comment on pouvait laisser tomber parce qu’un jour, bien malgré elle, elle avait laissé tomber, sans s’en rendre compte finalement, elle n’avait repris contact avec la réalité que quand son monde s’était totalement écroulé, elle n’avait rien pu faire et après cela elle n’avait pu que contempler le désastre de sa vie, l’ampleur des dégats et essayer de les réparer avec de l’aide, beaucoup d’aide et sans jamais y parvenir jusqu’à maintenant. Elle avançait à tatons, et elle faisait de son mieux c’était exactement ça, même si cela ne semblait pas vraiment suffisant. Thomas avait l’air de savoir de quoi il parlait mais, du point de vue d’Ivy, il s’en sortait beaucoup mieux qu’elle en la matière ou du moins c’était l’impression qu’il donnait.  « Peut-être qu'un jour tes pâtisseries changeront le monde !». La réflection de Thomas avait fait sourire la serveuse. Si seulement de simples pâtisseries pouvaient changer le monde… Ivy essayait déjà d’aider les autres à son échelle et elle avait beaucoup de valeurs à transmettre, du moins elle en aurait eu beaucoup si elle avait eu le courage de faire quelque chose, de se lancer. Peut être un jour, pour le moment elle n’était pas prête car comment prétendre aider les autres lorsque l’on a encore soit même besoin d’aide pour avancer ? « Si seulement on pouvait changer les choses avec des pâtisseries… Mais ça me fait du bien de me dire que le sucre peut apaiser quelques âmes en peine ! » Elle aurait aimé faire plus c’était une certitude mais c’était déjà ça, c’était mieux que rien voilà ce qu’elle ne cessait de se répéter pour éviter de sombrer à nouveau, pour essayer de se donner un peu de baume au coeur, de confiance en la vie et en elle aussi. En tout cas, le sourire du jeune homme à cet instant précis lui donnait envie de croire que c’était possible, qu’elle pouvait avec ses gâteaux, réchauffer des coeurs meurtris et donner le sourire. Assez parler d’elle maintenant. Ivy était bien plus à l’aise et bavarde quand il s’agissait de questionner Thomas quant à son nouveau travail. Une chose est certaine, cet emploi semble lui plaire énormément et Ivy était ravie d’entendre ça, de le sentir si passionnée. Grande amatrice de musée et d’art, elle n’y connaissait pas grand chose dans la restauration des oeuvres mais ça devait être passionnant et tellement valorisant que de redonner de l’éclat aux peintures que le temps avaient fait ternir.
« J'sais pas si je suis doué. Mais mon boss semble conquit par mes talents à restaurer de vieilles toiles de peinture ! ». Il était modeste, beaucoup trop certainement, Ivy était convaincue de son talant. C’était beaucoup plus simple d’encourager les autres, de les valoriser que de se faire confiance à soit même et d’être bienveillant envers sa propre personne, c’était une preuve indéniable. « Si ton patron est satisfait c’est le principal ! Mais je suis sûre que tu es beaucoup trop modeste. ». Apparement Thomas n’avait pas la main verte, ce qui expliquait certainement l’absence de verdure sur les photos qu’il avait pu envoyer de son appartement. Ivy comptait bien remédier à cela, c’était bien triste un appartement sans plantes. « Ah ben si tu me donne des cours pour ne pas faire mourir les plantes, je ne dis pas non ! ». Ivy avait rit avec douceur et amusement. Si elle offrait une plante à Thomas, sa mission serait donc de ne pas la laisser mourir et de rappeler au jeune homme quand il devait l’arroser, entre autre chose. « Pas de problème, je ne laisserais pas une plante mourir tu peux me faire confiance la dessus ! » C’était une mission de la plus haute importance, impossible de faire mourir un pauvre être vivant sans défense comme une plante verte. En plus, il était bien plus simple de prendre soin d’une plante que d’un être humain, les végétaux étaient moins compliqué à comprendre aux yeux d’Ivy. Elle était certaine que s’il s’y mettait, Thomas finirait pas y prendre gout à son tour. « oui, enfin je crois ! » La jeune femme avait acquiescé en promettant à Thomas de vérifier le jour où elle aurait l’occasion de venir chez lui. Sur le moment cette perspective ne l’effrayait pas, elle était même plutôt enjouée à cette idée d’aller chez Thomas et de lui ramener une plante verte pour décorer son appartement de la plus belle des manières. Il était certain que le jour où cela arriverait elle serait tétanisée, quelles que soient les circonstances de cette invitation chez le jeune homme. « Tu fais quoi après la soirée ? Je pensais que l'on pourrait aller se promener, à travers les rues du Queens. Qu'en dis-tu ? » Le film s’était achevé. Ivy n’avait pas suivi grand chose de ce qui s’était déroulé à l’écran, absorbée par sa conversation avec le jeune homme. Tant pis, elle ne serait pas interrogée par Jo’ sur l’histoire du film et puis elle pourrait le regarder chez elle, tranquillement. Jo’ d’ailleurs avec bien vu que son employée était absorbée dans sa discussion avec cet invité qu’il ne connaissait que de nom. Ivy avait réfléchit quelques instants avant de répondre. « Après ? Heu rien… enfin il faut que j’aide Jo’ a débarrasser la salle, faire la vaisselle, ranger tout ça… » Elle était partagée entre l’envie d’aller faire cette petite ballade avec Thomas et la peur d’y aller mais, de toute façon elle avait encore du travail ce soir, la journée n’était pas finie et Thomas n’aurait certainement pas envie de l’attendre pendant si longtemps, il choisirais certainement pour elle.