dominer le bruit (robin)

faut oublier.
oublier la solitude.
oublier l'coeur qui cogne.
oublier l'amour unique, l'amour qui détruit.
ouais. faut oublier les choses qui font un mal d'chien, essayant de se bâtir un nouveau trône en sachant pertinemment qu'il va s'casser la gueule encore et encore tant qu'elle n'est pas là pour lui tendre la main et lui promettre que ça va aller.
faut continuer.
continuer la merde du joint,
continuer la merde dans sa tête,
ses voix qui lui hurlent des tonnes et des tonnes de choses. ses voix qui ne le laissent pas, la sensation de devenir fou. sans doute le manque de sommeil, ou encore une drogue bien plus forte qu'il n'a pas encore su digérer. son estomac, ses poumons, son foie. rien n'va. son corps le lâche. il pourrait crever de plusieurs façons finalement.
l'overdose.
l'cancer.
l'amour.
trois putains d'bons scénarios, peut-être qu'il finira par trouver la paix. peut-être qu'il arrivera à éteindre les voix pénibles dans sa tête. et qu'est-ce qu'on dira de lui hein ? qui pleurera la mort d'un minable ? d'un type qui fait pitié. lui-même qui entoure avec perfection ce verre d'alcool bien trop fort avec ses ongles dégueulasses.
personne.
et peut-être pas même elle.
peut-être qu'elle a déjà oublié qu'il était. qu'elle se perd dans les bras d'un autre, qu'elle est en train de jouir et qu'elle ne pense plus à ce minus de robin qui ne lui apporterait même pas un peu de joie, avec une vie de merde comme la sienne.
alors pourquoi les voix continuent de hurler ? pour lui envoyer un message ? avec ce téléphone à clapet bien trop naze. ce téléphone qui est la seule chose qu'il a pu s'acheter en dehors de la came et des factures qui s'entassent dans un coin poussiéreux. ce téléphone avec lequel ses doigts jouent. monter. descendre. monter. descendre. ce même clip qui doit sans doute casser les oreilles à beaucoup de mondes dans ce bar. p't'être juste ils ont trop d'respect et qu'ils ferment leurs gueules. bien qu'il pourrait se manger un point dans la gueule que robin ne verrait pas tellement la différence.
quand on a une vie d'merde, on l'a jusqu'au bout, non ?
il n'en sait rien. il voudrait juste que tout s'arrête. sans s'empêcher d'se poser des questions cons. du genre ; et si mes parents étaient un peu moins cons ? mais qu'est-ce que ça change ? d'connaître un avenir différent ? à quoi bon hormis se faire plus de mal qu'autre chose ? ça sert à rien.
robin se lève. laissant le clapet sur le comptoir, à côté de son verre. il n'a pas peur qu'on lui vole ; qui voudrait d'une merde pareil ? personne. putain. personne. allant jusqu'aux toilettes, il ne prend pas la peine de se cacher une seule seconde quand il dépose la poudre sur le lavabo dégueulasse. il s'abaisse, des gestes bien trop précis pour un homme qui tremble à cause de manque. ça vous fera taire. qu'il espère. très sincèrement. en bouchant sa narine et en inspirant une longue lignée de drogue. ce sachet déjà presque vide, et l'argent déjà bien trop limite.
tant pis. au pire, il n'aura à nouveau pas d'eau chaude. est-ce si grave, finalement ?
lamentable.
il retourne à sa place. il ne marche déjà plus très droit. peu importe. il s'r'installe sur ce tabouret minable. reprenant une gorgée en jouant à nouveau avec le clapet.
rude soirée. putain. sa main se serre autour de ce verre. très bêtement. son regard se tourne vers lui. robin et la défonce visible à mille à l'heure. tant pis. juste tant pis, oui. faut croire que la tienne aussi. vu qu't'es là. l'homme détestable. et pourquoi hein ? pour cette jalousie ? cette connerie ? robin prend même une totale confiance quand il fait un signe au serveur, et que celui-ci s'approche. c'est lui qui paye mes verres. il ne parle pas doucement. l'art de la discrétion, ce n'est pas pour lui. il lui offre à la place un semblant de sourire qui ressemble plus à une grimace qu'autre chose. se retenant pour ne pas lui montrer son majeur. t'es tout seul alors ? ça va ? tu l'vis bien ? provoquer le diable, alors qu'il n'est pas mieux finalement.