Feux d’artifices accidentels (Isabella)

- feux d’artifices accidentels -

— ft @Isabella Kingston

Le soleil s’est levé. Les rayons pénètrent sournoisement la chambre à coucher, quelques heures à peine après que l’australien se soit finalement écrouler. Pourtant, le réveil est doux au côté de ces deux jeunes femmes. Il s’étire. Contemple longuement leurs corps nus, et entremêlés. Ashley a déjà oublié leur prénom. Il ne sait même plus s’il l’a même déjà su. Mais, ça lui importe peu. Un café. Un seul. Et elles prennent habituellement la porte. Seulement, elles ont choisis de parader encore un peu en petites tenues, plutôt que de revêtir immédiatement leur habits de la veille.

Quelques fruits frais, des oeufs aux plats et du pains grillés. Quelques mots à peine de sa part. Le mutisme du matin. Il déguste son café, en contemplant les courbes délectables féminines. À la dernière gorgée, il les invite à enfiler leurs robes et leurs escarpins. Et quitter ensuite son domicile. Rapidement, puisque le temps commence à lui manquer. Il a rendez-vous à Manhattan avec un client. Rick compte sur lui pour régler les derniers détails. Une douche rapide en solitaire et il imite ses conquêtes de la veille. Un pantalon de costume bleu marin et une chemise unie. Il attrape son veston au passage, mais se refuse à l’enfiler dans l’immédiat.

Et s’il arrive dans les temps, que tout se déroule comme prévu, le passé le rattrape sur le chemin de retour. Ashley râle, il maugrée. Une voiture a percuté la sienne.

Il jette un premier coup d’oeil, depuis l’impact, au rétroviseur. Le visage de l’autre conducteur est flou. Une jeune femme, toujours au volant de son véhicule. Il serre les dents, puis il ouvre la portière, et sort en trombe de sa Cadillac escalade. La colère l’inonde déjà. Elle l’envahie, avant qu’il ait même constaté les dégâts. Ce n’est pourtant que de la taule. Et les chances pour que son immense 4x4 ait été endommagé gravement par la petite berline, sont minces. Le blond coléreux est pourtant incapable d’y songer, jusqu’à ce qu’elle apparaisse et le rejoigne sur le trottoir. Le quadragénaire retire alors ses lunettes de soleil, son perpétuel sourire carnassier au coin des lèvres.

« Tu pouvais pas t’empêcher d’me faire du rentre-dedans, bien sûr... » Ses iris claires azurés s’accrochent à celles d’Isabella. Son coeur, lui, s’affole. Il se comprime dans sa poitrine. Et plus encore, lorsqu’il pense qu’elle pourrait s’être blessée, bien qu’il n’en montre rien. « Tu te sens bien ? Tu devrais t’asseoir. » qu’il lui ordonne, la guidant jusqu’à son camion. Ashley ouvre la portière. Et la regarde y prendre place. L’australien en profite pour la reluquer, avant de déposer sa main large contre le toit vitré et de se pencher vers elle. « Regarde-moi. » Sa main libre saisie délicatement le doux visage de la femme d’affaire, maintient son menton délicat, vérifie ses pupilles. « J’ai toujours l’même numéro. T’avais pas à faire tout ça, pour attirer mon attention. Une photo de ta poitrine aurait suffit... »

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crédit/ tumblr ♛  w/ @Ashley Kane

En guise de petit-déjeuner, un café noir, dont le seul dragée pour l’accompagner est en réalité une substance chimique censée l’apaiser. Elle avale l’anxiolytique puis, presque aussi vite, le café avant d’attraper son sac à mains et ses clés. La silhouette frêle s’échappe de l’appartement de sa sœur pour rejoindre sa voiture, sa matinée est emplie de rendez-vous. Elle aime son métier, Isabella, elle aime rencontrer le monde et que chaque journée soit différente. Mais, parfois, elle envie presque Peyton de pouvoir si souvent se focaliser sur son art. Pas de la meilleure humeur qui soit ces derniers temps, l’âme en peine parvient pourtant à merveille à faire illusion. Chaque rencontre professionnelle se déroule parfaitement comme il faut. C’est dans la voiture, subitement, qu’elle perd le contrôle. Un brin trop perdue dans tes pensées, peut-être juste trop déboussolée. Ou ce sont encore ces maudits cachets. Mais t’es trop paumée, Isa, pour le réaliser. Elle emboutit le véhicule qui se trouve juste devant elle, un 4x4 qu’elle aurait été aveugle de ne pas remarquer. La latina ferme douloureusement les yeux, épuisée d’avance par ce nouveau problème à gérer. Même si, encore une fois, c’est elle qui l’a créé. Elle sort de sa voiture sans plus attendre, pour s’assurer que sa victime va bien, que sa carrosserie n’a rien. – Je suis vraiment déso… Ses mots se perdent dans le regard de l’autre conducteur. Ce sont ses prunelles, en vérité, qui se perdent dans les siennes.

Et ton cœur à l’arrêt,
ton passé te percute de plein fouet.

Ses lèvres s’entrouvrent de surprise alors que l’homme assuré qu’il est, ne semble nullement déstabilisé. Le sourire du félin vient tranquillement la saluer. Elle ne relève même pas sa petite provocation qu’elle entend à peine l’effleurer. Trop sonnée qu’elle est, par ces retrouvailles inopinées. – Ashley. elle se sent, l'espace d’un instant, affaiblie, peinant à tenir debout sur ses escarpins soudain trop vertigineux. Le contre-coup de l’accident, de son état en ce moment, ou peut-être juste de cet ex qui réapparaît soudainement. Mais cela, elle ne l’admettra pas. Ashley, profitant de sa torpeur l’entraîne sans attendre son opinion jusqu’à sa propre voiture. Des mots qui sonneraient comme un conseil, si elle ne le connaissait pas si bien. – Je vais bien, Ashley… Elle se laisse pourtant attirer, avant de s’installer. Elle s’apprête, une nouvelle fois, à lui dire que tout va bien mais il glisse à ce moment précis sa main contre son minois. De la délicatesse qu’elle lui connaît, celle qui savait la chambouler, quand il acceptait de laisser tomber le masque voilé. Plongée soudain dans le mutisme, la belle tourmentée s’exécute, son regard ébène se glissant dans le sien. Il n’a pas changé, Ashley.  Le même que t’as aimé. Ça te frappe de plein fouet. Ses deux opales restent rivées sur ses grands océans, un peu trop longuement. Ce sont ses mots qui la poussent à reculer son visage de sa douce emprise sans plus attendre. – Il me semble que c’était davantage ton genre que le mien. lâche-t-elle, le ton assuré, de la femme qui ne se laisse pas amadouer. Chamboulée, malgré tout, de le revoir, la rose ne se fait pas longtemps épineuse. Elle retrouve sa délicatesse pour s’assurer de son état, à lui aussi. – Je suis navrée pour ta voiture, mais toi, tu n’as rien ? elle lui demande, soucieuse de lui avoir fait mal. Un peu plus mal, encore, qu’après la décision qui leur a été fatale.

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— ft @Isabella Kingston

Un seul regard suffit à l’australien pour constater les dégâts, l’état plus qu’adéquat de son véhicule. L’impact de la voiture sur son imposante automobile est à peine perceptible. Alors, qu’en contrepartie, la berline nécessitera de nombreuses, et couteuses, réparations. Cela, additionné à l’identité de la mystérieuse brune en face de lui, Ashley retrouve ce calme désarmant qui le caractérise. « Je suis vraiment déso...» Ses lippes s’étirent, forment un rictus narquois, alors que la brunette est stupéfaite. Immobile. À défaut de l’avoir été plus tôt, lorsqu’il le fallait.

Son prénom a toujours été plus doux, entre ses lèvres. Sa voix le caresse. Lui rappelle ce passé aussi fabuleux que douloureux, à ses côtés. Le colosse ne laisse rien paraitre. Pas même l’inquiétude qu’il ressent, pour cette femme qui a tant compté. Sa main contre sa hanche, il l’emmène sans difficulté là où il le veut, l’y installe, bien qu’elle tente de le rassurer. Mais, ça ne lui convient pas. Ashley marmonne, un simple grognement en guise de réponse. Il empoigne plutôt son menton, se plonge dans ce regard qu’il n’a jamais oublié. Et fait le malin. Une diversion. Une protection contre cette vague de chaleur, qui l’envie. Une envie folle, avant qu’elle ne s’éloigne. « Tu t’en ai jamais plainte... » qu’il lui rappelle.

« Ça va. Mon VUS n’a rien. La tienne, par contre... » L’automobile, minuscule comparée à la sienne, n’a eu aucune chance. « J’vais t’appeler une remorqueuse. » Une nouvelle fois, il s’exécute, sans lui laisser le choix. Il dépose sa main masculine sur son épaule délicate, afin de l’empêcher de bouger. Ou pire, de s’enfuir. « T’as besoin que j’t’appelle une ambulance ? » qu’il demande, secrètement inquiet pour son corps frêle et désirable.

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crédit/ tumblr ♛  w/ @Ashley Kane

Le calme implacable. L’allure impeccable. L’assurance inébranlable. Il est là, devant elle, tel qu’elle l’a connu. Tel qu’elle l’a rencontré quand il n’était encore qu’un inconnu. Mais Isabella, elle sait. Elle le connaît. Elle connaît la tempête qui se cache derrière les traits savamment maîtrisés. Elle connaît la fougue derrière cette fausse tranquillité. Elle connaît chaque parcelle, ou presque, de cet homme avec lequel elle a partagé des mois de passion et d’explosions. C’est pour cette raison que, quand il l’attire jusqu’à son immense voiture sans attendre son avis, elle y reconnaît tout de suite son emprise marquée. Elle le laisse faire, Isabella, poupée lassée, poupée qui n’a pas la force de le repousser. Mais les souvenirs viennent la submerger, aussi limpides que son océan glacé. Son trouble transparaît, sans qu’elle ne cherche à le voiler. Elle est surprise de le voir, déconcertée. Déboussolée.

Fantôme du passé,
pas si éloigné,

u n e é t e r n i t é


Elle se remémore tout ce qu’ils ont partagé, l’affection irréfutée, les sentiments inavoués. Elle se remémore tout alors que son encre se noie dans ses prunelles bleutées, juste avant de reculer. Et l’instant de flottement, à peine créé entre les deux âmes égarées, vient brusquement s’arrêter. C’est son silence qui lui répond, confession inavouée. Comme tant d’autre qui les ont séparées. Retrouvant un brin de contrôle, la belle écorchée s’intéresse à son état, à lui, bien plus qu’à son véhicule. Les dégâts sont matériels. Rien qu’elle ne fera pas remplacer, rien qui ne sera impacté. Mais il est décidé à prendre les choses en mains. Comme si elle en avait besoin. Sa main vient se poser sur bras du jeune homme avec une douceur qui contrebalance totalement à l’assurance dans sa voix. – Tu ne m’appelles rien du tout, j’ai le numéro de mon assistance. Elle se redresse, prête à aller récupérer son sac à main dans sa voiture délaissée. Jusqu’à ce que sa main vienne, sur son épaule, délicatement se poser. Son ébène s’accroche aux deux lunes qui la surplombent. – Tu n’as absolument pas changé. se contente-t-elle de faire remarquer avant de se redresser de nouveau. Elle se lève pour rejoindre enfin sa voiture et s’empresse de récupérer dans son sac son téléphone. L’appel n’est pas long, comme prévu, son assistance se charge de remorquer le véhicule. – Je vous remercie, à tout à l’heure. Et elle raccroche enfin, pour se retourner face à son ex. Elle le contemple, plusieurs secondes durant, comme si elle s’apprêtait à dire quelque chose. Mais la belle se ravise au dernier moment. – Nous devrions établir le constat. Elle ne veut pas lui faire perdre de temps. Ni se laisser envahir par de nouveaux, anciens, éternels tourments.

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— ft @Isabella Kingston

Le calme, ou l’indifférence.

Alors, que la seule femme qu’il ait, un jour aimé, se tient devant lui.

Elle a percuté son véhicule.

Isabella est réapparue dans sa vie, comme ils se sont aimés, comme ils se sont quittés, aussi. Intensément. Sans demi-mesure. Sans aucune retenue.

Elle a heurté son véhicule.

Isabella a abîmée sa voiture, comme elle a volé, puis brisé son coeur, aussi. Accidentellement. Sans l’avoir prévu, ni voulu. Sans l’avoir su, même.

Et lui se tient devant elle, sans rien laissé paraître. Une fois de plus.

Il la mène à son camion, l’y assoit. Incapable de la quitter des yeux. Incapable de ne pas s’en inquiéter. Et encore moins de le lui avouer. S’il le faisait, ce serait admettre qu’il a un coeur. Et qu’il est humain, vulnérable lorsque ça la concerne. Alors qu’il tient à cette réputation herculéenne qui le précède, qui le suit depuis toujours. Ashley l’indestructible. L’autoritaire. Ainsi, le grand blond balaie son interrogation du revers de la main. Il n’a rien. Il a été surpris, tout simplement. Et il propose d’appeler une remorqueuse, ou plutôt l’avise de ses intentions. Seulement, Isabella refuse. Sa main délicate sur l’avant bras du colosse le convainc de la laisser faire. Il a toujours aimé cela, d’elle. Cette indépendance. Cette force de caractère.

Il raccroche et range son téléphone dans la poche arrière de son pantalon, lorsqu’elle établi un nouveau contact physique entre eux. Ce perpétuel sourire railleur au coin des lèvres. « Pourquoi changer lorsqu’on a déjà atteint la perfection ? » qu’il lance, en un haussement d’épaule. L’australien ne l’abandonne pas pour autant. Il la suit de près. N’est pas bien loin, lorsqu’elle récupère ses effets, et qu’elle téléphone à ses assurances. La vue qu’elle lui offre est agréable. Mais, la proximité qu’il a conservé lui permettra d’intervenir, si un malaise la prenait soudainement.

Contrôlant pour la plupart. Galant à l’occasion. Et silencieux.

Il plonge ses océans dans les prunelles de la latina. Sans un mot. Sans un son. Il attend. Il a toujours été plus doux, plus patient avec elle. Elle a su l’apprivoiser, d’une certaine façon. Elle aurait pu le dompter, peut-être. Au lieu de le briser, encore un peu. Mais, elle a abandonné. Un peu trop tôt. Peut-être trop tard. Et la voix féminine se fait attendre encore un peu. Elle demande finalement la collaboration de son ex, pour le constat d’infraction. Mais, Ashley est ailleurs. Il n’en a rien à faire, du constat. « Nous devrions aller dîner. Ce soir. » qu’il rectifie, lui impose presque. Il ne lui demande pas si elle en a envie, ou si elle est libre. Il ignore aussi le souhait de la trentenaire, relativement à l’accident. La toujours aussi magnifique Isabella. Elle non plus, n’a pas vraiment changée. Si ce n’est les quelques mèches dans ses cheveux, qu’elle a fait coupés.

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crédit/ tumblr ♛  w/ @Ashley Kane

Il était tout aussi calme quand elle est partie. Il était tout aussi silencieux quand elle lui a dit que c’était fini. Comme une évidence fatale, comme s’il le savait, ou peut-être comme s’il s’en fichait. Elle n’a jamais su, Isabella, mais elle n’a pas eu l’audace de s’en offusquer alors qu’elle, le quittait. Alors qu’elle, l’abandonnait. Se retrouver face à lui, au moment précis où elle a reproduit la même chose avec son dernier petit-ami, c’est troublant et difficile. C’est faire ressurgir en elle le sentiment douloureux d’être toujours celle qui fait tout de travers. C’est réaliser, un peu plus encore que d’ordinaire, qu’il y a quelque chose qui ne va définitivement pas chez elle.

Puis, il y a ses prunelles,

ces deux océans dans lesquels elle se perd,

Ashley, ton prénom résonne encore dans son cœur.

Le cœur éreinté, de trop aimer, et à la fois, ne pas savoir aimer. Ne pas avoir su l’aimer. Pas comme il le fallait, pas comme il le méritait.

Ashley, ton prénom sonne comme un regret éternel,
une mélodie trop amère, si douce mais si cruelle.

Il paraissait si sûr de lui la première fois qu’elle l’a rencontré. C’est cette assurance, cette confiance dans ses grands yeux azurés qui a su tout de suite capter son intérêt. C’est la force qui en émanait, l’impression d’être face à un roc devant la poupée fanée qu’elle était. C’est ce qui l’a attirée, ce qui l’a captivée. Mais ce n’est pas ce qui l’a poussée, Isabella, à l’aimer. C’est la vulnérabilité qu’elle lisait dans ses deux océans quand il s’autorisait à les noyer dans son ébène. C’est la sensibilité qu’elle avait la chance, il lui semblait, de frôler de son empreinte.

Elle l’a aimé, Ashley,
elle l’a aimé comme on aime un arc-en-ciel.

De toutes ses couleurs, de toutes ses facettes, en sachant qu’il n’est pas éternel.

Mais l’amour n’est pas un sentiment éphémère. Il reste gravé dans son cœur autant que dans ses veines. Puissante est sa griffe, dans une âme presque sans vie. Et, quand il la taquine de son insolence, de cette arrogance qui avait su attirer son attention, elle ne sait plus si elle est agacée ou désorientée. Elle retient un sourire mais ses prunelles débordent d’une affection qu’elle ne sait dissimuler. Une tendresse inopinée. Parce qu’elle ne sait pas faire semblant, l’écorchée, elle ne l’a jamais fait. Moins encore quand il s’agit d’aimer. C’est plus facile de s’en détourner. Alors elle le fuit, Isabella, comme elle l’a fait par le passé. Elle s’éloigne pour passer cet appel, trouver une solution à ce problème matériel. C’est tellement plus simple, aussi, que s’interroger sur l’essentiel. Sa conversation téléphonique terminée, la belle tourmentée repose ses prunelles noires sur les siennes. Il est toujours là, il s’est même approché de la latina. Mais ce n’est pas pour remplir ce constat. Il ne répond pas à sa demande, comme toujours, il lui expose le plus simplement du monde sa propre réflexion. Et elle ne sait, comment il a pu arriver à une telle conclusion. Prise au dépourvu, la belle le contemple, répète sans le vouloir. – Ce soir ? L’invitation sonne comme une idée établie. Une qui a pourtant du mal à se matérialiser dans son esprit. Ashley, Isabella, comme autrefois. Elle tentait de faire abstraction de lui, de son magnétisme, depuis le début de leurs retrouvailles. C’est beaucoup plus difficile à cet instant. – Pourquoi veux-tu dîner avec moi… ? elle lui demande, presque, dans un murmure. Oublié l’accent, oublié le constat, elle se laisse perdre dans ses yeux d’azur.

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— ft @Isabella Kingston

Quelques pas dans sa direction pour sa sécurité, pour retrouver sa chaleur. Leurs premiers émois. Et l’invitation est lancée. Il la somme de l’accompagner. « Ce soir ? » qu’elle répète simplement - aussi adorable soit-elle, avant de l’interroger également sur les raisons de cette invitation. Deux questions que le colosse ignore dans un premier temps, préférant l’interpréter autrement. « Je pensais qu’on pourrait allés dîner au River Café. » Le seul, l’unique. L’incontournable. Un lieu d’exception, situé sous le pont de Brooklyn. Un sourire en coin. Un souvenir très cher. Leurs doigts entrecroisés. La petite allée fleurie et éclairée de ses guirlandes lumineuses qui mène à un grand jardin. Un véritable havre de paix malgré la jungle de béton américaine. Un oasis de verdure qui mène à cette luxueuse péniche amarrée, puis reconverti en un élégant et prestigieux restaurant étoilé. Un cadre enchanteur. Son ambiance feutrée, additionné à un panorama saisissant du centre ville de Manhattan et de ses tours scintillantes. Le pont illuminé. La statue de la liberté. Une cuisine gastronomique. Un pianiste de grand talent. La fierté inavouée d’y être au bras de la belle latina. Aussi magique soit-il, l’endroit n’a jamais été le même suite au départ de celle-ci.   L’habitué des lieux hausse les épaules. « Mais, t’as raison. Ils n’apprécient pas trop les réservations de dernières minutes... Il vaut mieux remettre ce dîner à la semaine prochaine. » Et s’assurer ainsi d’avoir une table près des fenêtres. Une tenue plus adéquate. Les idées claires, aussi. « Allons plutôt luncher à ce restaurant italien que t’aimes bien. Celui de la 10e avenue » qu’il conclu, sans la quitter des yeux.

Sa main virile se pose sur la joue de la trentenaire. Elle glisse ensuite sur son cou, lorsque le blond s’approche un peu plus de la belle. Les doigts se serrent contre sa gorge. Une poigne ferme. Et pourtant, d’une douceur insoupçonnée pour ces autres. Tous les autres, sauf elle.

L’objet de sa tendresse.

Isabella et son regard félin.
Isabella et ses lèvres écarlates.

C’est en les fixants qu’il se penche vers elle, et son oreille attentive. Il desserre son emprise, puis caresse sa peau de son pouce. « Et si le simple fait de le vouloir n’est pas suffisant, il y a aussi tes envies. » Un murmure à son oreille. « J’le vois dans tes yeux, à la façon que tu as de me regarder... » Trop prétentieux, sans doute, pour imaginer que ça ne puisse être que la surprise qu’il lit en elle. Alors, qu’il est pour sa part désireux de suspendre le temps, de prolonger les retrouvailles accidentelles. Elles n’ont rien de romantiques. Mais, elle est là. Et c’est tout ce qui compte. Ashley cherche donc inconsciemment à retarder les au revoir. Il l’ignore, encore, le nierait certainement avec véhémence si on le lui affirmait. Pourtant, il n’a pas envie qu’elle disparaisse à nouveau, parce qu’il ne sait pas s’il pourra survivre, une seconde fois à son abdication. Au souvenir enfoui de la douce Isabella, de ces sentiments pour elle. Troublants, paralysants. Car c’est cela, la vérité. La femme d’affaires a su capturer le coeur de pierre du titan. Elle l’a apprivoiser, et aurait certainement pu le dompter si elle était rester. Et la brute l’aurait laissé faire, Isa. Elle. Uniquement elle.

Seulement elle a choisi de l’abandonner. Et en un claquement de doigt, elle s’était éclipsé.

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crédit/ tumblr ♛  w/ @Ashley Kane

Et, pendant un court laps de temps, elle a la sensation de se retrouver projetée dans le passé. Souvenir fugace d’années lointaines et pourtant si près, nostalgie douce et amère qui ressurgit avec beaucoup trop de facilité. Comme s’il ne l’entendait pas, il se laisse penser à haute voix. Comme si, surtout, il ne l’écoutait pas. Il la laisse entrevoir, ce qu’il imagine pour une soirée à deux. Une soirée pour tous les deux. Le trouble dans les prunelles sombres de la latine s’intensifie un peu plus quand elle comprend qu’il est sérieux. Qu’il veut réellement dîner avec elle, en tête à tête, comme ils le faisaient autrefois. Les effluves du passé envahissent l’esprit tumultueux de l’âme torturée lorsqu’il évoque ce restaurant, celui où ils ont passé tellement de temps. À refaire le monde à leur façon, idéaliste parfois, plus fataliste d’autres fois. À se dire qu’ils refaisaient le monde quand, en réalité, c’est le leur qu’ils créaient. Leurs cœurs qu’ils liaient. Et leurs vies qui s’entremêlaient.

Ce restaurant, sans lui, elle n’y est plus jamais retournée.

Sans toi, Ashley, rien n’aurait eu aucun sens,
elle aurait ressenti, partout, ton absence.

Comme elle la sent, en ce moment même, alors qu’il est plus près que jamais. Peut-être même un peu trop près. – Ashley, je… sa voix tourmentée s’arrête, quand la main masculine vient subitement, sur sa joue, se poser. La caresse se fait plus entreprenante, plus vorace, alors que le rapace enserre son cou délicat de ses griffes acérées. Il la retient comme on détient une colombe, avec fermeté pour l’empêcher de s’envoler, mais avec tendresse pour ne pas l’abîmer. Le port altier, l’encre de ses opales aussi noires que l’ébène, elle le fixe sans sourciller. Sans s’effrayer, sans se laisser intimider. Inatteignable Isabella, il n’y a que les battements saisissants qu’il peut sentir palpiter sous ses doigts. Les battements accélérés sous son emprise comme si c’était son cœur qu’il retenait encore entre ses mains. Mais ce n’est pas sa force qui garde l’ascendant sur elle, c’est sa tendresse. La douceur avec laquelle il caresse sa peau halée, comme si elle était la chose la plus précieuse qu’il pouvait toucher. Chaleur incandescente qui vient à la submerger.

Il y a aussi tes envies, trop marquées,
cette façon que tu as de le regarder.

Le clair-obscur disparaît de ses deux lunes. Ne subsiste plus que cette noirceur obscure. Il a le don de la faire frémir, Ashley, le don d’éveiller en elle la féline. La douceur délicate laisse place à l’inapprivoisable. Le cœur d’écorchée, qui se réveille, farouche devant la virilité à son apogée. L’océan foudroyé de ses yeux revolver, elle lance de sa voix assurée. – Ne joue pas à ça, Ashley. La belle pose sa main contre la sienne pour la retirer, sans pour autant bouger. Elle sent encore les battements effrénés de son palpitant alors qu’elle continue de le contempler. – Tu pourrais simplement me dire que tu as envie de dîner avec moi. Et peut-être que, là, elle accepterait. Peut-être que, là, elle se rendrait compte que l’envie est partagée. Mais, à cet instant précis, la sirène se sent légèrement… suffoquer. Comme un rappel des médicaments qui viennent à lui manquer. Elle n’a guère le temps de réagir davantage qu’elle voit un camion s’arrêter, son assistance est arrivée. Elle s’approche du jeune employé, ils échangent quelques mots, avant qu’il n’aille installer sa voiture sur la remorque. – Vous allez pouvoir rentrer sans votre voiture ? elle ne sait pas, n’y a pas songé. Trop perturbée qu’elle était. – Je vais me débrouiller. Elle signe quelques formalités et lui donne ses clés. Récupérant son sac à main, la jeune femme se retrouve à nouveau seule avec son ex. Abandonnée sans voiture sur le pavé, l’impression désagréable, de se retrouver dans le rôle de demoiselle en détresse. – Je veux bien déjeuner avec toi si tu évites toute raillerie à mon égard. elle lance, sans savoir comment s’expliquer sa démarche. Peut-être juste qu’elle en a assez, Isabella, assez de dire au revoir.

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— ft @Isabella Kingston

Ce soir, oui.

Ce soir, parce qu’elle a éte mise sur sa route, pour la première fois depuis des années. Ce soir, parce qu’elle pourrait disparaître à tout moment. Et que ce serait pire, encore, que de ne pas l’avoir revue. Malgré qu’il ait tenté de faire le deuil de cette relation, de cette femme. Toujours en vain.

Alors, oui, ce soir, qu’il impose, mais pas tout à fait. Il l’invite, à sa manière, et comme si rien n’avait changé. Comme si elle était encore et toujours sienne. Il s’en saisie, se perd dans ses prunelles marrons, jusqu’à se languir à nouveau. La main du colosse câline et son esprit vagabonde. Le blond se noie dans ces souvenirs. Rien qu’en évoquant ce lieu. Toujours le leur. Figé dans le temps, comme cette relation au goût lancinant d’inachevée. Et il divague, un peu plus. Il s’impatiente, alors ce soir, devient maintenant. « Hum ? » qu’il fredonne, la priant de continuer.

Sa belle amour. Sa douce Isabella.

C’est elle, et sa peau satinée qu’il caresse. Et pourtant, le colosse en a des frissons. Son coeur de pierre qu’il sent vibrer dans sa poitrine, qui se fissure un peu plus, par la peur. Et le désir. « Ne joue pas à ça, Ashley » qu’elle lance, en déposant sa main contre la sienne. Et qu’elle le fixe, de son regard doux. « Quoi ? » qu’il marmonne, entre ses dents, avant que de sa voix, elle brise une fois de plus le silence, forçant le quadragénaire à détourner momentanément les yeux. La vérité c’est qu’il en est incapable. Il n’en a pas le courage. Et pourtant, l’envie est partagée... si vraiment elle le voulait aussi. Ainsi, il pose simplement son front contre celui d’Isabella. Il s’immobilise, la force à en faire autant. Ferme les yeux. Inhale son odeur, profite de sa chaleur.

Jusqu’à ce que la remorque s’arrête. Le blond la regarde alors s’éloigner. Belle et élégante. Il rejoint ensuite l’arrière de son véhicule, afin de s’y appuyer. De là, il la regarde faire. Prêt à interagir, en cas de besoin. Elle fini par le rejoindre et accepter officiellement son invitation. Il ricane, légèrement. « Promis. » Un serment qu’il scelle, en se penchant délicatement vers elle. Et embrasse sa joue. Moment tendre qu’il interrompt afin de faire le tour de son véhicule, et lui ouvrir la portière. « Attache ta ceinture, s’il-te-plait. Juste au cas ou on croiserait une autre de mes ex, sur la route... » qu’il blague, avant de prendre place sur le siège conducteur. Et puisqu’il lui avait promis de ne plus la taquiner à ce sujet, il se tourne vers elle. « J’suis... J’suis content de te revoir, Isa. » Sa Kryptonite. « Mais, ne te met plus en danger, comme ça ! »

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crédit/ tumblr ♛  w/ @Ashley Kane

Il lui a manqué. Il lui a manqué à la seconde même où elle l’a quitté. Un choix qu’elle a peut-être regretté, des pensées qui l’ont souvent tourmentée. Mais c’était la seule décision qu’elle pouvait prendre, mettre fin à une passion dévorante. La vérité, c’est qu’elle ne se sentait pas en sécurité avec Ashley. Leur relation était tellement intense, tellement prenante, trop pour qu’elle tienne sur la durée. Il a fait l’effet d’un tourbillon dans son cœur écorché, elle ne pouvait pas le laisser faire la même chose dans une vie déjà trop déséquilibrée. Elle avait besoin de stabilité, Isabella, besoin d’être rassurée. Besoin d’un homme qui sache lui dire qu’il voulait passer le restant de sa vie à ses côtés quand elle, elle était incapable de l’espérer. C’était injuste, sans doute, pour Ashley. Elle se confondait autant que lui dans cette relation fusionnelle et, à la fois, pleine de non-dits. Mais, pour une âme en perdition dont la vie n’a jamais été stable, il n’était pas le plus apaisant des petits-amis.

Il était la foudre à laquelle tu n’étais pas préparée,
rose fanée déjà bien trop abîmée.

Et la foudre s’abat une deuxième fois.

Se retrouver à ses côtés déstabilise la belle torturée. Plus qu’elle ne veut bien le montrer. Elle n’était pas préparée à le revoir, encore moins dans ces circonstances. Confrontée, une fois de plus, à un homme qu’elle n’a pas su aimer, pas comme il le fallait. Peut-être que les plus belles histoires sont celles qui laissent un goût d’inachevé. Peut-être qu’il vaut mieux un amour arraché, plutôt que des sentiments étiolés, des sentiments émiettés. Peut-être qu’elle ne l’aimera jamais autant qu’après l’avoir quitté. Ô, Isabella, le cœur pur, l’âme pourtant si obscure. Incapable de croire à un amour éternel, quand rien de ce qu’elle ressentait n’est resté éphémère. Elle tente désespérément de lui imposer une distance, émotionnelle en réalité, plus que physique. C’est le silence qui vient répondre à ses paroles alors qu’il détourne instinctivement ses iris. Elle le contemple toujours, elle, de son regard ébène. Elle le contemple et réalise qu’il n’a sans doute pas changé. Il ne sait dire ce qu’il peut éprouver. Mais peut-être qu’elle a perdu, aussi, le droit de l’écouter se confier. Et plus que les mots, ce sont les gestes qui parlent. Eux qui ont fini, chaque fois, par leur être fatal. Son front posé contre le sien, elle n’ose pas bouger. Prise dans l’instant comme ensorcelée. Elle ferme les paupières dans un signe de confiance qui ne lui est pas habituel. Tout comme lui avec elle.

Vos parfums se mêlent,
vos chaleurs s’entremêlent,

Et tu sens lentement se raviver cette flamme en berne.

C’est sa dépanneuse qui les sort de leur torpeur. Presque gênée, la latina recule à la volée, pour rejoindre l’homme venu l’assister. L’échange avec lui permet à l’âme trop torturée de retrouver une certaine assurance avant de revenir à ses côtés. Un faible sourire vient se dessiner sur ses lèvres quand il lui promet d’éviter de la taquiner. Et d’un baiser contre la joue, le colosse laisse entrevoir la tendresse qui l’a  poussée à l’aimer. Il s’éloigne déjà tandis qu’elle se sent encore perturbée, pour le rejoindre quelques instants après. – Merci. le remercie-t-elle quand il lui ouvre la portière avant de monter dans la voiture. Elle se retrouve sur le siège passager, s’exécutant à attacher sa ceinture de sécurité, alors qu’il s’installe de son côté. Le petit sourire amusé à ses premiers mots laisse place à un autre type de sourire, un sourire plus dangereux. Elle ne s’attendait pas à ce qu’il dévoile ce qu’il ressent, c’était déjà si difficile de le faire quand ils étaient ensemble. – Je suis heureuse de te revoir aussi, Ashley. Elle se rend compte, en le disant, combien c’est vrai. Combien elle se sent bien, dans cette voiture, à ses côtés. C’est, un peu, comme si elle revenait dans un endroit qui lui avait manqué. Elle se sent toujours à sa place alors qu’il y a trop longtemps qu’elle n’y a pas mis les pieds. – Je ne sais pas ce qui s’est passé, je devais avoir… la tête ailleurs. elle avoue, en détournant ses prunelles assombries vers le paysage qui défile. – Alors… comment vas-tu ? elle lui demande alors qu’elle se retourne déjà vers lui, son encre tentant de percer l’océan alors qu’il est occupé à conduire.