highway to hell. (Opale)

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{ highway to hell }
crédit/ tumblr ☾ w/@Opale Millstone

C’est dur de vivre avec ce trou dans le cœur. C’est dur de vivre avec cette sensation amère, celle que, peu importe ce que l’on peut faire, il n’y aura rien pour le combler. Elle a pourtant tout essayé, Ella, vraiment tout. Les fêtes, le sexe, l’alcool et encore bien d’autres travers. Les comprimés de toutes les couleurs, les poudres blanches, et même les seringues aiguisées. Elle a essayé de trouver la vie en frôlant la mort. Essayé de frôler la peur en côtoyant le danger. Mais non, rien. Comme si rien ne pouvait l’atteindre, même pas ce luxe que tous ces hommes lui paient. C’est ce manque d’amour qu’elle vit depuis toujours, manque impossible à oublier. Il n’y a que des instants éphémères, des bonheurs incertains, qui s’envolent au petit matin. Et, surtout, ces amitiés mises sur son chemin. Cette amitié en particulier, elle se rappelle, chaque fois qu’Opale lui prend la main. Chaque fois qu’elle vient auprès d’elle, la secourir ou bien l’épauler, ou lui demander un réconfort sans le formuler.

Chaque fois qu’elle est là,
quand plus personne d’autre n’est là.

C’est dans son regard qu’elle retrouve, un peu d’espoir. Pas envers la vie, mais envers cette amie. Elle est là, elle, chaque fois qu’elle est seule. Chaque fois qu’elle a besoin de sentir à nouveau vivre son cœur. Elle est là, en train de la rassurer, lui rappeler celle qu’elle est. Juste une survivante qui se bat, comme elle peut, dans un combat perdu d’avance contre cette vie qui ne veut pas d’elle. Avec une alliée, une amie, ce qui se ressemble de plus à un ange gardien pour veiller sur elle. C’est peut-être parce qu’elle lui ressemble autant, parce qu’elles ont le même tempérament. Mais Opale, elle sait trouver les mots dont elle a besoin, ceux qui lui font du bien. Ceux qui lui rappellent que ce n’est pas elle, le monstre d’égoïsme, mais l’humanité entière qui ne pense qu’à elle. – J’sais pas, t’as peut-être raison… Mais ça change pas que je suis bonne à rien. Elle hausse les épaules, un peu moins fataliste. Juste… réaliste. Elle laisse échapper un faible soupir, qui finit par se transformer en sourire. La cause, la proposition d’Opale, qui semble encore une fois lire en elle comme un livre ouvert. Comme une autre moitié d’une même âme, comme une sœur au sang différent mais au cœur siamois. – J’espère que t’as de quoi m’faire oublier, parce qu’il va falloir une sacrée dose. Et elle retrouve, tout doucement, un début d’insouciance. C’est le fait d’être dans cette voiture, loin de l’autre abruti, avec une vraie amie. Un goût de liberté retrouvé. Alors que le paysage continue de défiler, la voiture bientôt garée, c’est seulement une fois dans l’appartement qu’elle ose relever les prunelles vers celle qui l’a sauvée. – Et toi, ça va ? demande-t-elle en retirant sa veste, comme si elle sentait le contraire. Comme si elle sentait qu’elle n’était pas la seule, en ce moment, à se plonger toujours un peu plus dans les ténèbres.

beg you sometimes, i'll take you somewhere, the water still go, the ghost beyond law. -- @ella gardner

Être une bonne amie, c’est pouvoir montrer à Ella combien elle est géniale, malgré le fait que le monde tente de le lui cacher. Parce que c’est difficile de croire en soi, et elle le sait certainement mieux que personne, Opale. Elle-même n’y croit pas beaucoup, mais lorsqu’elle aurait pu baisser les bras, elle a pourtant décidé de se battre. Décidé de se débattre. Peut-être pas de la meilleure des manières, peut-être qu’elle se contente de vivre et non de survivre, mais elle ne lâche pas. Elle ne se sépare pas de ce petit souffle de vie qui lui permet de lutter encore et toujours. Elle ne pense pas au pire, et elle n’a aucune envie de voir celle qu’elle considère comme l’une de ses meilleures amies imaginer qu’elle n’a pas sa place dans ce monde. Ce que tu entends de la bouche d’Ella, c’est exactement ce que tu as pu sortir de la tienne, chaque fois que tu traversais tes pires moments. Chaque fois que t’avais l’impression d’être un véritable monstre. Et même si t’es bancale, aujourd’hui, même si t’es complètement instable, t’as quelque chose qui te fait vibrer, positivement : virevolter dans les airs telle la gymnaste que tu es. - Tu penses que je suis meilleure que toi, moi ? Non. Et j’ai quand même réussi à trouver ma voie, tu sais. Alors crois-moi, ça viendra. Elle est peut-être inconsciente, mais elle n’est pas inquiète pour Ella. Il faut simplement qu’elle parvienne à voir toute sa valeur, toutes les qualités qu’elles renferment en elle derrière la souffrance et la déchéance. Parce qu’elle mérite bien mieux, Ella. Elle pourrait parier sur elle, s’il le fallait, tant elle a confiance en son amie. - J’ai toujours la dose, tu le sais bien. Air malicieux, elle ne fait certainement pas ce qu’il faudrait faire. Mais après tout, elle ne le fait jamais. Tout ce qu’elle souhaite, c’est aider Ella à oublier cette soirée cauchemardesque. Oublier ce sale type, ce porc. Et une fois dans son appartement, elle sort deux verres et une bouteille, avec un peu d’herbe précieusement gardée dans une petite boite. - Oh, moi, ça va. J’me fais ma propre thérapie. Qu’elle lâche en désignant l’herbe préalablement sortie, en référence à son agression. T’aurais pu voir un psy, Opale, si tu le voulais. T’aurais pu te confier à quelqu’un, mais tu ne connais que trop bien les psychologues. Tu sais qu’ils ne sont pas bons pour toi.

(c) calaveras.

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Les âmes esseulées ne trouvent souvent pour les porter que d’autres âmes tout aussi tourmentées. Comme si elles se retrouvaient au même endroit, au-dessous du commun des mortels, quelque part dans les enfers. C’est là qu’elle l’a trouvée, Opale. L’air inconscient, mais la voix grave, puis ce petit quelque chose dans ses grandes billes noires. Elle s’est sentie si vite connectée à elle, parce qu’elles partagent toutes les deux ce mal-être. Mais son amie est bien plus forte qu’elle. Gymnaste professionnelle au métier charismatique qui lui correspond à merveille, elle a su se prendre en main. Elle a su écouter ses désirs, ses rêves, ses besoins. Elle a fait son bout de chemin, en vingt-trois petites années seulement, quand son aînée n’y arrive pas, à déjà trente-et-un. Parce qu’elle est plus forte que tu ne le seras jamais, Ella. Plus combative, plus déterminée, elle vit pour avoir le souffle coupé, quand t’as déjà du mal à respirer. Du mal à t’oxygéner dans cette vie polluée. Trop écorchée pour apprécier la vie, trop terrorisée pour en finir.

T’es une poupée cassée,
quand elle arrive, toute seule, à se réparer,

ou, au moins, elle essaie.

L’âme en perdition hausse les épaules, devant sa question, un peu démunie à l’idée d’avouer. Que, oui, son amie vaut mieux qu’elle ne vaudra jamais. Elle a choisi de se battre et d’affronter, elle, contrairement à l’écorchée vive qui se contente de subir. – J’avais trouvé quelque chose que j’aimais, tu sais. Mais contrairement à toi, j’ai laissé tomber. Alors, tu vois, t’es meilleure que moi. Plus forte, surtout. Car il n’y a pas que le théâtre qu’elle a abandonné, Ella. Il y a aussi l’amour, la famille, tout ce qui n’a jamais compté. Autodestructrice qui a anéanti tout ce qu’elle a pu aimer. La seule chose qui peut bien persister, c’est l’amitié. L’amitié d’Opale, qui est toujours là, même quand elle est au plus mal. D’un faible sourire, devant l’air malicieux de la belle, elle la regarde faire. Sans l’interrompre pendant qu’elle préfère ce qu’il leur faut, Ella s’installe sur le canapé. Elle retire ses escarpins horribles de ses pieds, puis s’assoit avec une nonchalance qui contraste totalement avec l’élégance de la robe griffée. Dernière offrande de lui qui l’a abandonnée sur le bas-côté. Mais la jeune femme ne veut plus penser à ce qui s’est passé, c’est sur son amie qu’elle choisit de se concentrer. Ses mots qui laissent apparaître qu’elle ne va pas aussi bien qu’elle le laisse paraître. – Et ça marche ? qu’elle demande, sans l’ombre d’un jugement. Elle voudrait savoir si Opale le ressent, elle aussi, ce sentiment que tout fout le camp… ou bien si c’est elle qui est simplement en manque. – Tu pourrais me donner ton contact, d’ailleurs ? Depuis que Thomas a arrêté, c’est la merde pour trouver quelque chose de potable. Ce qui paraît difficile à croire avec son entourage. Comme s’ils s’étaient tous mis en tête de la protéger du monde qu’ils connaissent autant qu’elle. Comme s’ils savaient, ce que tu te refuses d’avouer.

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Elle est forte. C’est indéniable. Elle a cette force en elle, presque surhumaine. Cette force qui ne descend pas des dieux mais qui remonte de l’enfer. Elle a cette force, celle de toujours se relever, celle de ne jamais complètement s’effondrer, mais cette force noire. Cette force noire qui vit en elle, comme un démon qu’elle ne garde que trop bien. Au fond, tu le sais, si Ella ne l’a pas, c’est une bonne chose. Si Ella ne ressent pas cette boule sombre grandissant en elle, c’est une bonne chose. Si elle savait, elle ne voudrait pas être comme toi, Opale. Si elle savait, ce qui te ronge, elle n’aurait plus le même regard sur toi. - J’avais que ça, tu sais. Laisser tomber, c’était comme… Crever. Qu’elle souffle, le plus naturellement du monde, en tirant quelques taffs du joint qu’elle donne finalement à son amie. Elle le sait, elle serait morte, dans la gymnastique, sans son but, sans son objectif. Parce qu’elle a tout perdu, sa santé mentale, ses parents, son frère, sa liberté. Elle a tout perdu, presque tout en même temps, lorsqu’elle ressentait plus que jamais ce besoin d’être aimée. Elle a tout perdu, sans jamais se reconstruire, sans jamais rebâtir ses fondations. Haussant les épaules aux paroles de son amie, elle ne sait que répondre. Est-ce que cela marche ? Est-ce qu’elle va bien ? Questions qu’elle ne se posent plus depuis des années déjà. Questions qui torturent son âme, systématiquement. - Je ne sais pas… D’un œil extérieur, qu’est-ce que tu dirais ? Et elle lui offre un sourire, comme pour effacer cette question. Comme pour oublier qu’elle est bien réelle, parce qu’en ce moment, tout s’effondre. Tout s’effondre depuis bien trop longtemps. - Oui, je sais… Je l’ai vu l’autre soir, c’était… Étrange. L’évocation de cette soirée, de ce baiser qu’elle n’a pas contrôlé, qu’elle n’a pas demandé. - Mais je te filerais mon contact. Et tu sais que si t’as besoin, ma porte t’est grande ouverte. Elle est toujours heureuse de la voir, Ella. Et même lors de moments comme ce soir. Même lorsqu’elle lui apporte à nouveau du noir.

(c) calaveras.

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La compassion amère, désolée pour elle, la tourmentée écoute celle qui est comme son autre moitié. Elle comprend si bien la douleur et la détresse, Opale, exactement comme elle. Mais elle a choisi de les affronter, elle a été capable de les surmonter. Aussi tortueuse que soit sa vie, elle refuse de la laisser lui échapper. C’est en cela qu’elle l’admire, Ella, de toujours être capable de se battre. D’avoir cette force en elle que tout le monde n’a pas. Que sa propre amie, pourtant semblable sur bien d’autres choses, ne possède pas. Elle devine sans mal ce que la gymnaste essaie de lui expliquer, ce besoin de vivre a su tout dépasser. Quand elle, continue de se laisser couler. – T’es quelqu’un de fort, Opale, ne laisse personne t’en faire douter. lui dit-elle la voix sérieuse, presque solennelle, bien plus que d’ordinaire. Car son amie a gardé cette flamme en elle, celle qu’elle ne doit surtout pas laisser consumer. Pour ne pas finir comme elle, belle coquille vide et brisée. Ses prunelles sombres posées sur la brunette, elle la regarde s’atteler à la tâche dans leur futur remède. Le joint dont elle se saisit à son tour, elle en tire une bouffée salvatrice qui calme instantanément ses nerfs. C’était ce qui lui manquait tout au long de la soirée. Un peu d’herbe, un peu d’alcool, et une véritable alliée. – J’sais pas si ça marche mais ça fait du bien. rétorque-t-elle avec un fin sourire sur les lèvres. Nulle envie de se laisser bouffer encore par ses ténèbres. Pas ce soir, pas avec elle. Opale, aussi torturée que toi, peut vite se laisser atteindre par tes dérives. T’as pas envie de ça, t’as pas envie de lui faire du mal, à elle aussi. Alors, à la place, elle lui fait part de son souci. Le manque de drogue dans son sang depuis que Thomas a décidé que c’était fini pour lui. Son amie, comme toujours, est prête à lui filer un coup de main. – Merci, tu m’sauves la mise. Parce qu’elle commençait sérieusement à craquer sans poudre magique, ni d’herbe thérapeutique. Mais quelque chose dans les paroles d’Opale ne lui a pas échappé. Et a attisé, surtout, sa curiosité. – Il s’est passé quoi d’étrange avec Thomas ? demande-t-elle, l’air un peu intrigué, peut-être aussi un peu inquiète. Elle sait que Thomas est aussi torturé qu’elles, c’est à croire qu’il n’y a que ça qu’elle aime, Ella.

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Elle a ce petit quelque chose de touchant, Ella. Ce petit quelque chose qui ne ressemble pas aux autres, qui ne ressemble à rien de tout ce qu’elle a pu connaître. Comme si elle s’évertuait à vouloir se détester. Peut-être un peu comme elle, peut-être pour cette raison qu’elles se sont si rapidement liées, toutes les deux. Mais il y a une différence majeure, entre elles. Différence qui frappe l’esprit d’Opale : Ella va mal, mais elle pourrait s’en sortir, elle aurait toutes ses chances, si seulement elle acceptait de voir sa propre beauté. T’aimerais pouvoir le lui montrer, t’aimerais être le miroir qui refléterait son âme, capable de lui prouver tout le potentiel qu’elle a en elle, tout ce qu’elle referme comme si elle était incapable d’exploser pour laisser sortir ses étincelles de magie. - Merci. Qu’elle répond, doux sourire sur les lèvres, touchée par ses paroles. - Et toi t’es quelqu’un de génial. Et ma vie sans toi serait nulle. Ne laisse personne t’en faire douter. Certainement pas le connard de tout à l’heure, ni même aucun des hommes de son espèce, ni même aucune personne de son espèce. Ella, elle vaut mieux que cela. Ella, elle mérite de tomber sur quelqu’un un jour qui saura la sortir de toute cette merde qu’elle s’enfile au quotidien. Quelqu’un qui n’aura rien en commun avec elle. Quelqu’un de bien moins sombre, de beaucoup plus beau. Quelqu’un qui ne serait pas là pour l’inciter à boire, à fumer, comme elles sont en train de le faire toutes les deux. Mais c’est ce qu’elles sont, ensemble, toxiques. Et les sourires illuminent, rien qu’un peu, cette pièce jusque-là beaucoup trop sombre. Sourire qu’elle est heureuse de voir, Opale. Sourire qu’elle rêvait de revoir sur le visage de son amie. - Avec Thomas… Et bien… Il m’a embrassé. Je t’avoue que je n’y attendais pas. Qu’elle lâche, buvant quelques gorgées de son verre. Surprise est encore un petit mot, face à ce qu’elle a réellement pu ressentir. Mais elle ne cache rien, à Ella. Rien de ce genre.

(c) calaveras.

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Opale, c’est la beauté d’une âme, aussi écorchée qu’elle, mais bien plus forte qu’elle. Une âme que la vie a voulu mille fois arrêter, mais que rien n’a jamais su faire tomber. Opale, c’est le courage et la grâce. Opale, c’est tout ce qu’elle n’est pas. Et, pourtant, elle perd son temps avec elle. Peut-être parce qu’elles sont reliées par les mêmes ténèbres. Peut-être parce qu’une partie d’elle est aussi attirée par la noirceur qu’Ella. Elle sait seulement mieux la contrôler, comme un équilibre qu’elle a su trouver. Alors quand elle entend ses mots empreints de tendresse, la torturée lui adresse un sourire pour cacher sa détresse. Cacher le fait que, la seule personne qui l’a fait douter de ses dires, c’est elle-même. Parce que t’as pas besoin de quelqu’un pour te faire douter. T’as pas besoin de quelqu’un pour te briser. La vie s’en est chargée depuis que t’es née. Et toi, tu fais que poursuivre son œuvre tourmentée. Mais elle est reconnaissante envers sa sœur de douleur. Reconnaissante d’avoir malgré tout, malgré toi, une place dans son cœur. – BFF forever, alors ? elle lance, le sourire mutin, comme pour se moquer de ces amitiés édulcorées. Pourtant, il y a une part de vrai dans ses paroles, une amitié dont elle n’imagine plus se séparer. Elle n’a jamais eu beaucoup d’amies féminines, Ella, c’est quelque chose qu’elle a découvert avec Opale. Elle n’a pas besoin de dire qu’elle est sa meilleure amie, il suffit de les voir, toutes les deux, affronter ensemble la vie. Et les rires s’enchaînent. Et vos habitudes toxiques reprennent. Il n’empêche qu’elle reste, Opale, dans une existence si sombre, une rare lumière. L’une de tes seules merveilles. Portant avec un soulagement non dissimulé le joint entre ses lèvres, elle laisse la fumée s’en échapper, en savourant les effets instantanés. C’est… libérateur pour l’esprit. Elle laisse les sensations l’envahir avec plaisir quand, soudain, elle entend les paroles de son amie. – Quoi ?! T’es pas sérieuse ? Elle se redresse instantanément sur le canapé, sous le choc d’apprendre ce baiser. Parce que, Thomas, il l’a aussi embrassée, et pas qu’une seule fois. La féline laisse échapper un léger rire, sincère, sûrement aussi grâce à l’herbe. – Il cache bien son jeu… il m’a aussi embrassée. raconte-t-elle, un petit sourire aux lèvres, avant de secouer la tête. Surprise par son ami, évidemment, mais la soirée a le mérite de la détendre pour la première fois depuis des jours. Et de lui faire oublier, de ces bêtises, les tourments habituels beaucoup trop lourds.

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Il y a ces soirées entre filles, celles qu’elle n’a jamais eu la chance de connaître, par la force des choses. Parce qu’elle n’est pas comme les autres, parce qu’elle n’a jamais été comme les autres et que sa vie entière est une mascarade, un chaos fait de douleurs, de souffrances, de drames. L’innocence s’est envolée à ses quinze ans, sa vie d’adolescente également. Tout ce qu’elle aurait pu faire, tout ce qu’elle aurait aimé faire, tout a disparu. Et il ne reste qu’elle, carcasse désenchantée, qui ne sait que se satisfaire de son maigre sort. Mais aujourd’hui, t’as Ella, Opale. Alors cette soirée n’est peut-être en rien comparable avec celle que t’aurais pu vivre, si t’étais normale, mais t’es avec une vraie amie. Une vraie amie qui se confie, une à qui tu peux te confier. Elles fument un joint, enfilent les verres, discute du monde, de la vie, jusqu’à se faire des déclarations d’amour saugrenues qu’elles seules comprennent. - BFF forever, promis ! Qu’elle lâche en riant, comme si tout ceci avait un sens. Toujours. Ce mot ne veut rien dire, strictement rien dire. Mais avec Ella, elle a la certitude d’avoir une épaule, quelqu’un pour qui elle compte vraiment et qui compte vraiment pour elle. Et ça te suffit, Opale. T’as jamais eu de grandes exigences. Savoir qu’elle est là et tout ce que tu demandes. Peut-être bien qu’elles sont toxiques l’une pour l’autre, peut-être bien qu’elles ne peuvent rien s’apporter de bon sur du long terme, mais elle est, aujourd’hui, la meilleure amie qu’elle puisse avoir. Et comme une meilleure amie le ferait, elle se confie sans attendre au sujet de Thomas, le dealer qu’elles ont en commun. Dealer et bien plus encore, à en croire les révélations de la brune. - Quoi ?! Toi aussi ?! Sous le choc, parce qu’en effet, il cache bien son jeu. Beaucoup trop bien, même. Et une partie d’elle aurait aimé que cela puisse être différent. - Je vois qu’il ne perd pas de temps. Faible rire, parce qu’il lui en fait beaucoup plus pour s’offusquer, parce qu’elle n’a jamais rien envisagé. Mais elle ne peut cependant pas l’occulter. Pas complètement. - Il y a quelque chose entre vous ? Ella est primordiale, Ella est la priorité et elle ne supporterait pas de faire quelque chose qui pourrait la blesser.

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Deux âmes délaissées, deux cœurs esseulés, qui ont su se trouver. Peut-être que vous n’étiez pas destinées à vous lier, peut-être que vous êtes toutes deux trop toxiques pour réellement vous apporter. Mais toi, Ella, tu n’y songes pas. T’es beaucoup trop bien, trop heureuse, chaque fois que t’es avec Opale. Elle est, dans un monde où les ombres prennent le pas sur la lumière, une rare source de bonheur. L’une des rares personnes qu’elle aime et qui l’aime aussi en retour. L’une des rares personnes, aussi, qu’elle a le maigre espoir de garder dans sa vie pour toujours. C’est ce qu’elle lui propose, les trois initiales teintées d’une légère touche d’ironie. Et pourtant, Opale, elle est peut-être bien sa meilleure amie. Celle sur laquelle elle pourra toujours compter, peu importe ce qui peut lui arriver. Comme ce soir, elle a été, naturellement, celle que l’âme en perdition a appelée. Un rire léger vient éclairer le minois assombri de la gamine devant cette promesse amusée, et à la fois, pleine de sincérité. – Promis ! répète-t-elle comme une enfant qui scelle son amitié pour l’éternité. Et ça te fait du bien, Ella, de rire et t’amuser. Te détendre et oublier. Profiter simplement d’une belle soirée en compagnie d’une fidèle alliée. Opale, elle devient de plus en plus un pilier pour elle. C’est avec elle qu’elle découvre le plaisir des soirées entre filles, avec l’alcool, la dope, et tout ce qui faut pour leur faire oublier le reste de l’univers. Les deux amies discutent avec légèreté, jusqu’à évoquer le dealer qu’elles ont en commun. Celui qui vit en ce moment même chez l’écorchée, celui qui l’a embrassée. Et celui qui a embrassé sa complice aussi, visiblement. Plutôt surprise, Ella se met surtout à rire, plus encore devant l’étonnement d’Opale. – Il doit avoir un faible pour les brunes camées. déclare-t-elle avec un petit froncement de sourcils, comme pensive. Elle n’est pas réellement vexée, peut-être un brin… troublée. Mais ce n’est pas un mec qui va perturber l’une de ses amitiés… sûrement pas. Encore moins avec une âme devenue sœur à la sienne. Devant sa remarque, la brune porte le joint à ses lèvres, pour en tirer une latte. Se laisser réfléchir, à ce qui se passe bien, entre elle et Thomas. – Non, c’est… un ami, j’crois. Un ami un peu particulier, c’est vrai. Ils ont une relation difficile à expliquer. Elle s’est attachée à lui sans le vouloir, mais elle ne voudrait plus imaginer sans existence sans Thomas. – Alors, tu peux te le taper, vraiment. Te gêne pas pour moi. elle précise, avec un léger sourire. Mais ses prunelles se font plus assombries, avant qu’elle n’ajoute dans un soupir. – J’crois que… mon cœur est mort, Opale. Elle dit ces mots-là, des mots si forts, sans aucune émotion. Comme une réalité que t’as accepté. Comme une fatalité impossible à oublier.

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Elle se sent comprise, toujours, à ses côtés. Et aucune révélation ne pourrait venir perturber l’amitié si forte qu’est celle qu’elle entretient avec Ella. Aucune révélation, elle en est persuadée, et certainement pas une révélation en rapport avec un homme. Quel qu’il soit. Parce que ce n’est pas son genre, à Opale. Parce que la vie s’est toujours évertuée à lui prouver que les hommes sont secondaires, dans son cas. Que l’amour est secondaire, dans son cas. Ella passe avant Thomas. Et peu importe ce qui s’est passé, peu importe ce qui s’est passé avec Thomas, la gymnaste refuse que cela se reproduise à nouveau s’il entretient le même genre de relation avec sa meilleure amie. Et Ella, comme ta jumelle sombre, semble être exactement du même avis que toi. Ella, elle te donne le feu vert pour profiter un peu de Thomas et ce qu’il pourrait bien t’apporter. Une vraie amie, c’est indéniable. Et c’est quelque chose de beaucoup trop rare à tes yeux pour que tu ne le remarques pas. Echappant un rire aux premières paroles de la belle, elle répond naturellement aux secondes. - T’es adorable. Mais même si ce n’est qu’un ami pour toi, c’est trop bizarre. Je ne veux pas partager mes aventures avec toi tout de même. Elle sourit, tirant un peu plus sur le joint, Ella est une amie beaucoup trop précieuse pour cela. - Et puis honnêtement, je ne pense pas qu’il puisse y avoir une vraie attirance entre lui et moi… Autant de son côté que de celui de Thomas. Son baiser ne lui semblait pas sincère. Son baiser ne révélait pas une attirance quelconque. Simplement un genre de pulsion qui ne lui ressemble pas. Et les paroles suivantes d’Ella sont bien plus profondes. Elles sont bien plus dures. Bien plus sombres. Paroles qui résonnent dans ton cœur, parce que tu ne peux que trop bien comprendre ce qu’elle ressent, Opale. Toi aussi, t’as le cœur mort. T’as aimé, une fois, profondément, t’as cru que ce serait la bonne, que tu pourrais enfin être aimée entièrement, et la trahison, la tromperie, a tout détruit. - C’est vrai… ? A jamais… ? Une partie d’elle aimerait croire qu’un cœur se répare toujours. Et peut-être que celui d’Ella ira mieux, un jour. Parce que contrairement à elle, Ella a au moins l’esprit. L’esprit pour penser ses plaies.

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