absolution.

traits de caractère / y a souvent des cris ardents. des soupirs vacillants. des joies éphémères et des mélancolies vénéneuses. vera, c’est le feu et la glace. du rhum et une cigarette entre des phalanges immaculées. des mains sales trop bien manucurés. vera, c’est la lumière cachée par les abysses. un cœur d’une profondeur sans nom coincé derrière une poitrine trop insidieuse. inhabité par une souffrance qui compromet tout. une âme vacillante. si entourée et pourtant si seule. y a pas d’âme assez belle pour toi. l’exigence, qui te perdra. éprise d'un souvenir jamais totalement passé. amoureuse d'un imparfait à l'inconditionnel. construite sur une douleur qui saigne encore. d'un amour qu'on t'a demandé d'oublier. un déchirement au creux du palpitant, depuis vingt ans. y a pas de douleur aussi profonde que ça.

tu fus une belle âme vera. de ce qu’il y avait de plus candide. de plus pur. teint hâlé, yeux cendrés, épicés. chevelure qui sent la vanille. un visage crée pour tenter les plus avertis. tenter les plus pervertis. toi, l’âme pas encore ravagée. c’était avant que les valdés mettent la main sur toi.  l’oncle et le père. ils ont vu l’potentiel. à deux, ils ont voulu te brûler les ailes. jeunesse pas éternelle. tu as grandi trop vite, égarée dans les nuages de fumée d’cigares. un monde d’hommes dont tu étais l’héritière. la jeunesse dorée de la havane. y a quelque chose qu’ils n’ont pas loupé, te façonner pour faire de toi une redoutable. une femme, oui, mais une forte, leur semblable.
l’annulaire encerclé. il parait que tu l’aimais. c’est pas toi qui l’a dit mais l’oncle valdés. ça s’voyait dans tes yeux, il parait. alors ça a suffit. suffit pour te convaincre de te lier à lui. mais y a eu un tourbillon infernal qui a changé ta vie. un tourbillon abyssal qui t’as ramené à la vie. un autre. débâcle de testostérone, débarqué de nulle part. des mois à s’fréquenter. à développer un réseau de cuba aux états-unis. trafic d’armes pour l’un. cocaïne pour l’autre. duo infernal. une sorte de bonnie and clyde. ça s’est terminé soudainement. pas comme tu l’aurais voulu. une nuit, une seule. une parenthèse dans ton monde trop sombre. au-delà d'être une étincelle dans tes nuits noires. un soupçon de plaisir dans ton quotidien trop abrupte. dans un quotidien qui ne te plait plus. une nuit, une seule. t’as jamais rien dit à ton mari. même lorsque ton ventre s’est arrondi. t’as dit qu’il était d’lui. mensonge qui grandit. adultère qui se tarit. c’est une fille. elle a tes yeux. heureusement pas les siens. elle n’a pas pris ses opales bleues. pourtant, les valdés, ils ont compris. ils ont su ce qu’il s’était passé. les hommes qui s’en mêlent et ta vie qui t’échappe. ton enfant qu’on t’enlève. pour mieux la protéger, de ton mari qui voudrait la supprimer. ôter la vie au fruit de l’interdit. y a eu cet instant où tu avais perdu l’sens des réalités. t’as voulu fuir, te tirer. t’en aller avec ce bébé. ton frère t’as retenu. dissuadée. c’était de la trahison, t’avait-il prévenu. il fallait qu’elle disparaisse. loin de ton mari. loin des valdés. et loin de toi. y a cette douleur que tu ressens encore. tes yeux qui en pleurent encore. ton amant d’une nuit, avec, il est parti. t’arrachant l’cœur avec et toute ton humanité. elle avait six mois, et toi, l’cœur en émoi. c’était ça ou le pire. mais pour toi, le pire, c’était juste ça. juste la perde et lui avec. t’avais tout perdu, vera. si tu voulais grandir, fallait courber l’échine. manger ton pain noir. courber le dos et écouter les anciens. et toi, tu voulais tout. t’avais l’ambition qui débordait. t’avais pas envie d’pourrir dans les tréfonds de la havane. alors t’as fait ta place. ça a pris des années. pour de toi ce que tu es aujourd’hui. vera valdes, l'âme teintée d’or et d’ébène.