This is our fate, I'm yours - Ainswell

Vingt-deux ans. Vingt-deux ans hier, et une vie déjà si compliquée. Une vie qu’elle n’aurait jamais pu imaginer, Kristina. Une vie qui est pourtant la sienne depuis plus d’un an maintenant. Depuis qu’elle a été violée. Depuis qu’elle a rencontré Katheryn. Depuis qu’elle est tombée amoureuse d’elle. Mais aujourd’hui, elle est malheureuse. Malheureuse parce qu’elle n’est plus avec elle. Parce que malgré le fait que leur histoire n’a jamais été facile, malgré les complications, elle l’aime. Elle l’aime plus que tout. Comme elle n’a jamais aimé personne. Elle l’aime à en crever. Et savoir que toute leur relation est gâchée à cause de ce foutu cancer, cela lui brise le cœur. Pourtant, depuis quelques jours, un petit espoir a regagné son cœur. Parce qu’elle a compris. Compris que Katheryn l’aime, qu’elle est folle amoureuse d’elle, et qu’elle souhaitait juste la protéger, lui épargner une vie difficile, une vie de souffrance. Lui épargner de vivre avec une femme malade qui sera à sa charge. Katheryn souhaitait la protéger, mais c’est sans elle qu’elle est va mal, Kristina. Et c’est d’ailleurs pour cette raison que son anniversaire a été en demi-teinte. Parce qu’Isabella lui a organisé une fête magnifique, comme toujours. Elle est la meilleure amie parfaite. Toujours présente pour elle, toujours à se plier en quatre pour la rendre heureuse. Elle prend soin d’elle comme personne, et Kristina a profité de cette soirée, elle l’a adoré, elle a respiré, pour une fois depuis longtemps. Mais l’absence de Katheryn s’est faite ressentir. Passer son anniversaire sans la femme qu’elle aime, c’est douloureux, d’autant plus qu’elle était persuadée, quelques mois plus tôt, de passer son anniversaire à ses côtés. Persuadée que leur amour serait invincible. Résistant à toutes les épreuves, tous les maux, toutes les difficultés, toutes les bonnes mœurs. Mais ce ne fût pas le cas. Et malgré ce baiser échangé quelques jours plus tôt, la situation n’est pas plus claire aujourd’hui. Malgré la manière dont Kristina a rejeté sa mère pour protéger Katheryn, un gros point d’interrogation règne toujours sur leur histoire. Mais elles ont tout de même échangé de très beaux messages, hier. Des messages qui ont touché Kristina au plus haut point. Parce qu’au fond, elle sait bien que Katheryn souhaite redonner une chance à leur histoire. C’est elle, uniquement elle qui bloque, parce qu’elle a peur de souffrir à nouveau. Cela ne l’empêche pourtant pas de se laisser aller, de plus en plus, avec elle. Passant le plus gros de son temps chez elle, s’occupant d’elle systématiquement, avec des gestes toujours plus tendres, les gestes d’un couple. Et aujourd’hui, elle a beaucoup pensé à leurs messages, Kristina. Elle a beaucoup pensé au sens de tout ça. Jusqu’à son cours de danse, moment qu’elle choisi pour se vider la tête. Qu’elle prolonge, même, alors que les autres s’en vont, elle se retrouve seule avec Alicia, sa professeure de danse. Une femme qu’elle adore, et qui est toujours bienveillante avec elle. Elles se retrouvent d’ailleurs à danser l’une avec l’autre, très tactiles. Et ce n’est qu’après un long moment qu’elle remarque finalement la présence de Katheryn. Une présence qui la fait sourire, immédiatement. Même si elle réalise que Katheryn a dû traverser toute la ville, seule, pour venir la rejoindre. C’est une idée qui l’effraie assez, depuis qu’elle a fait ce gros malaise en pleine rue. Et puis elle voit souvent la femme qu’elle aime très faible, alors elle l’accompagne au maximum lorsqu’elle doit sortir. Mais elle est tout de même heureuse de la voir. Elle salue alors Alicia en souriant à son tour. - Merci Alicia, c’est grâce à toi ! Affirme-t-elle en posant une seconde sa main sur la sienne. Puis elle la laisse partir, quitter le studio alors qu’elle se retrouve seule avec Katheryn. Elle s’approche d’elle, toujours en souriant, juste avant de déposer un baiser contre sa joue. - Coucou toi… Plongeant ses yeux dans les siens, elle peut constater à quel point elle est belle, encore une fois. Cancer ou non. - Qu’est-ce que tu fais ici ? Elle se doute que ce n’est pas anodin, pas le lendemain de son anniversaire. D’autant plus que Katheryn vient la chercher par surprise, sans la prévenir.

Elle sait très bien qu’elle joue avec ses propres sentiments, Kristina. Elle joue quotidiennement, chaque fois qu’elle passe du temps avec Katheryn. Elle joue, chaque fois qu’elle prend soin d’elle. Chaque fois qu’elle l’accompagne à un rendez-vous médical. Chaque fois qu’elle dépose un baiser contre sa joue, contre son front, chaque fois qu’elle la prend dans ses bras. Chaque fois qu’elle lui dit combien elle tient à elle, combien elle sera toujours importante pour elle. Elle joue aves ses sentiments, oui, parce qu’inévitablement, en restant près d’elle, elle ne peut pas cesser de l’aimer. Elle ne peut pas oublier qu’elle est toujours incroyablement folle amoureuse. Et ce soir encore, elle le réalise un peu plus. Parce que Katheryn est là, devant elle, prête à lui faire une surprise pour son anniversaire. Elle est touchée, la jolie rousse. Touchée de voir les efforts que Katheryn est prête à faire pour la reconquérir. Elle ne baisse pas les bras, elle ne perd pas espoir qu’un jour, elles puissent se remettre ensemble. Et Kristina a la sensation que Katheryn est prête à l’attendre un long moment, sensation qui lui réchauffe le cœur. Alors elle s’approche d’elle, souriant alors qu’elle entend ses paroles. Et puis elle plonge ses mains dans les siennes avant de reprendre la parole. - C’est adorable… Merci Katheryn. Evidemment, elle souhaite passer cette soirée avec elle. Evidemment, elle souhaite fêter son anniversaire avec la femme qu’elle aime. C’est pourquoi elle n’hésite pas une seule seconde en entendant les paroles de la quadragénaire au sujet de sa professeure de danse. - Oh non, on avait fini, ne t’en fais pas. Elle sourit, elle n’imagine pas une seule seconde ce qui passe à travers l’esprit de Katheryn. Pourtant, elle voit bien que quelque chose cloche. Le sourire de Katheryn est plutôt faible, sa voix presque hésitante. Et elle pense immédiatement à l’état de santé de sa belle. Elle pense immédiatement à ce cancer qui la fatigue toujours. Elle n’imagine pas que cela puisse être autre chose. - Est-ce que tout va bien ? Kristina entrelace ses doigts avec ceux de Katheryn, elle les entrelace pour lui montrer sa présence. Au fond, elle ne voit qu’elle. Elle ne voit plus qu’elle. Et elle n’a toujours vu qu’elle.

Elle n’a jamais espéré un quelconque remerciement, Kristina. Elle n’a jamais espéré ne serait-ce qu’une gratitude de la part de Katheryn. Tout ce qu’elle fait pour elle, elle le fait avec le cœur. Elle ne veut pas être remerciée. Elle ne veut pas de reconnaissance, parce que ce qu’elle fait, c’est tout naturel. Ce qu’elle fait, c’est ce qu’elle aurait dû faire depuis le début. Ce qu’elle aurait pu faire depuis le début, si Katheryn n’avait pas mis un terme à leur histoire. Un couple, ce n’est pas uniquement dans les bons moments. Un couple, ce n’est pas uniquement quand tout va bien. Non, être en couple c’est rester avec la personne qu’on aime, quoi qu’il arrive. Cancer ou non. Ce qu’elle fait, c’est tout naturel, pourtant elle voit bien à quel point Katheryn est heureuse, à quel point elle veut la remercier d’être là et de prendre soin d’elle. C’est aussi ce qu’elle voit dans cette idée de la surprendre ce soir, et la jolie rousse est plus touchée que jamais. Mais elle voit surtout le visage de Katheryn, elle la connait, elle la connait par cœur. Et elle voit que quelque chose ne va pas. Elle voit qu’il y a quelque chose qu’elle ne dit pas. Evidemment, avec toutes les choses qui se sont passées ces derniers mois, elle envisage le pire. Elle s’inquiète et elle ne peut pas le contrôler. - Katheryn, je te connais, tu sais ? Elle esquisse un petit sourire, doux, tendre. Un sourire pour l’inciter à parler, quoi qu’elle puisse bien avoir à lui dire. Un sourire pour lui montrer que, même si elles ne sont plus ensemble, elles sont plus soudées que jamais, toutes les deux. - Je vois bien qu’il y a quelque chose… Alors dis-moi… Passant une main contre son bras, la caressant doucement, elle voudrait qu’elle apprenne, Kristina. Elle voudrait qu’elle apprenne de ses erreurs, cette fois. Qu’elle ne la tienne pas à l’écart, quoi qu’il puisse se passer. Son attitude est bien trop étrange pour qu’elle soit naturelle.

Elle la connaît oui, peut-être trop bien. Pourtant, quand Katheryn est tombée malade, elle n'a rien vu. Elle n'en a pas eu le temps, puisque la quadragénaire a mis un terme à leur relation brutalement. Mais elle y pense parfois, Kristina. Elle y pense et elle réalise qu'elle aurait dû comprendre bien plus tôt. Qu'elle aurait dû se fier aux signes qu'elle voyait. Aux moments où Katheryn semblait plus faible, fatiguée. Elle aurait dû voir. Au lieu de cela, elle l'a laissé s'éloigner. Elle l'a laisser mettre un terme à leur relation. Peut-être parce que c'était le coup de trop. Peut-être parce que c'est trop douloureux d'être toujours celle qui maintient le couple hors de l'eau. D'être toujours celle qui y croit. Pourtant, malgré cette douleur, elle est toujours là aujourd'hui, près d'elle. Parce que vivre sans elle, c'est bien plus douloureux encore. Elle en est simplement incapable, triste vérité. Sans Katheryn, elle se sent incomplète. Elle sent un vide incommensurable dans son cœur. Un vide qu'elle seule peut combler. Et pourtant, lorsqu'elle entend les paroles de son ancienne petite-amie, elle reste quelques secondes surprise, sans comprendre. Elle parle de sa professeure de danse, souligne à quel point elles sont proches toutes les deux. Et l'espace d'une seconde, la rousse se demande si Katheryn est véritablement jalouse. - Attends, Katheryn, qu'est-ce que tu imagines ? Elle imagine que quelque chose de passe entre elle et sa professeure ? Qu'elle recommence une nouvelle histoire avec quelqu'un d'autre ? Alors que ton cœur, Kristina, ton cœur, il n'appartient qu'à elle. Aujourd'hui et pour toujours. Il n'y a toujours eu que Katheryn, elle et uniquement elle. Et peut-être qu'elle devrait tourner la page. Peut-être qu'elle devrait essayer de s'intéresser à quelqu'un d'autre. Peut-être que ce serait mieux pour elle. Mais elle en est simplement incapable. Parce qu'elle ne peut pas contrôler cet amour qu'elle ressent et ressentira toujours pour elle.

La vérité éclate enfin. Elle se dissipe enfin à travers les lèvres de Katheryn. Et Kristina a la sensation de tomber d’un million d’étages en réalisant ce que pense la quadragénaire. En réalisant qu’elle imagine la rousse entretenir une nouvelle relation. Qui plus est avec une femme de l’âge de Katheryn, une femme qui est également sa professeure. Et elle voit bien, elle voit bien que son ancienne petite-amie est jalouse. Une jalousie qu’elle ne parvient vraisemblablement pas à contrôler. Elle ne lui en tient pas rigueur, mais elle se demande vraiment comment Katheryn parvient à envisager une seule seconde que Kristina puisse faire cela. Puisse lui faire cela. Elles sont séparées depuis quelques mois, certes, mais une première vraie grande histoire d’amour ne s’oublie pas en si peu de temps. Et puis… Elle n’a pas le temps pour une nouvelle histoire, Kristina. Elle n’a pas le temps de s’intéresser à quoi que ce soit. Peut-être qu’elle devrait. Peut-être que cela lui ferait du bien. Mais toute son attention, elle la donne à Katheryn. Tout son temps, elle le passe à prendre soin d’elle. Toute sa tendresse, son amour, elle les lui donne, à elle, pour qu’elle aille bien, pour qu’elle guérisse. La rousse attrape alors sa main pour la retenir, il est hors de question qu’elle prenne la fuite. Hors de question qu’elles terminent cette conversation de cette façon. Pas cette fois. - Katheryn ! Tu penses vraiment que je pourrais tourner la page, si vite ? Alors que tu es encore aussi présente dans ma vie ? Tant qu’elle entretiendra cette relation avec Katheryn, elle ne pourra jamais retrouver quelqu’un, elle le sait. Et elle place entièrement sa vie de côté, pour elle, pour l’aider à affronter ce cancer. - Et puis, je ne me suis pas fixée pour objectif de sortir avec toutes mes profs, tu sais… Un faible sourire s’installe sur ses lèvres, alors qu’elle s’approche de nouveau d’elle. Elle se place bien en face d’elle, Kristina, posant ses mains contre ses jours, avec douceur. - Et si tu me disais ce que tu ressens vraiment… Pour une fois, ce serait-bien, non..? Elle est épuisée, Kristina. Epuisée de devoir toujours lutter pour que Katheryn soit sincère avec elle. De devoir toujours se battre pour qu’elle s’ouvre à elle, alors qu’elle est censée l’aimer. Alors qu’elle était censée l’aimer. Et pourtant, elle est encore là, à essayer, une ultime fois, pour elle. Pour Katheryn. Parce qu’elle ne veut pas la voir avec le cœur lourd. Parce qu’elle ne veut pas qu’elle se tracasse. Qu’elle soit mal.