(infernal) « Mais tu vas la fermer, oui ? Je t’ai dit de la fermer. C’pas compliqué à comprendre, putain. Qu’est-ce que tu peux être conne, toi ! » qu’il répétait c’gars, à la fois père et incapable. Ce gars à la fois détestable et incontrôlable.
« Arrête. Je t’en supplie. Je veux que tout ça puisse cesser. Je n’ai aucune envie de vivre ainsi. Laisse-moi tranquille. » qu’elle répondait cette fille à la fois mère et peu présente pour sa gamine. Cette fille qui ignorait l’erreur qu’elle commettait en restant dans cet endroit-là, aux côtés de ce gars-là.
« Maman ! Maman ! S’il te plait… » qu’elle rechignait la petite, à la fois déstabilisée et dans l’incapacité d’en dire plus que ce qu’elle exprimait. cette petite dans l'incapacité de dire ce qui l'avait profondément marqué. petite à la fois manquant de confiance en soi et déchirée. petite à la fois apeurée et au silence, bien amochée.
Cette gamine voyait pour la dernière fois celui qu'elle nommait papa.
« Ça suffit. Je vais appeler ma sœur ! » sont les derniers mots que ma mère prononçait avant même de se bouffer la table.
« Mais vas-y, appelle-la ta garce de sœur ! Elle n’est bonne qu’à ça, celle-là ! » que mon père hurlait avant de quitter la pièce. obligée de suivre ma mère, je ne lui ai jamais dit au revoir.
Cette gamine c'était bel et bien moi.
(phenomenal) enfance auprès de ma tante, Nina et Elena. enfance durant laquelle je me suis peu à peu rapprochée de l'une des jumelles tout en ayant l'air d'effrayer l'autre. enfance durant laquelle j'ignorai à quel point mon insouciance nous menait vers le mauvais chemin. innocence qui sommeillait en moi, inconscience qui m'apportait des soucis, de nombreuses fois. Elena demeurait dans l'ombre en toute clarté tandis que Nina rayonnait à mes côtés. Et il y a eu ce jour où je n'ai pas pris la peine de me comporter en tant que personne dite normale. Ce jour où, malgré la peine des autres, j'ai refusé de venir voir Elena dans son sale état. Elle nous a tous délaissé sans se demander ce que ça pourrait créer, sans même prendre connaissance que sa perte ferait tout effondrer. puis j'ai décidé de m'en aller un jour, à mon tour. pas de la même façon qu'elle mais d'une autre bien plus intéressante. j'ai fait la connaissance de plusieurs personnes durant mes petites virées qui me convenaient dont quelques unes qui m'ont suivies dans ma chute, sans broncher. avec l'argent que je me faisais, j'entreprenais une carrière de guerrière au fin fond des arts du spectacle et du dramatique, bien aimés de toujours. j'ai eu cette chance d'atteindre une partie de cet unique rêve, de pouvoir suivre des cours dans ce domaine.
(signal) nina devenue nine, délaissant sa maman qui l'atteignait de manière indélébile, avait besoin de ma présence de temps en temps. je continuais à bosser, à suivre ce qui aurait dû animer ma vie. puis j'ai fini par recommencer les virées, rencontrer du beau monde, observer de nouveaux lieux, me fonder une famille d'esprit et non de sang. certains m'intéressaient plus que d'autres. certains refusaient de m'abandonner. et il y a eu cette intrépide idée qui me vaut une histoire à raconter. tout d'abord, des fiançailles. indétectables, inconcevables. puis celle de quitter le squat et de s'embarquer dans une aventure dont tous parleraient une fois terminée en tant que fierté. braquage de banque il y a de ça plus de cinq ans. braquage de banque, une arme à la main, le sac rempli d'argent dans l'autre, la fuite parfaitement gérée. réussite qui devient rapidement échec. réussite qui part en fumée. parce que ouais, ça m'a valu cinq putain d'années à cohabiter avec ceux à qui je n'avais jamais songé. ça m'a valu des coups et blessures, des sourires remplis de désirs, des pleurs entendus par d'autres, des regards noirs échangés et des paroles insensés, menaces balancées entre taulardes agacées.
(animal) « Ecoute. S’il y a bien une chose qui me hante depuis ces années, c’est celle de retrouver la p’tite. Alors ta gueule, tu vas te la fermer et tu vas m’y amener chez Nine. T’as plutôt intérêt à faire c’que j’te demande sans reculer ou ton sourire, j’vais t’le défoncer. » paroles d’une jeune femme qui revoit le jour des années après, à imaginer comment s’en sortir, auprès d’autres détenues. Paroles de celle que je suis devenue aujourd’hui. Je ne pense pas avoir tant changé qu’ça bien qu’cet endroit m’ait renforcé dans mes pensées. J’me doute bien qu’Nine, si elle n’s’est pas ramenée, n’serait-ce, une seule fois, c’parce qu’elle avait la rage d’constater qu’j’l’avais lâché, à mon tour. Peu importe, il faut qu’j’vois son visage. Il faut qu’j’sache si mon présage n’ait dû qu’à une partie délirante et entraînante d’mon cerveau. Il faut que j’l’entende parler, la remarque face à moi après tout ce temps écoulé.
En ce qui concerne la ville, rien n'a changé.
En ce qui concerne les habitants, j'ai l'impression qu'rien n'a bougé.
putain, qu'est-ce que c'est compliqué d'trouver un job en sortant d'c'merdier.
vivement qu'j'retrouve ces petits canons intenables et irréprochables.
vivement qu'j'puisse en découvrir à approcher et à suffisamment intriguer.