particles / moïse

Moïse laisse la tendresse s'envoler. Chaque mot de Kaz semble ajouter à sa déception cuisante, alimenter le feu appelé rage au fond de ses entrailles. Lorsque ce dernier le sent s'éclipser, il le retient du bout des doigts, la peur de le voir à jamais disparaître prenant le dessus sur le souhait de ne jamais l'avoir recroisé. Toutes les syllabes qui glissent d'entre ses lèvres n'ont pas grand sens – comme cette entière situation. Kaz est partagé entre le désir d'en finir pour de bon et celui de s'éloigner au plus vite. Moïse lui offre le second choix sur un plateau d'argent. C'est comme si Marek n'existait pas, que ses actes n'avaient pas été synonymes de l'envoyer au bûcher. Au fond, Kaz sait ce qui coûte à Moïse de lui ouvrir les portes de la liberté derrière le dos de son grand frère. C'est ce qui l'encourage à être honnête, à laisser échapper qu'il ne lui en voudrait pas si sa raison prenait le dessus, si son amour pour Marek l'obligeait à tout avouer. Après tout, la vie de Kaz ne vaut pas leur amitié. Son existence entière n'a plus aucune valeur et l'un comme l'autre le sait ; l'un souhaitant être mort, l'autre ayant déjà fait le deuil de ce dernier. Les dernières paroles de Kaz n'adoucissent pas la tension entre leurs deux êtres. Au contraire, ils intensifient la colère de Moïse, l'obligeant à faire un pas en arrière après que ses doigts aient perdu leur emprise sur le poignet de ce dernier. – Dis plutôt que ça t’arrange de croire que tout est foutu. Ça t’donne une excuse pour en gober toujours plus. Les yeux de Kaz sont toujours fixés à ses pieds, sa tête baissée et ses épaules voûtées comme un gosse réprimandé par ses parents. Il a déjà assez affronté la froideur du regard de Marek pour une existence entière et n'a pas la force de continuer. C'est frénétiquement qu'il secoue la tête en réponse aux paroles de Moïse. Des milliers de mots sont bloqués dans sa gorge, alors que ses lèvres tremblantes s'ouvrent et se referment à répétition. Sa vie est foutue et Moïse ne peut pas lui faire croire que lui, of all people, croit le contraire. Compte pas sur moi pour dire à Marek que j’suis tombé sur toi, il a assez souffert comme ça. Kaz agonise sous ses vêtements, sent son corps entier hurler à la mort tellement il souffre. C'est encore plus fort que la douleur qui suit un manque et l'impression que tous ses organes se rétractent sous sa puissance. C'est physique et psychique à la fois, ça attaque son cerveau, son cœur, chacun de ses membres avec une puissance insupportable. C’est pas lui qui t’offrira la rédemption en t’explosant la cervelle. Parce que c’est pour ça, que tu veux l’revoir non ? T’arrives pas à te tuer avec ton poison, tu veux que ce soit un autre qui s’en charge. – Non, que Kaz lâche dans un souffle pénible. Il a l'impression d'asphyxier. D'avoir beau essayer de trouver la surface, il ne fait que s'enfoncer davantage. La main salvatrice de Moïse est désormais celle qui retient sa tête sous l'eau, l'empêchant de reprendre son souffle et l'entraînant vers une mort douloureuse. Non. Il répète une deuxième fois, la tête lui faisant un mal de chien à force de la secouer avec brutalité. Il ne fait même pas attention à la proximité instaurée par Moïse, à la tension dans chacun de ses muscles. C'est à peine s'il entend la note tremblante de ses mots. – Si t’as des couilles, t’ira toi même trouver D’Shaun. Et c'est l'angoisse qui revient comme un ras-de-marée meurtrier. D'Shaun n'est qu'un souvenir poussiéreux, qu'un visage dont les traits se sont partiellement effacés, mais la peur de le croiser est presque aussi force que celle de se retrouver en face de son frère. Sa main gauche reprend place à son poignet droit, ses ongles s'enfonçant dans sa peau avec frénésie. Tout, tout, mais pas ça. Son corps est pris de spasmes incontrôlables, tandis que ses yeux se détachent de ses chaussures pour recommencer leur course effrénée entre les corps. – M'oblige pas à y aller, qu'il supplie d'une petite voix. Il ne sait pas à qui il parle, peut-être à Moïse, peut-être même à Dieu, sûrement qu'il s'adresse aux deux en même temps. Kaz fait plusieurs pas en arrière, manquant de trébucher et de s'écraser sur le sol dégueulasse. Et si la situation échappe complètement à Moïse, ce qui se passe dans le cerveau de Kaz est le miroir de l'apocalypse. Ses pensées ne sont pas cohérentes. Le monde semble tourner dans le mauvais sens.

@moïse russel

La colère, la tristesse, le deuil.
Les émotions se chevauchent, enflamment ton corps et liquéfient tes pensées. C’est avec hargne que tu retires ta main tendue, avec la même hargne que tu exposes les faits qui ne sont que vérité. Kaz n’a toujours pensé qu’à lui, c’est son égoïsme maladif qui l’a poussé à sauter dans le vide et à ne jamais essayé de revenir. Non. il murmure, tu ne veux pas entendre. Non. il réitère, le regard fuyant, le corps en berne, tu frappes une nouvelle fois. si t’as des couilles, t’iras toi même trouver D’shaun. si t’as les couilles Kaz, tu ne passeras pas part des intermédiaires et tu assumeras l’intégralité de tes actes. M’oblige pas y aller. qu’il articule finalement, tes mâchoires se serrent instantanément. Il pleurniche presque, tu n’es plus en mesure de le supporter. Sa présence devient désagréable, à tel point que tu recules d’un pas, deux, trois. T’es assez loin de lui pour qu’on ne puisse vous associer, le coeur qui s’emballe qui dictent une mélodie contraire à toute la haine qui émane de tes iris. t’as su jouer les morts pendant plus de cinq ans, t’as qu’à continuer. tu craches les mots sans les penser, même pas un instant, tu joues la comédie les poings fermés. et voir si ça marche, encore. Tu restes face à lui, encore un instant, une minute sans doute, le plus silencieux du monde. C’est de son être tout entier que tu t’imprègnes, de ce visage ravagé par les années, de ce corps abîmé par les cacher et les excès. C’est sa descente aux enfers que tu graves dans un coin de ton crâne, une photo en noir et blanc qui prendra tout l’espace. Kaz, le frère, n’est pas mort et toutes tes convictions foutent les camp. je te préférerai dans un cercueil. que tu souffles finalement, la sincérité au bord des lèvres, dans chaque battements de ton coeur. Tu lui tournes le dos, les doigts accrochés à ce fourre sac plastique. Tu enfonce les écouteurs dans tes oreilles, My Life de The Game devient une mauvaise blague.