blow up.

Trois heures,
c'est le temps qu'elle est restée debout face à cette toile qui refusait se remplir. Fusain entre les doigts, vidée de toute inspiration.
Trois heures,
c'est le temps qu'elle a laissé filer avant de pousser un cri de rage tout en se laissant tomber dans son canapé, en nage comme si elle venait de courir un marathon.
Trois heurs,
c'est le temps durant lequel elle est parvenue à rester sobre, avant de choisir au hasard l'une des lignes blanches trônant sur sa table basse. celle de droite, la plus épaisse. quelques secondes d'extases, quelques secondes de libération qui l'obligèrent à se saisir de son téléphone pour faire défiler les prénoms de son répertoire. le pouce avait ripé sur livia et le message était parti avant qu'elle ne s'en rende compte.

allongée en travers de son king size, ava zieute le trajet en uber qui conduira livia jusqu'à chez elle. peu lui importe l'heure, peu lui importe le dérangement qu'elle lui cause. dans son cerveau bouillonnant, elle lui parait être la seule en mesure de conjurer le mauvais sort qu'est la toile blanche. c'est tout ce qu'elle veut, là, maintenant. laisser placer à cet art qui lui tient à coeur, jouer de ses talents comme auparavant. avant toute cette cocaïne,toutes ces overdoses desquelles elle ne tire jamais leçon. le téléphone à bout de bras au dessus de son visage, elle râle à chacun des feux rouges rencontrés par le chauffeur. les minutes passent et la gamine pourrie gâtée s'impatiente. si elle se redresse, ce n'est que pour s'enticher d'une nouvelle trace préparer à l'avance sur l'ébène de la table de chevet. le sourire se redessine jusqu'aux oreilles, la voiture est au pieds de son immeuble et comme une gosse turbulente elle se lève d'un bond. s'arrête devant le mirroir deux fois plus grand qu'elle pour se refaire une beauté. elle n'est vêtue que d'une nuisette en soie noire, son maquillage est encore impeccable, seuls jurent ses cheveux malmené sous sa poigne impatiente.
la sonnette signe la fin de son calvaire.
après avoir salement noté le chauffeur et sans lui donner un seul pourboire, elle jette son portable sur le matelas et s'élance pieds nus jusqu'à la porte d'entrée. son cœur s'emballe à peine ouvre-t-elle à son invitée.
ce chauffeur était vraiment naze. j'lui ai mis qu'une seule étoile. qu'elle affirme comme si cela avait une réelle importance. le sourire qu'elle arbore est à l'image de toute la drogue affluant dans ses veines. entre, entre, elle l'observe de haut en bas, referme derrière elles, puis la dépasse pour s'engouffrer dans le loft. la femme de ménage est passé le matin même, mais on dirait qu'une tornade s'est affairée à foutre le bordel. elle grimace. tu veux boire quelque chose ? ou tu veux t'mettre à poil tout de suite ?