inbetween days | leor #3

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{ inbetween days }
crédit/ tumblr ☾ w/@Gregor Ferreira

Dans un avion qui la conduit vers un autre continent, Leonide s’éloigne du froid humide New-Yorkais et se dirige vers la chaleur exotique d’un désir qu'elle pourchasse depuis plusieurs semaines. Si en général elle ne revient pas vers les hommes qui croisent sa route une fois passée dans leur lit, cette fois-ci Leo ne parvient pas à s’expliquer l’attraction que celui qu’elle s’amuse à appeler Ben exerce sur elle. Depuis cette première nuit, ils persistent à se tourner autour, se provoquer et s’entraîner sur des terrains de jeux dont ils s’appliquent à préserver le secret. Accompagnée d’un homme mutique, habillé de noir et de blanc, venu la récupérer comme il lui avait annoncé quelques heures plus tôt, elle peine à trouver le sommeil. Au milieu de la nuit, quelque part au-dessus de la Mésoamérique, Leonide se débat dans des draps de satin. Il y a cette question qu’elle ne veut pas poser et dont elle n’est pas sûre de vouloir connaître la réponse. Car elle aime ce mystère qui enveloppe l’homme qu’elle ne connaît que depuis quelques semaines, et elle apprécie la manière dont lui aussi se contente de la fausse identité qu’il lui a attribuée. Un voile qu’ils semblent, sans même l’avoir clairement formulé, vouloir conserver. Mais plus elle le découvre, plus il la fascine, et plus l’écho de cette question résonne dans son crâne : qui est-tu ?

En franchissant les portes de l’aéroport, les pupilles de Leonide habituées à la grisaille hivernale se rétractent face à l’apparition d’un soleil éblouissant et son corps est soudainement écrasé par la chaleur de cette ville qui vit un été éternel. Elle suit celui qui l'accompagne jusque dans une limousine garée non loin. Assise sur le cuir de la banquette arrière, elle observe l’agitation des cariocas dans les rues de Rio de Janeiro, et ressent l’excitation provoquée par cette rencontre sur le point d’avoir lieu dans chacun des battements qui soulèvent son cœur. Au bout d’une durée qu’elle ne parviendrait pas à estimer le véhicule s’arrête, pour la déposer devant les portes d’un hôtel luxueux où l’attend un major d’homme. « Bonjour mademoiselle Thompson, nous allons monter vos bagages dans votre suite. Monsieur vous attend sur la terrasse principale, je vous invite à me suivre. » lui dit-il une fois la porte de la voiture ouverte. Le visage dissimulé derrière une paire de lunettes de soleil noires, elle se laisse guider à travers l’hôtel prête à aller à la rencontre de celui pour qui elle vient de parcourir sur un coup de tête plusieurs milliers de kilomètres. Le major d’homme s’arrête une fois arrivé sous une pergola dévorée par un bougainvillier flamboyant, et lui indique poliment d’un mouvement de la main où est installé celui qu’elle est venue retrouver.

Assis seul à une table, le nez plongé dans un journal, il surplombe un spectacle d’une rare beauté. Derrière lui s’étend et se dessine Rio de Janeiro, bordée d’un côté par le bleu azur de l’océan et de l’autre par le vert éclatant de la forêt tropicale. Alors qu’elle avance dans sa direction l’air chaud vient faire onduler les volants de sa robe émeraude. Arrivée à son niveau, Leonide baisse du bout de l’index le journal qu’il tient entre ses mains et s’installe dans la chaise libre face à lui. « Bonjour ». Le soleil brille, et l’invite à retirer ses lunettes pour lui offrir son visage. Elle ferme les yeux quelques secondes, le temps de prendre une profonde inspiration et savourer la chaleur qui se répand sur ses paupières closes, ses joues pâles et la peau dénudée de son sternum. « Ce n’était pas nécessaire de m’envoyer l’un de tes sujets pour me guider jusqu’à toi. Je suis plus que capable de trouver mon chemin. » Aujourd’hui, elle n’a pas travesti le naturel de sa beauté avec du maquillage, le rose de ses joues simplement ravivé par la chaleur du Brésil. Elle plonge dans le regard de celui qui semblait l'attendre et y retrouve la noirceur qui lui donne à chaque fois la même envie de danser sur le rythme de ses mots. « Alors, dis-moi, qu’as-tu en tête pour occuper cette journée qui s’offre à nous ? » Une certaine malice anime ses yeux verts, curieuse de découvrir ce qu’il va lui proposer, décidée à partager avec lui un moment loin des engagements qui leur sont imposés, à l'abris du tumulte de leurs vies.

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{ inbetween days }
crédit/ tumblr ☾ w/@Leonide Tendler

Spontané, il ne l'est pas vraiment. Homme d'affaires, mafieux véreux, fils à papa parfois, voilà des qualificatifs pour Ferreira. Mais spontané, non. S'il l'est, il le cache car ses fonctions l'empêchent de vivre ses envies au premier degré, à la première envie. Puis, il y a quelques écarts. Là, devant lui, qui baisse le journal qu'il lit, il y a une exception. Une damnée exception qui lui fait du bien au moral et au physique. Gregor sourit d'un sourire malicieux pour répondre à son bonjour guilleret. « Tu sembles être arrivée en un morceau, j'en suis ravi. » Des yeux, il dévore le morceau en question, se pourléchant déjà de cette mini escapade au pays du soleil avec elle. Evidemment, il ne lui dira pas que normalement, il devait rentrer avec l'avion de dix heures et qu'il a postposé pour prendre celui du lendemain. Parce qu'un Ferreira ne module pas son agenda en fonction d'une simple maîtresse. Mais simple maîtresse ou pas, de toutes, elle est seule la à être là. « Vraiment? » Cette petite pique de vanité lui crée des idées. Si elle veut jouer à ça, elle risque d'être servie. Le journal tombe sur la table de la terrasse doucement tandis qu'il la regarde sans ciller. Avec ce soleil radieux derrière elle, elle semble être une apparition divine, là, uniquement pour lui. Mais si Greg croit en Dieu, sa foi n'est pas de celles qui le poussent à croire aux anges. Du moins pas en la personne de Leonide. Car cette femme dont il ne connait toujours pas le vrai prénom est tout sauf angélique, au contraire.

Il se lève, ravi qu'elle provoque déjà ses plans mesquins. Elle en est à l'origine et elle va pouvoir prouver ses dires. « Eh bien Caroline, puisque tu es si douée pour retrouver ton chemin, on va tester ça. » Ce qu'il va lui proposer va leur faire du temps ensemble. Mais le jeu est bien plus intéressant que tout le reste. Il se rapproche d'elle, passe sa main sur sa hanche et attrape la robe de la dame par son pan inférieur. Gregor glisse sa main par-dessous pour saisir la dentelle du sous-vêtement et la faire glisser jusqu'à l'enlever et l'enfourner dans sa poche. « Retrouve-nous à la Fontaine bleue. » Nous : moi et ta petite culotte. Il sourit amusé avant de tourner les talons. La fontaine bleue est une sorte de zone peu touristique, connue surtout des locaux. Google Maps ne pourra pas l'aider pour ça. Mais si elle est débrouillarde, elle devrait le retrouver finalement. Il prend l'ascenseur, un livre sous le bras et fait tomber ses lunettes de soleil sur son nez.

Son chauffeur le dépose devant une fontaine vieille et délabrée, dont la couleur était probablement bleue autrefois. Assis à une terrasse, il lit tranquillement. Deux heures plus tard, à l'heure du déjeuner, la trop belle invitée de Gregor apparaît auprès de la fontaine. Les rayons de soleil qui traversent ci et là ses cheveux ne font pas de doute. Elle ne s'est pas revêtue d'un autre sous-vêtement. Quand leurs regards se croisent, il lui fait signe de la tête, attendant qu'elle vienne s'asseoir auprès de lui. Mais elle ne bouge pas. Alors il dépose son livre sur la table et se lève pour aller la rejoindre. Arrivé à son niveau, il l'empêche de parler en l'embrassant directement, avec une fougue plus ressentie depuis longtemps. Son corps se presse contre le sien et le désir est déjà là, ardent. Il redépose celle qu'il a soulevée inconsciemment. « Viens manger Caro. J'ai d'autres plans pour toi après. » Mais il est déjà très curieux de l'entendre lui raconter comment elle a cherché et parcouru la ville pour retrouver cet endroit. Bien que vicieux, ce défi était probablement aussi très amusant pour celui ou celle qui souhaiterait se balader dans le Rio moins fréquenté.

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crédit/ tumblr ☾ w/@Gregor Ferreira

Magnétique. Si Leonide devait déterminer un qualificatif pour décrire le regard de cet homme, ce serait le mot qu’elle choisirait. Quand il est là elle ne parvient pas à décrocher ses yeux des siens. Et dans ses iris elle voit des paysages qui donnent l’envie de se perdre. Elle répond à son sourire, amusée par la malice qu’elle lit sur ses lippes. Traverser un pays, changer de continent pour rejoindre un homme, ça ne lui ressemble pas. Généralement, c’est elle qui les fait venir jusqu’à elle. Elle s’applique à contrôler les choses. Elle ne prend pas le risque de se retrouver coincée, car elle sait qu’elle est vite lassée, que l’ennuie finit toujours pas remontrer le bout de son nez. Pourtant, elle est là. Elle est venue le rejoindre sans même réfléchir à sa décision, animée par l’envie de se sentir vivante. Car il réussit à la faire sortir de cet état léthargique, cet étrange coma éveillé dans lequel elle est plongée depuis si longtemps qu’elle ne parvient plus à se souvenir de quand ça a commencé. Elle hoche la tête lorsqu’il réagit à la pique qu’elle vient de lui adresser, le défiant du regard, convaincue qu’il va réagir. Elle ne le quitte pas des yeux lorsqu’il se lève et contourne la table. « Je t’écoute » lui lance-t-elle, avide de jouer avec celui qui parvient à la surprendre quand tous les autres la désintéressent. Elle ne cille pas quand elle sent sa main se frayer un chemin sous sa robe. Elle ne l'empêche pas de faire glisser la dentelle le long de ses cuisses. Elle accompagne son geste d’un mouvement de jambe, un sourire amusé accroché aux lèvres. Il lui donne rendez-vous, en lui indiquant un endroit énigmatique où les retrouver, lui et le bout de tissu dont il vient de la priver. Elle penche légèrement la tête, intriguée par ce défi qu’il lui lance ; tentée par cet homme qui arrive à la bousculer quand tous les autres la confortent. «  Je te laisse prendre de l’avance. ».

Confiante, Leonide décide de monter prendre une douche dans sa suite avant de se lancer à sa recherche. Elle veut le faire attendre, convaincue qu’elle arrivera à le trouver. Elle est maligne Leo, assez pour savoir qu’il ne lui a pas communiqué une énigme qu’elle pourra élucider dans un guide touristique ou sur internet, et suffisamment pour savoir comment parvenir à ses fins. En sortant de la cabine embuée, elle enfile sa robe, parfume la peau de son cou et l’intérieur de ses poignets, mais ne prend pas la peine remplacer le sous-vêtement qu'il lui a dérobé. Elle parcoure les couloirs de l’hôtel à la recherche d’une femme de ménage, persuadée que c’est en s'adressant à un véritable carioca qu’elle obtiendra l’information qui lui manque. À présent munie d’un nom de quartier où se rendre, Leonide s’engouffre dans un taxi. Elle sillonne les rues. Elle y découvre une effervescence où des couleurs vives se mélangent à des odeurs inconnues. Elle demande parfois son chemin, traverse des places bondées, croise des étales où s’amoncellent des fruits qu’elle ne connait pas. Puis, elle finit par la trouver, la fontaine bleue.

Arrivée à son niveau, elle balaye du regard les terrasses qui l’entourent à la recherche de Gregor. Il est là, assis un livre entre les mains. Lorsqu’il croise son regard, qu’il lui fait un signe de la tête comme pour l’inviter à le rejoindre, elle ne bouge pas. Elle a déjà parcouru assez de chemin, il va falloir que lui aussi fasse un pas vers elle. Quand il arrive devant et qu’elle s’apprête à le piquer, il la surprend en l’embrassant. Et la fougue qui s’éprend d’elle alors qu'elle sent son corps se serrer contre le sien, qu'elle enroule ses bras autour de son cou et que ses pieds se détachent du sol, elle ne l’avait pas ressentie depuis très longtemps. Le monde s’éclipse quelques secondes pour ne laisser exister que le brasier de leur passion. « Trouvé » lui souffle-t-elle alors qu’il la repose à terre. Elle secoue légèrement la tête quand il lui propose d'aller manger. « Tu persistes avec les ordres. Mais cette chasse à l’homme m’a ouvert l’appétit alors pourquoi pas. »  Elle qui a l’habitude de mener son monde à la baguette s’amuse de cette envie qu'il a de vouloir la diriger. Elle aime ce rapport de force dans lequel il se complait.

Quand ils arrivent à la table qu’il a quittée quelques minutes plus tôt, elle sort une cigarette d’un paquet récupéré dans son sac. Elle demande en portugais un briquet au serveur qui vient de les rejoindre, et sans laisser le temps à celui qui l'accompagne de prendre la parole, commande deux ceviches et une bouteille de vin de blanc. Elle allume sa marlboro, ses yeux rivés dans ceux qui lui font face. « Tu comptes me rendre ce qui m’appartient, ou je n’ai pas encore rempli toutes les conditions pour la récupérer ? » Elle se penche pour saisir le livre posé devant lui, frôlant sa main avec la sienne. « Par contre, et même si soudoyer le personnel de l’hôtel pour te retrouver était plutôt plaisant, je ne suis pas venue jusqu’ici pour jouer à cache-cache. »  Elle tire sur sa cigarette tout en lui lançant un regard qui ne nécessite pas un mot de plus pour se faire comprendre. Et bien qu’elle ne lui dise pas, la vérité est qu’elle a adoré la manière dont il l’a défiée, et qu’elle se réjouit étrangement des prochaines heures qu’ils vont partager. Elle exhale suavement la fumée de sa cigarette en détachant ses yeux des siens pour jeter un coup d’œil à la couverture du livre qu’elle tient entre les mains, curieuse de découvrir ce qu’il lisait en l'attendant.

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{ inbetween days }
crédit/ tumblr ☾ w/@Leonide Tendler

Comment en est-il arrivé là? A prendre le déjeuner à Rio alors que d'autres affaires l'attendent chez lui? Comment en est-il arrivé à inviter une femme dont il ne connaît pas même le prénom... ? Rien n'a de sens. Et c'est cette liberté qui lui plaît. Si Gregor le souhaitait, il pourrait déserter maintenant. Tel est le jeu. Il est déjà parti lors de leur première rencontre, a tout écourté parce que cela lui plaisait. Ils n'ont pas de compte à se rendre. Juste du plaisir à partager. Et c'est pour ça qu'il lit paisiblement, sans se soucier de savoir quand elle arrivera. Elle prend son temps, il s'en fiche, c'est son droit. Et pourtant, intérieurement, il s'impatiente.

Quand l'inconnue qu'il prénomme Caroline arrive, leurs regards fusionnent et il se lève comme dirigé par une télécommande qu'elle actionne. Elle le manie et manipule aisément. Il n'aimerait pas ça si elle était importante pour lui. Mais alors qu'il l'embrasse avec fougue près de cette fontaine délabrée, un songe le traverse : il l'aime bien. Cette femme aux allures fortes, aux sourcils froncés, il l'aime bien. Et ce n'est pas l'absence de petite culotte qui le fait la désirer. Non. C'est ce jeu qu'ils partagent, c'est cette complicité.

Mais tu vas te marier.
Et elle aussi.

« Tu finiras par t'habituer aux ordres.  » dit-il en la guidant vers leur table. Il sait très bien que c'est tout sauf ce qu'elle veut entendre. Car il sait aussi qu'elle ne capitulera pas. Contrairement aux femmes qu'il côtoie, celle-ci semble indomptable. Les filles qu'il aime habituellement sont celles qu'il peut protéger. Miss Thompson n'a pas besoin de ses bras pour pleurer la nuit, n'a pas besoin de ses sous pour vivre sa vie.

Il déplace le livre de Tolstoï de la table, le tournant pour ne pas qu'on en voit le titre pompeux. Gregor n'aime pas les gens qui s'évertuent à montrer leur culture en montrant leurs lectures. Il la laisse s'asseoir et parle en allemand au serveur. Il n'expliquera pas pourquoi, préférant garder le mystère sur ses motivations. A son tour, son invitée parle dans une langue étrangère qu'il devine être du portugais. Elle passe commande sans se soucier qu'il vienne de le faire juste avant. Il sourit et dispense le serveur de tenir compte de ce qu'il a demandé. « On suivra les ordres de Madame...    » dit-il en anglais et quand le serveur est parti, d'ajouter «  ...pour l'instant.  » Elle parle de son sous-vêtement dérobé et il le sort de sa poche sans aucune gêne. Gregor aime défier, aime jouer. «  Ca?  » La dentelle passe entre ses doigts et il la monte jusqu'à ses narines, l'humant sans scrupules devant sa propriétaire. Les effluves de sa compagne lui reviennent à la mémoire sans aucun souci et il sourit. «  Non, j'estime que je mérite bien un petit cadeau souvenir vu tout ce que j'ai payé.  » Ses yeux luisent. Gregor se doute que ce n'est pas une femme qu'on achète. C'est pourquoi il la provoque ouvertement. « Et si on se cache ensemble?   » Un sourire se dessine sur son visage tandis qu'il se lève sans lui dire où il va. Le serveur le regarde et il lui parle à nouveau en allemand, indiquant qu'ils reviennent dans vingt minutes. Il saisit la main de Leonide et l'entraîne dans des petites ruelles. Puis quand, ils arrivent dans une rue déserte, il s'arrête, tourne vers elle et l'appuie contre le muret. Son regard ne laisse aucun doute sur ses intentions. Sa main soulève sa robe tandis qu'il l'embrasse langoureusement en se pressant contre elle. «  Je vous désire ardemment Mademoiselle Thompson. » murmure-t-il à son oreille tandis que de ses doigts, il va scruter si le désir est partagé. Le lieu est vide mais un passant pourrait surgir à tout moment. Le sang afflue dans tout son corps tant le stress et l'envie se mélangent abondamment.

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crédit/ tumblr ☾ w/@Gregor Ferreira

Perdus dans la folie d’un instant ils se jouent des règles qui leur sont imposées. Loin des engagements auquels ils sont liés, ils s’abandonnent à ce désir qui ne semble pas vouloir faiblir. Ils balayent d’un revers de la main ces promesses qu’ils n’ont pas choisies de prononcer, et s’enfoncent toujours un peu plus loin dans l’interdit. Leonide lui sourit lorsqu’arrivé à son niveau il souligne la confession qui lui a échappée un peu plus tôt. Quelques mots qu’elle aurait préféré taire mais qui, dans l’étourdissement provoqué par la fièvre de son plaisir, s’étaient frayés un chemin jusqu’au bord de sa langue. Elle se contente de lui sourire en guise de réponse. Un sourire malin plutôt qu’un mot de trop.

Il prend sa main, et alors qu’ils arrivent à la table qu’ils ont précédemment quittée, il fait un pas qu’elle n’avait pas anticipé. Elle s’est demandée mille et une fois qui se cache réellement derrière Ben. Elle le sonde du regard alors qu’il l’attire contre lui. Elle hésite. Son cœur tambourine dans sa poitrine. Elle incline légèrement la tête et fronce les sourcils « Je pensais que l’inconnu était ce qu’on avait convenu. Pourquoi prendre le risque de gâcher cette liberté de ne pas savoir ? »  Ne pas savoir est bien plus simple, bien plus sage. Mais à chaque fois que cet homme pose ses yeux sur elle, sa raison se dissipe pour ne laisser place qu’à cette envie dévorante d’être avec lui. Connaître sa véritable identité rendra cette passion bien réelle, ça lui donnera un nom. Elle s’amuse de sa soudaine galanterie, lui qui quelques minutes plus tôt se laissait guider dans des envies primaires, lui qui si souvent s’adresse à elle à l’impératif. Et elle ne peut retenir un léger rire lorsqu’il lui adresse un reproche à peine déguisé. Je serai ton cancer si tu ne fais pas attention. Je me glisserai dans chacune des tes cellules, je métastaserai dans ton cœur. Et tu auras beau t’injecter du poison dans les veines, je serai toujours là, tapie dans l’ombre de ce qu’il restera de toi. « Je suis en phrase terminale, n’attend pas de moi que je te fasse une promesse de rémission. »  dit-elle en même temps qu’elle s'allume une nouvelle cigarette en lui lançant un regard provocateur.

Le serveur remplit leurs verres du vin blanc qu’elle a commandé un peu plus tôt. En plongeant ses lèvres dans le liquide doré, les yeux accrochés à ceux de son partenaire de jeu, elle se laisse aller à une folie qu’elle n’avait pas prévue. « Mais allons-y. »  Elle dépose son verre sur la table. « Ne me prête plus le prénom d’une autre. Appelle-moi par le mien. »  Elle tire sur sa cigarette sans détacher ses iris des siennes, comme pour apprécier à juste valeur une dernière fois le masque qui recouvre son visage. Et en tendant l’une de ses mains dans direction, la fumée se frayant un chemin à travers ses lèvres, elle lui souffle : « Leonide. » un sourire se dessine sur son visage avant qu’elle continue « À qui ai-je affaire ? ». Une vibration agite son cœur tandis qu’elle attend sa réponse. Elle vient d’accepter de lever ce voile derrière lequel ils persistaient à se cacher. Une main tendue dans sa direction, elle s’apprête à signer un pacte avec le diable ; elle accepte leur future damnation.

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crédit/ tumblr ☾ w/@Leonide Tendler

Son père lui a toujours dit de faire attention à son image. En tant qu'aîné de la fratrie, il a une responsabilité en portant le nom de Ferreira. Un nom qu'il tient jusque dans son sang, jusque dans ses racines. Mais ses responsabilités sont bien loin derrière, dans un pays qu'il n'envisage même pas. Ici, le soleil lui tient chaud et la demoiselle qu'il a ramenée de loin pour leurs bons plaisirs partage cette chaleur avec lui.

Le plaisir les immerge, les inonde et Gregor soupire en la sentant qui s'éloigne. Juste à temps. Mais Greg l'aurait bien retenue un instant de plus, un moment, ... quitte à se damner sous le regard de cette mère qui les aurait jugés. « Il y a une chanson de la grande Piaf qui dit cette même phrase, "tu me fais tourner la tête." » dit-il avec un accent très prononcé. Le boss n'a peut-être pas répondu pendant qu'il s'insinuait sous sa robe légère mais il n'oublie rien, aucun détail, aucune phrase. Pour le patron de la mafia, il est clair que chaque petite chose compte et peut faire la différence.

Elle l'appelle Ben, une énième fois. Tandis qu'il saisit sa main pour la ramener à la terrasse précédemment quittée, il sourit « Et si tu m'appelais par mon vrai prénom? » Il s'arrête et l'attire contre lui, prêt à s'engager dans plus qu'une aventure avec une inconnue. Tellement parfaite, elle mérite un peu plus que l'illusion du voyage. Gregor sent son coeur qui palpite d'une étrange sensation, celle des confessions, des mots qu'on retient, des envies qu'on étreint. Plongé dans son regard, il se dit qu'elle est trop enivrante, dangereuse pour lui. Et ce danger le galvanise. « Tu es magnifique. » Ses lèvres déposent un baiser sur sa main à la manière des Français au 19ème siècle et il tire la chaise de la belle tout en faisant signe au serveur pour qu'il vienne leur apporter leurs commandes. Face à elle, il regarde la cigarette qui traîne dans le cendrier et rehausse ses lèvres dans un petit rictus désapprobateur. « Les femmes qui fument sont le cancer de la bienséance. » Cette phrase a été dite maintes fois par son père. Lui-même ne se laisse aller à ce vice qu'en de rares moments. Il faut que James lui hérisse le poil, que Joyss soit en retard d'un de ses rendez-vous ou qu'Alix soit absente trop longtemps après une mission de reconnaissance. Le stress le fait fumer, le sexe parfois aussi, la poésie le pousse à s'enliser dans les vapeurs vagabondes de la nicotine. Mais il s'attend à ce que sa future épouse ne présente aucun de ces vices qui nuiraient à son image, à son nom. Cependant, Miss Thompson n'est pas destinée à être sa femme. Gregor voit désormais un dessein parfait pour elle : maîtresse en chef. Comme les rois d'autrefois, il la désigne intérieurement pour être, si pas la première dame, la première courtisane.

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{ inbetween days }
crédit/ tumblr ☾ w/@Gregor Ferreira

Perdus dans la folie d’un instant ils se jouent des règles qui leur sont imposées. Loin des engagements auquels ils sont liés, ils s’abandonnent à ce désir qui ne semble pas vouloir faiblir. Ils balayent d’un revers de la main ces promesses qu’ils n’ont pas choisies de prononcer, et s’enfoncent toujours un peu plus loin dans l’interdit. Leonide lui sourit lorsqu’arrivé à son niveau il souligne la confession qui lui a échappée un peu plus tôt. Quelques mots qu’elle aurait préféré taire mais qui, dans l’étourdissement provoqué par la fièvre de son plaisir, s’étaient frayés un chemin jusqu’au bord de sa langue. Elle se contente de lui sourire en guise de réponse. Un sourire malin plutôt qu’un mot de trop.

Il prend sa main, et alors qu’ils arrivent à la table qu’ils ont précédemment quittée, il fait un pas qu’elle n’avait pas anticipé. Elle s’est demandée mille et une fois qui se cache réellement derrière Ben. Elle le sonde du regard alors qu’il l’attire contre lui. Elle hésite. Son cœur tambourine dans sa poitrine. Elle incline légèrement la tête et fronce les sourcils « Je pensais que l’inconnu était ce qu’on avait convenu. Pourquoi prendre le risque de gâcher cette liberté de ne pas savoir ? »  Ne pas savoir est bien plus simple, bien plus sage. Mais à chaque fois que cet homme pose ses yeux sur elle, sa raison se dissipe pour ne laisser place qu’à cette envie dévorante d’être avec lui. Connaître sa véritable identité rendra cette passion bien réelle, ça lui donnera un nom. Elle s’amuse de sa soudaine galanterie, lui qui quelques minutes plus tôt se laissait guider par des envies primaires, lui qui si souvent s’adresse à elle à l’impératif. Et elle ne peut retenir un léger rire lorsqu’il lui adresse un reproche à peine déguisé. Je serais ton cancer si tu ne fais pas attention. Je me glisserais dans chacune des tes cellules, je métastaserais dans ton cœur. Et tu auras beau t’injecter du poison dans les veines, je serais toujours là. Tapie dans l’ombre de ce qu’il restera de toi. « Je suis en phase terminale, n’attends pas de moi que je te fasse une promesse de rémission. »  dit-elle en même temps qu’elle s'allume une nouvelle cigarette en lui lançant un regard provocateur.

Le serveur remplit leurs verres du vin blanc qu’elle a commandé un peu plus tôt. En plongeant ses lèvres dans le liquide doré, les yeux accrochés à ceux de son partenaire de jeu, elle se laisse aller à une folie qu’elle n’avait pas prévue. « Mais allons-y. »  Elle dépose son verre sur la table. « Ne me prête plus le prénom d’une autre. Appelle-moi par le mien. »  Elle tire sur sa cigarette sans détacher ses iris des siennes, comme pour apprécier à sa juste valeur, une dernière fois, le masque qui recouvre son visage. Et en tendant l’une de ses mains vers lui, la fumée se frayant un chemin à travers ses lèvres, elle lui souffle : « Leonide. » un sourire se dessine sur son visage avant qu’elle continue « À qui ai-je  affaire ? ». Une vibration agite son cœur tandis qu’elle attend sa réponse. Elle vient d’accepter de lever ce voile derrière lequel ils persistaient à se cacher. Une main tendue dans sa direction, elle s’apprête à signer un pacte avec le diable ; elle accepte leur future damnation.

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crédit/ tumblr ☾ w/@Leonide Tendler

Et soudain la réalité refait surface, comme une bulle que l'on éclate.

Se pourrait-il que... Les songes le traversent, le bouleversent. Plus rien n'a d'importance. Ce prénom, cette consonnance... Le Ferreira ne met que quelques secondes à se souvenir pourquoi cela lui fait froid dans le dos d'entendre ces quelques syllabes. Peu courant, Leonide n'est pas un prénom que l'on rencontre à tous les coins de rue. Et pourtant, quelles sont les probabilités? Il s'interroge, muet devant l'aveu qu'elle ne sait pas, dont elle n'imagine pas l'ampleur. Mais il est encore trop tôt pour être sûr, trop tôt pour s'écrier à l'outrage. Pourtant Gregor la regarde et des détails lui reviennent en tête pendant qu'elle l'interroge sur son identité. Son visage se mure, la froideur du chef de la mafia se révèle à nouveau comme elle ne l'a jamais vu. Ne sait-elle vraiment pas qui tu es? Ou se moque-t-elle de toi depuis le début? La voix dans sa tête l'attaque, le martyrise. Gregor revoit l'actrice sur les planches de théâtre la confronte au rire de Javier Ferreira qui lui annonce que sa fiancée est une artiste. Cela concorde. Elle est fiancée. Elle m'est fiancée. Un rire glacé, une sorte de tremolo guttural l'anime en la regardant. « Gregor. Je m'appelle Gregor. » Il ne bouge pas. Son regard ancré sur elle, il analyse l'effet que ce prénom a sur la femme qu'il est convaincu d'avoir découvert. Mais son prénom ne suffit pas. Certes, plus répandu que celui de la jeune femme, il demeure néanmoins le sien. Et si elle est dans le même trouble que lui, si elle se pose la question, c'est que la conclusion peut être faite, que le bilan peut être posé.

Le serveur dépose les ceviche sur la table mais Gregor se lève. Droit dans sa posture, tout ce qu'il ressentait pour sa compagne s'est évaporé depuis qu'elle a laissé tomber la hache de son identité. Le sort se moque bien de lui, pense-t-il sans rien dire. Il sort une liasse de billets qu'il donne au garçon en signe de paiement. « Ca devrait couvrir nos dépenses. » Il le congédie avant de reposer ses yeux sur la brune dont la cigarette le nargue au bout des lèvres. Quelques instants plus tôt, il se l'imaginait au bord du lit, sa maîtresse tandis que son insipide femme coucherait ailleurs dans la maison. Maintenant, il voit là, le cancer de sa raison. Aguicheuse, indomptable, irritante... Leonide. « On se reverra à New-York Mademoiselle Tendler. » Sa voix claque dans l'air tandis qu'il fait volte-face et s'éloigne d'elle. Il a besoin de prendre ses distances, de réfléchir, de la haïr pour l'avoir ainsi trompé. Ils se sont trompés tous les deux, sans le savoir, sans pouvoir voir... Gregor ne passe plus par l'hôtel, il va directement à son jet et décolle pour revenir chez lui.

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{ inbetween days }
crédit/ tumblr ☾ w/@Gregor Ferreira

À peine la mélodie de son prénom parvenue à ses oreilles, elle aperçoit l'arrivée d'un orage dans ses pupilles. Son visage disparait derrière un mur de glace qu’elle ne pourrait dépasser. Leonide ne comprend pas, silencieuse, perplexe, elle ne le quitte pas des yeux fronçant légèrement les sourcils. Ce voile n’aurait jamais dû être levé. Elle savait que la liberté de ne pas savoir était précieuse, mais pas encore à quel point. Elle repose sa main sur la table, comprenant qu’il ne la saisira pas, tentée de lui balancer un "je te l'avais dit". Et, quand il finit par répondre à sa question, qu’à son tour il lui dévoile son véritable prénom, la passion et le désire qu’elle éprouvait la seconde d'avant se transforme en cendres dans sa bouche. Gregor. C’est lui. Celui qu’elle ne connaît pas. Celui dont elle ne veut pas. Le sourire sur ses lèvres s’évapore, englouti par toute la noirceur dont se rempli son regard. Elle s’était imaginée être mariée à un de ses pantins qu’elle pourrait facilement manipuler, un homme qu’elle mépriserait, tromperait à sa guise. Elle a eu le malheur de penser que celui qu’elle appelait Ben pourrait être une échappatoire à cette vie avec un autre, alors qu’en réalité, il est le cimetière où sa liberté sera enterrée.

Elle ne dit rien quand elle le voit se lever, elle ne cherche pas à le retenir, elle ne lui répond même pas. Elle s’étouffe dans sa rage. La colère qui monte en elle, l’humiliation terrible d’avoir été dupée encombrent sa trachée. Et lorsqu’il la salue, ponctuant sa phrase de son nom, lui confirmant de vive voix que lui aussi sait, ce n’est qu’un regard noir qu’elle est capable de lui donner. Et à la colère se mélange la peur quand elle commence à comprendre l’ampleur du piège qui sur elle est en train de se refermer. Elle est malade qu’il ait pu avoir cette emprise sur elle, qu’il lui ait fait goûter à cette passion si dévorante qu’elle n’arrivait à s’en rassasier. Il s’en va en laissant derrière lui ce goût amer dans la bouche de Leonide et l’éclosion de sa haine est assourdissante. Elle reste assise, seule à cette table une durée qu’elle ne parvient pas à estimer. Elle ne touche pas à son assiette, ne prête pas attention au monde qui l’entoure.

Avant que le soleil ne se couche elle sera partie, ramenée en terre conquise par l’un des jets privés de son père, accompagnée par sa colère et son humiliation, hantée par les deux syllabes de son prénom.