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 Chasseur d'ombres (Ella)

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Message Sujet: Chasseur d'ombres (Ella)   Chasseur d'ombres (Ella) Empty Dim 3 Jan - 21:05

Chasser tes ombres et tes fantômes
@Ella Gardner


Dehors, quelques flocons paresseux détrempaient les pavés sales, la nuit s’était imposée depuis la fin d’après-midi entre les nuages pollués, le froid de l’hiver mordait la peau des doigts engourdis d’avoir attendu longtemps dehors, le concerto désorganisé des klaxons et des sirènes trop présent, empêchant d’entrevoir toute poésie ou mélancolie dans un tel tableau. Il n’empêche que le sourire d’Ella, à lui seul, savait faire fondre les glaciers – pour lui en tous cas, cela fonctionnait à chaque fois. Une fois n’était pas coutume, il avait joué les retardataires, le temps de terminer ceci et cela avec un dernier patient, de boucler une ordonnance, de transmettre quelques informations à l’équipe de relève pour ce soir-là, d’abandonner la tenue blanche et les couloirs aux odeurs aseptisées. Mais même en s’y appliquant, il ne savait pas sortir pile-poil à l’heure. Il s’excusa après un bonsoir glissé au creux de l’oreille de s’être fait attendre, les lèvres adorées bouleversant les siennes, baigné de ce bonheur de pouvoir serrer le corps qu’il préférait contre le sien. Il savourait la facilité qu’elle avait pour le déconnecter de tout le reste, le sang et la douleur et les journées éreintantes, les montées d’adrénaline imprévues. Il adorait son travail, pour les rencontres à chaque fois inédites, pour l’inconnu qui se profilait devant lui à chaque réveil, pour ce sentiment d’avoir toujours tant à apprendre... Mais la retrouver elle, il aimait encore plus.

Ella n’était jamais suffisamment couverte, il faisait un froid de canard alors il râla pour la forme, pas assez moralisateur au fond pour l’obliger à quoi que ce soit, sinon l’emmitoufler dans sa propre écharpe l’instant d’après.

Il lui avait parlé d’un bar très récemment ouvert, soi disant le nouvel établissement plutôt à la mode dans le quartier (non pas qu’il s’intéresse aux dernières tendances, mais ses collègues lui en avaient dit du bien), ils avaient convenu sur un coup de tête par sms rapides à peine plus tôt dans la journée qu’elle le retrouverait après sa garde du jouril l’y emmènerait. Et comme par hasard, la librairie qu’il aimait tant se trouvait juste avant – il avait absolument besoin d’un essai qui venait de sortir, besoin oui car bien trop curieux et impatient. Sa muse avait été douce et docile, et lui il lui avait promis à contre cœur qu’il ferait vite.

A son sens il avait tenu parole, évitant de (trop) se faire happer par les pages et les couvertures de tant d’ouvrages inconnus, et les étagères pleines si attirantes. Il avait tenté un temps de diversion à l’aide d’un si quelque chose te fait envie choisis, je te l’offre, mais ça n’avait pas très bien fonctionné. L’urgentiste transformé en immense amoureux de la littérature à la nuit tombée avait fini par raisonnablement repartir avec de quoi occuper trois nouvelles places dans sa bibliothèque (il trouverait toujours de la place), cela ne changeait pas, comme il était habitué à aimer marcher dehors mais avec une cigarette allumée coincée entre les lèvres.

Ils avaient fini par franchir la porte du Stumble Inn, endroit aux allures à la fois vintages et industrielles comme cela se voyait volontiers par les temps qui couraient, des musiques rock en sourdine, et les boissons rapidement commandées – pour lui une espèce de cocktail soi disant innovante et originale pour l’hiver, à base de whisky et d’orange. Ella savait le faire parler, lui qui détestait cela avec le reste du commun des mortels, lui qui ne savait pas s’y prendre, faussement à l’aise avec quiconque n’était pas elle. Mais avec elle, il aimait bien. Lui raconter sa journée, éludant rapidement les patients aux histoires les plus tragiques, préférant insister sur le calvaire que pouvait faire un enfant bien décidé à ne pas se laisser examiner, ou plus globalement les anecdotes susceptibles de l’amuser.  Et puis aussi il aimait la faire parler elle, la plupart du temps scrupuleusement attentif à leurs discussions, sinon déconcentré à la dévorer des yeux. Le reste du temps, il était observateur, il avait pourtant le sens du détail, pas artiste pour un sou, mais suffisamment de curiosité pour volontiers laisser les yeux noisette vagabonder sur leur nouvel environnement transitoire. Les lieux étaient d’ailleurs quasi-pleins, mais après vérification, il y avait bien un type qui sortait du lot. Costume probablement hors de prix, montre tape à l’œil l’air de rien laissée en évidence au poignet, les tempes plus que grisonnantes. Non pas qu’il ait l’habitude d’en avoir après ceux dont le faciès collait terriblement bien à celui du président d’une grande compagnie d’assurances (franchement, il en aurait mis sa main à couper) – il n’enviait pas leur quotidien morne, préférait les hommes aux chiffres. Mais, il y avait bien ce regard de chien de garde contrarié qui l’interloquait, alors même que les cocktails tardaient à arriver, il fit la remarque à sa chère et tendre : « Regarde discrètement à ta gauche, le type en costume marine... J’ai dit discrètement, Ella ! » Il pouffa, comme les deux incorribles adolescents qu’ils ne cessaient jamais complètement d’être, quand ils étaient tous les deux. Sa remarque avait le ton évident et la légèreté de la plaisanterie, et pourtant : « Il te regarde depuis tout à l’heure, qu’est-ce que tu as bien pu lui faire à ce pauvre homme ? »
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Message Sujet: Re: Chasseur d'ombres (Ella)   Chasseur d'ombres (Ella) Empty Mar 5 Jan - 20:19


☾ ☾ ☾
{ chasseur d'ombres }
crédit/ tumblr ☾ w/@Ambroise Marshall
Ce sourire,
l’arrivée de l’éclaircie,
après une journée agonisante,
passée à l’attendre,
ce sourire qui efface tout, ce sourire qui ressuscite,
ce sourire qui illumine,
ce sourire qui fait vivre.

Elle ferait n’importe quoi pour ce sourire.

Elle l’attendrait même dans le froid polaire de la cité urbaine. Elle patienterait pour quelques minutes de retard ou même une douzaine. Elle lui laisserait le temps de sauver des vies avant de venir donner un sens à la sienne. Et puis, elle consentirait à le suivre, pour se retrouver ensevelie sous une tonne de ces livres dont il a tant besoin. Elle ferait n’importe quoi, Ella, pour passer ces instants d’éternité avec lui. Dans cette bulle qui se forme chaque fois qu’elle plonge son ébène dans ses iris. Chaque fois que ses lippes s’emparent des siennes dans un baiser débordant d’envie. Chaque fois qu’il resserre un peu cette écharpe  - à lui, elle n’en possède aucune – contre son cou refroidi. Elle a la sensation que tout devient plus facile, quand elle est avec lui. Elle perd cette boule qui lui taraude l’estomac, ces angoisses qui la noient dans ces tempêtes abyssales. Elle parvient à échapper aux démons qui ne cessent de la poursuivre depuis l’enfance grâce à celui qu’elle considère comme un ange. Celui qui rafistole, lentement, chaque plaie laissée béante dans son cœur en manque. Celui qui lui offre l’antidote de l’amour face au trou noir laissé en elle par ses propres parents.

Alors elle le suivrait bien n’importe où, Ambroise.

C’est sans discuter, sans même l’interroger, qu’elle accepte de le suivre dans ce bar qui lui est inconnu. L’oiseau nocturne a pourtant écumé les nombreux lieux de fêtes et de débauches. Elle s’est perdue dans les vices et l’alcool. Dans les danses lascives avec de parfaits étrangers, pour mieux les dépouiller. Pour mieux se perdre, aussi, dans les abîmes. Mais elle sort beaucoup moins régulièrement que par le passé. Ses amis s’en sont même plus d’une fois étonnés. C’est Ambroise qui a cet effet sur elle. L’envie de se perdre dans la fête a disparu quand elle a retrouvé la sérénité de ses étreintes. Elle n’a pas même besoin d’être ici, devant le Mojito à peine entamé qu’elle a commandé, toute son attention étant focalisée sur l’homme qui se tient à ses côtés. Elle écoute avec un plaisir non dissimulé, les anecdotes de sa journée. Toujours friande des histoires du médecin, elle le soupçonne de lui épargner les instants les plus tragiques pour mieux lui faire garder son sourire. Même s’il ne doit pas réaliser, Ambroise, comme elle est fière de lui chaque fois qu’il parle de son métier. Comme une part d’elle l’envie, aussi, d’avoir su trouver sa voie en aidant son prochain. En faisant le bien. Elle préfère mille fois l’écouter, lui, plutôt que parler d’elle, peu intéressante de son propre avis. Chassant ses pensées pour mieux profiter de cet instant à ses côtés, la ténébreuse saisit son verre pour boire une gorgée. C’est à ce moment-là qu’il lui demande de jeter un coup d’œil sur sa gauche. Sans l’ombre d’une quelconque discrétion, elle tourne la tête frontalement, trop intriguée pour qu’il en soit autrement. Mais elle ne s’attend pas au visage qu’elle reconnaît instantanément. Elle ne s’attend pas à voir un homme de son envergure dans un bar branché, lui qui avait l’habitude de l’entraîner dans des soirées bien plus coincées. Devant les traits beaucoup trop familiers de l’une de ses victimes, c’est le propre minois de la croqueuse de diamants qui pâlit. Protégée, elle l’espère, par le maquillage dessiné, elle se sent subitement bien embarrassée. « Euh, je ne sais pas, il a peut-être juste flashé sur moi. » elle lance avec un sourire en coin, sourire qui se veut innocent. Mais elle n’a jamais été aussi mal à l’aise qu’à cet instant.

Ô, Ambroise, si tu savais,
si tu savais ce que je lui ai fait,
si tu savais le mal que j’ai fait,
si tu savais la personne que je suis en réalité,

tu ne serais peut-être déjà plus à mes côtés.


Elle ne sait pas ce qui lui prend de mentir. Elle ne ment pas, Ella, même quand la vérité fait mal. Elle a trop souvent fait cette erreur par le passé pour la reproduire dans le présent. Pour la reproduire avec Ambroise. Seulement… seulement, elle est terrorisée. Désemparée. Paniquée, à l’idée qu’il découvre la vérité. Qu’il comprenne la personne qu’elle est. Celle qu’elle a été, quand il n’était pas là pour l’éclairer. Pas le temps de trouver une quelconque marge de manœuvre, l’ancien pigeon décide soudain de s’approcher des deux amoureux. Elle voit le cataclysme lui arriver droit dessus, la camée. Comme une avalanche qu’elle voit approcher sans pouvoir l’éviter. « Bonsoir Ella. » Et tous les doutes qu’Ambroise aurait pu avoir viennent d’être balayés. Elle voudrait disparaître, elle voudrait s’éclipser. Mais elle sent deux paires de yeux rivés droit sur sa carcasse piégée. Silencieuse, Ella, elle est juste incapable de parler. Incapable de l’affronter.
C’est plus vrai encore avec l’être aimé.

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Message Sujet: Re: Chasseur d'ombres (Ella)   Chasseur d'ombres (Ella) Empty Dim 17 Jan - 21:53

Elle mentait. Il était de ceux qui préféraient observer l’interlocuteur plutôt que de monopoliser la parole et l’attention, Ambroise. Et Ella, Ella plus que n’importe quel autre humain sur cette planète, il l’aurait fait parler des heures et des heures, inlassablement, pour boire ses paroles et s’enivrer de ses mimiques. Il connaissait par cœur ses regards ravageurs, ses regards taquins, joueurs, enfantins, agacés, courroucés, ses regards quand ils étaient une mauvaise barrière entre ses émotions et les mots qu’elle peinait à placer. Il connaissait ses sourires véritablement innocents, ses sourires provocateurs, et ceux dont l’objectif était principalement de le berner. La dévorer des yeux était l’un de ses passe-temps favoris : elle mentait, il le savait. Et pourtant, il n’insisterait pas. « Je peux comprendre », il se contenta d’acquiescer sagement, d’éluder rapidement – après tout lui aussi, il avait l’éternelle tendance à flasher sur elle à chaque fois qu’elle entrait dans son champ de vision –, l’air mutin pas même entamé par le comportement soudain surprenant de sa douce.

Aveuglément, il avait confiance en elle ; à raison ou à tord, diraient certains, mais lui y croyait comme jamais il n’aurait osé croire en qui que ce soit. Il savait l’immensité de ses blessures, les sentait plus qu’il n’en connaissait les détails, mais n’insistait jamais. Ne la questionnait pas, ou peu. Parce qu’il était trop tôt, parce qu’Ella venait naturellement vers lui, comme lui était incapable de se passer d’elle. Alors brusquer les choses dès à présent ou patienter un peu pour aider son amour meurtri à recoller les morceaux...

Alors il rangea de côté sa curiosité et se contenta de prendre une première gorgée du cocktail à base de whisky. Les prunelles parlant de toute manière pour lui, occupées à détailler et interroger silencieusement chacune de ses expressions fuyantes... Le supposé inconnu s’était levé à peu près au même instant, et Ella avait eu de geste rapide, comme pour se camoufler derrière sa paume de main ouverte. Lui se fit la réflexion qu’il n’avait de toute manière pas de quoi craindre quoi que ce soit, pas de quoi laisser gronder une jalousie véritable, face à un type avec une cravate pareille. L’urgentiste avait des réflexions qu’il taisait aisément, l’homme après une journée de labeur avait tendance à volontiers laisser divaguer ses pensées vagabondes et à avoir un visage un brin expressif – personne, personne ne l’aurait jamais forcé à aller travailler avec un truc pareil autour du cou.

Seulement voilà, il l’appela par son prénom (bonsoir Ella), et c’est tout naturellement que ses iris firent la navette jusqu’à la jeune femme. Il ne chercha même pas à feindre la surprise, puisqu’elle avait été grillée dès ses quatre ou cinq premiers mots (évidemment, qu’elle mentait). D’abord plutôt curieux de la laisser se défaire de cette situation cocasse seule comme une grande, il hésita à rétorquer une ânerie sur le ton de la taquinerie (encore un prétendant, à un tel point qu’elle finissait par oublier leur visage ?)... Et puis la voix de la raison lui cloua le bec, les lèvres occupées le temps d’une nouvelle gorgée à reprendre de cette boisson finalement trop sucrée à son goût, reposa le verre sur la table en bois sans trop de bruit. Il avait laissé à Ella un temps de réponse raisonnable, et son Ella, Ella qui n’avait jamais la langue sagement rangée, Ella qui n’avait peur de personne, Ella qui répondait par le double quand on la provoquait... Avait viré à un teint plus livide que ses tenues habituelles de travail à lui. C’était suffisant pour lui retirer l’envie de jouer avec elle. Il était le seul à s’autoriser ça (jouer avec Ella). Et il avait simplement envie de passer un moment agréable rien qu’avec elle – Monsieur le Président n’avait pas le droit de faire tarir ses sourires. Il n’était pas encombrant, Ambroise, pas bagarreur, pas sanguin, et il se contre-fichait de savoir pourquoi sa moitié avait essayé de faire semblant, vraiment. « Bonsoir, enchanté, soyez le bienvenu dans notre soirée en tête à tête. » Il garda évidemment son calme, et enfin, il capta à son tour l’attention de cravate-boy. « Navré chef, mais je crois qu’Ella n’a pas très envie de vous parler. » Il haussa les épaules d’un air tout à fait désabusé, l’éternel calme, jamais impressionné, mais plus encore protecteur de son âme-sœur, quitte à y perdre parfois ses capacités de réflexion. La réponse cingla la seconde suivante, sifflée derrière un sourire sensiblement amer, tout droit en direction du visage fugitif et décomposé : « Comment va ma voiture ? Tu es aussi partie avec quelques centaines de mes dollars, si mes souvenirs sont bons. »
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Message Sujet: Re: Chasseur d'ombres (Ella)   Chasseur d'ombres (Ella) Empty Mar 19 Jan - 19:18


☾ ☾ ☾
{ chasseur d'ombres }
crédit/ tumblr ☾ w/@Ambroise Marshall
C’est, comme,
voir arriver une catastrophe,
un cataclysme, une avalanche,
ou bien un immense cyclone,
c’est voir arriver un tourbillon sur eux,
droit sur elle, sur lui, sur tous les deux,

mais ne rien pouvoir faire pour l’empêcher,
ne rien pouvoir faire pour les sauver.

Ella, elle n’a pas l’habitude de répondre de ses actes. Âme farouche, âme sauvage, rares sont ceux qui osent se confronter à l’impétuosité de la femme, à bien trop d’égards, fatale. Peut-être par effroi, peut-être seulement parce qu’ils s’en fichent pas mal. Il n’empêche qu’elle, n’y a guère apporté de l’importance, du moins jusqu’à présent. Jusqu’à retrouver l’amour auprès de cet homme aux allures d’ange. Jusqu’à Ambroise. Ce n’est pas pour ce businessman à la fortune inestimable et au comportement méprisable qu’elle se met dans cet état. C’est pour Ambroise. Seulement, toujours, pour Ambroise.

Comment réagira-t-il,
quand il saura ce que tu leur as fait subir,
quand il saura comme tu as fait d’eux tes victimes,
juste pour le vice, juste pour le plaisir,
juste, pour le goût de survivre ?

Comment réagira-t-il,
quand il verra que tu n’es pas une martyre,
que tu as fait tellement de mal à autrui,
à lui,
à tous ces autres que t’as pris pour cibles ?

Comment réagira-t-il,
quand c’est ton amour dont il faudra douter,
de tout ce que tu peux éprouver,
tout ce qui est vrai,
tout ce qui est avec lui si opposé,
de tout ce qui a fait ton passé ?


Il partira.
Il s’en ira.
Il la quittera.

Et il aura raison de le faire. Car si elle n’a jamais été aussi sincère qu’avec Ambroise, elle n’en est pas moins une femme noyée par le mal. Celui qu’elle ressent, celui qu’elle transmet. Celui avec lequel elle est née, celui qu’elle donne à tous ceux qui osent trop l’approcher. Un mal inné qui ne cessera jamais de la hanter. Alors mieux vaut-il peut-être qu’il sache, dès à présent, qu’il s’en aille avant que ce soit trop tard. Qu’elle ne brise pas son cœur ou, pire, son âme. Elle ne sait que trop comme elles sont irréparables. Ella, c’est à cela qu’elle pense, tandis que l’homme s’avance. Tandis que l’homme prend la parole pour rappeler combien il s’en souvient encore. De ce qu’elle lui a fait, de ce qu’elle lui a pris sans qu’il ne remarque même comme il était manipulé. Pantin des envies de la demoiselle, il a satisfait le moindre de ses désirs, le plus ridicule de ses caprices, jusqu’à ce que soudain, elle le rejette. Mais le pantin tient là le châtiment qu’il a tant dû désirer, la vengeance à sa portée.

Et je sens tes prunelles sur moi,
elles ne me quittent pas,
je les sens m’embraser,
et moi, je me sens me consumer,
quand je réalise que tout va partir en fumée,
que, de notre amour, ne restera qu’une dépouille cendrée.


Elle fuit, Ella, elle fuit ses opales autant que celles de l’ancienne proie. Plus encore même. C’est le regard d’Ambroise qu’elle sent la brûler. Il la scrute, sûrement, avec intensité. Sans comprendre, peut-être, sans oser imaginer une chose pareille. Lui qui l’aime, lui qui a… confiance en elle. Lui qui arrive encore à vouloir prendre soin d’elle, la préserver de l’indésirable quand c’est elle, la seule coupable. Il atteint son cœur au plus profond, la submerge de remords par la même occasion. L’âme en perdition voudrait tout lui dire, lui avouer tout de suite. Qu’il sache qu’elle n’est plus cette fille, qu’elle ne veut plus l’être depuis qu’elle est sa petite-amie. Même avant lui, à vrai dire. Elle ne supportait plus, la junkie, ce qu’elle était devenue. Mais c’est vers le millionnaire qu’elle se retourne. Avant qu’il n’aille plus loin, même s’il est déjà allé trop loin. Les limites franchies, elle ne peut plus revenir en arrière. « Je suis partie seulement avec ce que tu as bien voulu me donner. «  elle lance enfin, laissant entrevoir ce qui était déjà clair pour le médecin. Ce qu’il a dû comprendre à la seconde même où elle a balancé ce mensonge. C’est trop tard pour tenter de préserver les apparences mais elle peut, au moins, rectifier la vérité. « C’est ce qui t’aide à dormir le soir ? Tu sais très bien que tu as profité de moi. Exactement comme tu es en train de profiter de ce type. » Il n’en faut pas plus pour qu’elle réagisse. Elle se tourne complètement vers lui, l’ancienne victime. Devenue coupable de la torture vengeresse qu’il lui inflige. « Ne parle pas de ce que tu ne sais pas. » « Mais je sais très bien ce que tu es. Tu es une menteuse, une manipulatrice, une femme qui séduit les hommes pour en retirer ce dont elle a besoin. Comment ça s’appelle d’après toi ? » et c’est vers Ambroise qu’il finit par se tourner. « Croyez-moi, mon cher. Il vaut mieux se tenir à distance de cette femme avant qu’elle ne vous prenne tout. »

Et tu ne le croiras pas, hein,
dis-moi que tu ne le croiras pas,
il n’y a rien à voir entre lui et toi,
il n’était rien,
quand toi, tu es tout.


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Message Sujet: Re: Chasseur d'ombres (Ella)   Chasseur d'ombres (Ella) Empty Dim 24 Jan - 21:20

« Comment ça s’appelle d’après toi ? » « Restez poli. » L’injonction, si elle n’impliquait pas de violence dans la voix, ne laissait toutefois pas la place à la moindre alternative. Il avait les yeux foutrement expressifs, Ambroise : ça avait toujours été comme cela, les iris couleur noisette faisant irrémédiablement de lui un mauvais menteur. Et c’était pire encore quand la patience plus si infinie s’effilochait à coups de grondements de colère. Comme une ténacité silencieusement rageuse, parce qu’il avait fané son sourire préféré.

Et Ella, elle, savait tout faire naître en lui, un arc-en-ciel immense d’émotions (la peur et la passion, l’envie, la patience, l’impatience, l’espoir plus souvent que les regrets, la sérénité, la jalousie, le courage, la confiance : l’amour sous toutes ses formes), mais jamais cette hargne violente.  

Il s’était préparé – il imaginait, s’être préparé. Aux drogues toutes plus sales les unes que les autres, à la violence toxique des âmes trop longtemps abandonnées à leur souffrance, au sexe, aux moments funambulesques entre vie et mort, exister et disparaître, aux jours qu’elle avait jadis peut-être considéré comme une liberté absolue et dont il se prendrait le récit en pleine figure. Sex, drugs and rock’n’roll, pour tout oublier. Il avait imaginé cent histoires sans jamais oser les lui faire préciser, sans jamais rendre ses interrogations concrètes. Il avait bien réfléchi à la question et plus les mois s’écoulaient, plus la réponse revenait, toujours identique, solide ritournelle : il se contrefoutait ce qu’avait été Ella quand lui s’était contenté de laisser les années défiler, sans couleur ni relief, mais bien sages.

Qui, quoi, pourquoi. Peu importait. Il y avait elle maintenant, eux à présent. Sa confiance était complète et aveugle, il voulait bien se damner si le passé d’Ella changeait quoi que ce soit à ces instants précieux et indestructibles et fragiles. Ca ne voulait pas dire qu’il ne voulait rien savoir. Simplement que rien ne pressait. Pas ce soir, il était vrai qu’il était doué pour toujours tout repousser, l’homme trop prudent ou trop naïf, doué aussi pour chasser les conflits.

Il ne faisait pas de coup d’éclat en public, Ambroise. Pas de coup de colère tout fort non plus, d’ailleurs. Ella savait le pousser dans ses retranchements comme aucune autre avant elle, elle pouvait le mettre hors de lui quand elle s’éclipsait dans la nuit italienne – mais jamais, il ne savait complètement et réellement être fâché contre elle. Ambroise avait besoin de s’entendre penser et peser ses mots, les yeux dans les yeux, rien qu’à deux. Comprendre et se faire comprendre, ne pas blesser le moindre cœur. Il ne savait pas faire, faire taire les sourires sans que ce soit un crève cœur. « Croyez-moi, mon cher. Il vaut mieux se tenir à distance de cette femme avant qu’elle ne vous prenne tout. » Quand lui semble-t-il, les balayait avec une facilité déconcertante, l’air carnassier les éclipsant avec aisance. « J’essaie, il dit en fronçant les sourcils d’un air soucieux ou songeur, vida d’une traite une bonne partie du verre qui avait évidemment perdu la saveur d’un moment tout simple. Mais elle continue de prendre beaucoup, beaucoup de place, y compris et surtout la nuit quand elle dort. Elle s’approprie mes pulls le matin, éparpille ses affaires et son parfum un peu partout, il faut la nourrir à intervalles réguliers... Comment voulez-vous que je me tienne à distance ? ... Vous ne saviez pas tout cela, peut-être ? » « Vous vous foutez de ma gueule ? » Il était rapide et perspicace. Monsieur le Directeur n’ayant sans doute pas l’habitude qu’on lui dise « non », effrontément. Vexé comme un pou de ne pas trouver le moindre complice dans la manœuvre. « Un peu », il haussa les épaules rapidement, profondément agacé par la situation. Ca n’était pas forcément évident, l’urgentiste avait toujours travaillé ses airs d’impassibilité. Mais Ella le connaissait trop bien ; Ella sentirait forcément. Il se leva enfin, repoussant le siège aux allures industrielles et vintage comme cela se faisait volontiers dans tous ces bars branchés, les doigts pianotant d’impatience sur la table en bois à présent juste derrière lui : « Ecoutez, j’ai l’impression que vos reproches commencent déjà à tourner en boucle. Laissez-nous, vraiment. »

L’homme en apparence essayait de calmer la situation toxique comme il en avait l’habitude, l’homme en réalité tout au fond du myocarde fou d’amour étouffait loin de leur bulle rien qu’à eux deux. L’urgentiste savait laisser les réflexes parler, agir vite, infatigable... Comme il détestait se faire bousculer jusqu’à reculer très loin dans ses retranchements. Il avait besoin de la retrouver elle. D’une mise au point rien qu’avec elle. Pour l’entendre dire, comme pour se rassurer après un mauvais rêve, qu’il avait toutes les raisons du monde de tout donner, mais absolument tout, pour eux deux. L’homme en apparence était plein d’aplomb... Quand en réalité il avait surtout, et c’était son urgence à lui, besoin de la retrouver, elle.
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Message Sujet: Re: Chasseur d'ombres (Ella)   Chasseur d'ombres (Ella) Empty Dim 31 Jan - 12:26


☾ ☾ ☾
{ chasseur d'ombres }
crédit/ tumblr ☾ w/@Ambroise Marshall
Un coup au cœur,
c’est comme ça que ça doit s’appeler,
élan de violence insoupçonné,
impossible à anticiper,
trop brutal pour être arrêté,
trop lancinant pour être supporté.

Un coup au cœur, pour une terrible douleur. C’est ce qu’elle ressent au plus profond d’elle-même alors qu’elle demeure muette, spectatrice silencieuse de cette scène. L’impression que le monde a cessé de tourner. Ou peut-être qu’il continue mais qu’elle n’est plus à l’intérieur, plus tout à fait. Elle voit la vie lui échapper. Myriade de souvenirs venus la submerger, sans pouvoir les arrêter, sans pouvoir les emprisonner. Les instants avec Ambroise, ils défilent dans les méandres de son encéphale, à cette vitesse aussi vertigineuse que fatale. Ils s’enchaînent si vite, comme on les imagine, quand arrive la fin d’une vie. Mais c’est le sentiment qu’elle a, Ella. Le sentiment que tout pourrait basculer d’une seconde à l’autre. D’une vie à la mort. De son amour à sa haine. Ou, pire encore, de son amour à sa perte. Elle ne peut pas accepter l’éventualité de perdre l’homme qu’elle aime. Elle a mis trop longtemps à se fier à ses sentiments, trop longtemps à leur faire confiance, pour que tout s’arrête si brusquement. Mais lui, parviendra-t-il encore à lui faire confiance ? Devant de telles confidences ? Devant le procès qu’elle subit en ce moment ?

Mutique, Ella,
elle entend cet homme la démonter,
elle laisse cet homme la désarçonner,

si loin de se préoccuper,
de ce qu’il peut penser,

mais il y a cet autre homme à ses côtés,
celui qui est en train de l’écouter,
celui qui pourrait la quitter.

C’est pour lui qu’elle est encore ici ; pour lui qu’elle n’est pas encore partie. Clouée au sol par le cœur, elle se doit d’affronter cette tempête qu’elle n’avait pas prévue. Celle qu’elle aurait dû anticiper mais qui lui tombe si violemment dessus. Elle aurait dû penser à cette éventualité, qu’ils puissent tomber un jour sur l’un de ces hommes qu’elle a utilisés. Ambroise lui a même tendu une perche, une ou deux fois, pour qu’elle se confie à lui. Mais non, elle ne l’a pas fait. Elle a préféré se taire et tout garder. Tout ce qui aurait pu l’inciter à la détester. Elle ignore ce qui se passe à cet instant dans l’esprit du médecin, n’a pas la moindre pensée de tous les tourments qui doivent le submerger. Elle n’ose, en réalité, même pas le regarder. Elle s’attend à un coup d’éclat, subitement. Elle s’attend à l’entendre hurler d’au moins oser relever ses iris vers lui. Elle s’attend à tout, Ella, mais pas à ce qui arrive. Le cœur fébrile, au premier mot, elle ose timidement redresser son minois. Et puis, il continue ; et puis, il lui serre le myocarde un peu plus. Elle ne sait plus si elle doit être effrayée ou bien émue. Ne sait plus si elle doit le supplier de l’aimer ou bien le remercier. Parfait, Ambroise, il est parfait.

Si tu savais,
si tu savais comme je t’aime à cet instant précis,
si tu savais comme je ne te mérite pas, aussi.


Elle le contemple cette fois, sans un mot, les billes noires qui ne le quittent pas. Bouleversée par sa réaction, elle se sent un peu moins suffoquer. À nouveau respirer. Et ses pupilles, malgré elle, se mettent à briller. C’est quand elle sent l’irritation monter des deux côtés qu’elle tente de se ressaisir. Éviter d’envenimer le conflit. Pas pour l’ancienne victime, mais pour l’homme de sa vie. Car elle le connaît, sous ses allures impassibles, il ne va pas aussi bien qu’il le laisse croire. Plutôt que lui rétorquer, l’homme d’affaires choisit de se tourner vers la plus faible des deux âmes. « Félicitations, tu arrives encore à embobiner ton monde. Je me demande comment tu peux te regarder dans une glace. » et là, pour la première fois, elle retient ses ardeurs. Elle retient sa colère, Ella, face à autant de mauvaise foi. Cet homme agit comme si elle avait joué avec ses sentiments, alors qu’elle a seulement accepté ses offrandes. Il savait qu’il l’achetait avec ses cadeaux, il pensait juste être celui des deux qui avait le contrôle, mais c’était faux. Elle voudrait lui balancer tout ce qui traverse son esprit, là, tout de suite. Mais elle se contient. Encore une fois, pas pour lui, mais pour son médecin. Pour l’homme qu’elle aime. « Viens, on s’en va. » qu’elle demande à Ambroise, sa main cherchant la sienne, presque dans un réflexe. Un instinct trop naturel, pour qu’elle le retienne, même à cet instant. Même alors qu’elle a si peur de le perdre pour de bon. Elle tente de faire abstraction des menaces à peine assumées de celui qui vient peut-être de tout briser. Non, tout ce qui lui importe, c’est de se retrouver seule avec l’être aimé. Seule avec Ambroise et, enfin, savoir tout ce qu’il ne dit pas. Tout ce qu’il doit penser tout bas. À peine à l’extérieur, hermétique à la brise glacée venue les fouetter, elle se tourne vers l’élu de son cœur. « Est-ce que… ça va ? » question ridicule, question maladroite. La boule au ventre, le nœud à l’estomac. Terrorisée, Ella.

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Message Sujet: Re: Chasseur d'ombres (Ella)   Chasseur d'ombres (Ella) Empty Dim 7 Fév - 22:04

Il s’était toujours dit qu’il se contre-fichait de qui Ella avait été pendant toutes ces années, éloignés l’un de l’autre. Que seul le présent comptait dorénavant. Leur présent. « Ca suffit », il menaça et gronda, et soudain les iris trop expressifs se mirent à lancer des éclairs. Ils se calmèrent d’un seul coup quand les doigts de son double surprirent les siens pour venir s’y agripper, fort – et lui de ne plus jamais, jamais avoir envie de les lâcher.  

Il s’était toujours dit que, peu importait ce qu’elle avait fait, qui elle avait fréquenté, aimé, détesté. Soit parce qu’il avait en elle une confiance inconditionnelle – et quand bien même, il serait à tout jamais incapable de la détester, puisqu’il l’aimait infiniment. Soit parce qu’il était celui des deux, Ambroise, qui resterait incapable de se regarder en face dans un miroir, le jour où il aurait le détail de tous les moments où il avait eu l'opportunité de l’empêcher de glisser dans ses abimes. Car après un interlude aveugle, il ramassait les petits morceaux de son amour usé. Il faisait de son mieux, à coups d’optimisme indéfectible, de patience, de confiance (en elle, en eux) ; sans jamais savoir si cela suffirait. Vouloir la protéger coûte que coûte quand il était incapable d’aborder les sujets les plus fâcheux, les sujets indispensables pourtant, ceux qui passaient bien avant un passé qu’il imaginait tout à fait passé... Quelle hypocrisie, peut-être. Mais comment aurait-il pu faire autrement ? Il veillait, entêté, écervelé, sur l’être indispensable à sa vie, et réagissait au quart de tour, les émotions toujours décuplées par chacun des actes et des mots d’Ella.

Comme Ella savait aussi faire redescendre en un claquement de doigts la colère féroce qui naissait quand on cherchait à la prendre elle à la gorge. La nuit avait terminé de tomber tant bien que mal sur la ville toujours polluée de ses néons et luminaires, et avec elle, s’imposaient plus sérieusement les flocons glacés. Quelques pas ni pressés ni paresseux sur le béton humide, il n’avait pas envie de s’éterniser devant cet établissement qui avait finalement été, de toute évidence, une mauvaise idée. Il entraina Ella à son rythme, les doigts toujours solidement liés, quitte à bientôt s’engourdir.

« Ca va », il affirma spontanément, sans trop savoir à quel point la réponse abrégée était un mensonge, sans que les prunelles ne cessent de vaguement contempler les véhicules pressés. Il devinait son souffle cristallisé par le froid et ses angoisses... Et le fait était qu’il était incapable de figer ses pensées sur un point bien précis. Il ne pensait à rien, Ambroise. L’air d’abord interdit, renfermé, concentré sur Dieu sait quoi, conscient néanmoins qu’Ella lisait en lui comme un livre ouvert. A elle, il ne savait rien cacher. Il n’y avait jamais rien qu’un seul foutu sujet qu’il était incapable d’aborder, avec elle. Et toujours, il y avait cette peur bleue et acide qu’elle disparaisse avec un courant d’air imprévu. Il avait confiance en elle : mais pas elle. Il se dit soudain, l’urgentiste sans cesse en retard quand il s’agissait de l’amour de sa vie, qu’il aurait dû le faire taire d’emblée. L’homme aux allures si importantes n’était personne pour avoir le droit d’immiscer le moindre doute dans l’esprit blessé sous sa carapace. Il n’avait juste pas le droit.

C’était à tout cela qu’Ambroise pensait, incapable pourtant de figer des mots bien précis. Alors qu’il sentait Ella prise d’une terreur dont il avait du mal à saisir toute l’ampleur. Ella ne se défendait pas bec et ongles, ne jurait pas au nom d’allez savoir quoi qu’elle ne mentait pas, ne se précipitait pas en explications comme un condamné qu’on aurait pris sur le fait... Ella serrait sa main, un peu plus fort, et lui laissait le temps de répondre. Il se dit que plus jamais il ne laisserait quiconque insinuer qu’elle était une menteuse. Il n’empêche que la confiance indestructible n’avait pas empêché les nœuds de se former dans l’esprit soucieux.

Et puis une éternité plus tard, il soupira : « T’es pas obligée de m’expliquer. » Parce qu’il s’était toujours dit que cela ne regardait qu’Ella, qu’il croyait en elle plus qu’en quiconque, lui-même y compris, qu’il pouvait faire taire sa curiosité déplacée pour se contenter de mordre à pleines dents les moments de bonheur qui s’offraient à eux... Il tuerait, Ambroise, pour que jamais ne se fanent ses sourires. Et il était doué dans l’art de garder des œillères. Et la culpabilité, comme un acide à feu doux, de l’avoir laissée, hurlant trop fort pour qu’il puisse se sentir légitime d’exiger quoi que ce soit.

T’es pas obligée, mais j’aimerais bien.
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Message Sujet: Re: Chasseur d'ombres (Ella)   Chasseur d'ombres (Ella) Empty Mer 10 Fév - 20:29


☾ ☾ ☾
{ chasseur d'ombres }
crédit/ tumblr ☾ w/@Ambroise Marshall
À l’extérieur, le silence,
mutique,
paralytique,

à l’intérieur, l’effervescence,
la fusion de tout ce qu’elle ressent,
tout ce qu’elle ne saurait lui dire,

tout ce qui pourrait les détruire.


Elle sait, Ella. Elle sait qu’elle devrait lui livrer ses états d’âme. Lui demander les siens, les connaître. Le rassurer. Le soulager. Lui rappeler, seulement, comme elle peut l’aimer. Comme elle veut passer le restant de sa vie à ses côtés. Elle voudrait tant, la tourmentée, trouver les mots qu’il aurait besoin d’écouter. Mais elle n’y arrive pas. Ne se résout pas. Plongée dans un silence hermétique, le corps tremblant dans l’air glacial de la nuit, mais moins encore que son esprit est fébrile. Que son cœur, lui-même, se sente si démuni. Si fragile. Vulnérable, sujette à celui qui l’a asservi. À cet homme pour lequel elle pourrait donner sa vie. Une vie… qui a si peu de mérite.

il n’y a plus que lui,
il n’y a toujours eu que lui.

Tout ton être est focalisé sur Ambroise,
sur la fréquence de ses pas,
sur ce contact qu’il ne lui interdit pas,
sur ses respirations qui s’échappent,
et enfin, sur sa voix.


Sa voix qui lui assure que ça va, quand elle est sûre du contraire, Ella. Tout doit se chambouler dans sa tête. Doivent s’enchaîner les hypothèses, les et si à coups de peut-être. Il doit imaginer le pire… mais le pire, n’est-ce pas la réalité de sa vie ? N’est-ce pas ce qu’elle a fait, encore et encore, durant toutes ces années ? Silencieuse, à nouveau, l’écorchée vive ne sait quoi dire. La gorge nouée l’empêche de parler, l’encéphale angoissé surtout l’empêche de s’expliquer. Justifier l’inqualifiable ne lui semble pas approprié. Moins encore avec l’ange qui se tient à ses côtés. Tout ce qu’elle voudrait, là tout de suite, c’est lui avouer sa culpabilité. Lui confesser toute sa cruauté. Lui révéler, enfin, la terrible personne qu’elle est. Sans chercher à se dédouaner, sans vouloir se préserver. Mais elle en est retenue, Ella, par ce qu’on appelle l’amour. Par cet instinct de protection que, si elle n’a pas envers elle-même, elle a envers l’homme qu’elle aime. Envers le couple qu’ils ont choisi de former, et toutes les promesses qu’ils se sont murmurés ou criés, tous les engagements inavoués, toutes ces évidentes éternité. Pour eux, tous entiers.

Pour eux, à jamais.

C’est après un temps inconnu, qui paraît durer des heures entières, qu’Ella entend à nouveau le son de la voix qu’elle préfère dans l’univers. Une tentative pour la rassurer, lui affirmer qu’elle n’est pas obligée de lui expliquer. Pas obligée, non, jamais. De rien, avec son médecin. Il ne veut jamais lui forcer la main, jamais la contraindre. Il veut, toujours, toujours, son bien. Elle ne sait pas, non, ce qu’elle a fait pour mériter cela. C’est tout l’opposé qu’elle mérite, Ella. Une inspiration plus tard, elle essaie de retrouver l’usage de sa propre voix. « Je crois qu’il t’a dit l’essentiel. » qu’elle conclue de cette voix amère. Et, dangereusement, se renferme. Elle aurait sûrement déjà pris la fuite avec un autre que lui. Elle aurait tourné les talons pour prendre un autre chemin que le sien. Mais elle n’aurait jamais entrepris ce chemin, avec un autre que lui. Elle n’aurait jamais été capable d’aller si loin. La camée secoue la tête avec fébrilité, tente de remettre de l’ordre dans ses idées. Et, surtout, d’apaiser son cœur prêt à se déchirer. « Ma voiture, c’est bien la sienne. » Et elle en était presque fière. À présent honteuse, elle poursuit, le ton blême. « J’ai fait ce qu’il a dit. Tout ce qu’il a dit. » Et bien pire. Bien pire que tu ne l’imagines. Bien pire que tu pourrais le croire possible. Si tu savais. Si tu savais, Ambroise. « À lui… et à d’autres aussi. » Elle n’ose même pas le regarder. Elle ne supporterait pas de voir de la déception dans les iris de l’être aimé. Ou de la colère, ou de la rancœur, ou du dégoût, ou de la haine. Non, elle ne supporterait rien de tout cela, Ella, elle le sait. Elle préfère y échapper, comme elle a passé l’intégralité de sa vie à se dérober. À vouloir se délivrer, d’une obscurité qu’elle n’a jamais essayé d’affronter.

J’aimerais seulement te dire,
que tu n’as rien à voir avec lui,
rien de commun avec chaque victime,

je voudrais te le crier,
mais je ne l’ai pas mérité,
je ne t’ai, jamais, mérité,

et je le sais.


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Message Sujet: Re: Chasseur d'ombres (Ella)   Chasseur d'ombres (Ella) Empty Dim 14 Fév - 19:26

Il avait osé demander et pester : comment oses-tu encore te regarder dans une glace ? Mais le fait était qu’Ambroise ne se lassait jamais de la détailler du regard. Le matin comme le soir, assoupie ou vivant très fort, éblouissante même sans s’apprêter, à chaque volet du grand éventail de ses émotions. La couver de prunelles très amoureuses, la protéger de loin et de près, la déshabiller bien moins sagement rien qu’avec les iris, partager un élan de complicité évidente. Face à face, qu’elle s’y attende ou non, les yeux dans les yeux, ou à travers le reflet d’un miroir. Elle était belle, Ella, et souvent il cherchait la recette de la solution miracle pour qu’à son tour, elle en prenne conscience elle aussi. Qu’elle se trouve elle-même lumineuse et magnifique comme lui ne se lassait pas de le ressentir : à chaque regard.  

Alors évidemment, le médecin pourrait légitimement rétorquer et s’indiquer qu’il n’avait que raconter d’infâmes sornettes, qu’elle était très belle Ella, dans chacune des dimensions que la beauté pouvait impliquer, qu’il avait été un parfait abruti de ne pas s’en rencontre compte. Ça, et lui interdire de se flageller devant lui, de se salir à coups d’adjectifs qui seraient tout sauf adaptés à la lumière qu’elle mettait dans son existence. Dire que, tant pis si ça n’était qu’une histoire de dollars – le pognon était par définition dégoûtant – et qu’il ne cautionnait pas bien-sûr, mais tant pis, c’était de l’histoire ancienne. S’exclamer qu’il comprenait maintenant pourquoi elle n’avait jamais répondu à ses interrogations, curiosités lancées sans trop d’insistance, quand il se demandait tout ce qu’elle avait fait, ces dernières années ; comment elle payait le loyer, l’assurance de la voiture, les courses, sans poursuivre le théâtre. Et surtout, surtout, lui jurer très fort que rien ni personne ne le laisserait jamais envisager le fait qu’elle puisse être une menteuse.

Il écouta les mots limpides, et se retrouva pourtant bien maladroit lorsque fut venu le moment de répondre. Il s’était dit depuis des mois à présent qu’il était prêt à affronter les tempêtes ou les marées, pour elle et avec elle. Qu’elle était la femme de sa vie, avec les cauchemars collés à son ombre et ses casseroles, tant pis. Que rien ne serait jamais insurmontable, à condition d’être à deux, car il n’y avait qu’en eux deux qu’il croyait, lui qui s’était contenté jusqu’à présent de se laisser guider par une existence facile et sans vague. Ça avait été différent pour elle. Ella s’imaginait obscure, quand elle n’avait été coupable au fond que d’avoir cruellement manqué d’amour et de mains tendues aux moments indispensables. Forcément, cela bouleversait un destin. Il s’était juré et promis de ne jamais, jamais la laisser tomber, parce qu’à deux, ils seraient invincibles. Parce qu’il avait plus que confiance : il avait foi en elle. En eux. Naïvement, mais tant pis, puisque d’une force titanesque.

Les aveux tombaient... Et tandis qu’il aurait dû réagir, peu importe comment, ses pensées n’avaient de cesse de s’affoler autour de l’unique conviction qu’elle était la femme de sa vie. Avec ses fantômes, ses peurs, ses erreurs. Toute entière.

Et si Ambroise était sûr et certain de l’aimer jusqu’à la fin des temps, il débutait encore, dans le rôle de l’amoureux capable d’affirmer l’avalanche de sentiments. Il était habituellement celui des deux qui parlait et rassurait, d’un aplomb solide, mais cette fois, pour une fois, il avait envie de se laisser porter. Il y avait les convictions inébranlables d’un côté, les peurs idiotes de l’autre. Elles, elles étaient responsables d’un nouveau silence prolongé, du masque à travers lequel elle saurait évidemment lire, d’un besoin d’explications, de promesses. Il y croyait, en ses promesses.

Il avait serré à peine plus fort ses doigts contre les siens, puisqu’il n’était pas question de lâcher l’étreinte des phalanges engourdies et rougies par le froid, avant de l’entrainer à l’abri sous la toile laissée déployée d’un magasin fermé. Là, face à elle, plutôt que d’attendre qu’elle finisse par relever vers lui cette moue contrariée, il aurait pu promettre que tout allait bien, l’embrasser comme au cinéma, chercher à la faire rire jusqu’à faire disparaitre pour de bon l’air chagriné. Etait-ce si mal que d’avoir besoin, pour une fois, l’entendre raconter ses histoires et surtout promettre que leur histoire n’aurait jamais rien à voir ? Il était incapable d’être en colère contre elle – contre celui qui aurait posé ses mains sur elle comme un vulgaire morceau de viande alors qu’il se faisait rouler dans la farine, en revanche, oui. Il attendit un peu, donc, puis demanda seulement : « Y a-t-il autre chose que je devrais savoir ? » Le ton pas plus haut que d’ordinaire, simplement planté là, à attendre d’elle qu’elle lui raconte un peu, quand il avait toujours plutôt essayé de ne jamais la brusquer. Incapable de toute manière de la regarder autrement que de ces yeux très amoureux. « Je crois que j’ai besoin que tu me racontes avec tes mots à toi. »

Parce qu’il n’était pas question de se contenter d’un horrible personnage capable de la traiter de menteuse,

Parce que je suis prêt à me lancer éperdument dans cette vie avec toi et à ne plus regarder que devant nous, et que j’ai besoin que tu me dises encore que toi aussi,
que tu m’éclaires sur tes blessures pour que tu ne sois plus jamais seule à les panser.  
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