(les opales en peine) ft ivy

L’été était désormais bien installé sur l’immensité New-Yorkaise. Tous les quartiers sont maintenant étouffés par la chaleur, le béton qui avait envahi les rues depuis plusieurs decénies devenait brûlant sous les impitoyables rayons du soleil. La nuit, quand l’obscurité avait gagné la ville, le mercure peinait à redescendre ce qui rendait l’atmosphère parfois difficilement respirable. Il n’y avait que sur les bords de l’Hudson que l’on pouvait trouver un peu d’air et un semblant de fraîcheur. Elle n’y avait pas été parce que cela demandait de se rapprocher bien trop de Manhattan ou de Brooklyn, plus qu’elle n’en était capable. Le Queens était un peu moins bien loti de ce côté-là que les précédents endroits ou elle avait habité, on ne pouvait se trouver au bord de l’eau qu’à l’extrême nord du quartier et c’était un peu loin pour Ivy après sa journée de travail. Surtout que, depuis son retour de Los Angeles, en début d’année, elle peinait à s’éloigner de chez elle seule, mais elle ne cherchait pas la compagnie pour autant. C’était paradoxal, signe qu’elle était toujours aussi perdue. Ce n’était pas dans ses habitudes d’être dans la rue si tard le soir. Normalement, elle terminait le travail aux alentours de 20h ce qui lui permettait de rentrer chez elle avant que les rues du Queens ne deviennent vraiment mal famées. Ce soir, après son service, elle était restée avec Joseph, au café, ils avaient discuté pâtisserie, recettes, innovations. Ils avaient fait de tests, Jo’ avait même laissé Ivy cuisiner sa propre création. Pour le moment juste pour eux, mais peut être que bientôt, il lui laisserait confectionner des mets à proposer aux clients du café plus régulièrement et Ivy était pleine de joie à cette idée. Cela faisait longtemps qu’elle n’avait pas ressentie une émotion aussi positive s’emparer de son être et elle s’était laissée emporter. C’est ainsi qu’elle se retrouvait, au beau milieu de la nuit, à marcher, tête basse dans la rue. Elle avait refusé d’abuser de la bonté de son patron qui, conscient des failles de la jeune femme, avait proposé de la ramener chez elle. En pleine journée, déjà, elle marchait la peur au ventre, ne prenant pas le temps de s’arrêter pour observer son environnement. Hors de chez elle, ou du café, elle ne se sentait jamais en sécurité qu’elle soit seule ou non, elle était toujours sur le qui-vive, prête à prendre la fuite en cas de danger, réel ou supposé, si ses jambes le lui permettaient puisqu’elles avaient la fâcheuse tendance de la lâcher et de se tétaniser quand la blonde mourrait d’envie de fuir. De nuit c’était pire, elle filait, tête basse, tous ses sens aux aguets, elle surréagissait au moindre bruit même s’il ne s’agissait que d’un chat qui s’enfuyait à grand fracas entre les poubelles d’une ruelle. Elle priait toutes les forces divines pour ne pas faire de mauvaises rencontres. Ou même pour ne pas faire de rencontre du tout. Elle aurait dû savoir que le ciel n’était pas avec elle, ni ‘aujourd’hui, ni hier, ni jamais. Son corps heurta de plein fouet une personne qui marchait dans l’autre sens dans la rue. Elle vacilla, tout le corps de la blonde s’était crispé à ce contact brutal. Elle déglutit difficilement avant de porter le regard sur la personne face à elle, espérant encore qu’elle réussirait à s’en sortir sans difficulté. Elle allait prendre la parole pour se confondre en excuse, probablement en bégayant à cause de nervosité, mais la personne face à elle, pris la parole avant elle. « Désolée.»   Une petite voix fluette qui n’avait rien d’impressionnant et surtout, un timbre qui n’était pas inconnu pour Ivy. Elle braque son regard sur la jeune femme face à elle, menu, jolie, délicate. Elle la connaissait, Tehani. Voilà des années qu’elle ne l’avait pas vu. Déjà parce qu’elle avait disparu pendant 14 longs mois, cachée à Los Angeles ou plutôt enfermée et ensuite parce que les deux jeunes femmes, malgré des affinités particulières, avaient deux vies bien différentes. Ivy était gênée de se retrouver face à une vieille amie. Elle était partie sans donner de nouvelles, au début elle ne pouvait pas, certes mais ensuite… Elle avait laissé beaucoup trop de monde en plan, même sa propre mère, et elle culpabilisait chaque jour un peu plus. Elle ne savait pas par ou commencer. Retrouver des connaissances passées était difficile pour elle, encore plus que de rencontrer des inconnus finalement, car ces personnes qu’elle avait côtoyées dans sa ‘vie d’avant ‘, méritaient certainement une explication pour son silence, surtout quelqu’un comme Tehani. Mais Ivy n’était pas capable de raconter son histoire, c’était trop dur encore, elle préférait rester dans le dénie. La jolie Tehani n’avait pas le visage jovial. Ivy savait à quel point elle avait pu souffrir depuis l’enfance, dû à son mode de vie forcément particulier mais, elle avait pleuré, Ivy en était certaine, elle tentait peut-être de le cacher mais la blonde sentait ses choses là. Mettant de côté son malaise, Ivy pris enfin la parole. « Tehani ?! Qu’est ce qui t’arrive ? Ça n’a pas l’air d’aller... » Comme si elle s’était quittée hier, Ivy s’empressa de demander à son amie ce qui ne va pas, peut être une drôle de façon de procéder. Peut-être que Teha’ lui en voulait d’avoir disparu ? Elle le saura bientôt de toute façon.