l'écume des jours (julius)

ambiance feutrée de début de soirée. silhouette élancée sillonne entre les petits groupes qui commencent à s’amasser devant la petite scène. tu es dans ton élément, hazel. c’est ton antre. moindres recoins que tu ne connais que trop bien. repère depuis des années. l’unique endroit où tu laisses couler ta peau de serpent à terre. mise à nue devant la musique, notes qui réchauffent ton âme. ta voix que tu laisses entendre à ce public d’un soir. enlace ton être de toute ta splendeur. la véritable blonde se retrouve ici, rare sont ceux qui ont pu l’apercevoir par delà le voile. il y a du beau monde ce soir, tes ambitions pourtant au placard. tu croises de tes yeux charbonneux, le galbe halé de celui que tu vas rencontrer. léger sourire étire tes lippes. il est bien là, le marin. boucles salés essuyés par le vent, regard perdu dans la marée humaine qui écume la salle. est-ce qu’il t’a seulement remarqué, julius ?
un moment que la mer ne t’avais pas ramené vers moi,
mon ami fidèle.
tu arrives à quelques pas de lui, sagement assis au bar. la guitare, amplifiée par l’électronique, entre en scène. derrière vous, en fond. à sa hauteur, tu passes doucement ta main le long de ses épaules sculptées en te penchant à son oreille. « de retour au port, matelot ? » murmures étouffé avant que tu lui claques un baiser sur la joue, tu glousses légèrement en prenant place à ses côtés. tu fronces les sourcils en croisant tes jambes fuselées, remarquant le verre qui lui fait face. « en plus, tu bois sans moi ? » tu roules des yeux. « c’est nouveau, ça. » tu appelles le serveur bien occupé qui te fait signe qu’il viendra à toi dans quelques instants. le regard teinté de malice, tu croises les orbes du marin. « je veux tout savoir. les moindres détails de ta vie. » étrangement, tu ne tires que peu d’avantage dans cette relation. peut-être un petit pourcentage de son blanchiment d’argent dans le casino dans lequel tu travailles, un jour. seulement, là n’est pas l’objectif de la soirée. véritable parenthèse enchantée dans ta vie décadente depuis quelques temps. il a ce pouvoir là, l’homme vénérable des mers.

- l’écume des jours -

— ft @Hazel Fletcher

Invitation inattendue de la sirène des casinos. Impossible de lui refuser quoi que ce soit, même s’il l’avait voulu. Ses grands yeux marrons et ce regard qui envoute. Un simple signe de la tête de l’ensorcelé en guise de réponse. Et le besoin de sortir, de voir des gens et de se changer les idées, plutôt que de faire les cents pas à bord de son navire. Pressé de retrouver âmes qui vivent, et ce liquide ambrée, Julius est à l’heure. Pour la toute première fois, en trente-et-un ans. Mais, elle, n’est pas là. Il ne la voit pas. Et il a besoin d’un verre.

Les riff de guitare retentissent, enfin. Tout comme Hazel. Elle qui glisse sa main autour des épaules du marin. Belle amie. Les lèvres de Julius s’étirent. « Tu m’manquais trop, tu sais bien... » qu’il admet, à sa manière. La vérité sous un fond humoristique. Il n’y a, pourtant bien, que les femmes de sa vie, soeurs et amies, pour le ramener au port. Toujours. Entre deux odyssées.

Hazel embrasse sa joue avant de s’asseoir près de lui. Sa mine change. Des propos accusateurs. Le gamin a l’impression d’se faire disputer. Il fait la moue et hoche la tête. « Ah ça, c’est parce que, tu sais, mon ange.... T’étais en retard. Alors, j’ai cru qu’tu m’avais posé un lapin. Et donc, j’ai eu besoin d’boire pour oublier ! » qu’il explique le plus sérieusement du monde. « Mais, attend, on va y remédier tout d’suite... » Il termine d’une traite le verre, puis, cherche des yeux la barmaid qui l’a servi un peu plus tôt. Julius lui a remis un pourboire très généreux dès le départ dans l’espoir de ne pas avoir à attendre, et se faire servir rapidement, le reste de la soirée. Pour ça, et parce qu’elle lui a offert une jolie vue, en se penchant pour prendre sa commande.

Le grand brun sourit à la serveuse lorsqu’elle lui emmène la même chose, sans qu’il n’ait eu à le lui préciser. « Qu’est-ce que tu veux boire ? » C’est le pirate généreux qui offre. L’argent sale sert à être dépensé, et à gâter un peu les gens qu’il aime. D’autant plus qu’il n’est pas un grand consommateur, loin d’être matérialiste. Il ne s’intéresse pas aux nouvelles technologies. Il n’y connaît pas grand chose, même. Jules, il rigole lorsqu’ils reprennent leur conversation, et que son amie demande de ses nouvelles, exigeant de tout savoir. « J’sais pas trop par où commencer. J’ai l’impression d’être dans un épisode de Melrose Place... » Sa vie est une aventure. Un téléroman. Les aventures de Sinbad Julius le marin. Sans parler de l’incident d’Isabella, qui lui a brisé le coeur. Boire pour oublier, qu’il lui a dit plus tôt. Julius qui n’aime pas se confier. Il la lui retourne, en espérant qu’elle oublie ensuite qu’il n’y a pas vraiment répondu. «  Et toi, ça va ? »