Sujet: U.E.S / Un long dimanche de victuailles [Ada & Ismaël] Jeu 28 Nov - 22:32
Le son des cordes enveloppe l'air lourd comme dans les profondeurs d'une mine de plomb. Un dimanche pas tout à fait comme un autre. Est-ce que tu es entrée dans une salle de bal ou bien dans la salle à manger de tes aïeux, tu te demandes, le sourcil flirtant dangereusement avec la ligne de tes cheveux. Il fallait que ce soit le jour où t'as une bonne grosse gueule de bois. Face à ce spectacle irréel d'argenterie, de nappe en soie et de bougies vieillottes tu repenses à ta nuit alcoolisée, t'essayes de te souvenir de ce que t'as fait. T'as embrassé un nouvel inconnu, un réveil difficile dans ses draps, le mal de crâne, encore une fois c'est à peu près tout ce dont tu te souviens. Tu crains Ada, tu couches avec n'importe qui et t'es même pas foutue de te souvenir comment c'était, s'il a mis une capote, ce genre de truc essentiel. Tu vas finir avec la syphilis, c'est tout ce que t'auras mérité. En vrai, ça commence à te travailler, pas de faire ça, mais de ne même plus savoir si t'as déjà couché sans être ivre. Tu coups, t'as couru jusque chez toi te doucher et changer et t'es arrivée pour le fardeau dominicale avec à peine une ou deux heures de retard.
- Bonjour Adama, contente de voir que tu nous fais grâce de ta ponctualité légendaire. Le père... - C'est bon maman... T'es pas d'humeur, y'a un pic-vert qui s'est logé sur ta tempe. - Ne commence pas sur ce ton... Et cette robe ne va pas du tout, vas te changer, je t'ai mis une tenue sur ton lit. Nous avons un invité !
Tu grommelles et après un détour par la cuisine pour demander à Clotilde l'une de ses recettes miracles pour les cas désespérés de ton genre, tu pars donc enfoncer ton corps menu dans la robe que ta mère a acheté pour l'occasion. Elle t'arrive aux genoux, il n'y pas de strass, de plumes, ou autres conneries. Elle est d'un rouge profond, une couleur que tu adores. Et... Non quand même, elle est un peu trop habillée pour un simple repas et tu te sens un peu comme un sapin de noël, juste sans la guirlande lumineuse. C'est là que tu réalises qu'ils ont invité un jeune homme d'une bonne famille, bien sûr. Dans l'espoir de quoi au juste ? Ce n'est plus le dix-huitième siècle, si jamais ils n'ont pas remarqué.
Coiffée, maquillée et affublée de jolis bijoux - que t'as choisi volontairement bling-bling pour agacer ta mère, tu les rejoins dans le salon tel le faire-valoir qu'ils voudraient que tu sois. Ils te trouvent magnifique. Tu l'es, c'est pas pour autant que t'as pas l'air con. Cette famille est pathétique, faut vraiment que tu te tires un jour. Il y a comme un bruit de fond qui manque à l'appel, quelqu'un pour pointer les évidences de sa petite voix criarde, une observatrice démoniaque aux atours angéliques. Ta sœur. Et il n'y avait bien que quatre couverts sur la table.
- Khion n'est pas là ? - Non, elle est à un anniversaire. Tu dis : " Dommage." Tu penses : " Bon débarras."
Il sonne. Ton père te regarde, sévèrement. - Enlève moi ces boucles ridicules. Oui, Adama, vas mettre tes perles.
Tu hausses les épaules. C'est dingue comme tu t'en fous. Mais tu leur obéis, t'as pas envie de chercher le conflit en ce moment. C'est rien qu'un repas débile de toute façon, tu vas faire la causette et puis tu rentreras chez toi. Rien de plus. Dans le couloir en direction de ta chambre, tu les entends saluer leur invité. Tu te demandes qui ça peut bien être. C'est là que t'entends ta mère dire " Mais vous n'êtes pas Timothée Sartier ?!" et le silence éloquent de ton père. Tu te marres en entrant dans ta chambre pour changer de boucles, d'où tu n'entends pas la suite. Ils se sont plantés d'invitation en plus ?
Deux minutes après tu les rejoins dans le salon où ils ont pris place pour l'apéro. Ton père, le visage fermé et mauvais sert les alcools, tu sens immédiatement qu'il est furieux face à cette déconvenue. Ta mère a ses petits airs coincés, la bouche pincée qui témoignes de son énervement et t'as du mal à contenir ton amusement. Surtout quand elle t'annonce la couleur.
" Ismaël voici Adama, notre fille. Adama, Ismaël Sartier." Tu te mords la lèvre pour ne pas glousser. Ismaël Sartier, le gars qui sort de prison pour meurtre, tout pour plaire à tes chers parents complètement étroits d'esprit. La famille Sartier est bien plus réputée que la votre, la réputation du fils aîné par contre... On dirait bien que leur petit plan à la con est tombé à l'eau tout seul. Et rien que pour ça, t'as envie de te la jouer très premier degré, à fond dans ton rôle de petite princesse qui veut se faire passer la bague au doigt pour faire plaisir à ses vieux. Bon, pas dit que tu ne changes pas de stratégie d'ici dix minutes. Doucement, tu tournes tes beaux yeux verts vers l'indésirable, avec ton sourire le plus faux et tu lui tends ta main. T'as le regard malicieux.
Sujet: Re: U.E.S / Un long dimanche de victuailles [Ada & Ismaël] Jeu 28 Nov - 23:16
- tu vas y aller à ma place, hein ? - c'est mort. - isma... vas-y, rend moi ce service. j'peux pas m'pointer là-bas, je te jure. - c'est pas mon foutu problème si t'as déjà baisé la future mariée hein. qu'il crache en ricanant le Sartier, les yeux rivés sur le téléphone portable de son frère. c'est le profil instagram de l'heureuse élue qu'il fait défiler sous ses doigts. c'est qu'elle est sacrément c-a-n-o-n en plus de ça. tim soupire en lui arrachant l'appareil des mains. ismaël croise les mains derrière son crâne et se laisse retomber dans le fauteuil de sa chambre. - tu crois que j'ai pris l'temps de lui demander son nom. - oh ça va, c'est pas si grave. au pire, y'a peut-être déjà un mioche en route. - stp, fais ça pour moi... imagine comme ça fera enragé les vieux, et maman.
(...)
c'est seulement parce qu'il a imaginer le visage de constance virer pivoine qu'il s'est pointé à ce repas. le corps enfermé dans un costume sur mesure. il a sonné à la porte, a reçu les éloges escomptées. non, il n'est pas timothée. oui, il est bien le fils aîné, indigne héritier d'une fortune à huit chiffres -peut-être neuf, personne ne le sait. c'est avec toutes leurs bonnes manières qu'ils l'ont tout de même accueilli, les parents de la belle adama. il a complimenté la mère, puis leur demeure clinquante, avant que ne l'oblige à s'asseoir pour déguster un bourbon plus vieux que lui. elle ne devrait plus tarder, c'est ce qu'ils lui avaient dit en chœur avant que la jeune femme apparaissent dans son champ de vision. Aussitot il se lève, c'est de convenance. Son visage se pare de son plus beau sourire, le plus carnassier aussi. Ismaël voici Adama, notre fille. Adama, Ismaël Sartier. c'est avec difficulté qu'ils font les présentation, il tend la main le blond pour se saisir de celle de l'héritière. Il garde sa main trop longtemps dans la sienne, ne prive pas ses yeux clairs de dessiner le contour de son visage, puis d'apprécier la rouge de sa robe de couturier. Elle a tout d'une princesse. Le genre de fille qui ne peut pas épouser un roturier. C'est que les grandes familles comme les leurs, ne peuvent pas se permettre de voir un héritage dilapider entre de mauvaises mains. tout le plaisir est pour moi,[/i] qu'il prononce. il attend qu'elle prenne place avant de s'asseoir de nouveau, récupérant entre ses doigts le verre servi plus tôt. c'est la mère qui réclame son attention. je, enfin, nous pensions que timothée se joindrait à nous... qu'elle lui lance, laissant paraître dans son regard une inquiétude immensse. ma mère s'est dit, que je ferai un meilleur parti, il sourit encore, puis se penche légèrement vers eux comme pour l'avouer un secret, puis, entre vous et moi ... elle avait un peu honte de laisser son cadet venir au repas avec une gueule de bois monumentale... il a un regard en coin pour leur fille, puis reprend, le pauvre ne se souvient même plus de ce qu'il a fait hier soir, vous comprenez ... il rit, d'un rire faux rempli d'hypocrisie, si c'est la case prison qui vous fait peur, ne vous en faite pas, ça fait cinq ans que je suis dehors, et mon père s'est chargé de faire disparaître toute trace de mon casier judiciaire. seules persistes les rumeurs et les ouï-dires. faux, absolument tout est faux. son casier judiciaire lui collera au cul jusqu'à la fin de sa vie. tout l'argent de son père ne serait suffisant à effacer la dette qu'il doit à la vie.
Sujet: Re: U.E.S / Un long dimanche de victuailles [Ada & Ismaël] Ven 29 Nov - 14:50
Il se fout de ta gueule ou quoi ?
[...]
Mèches blondes savamment ébouriffées, visage anguleux, yeux bleus perçant et ce sourire en coin, charmeur, sa main qui s'attarde dans la tienne. Pourquoi ça te semble familier ?
Avec son costume parfaitement ajusté et ses manières pompeuses de gentleman, t'es pas tout à fait dans l'image que tu t'étais faite du meurtrier Sartier. Est-ce que ça te t'étonnes ? Pas tant que ça tout compte fait, tout le monde joue un rôle. C'est ça qui est bon aussi, personne ne sait ce que pense l'autre ni à quoi il joue, le mystère est partout. L'essentiel c'est que ça fasse rager tes parents, qui n'en démordent pas d'ailleurs et rien que pour ça, tu lui offres ton plus beau sourire durant les présentations.
- Je, enfin, nous pensions que Timothée se joindrait à nous... - Ma mère s'est dit, que je ferai un meilleur parti. - Oh, et bien vous êtes direct, vous !
Elle est toute affolée ta mère. Tu le donnes en mille que si ça avait été Timothée elle aurait été mielleuse comme pas possible, faisant tout pour le ferrer quitte à lui faire signer un contrat de mariage aujourd'hui même. Tu sens dans le regard qu'elle te jette et celui plus dur de ton père qu'il n'est pas le candidat que tu devrais choisir. Quant à toi, tu n'arrives pas à te départir de ce sourire, cette situation te délecte.
Ils sont servis en alcool et Clotilde t'as apporté sa petite solution miracle anti-gueule de bois dans une tasse opaque, le genre de truc qui agace ton père parce que la tasse n'est pas très jolie. Enfin c'est un grand mug quoi. T'as prétendu que c'est un Chaï latte lorsque ta mère t'as demandé, ajoutant que tu n'avais pas envie de boire d'alcool. Et c'est avec ce breuvage que tu manques de t'étouffer lorsque votre invité avoue que son frère ne pouvait se présenter à eux, vu son taux d'alcool dans le sang tout en te regardant en coin. Timothée Sartier. Quelques bribes indécentes de ta nuit te remémorent le goût de ses lèvres et le grain de sa peau. Il ne se souvient pas plus que toi, d'après Ismaël. Ils sont beaux les enfants des riches familles New-Yorkaises ! Il rit, et toi Ada, t'as un beau sourire satisfait. Hormis l'effet de surprise, ça ne t'a pas fait rougir le moins du monde, au contraire, t'es plutôt très fière de toi et ça se voit. Sans le savoir, t'as ruiné leur plan de mariage... Pour le moment. Et de toute façon, t'éprouves aucune honte de tes activités nocturnes, y'a qu'à tes parents que tu le caches.
Et lui, le beau baratineur aux manières impeccables, il continue son petit cirque, ne te laissant même pas le plaisir de mettre les pires sujets sur la table. Il parle de la prison avant que tu n'ais pu le faire, rassure même tes parents. Il se fout de ta gueule ou quoi ? Vraiment tu te demandes à quoi il joue avec son numéro de charme, parce que s'il continue, ils vont de te demander de l'épouser, c'est sûr. Le repas avance, vous passez rapidement à table puis au plat principal et t'as le sentiment qu'ils oublient qui ils ont devant eux, qu'ils t'oublient toi aussi, en passant. T'es carrément laissée de côté, traitée telle une simple spectatrice. Les discussions vont bon train sur ce qu'ils faisaient avant la prison, l'université qu'il a fréquenté, ce qu'il fait maintenant. Ton père ne manque pas de se rappeler ton existence lorsqu'il s'agit de vanter tes rares mérites. Adama est en dernière année à Columbia, à la Business School bien entendu. Une fois diplômée elle rejoindra l'entreprise familiale pour en prendre la tête dans quelques années. Notre fille sera une grande femme d'affaires en plus d'être un excellent parti. T'es un foie gras sur l'étalage d'un marché de noël. Tu pinces tes lèvres en un sourire qui imite discrètement celui de ta mère, pour te foutre de leur gueule à ton tour. Que de perspectives réjouissantes... C'est réellement un dialogue entre lui et tes parents auquel tu assistes et eux, ils sont en train de craquer pour lui... Exaspérant putain.
Tu prends le premier silence qui passe pour t'imposer dans cette conversation et jeter le froid que t'espérais.
- Alors Ismaël, ça fait quoi de tuer quelqu'un ? Je suis curieuse. Tu bats des cils innocemment, sourire faussement aimable.
Sujet: Re: U.E.S / Un long dimanche de victuailles [Ada & Ismaël] Mar 10 Déc - 23:11
Quand il s’en donnait la peine, il avait un charme fou Ismaël. Un sourire à tomber qui plaisait à toute potentielle future belle mère. Il se vendait bien Sartier. S’il le faisait, c’était seulement pour mettre à mal tout ce qu’avait mis en place leurs parents respectifs. Il voulait effacer l’image de Timothée, qu’ils ne gardent plus que la sienne en tête. Qu’il se focalise sur lui, pourquoi pas, qu’il l’imagine comme future beau fils pour ensuite faire tout capoter comme à son habitude. Puisqu’il ne voulait pas l’épouser Adama, sa mère ne le permettrait jamais. Toute personne assez saine d’esprit ne le permettrait pas. Mais le jeu l’amusait, si bien qu’il répondait à merveille aux questions qu’on lui posait. Qu’il acceptait avec joie l’alcool qu’on lui proposait, sans trop en boire, toujours pour faire bien. De discussions en discussions, avec quelques œillades pour Adama, ils passèrent à table. L’entrée, le plat principal. Le sujet de conversation n’était centré que sur lui et sa famille. Sur lui et l’argent de sa famille. Sur lui et sa mère, Constance. Quelques fois ils parlaient de leur fille, comme si elle n’était pas là, ce qui le faisait sourire le blond. Plus que de raison. Il était en train d’avaler une gorgée de vin quand la silencieuse s’exprima, enfin. Alors Ismaël, ça fait quoi de tuer quelqu'un ? Je suis curieuse. Il failli recracher le liquide rougeatre. Se concentra pour le ravaler, avant de lever son regard azur sur la demoiselle beaucoup trop fière d’elle. Il avait ce sourire en coin, celui des mauvais jours et il se racla la gorge avant de prendre la parole. Parce que oui, il allait répondre. Je ne sais pas Adama, je n’étais pas moi-même ce jour là. Qu’il mentait, alors qu’il se rappelait avec exactitude de ce qu’il avait ressenti. C’était prenant, excitant, totalement hors normes. Il n’avait pas pu s’arrêter de cogner ce jour-là, ils s’y étaient mis à quatre pour le stopper. Et puis, tu sais, je n’étais pas là, quand il est mort. C’est à l’hôpital que ce pauvre jeune homme est décédé. Il feignait la compassion, alors qu’il n’en avait aucune. Il le méritait ce pauvre type. C’est ce qu’il s’était toujours dis, du jours de son enfermement jusqu’à maintenant. Il n’avait jamais regretté. Serait prêt à recommencer. Les années de taule ne lui avaient pas fait peur, au contraire. Mais, pourquoi cette question, tu as des envies de meurtres ces derniers temps ? Dis nous tout. Il arqua un sourcil, ne la quittant plus des yeux. Elle avait attisé sa curiosité, sans doute celle de ses parents également qui étaient resté bouche bée devant cet échange macabre.
Sujet: Re: U.E.S / Un long dimanche de victuailles [Ada & Ismaël] Ven 13 Déc - 21:49
Elle a un petit sourire satisfait et victorieux, pendant que les convives sont tous en train de s’étouffer avec le plat raffiné du jour. La tête haute, sans pour autant oublier ses manières, voilà que l’héritière venait de remettre chacun à sa place en quelques mots. Et c’est sans encombre qu’elle porta un morceau de viande à ses lèvres et l’avala, et pas de travers elle, toujours avec cet air impérieux, presque espiègle et sans aucun doute malicieux. Ses mots avaient eu l’effet escompté, maintenant elle n’attendait rien de plus et c’est avec curiosité qu’elle écouta l’étonnante réponse d'Ismaël, sous les yeux horrifiés de ses parents. Elle n’avait jamais imaginé qu’il répondrait de façon aussi sincère à cette question totalement déplacée, à part qu'il ne l'était pas du tout.
- Je vois... dit-elle vaguement sans rien voir du tout. Tu peux m’appeler Ada, au fait.
Un toussotement rauque et significatif retentit, ses parents détestaient ce diminutif qu’ils trouvaient tout à fait inapproprié. Mais Ada, elle, elle papillonnait des cils dans une caricature tout à fait réussie de la grande bourgeoise, tout en ignorant l'agacement qu'elle pouvait répandre chez ses ancêtres. Après tout, ce n'était qu'un juste retour de bâton. Ismaël continuait, sa mère était rouge comme une pivoine, son père fulminait derrière un masque d'inexpressivité ; tout allait bien dans le meilleur des mondes. Et elle, dans son petit jeu, elle était presque déçue de l’absence de détails sordides. Il faisait genre il se sentait concerné, c’était limite pénible tant il allait vraiment finir par acheter ses parents. La princesse ne laisserait pas faire ça, quitte à se montrer sous son vrai jour. Il termina et elle éclata de rire, d'un vrai rire d’aristocrate, distinguée et délicat. Quel jeu d’actrice, elle méritait un oscar pour cette prestation, clairement.
- Hmm, peut-être. Difficile de ne pas avoir des envies de meurtres quand on a une petite sœur comme la mienne… Enfin, je n’irais pas me salir les mains quand même. N’est ce pas papa ? - Qu’est-ce que tu insinues Adama ? - Moi ? Oh, rien, juste que quand on est riche et puissant, on peut bien payer quelqu’un pour se débarrasser des indésirables non ? Mais j’ai surement dû regarder trop de film.
Elle jetait des œillades complices à leur invité, tout en racontant ces inepties auxquelles elle ne croyait pas du tout. Elle n’avait aucun soupçon sur ce genre de cas dans la famille, c’était juste une provocation de plus, sortie au hasard de son imagination.
- Tu détestes à ce point ta soeur Adama ? - Maman, il n’y a que vous qui l’aimez, elle est absolument invivable. Même Balthaz… - Il suffit Adama.
Son père abattit sa serviette avec fermeté sur la table, sonnant la fin de ce petit cirque.
- Excusez-nous pour ce piètre spectacle, Ismaël, notre fille apprendrait peut-être d’un petit tour en prison. J’y suis en prison papa, qu’elle pensa, un air indéchiffrable sur le visage et le sourire de la Joconde. Cette histoire m’a coupé l’appétit, mais je vous en pries, finissez de manger, un délicieux dessert vous attends. Adama et son imagination débordante vous tiendront compagnie, puisqu’elle aime tant se mettre en scène.
Il s’en alla, suivit de près par sa femme. Ada les couva du regard jusqu’à ce que la porte se referme, alors elle éclata de rire, retrouvant son naturel et sa jolie voix rauque. Elle s’était découvert un certain pouvoir pendant ce repas, une insolence qui ne pouvait se punir tant qu’elle était l’héritière désignée. Même si elle n’était pas dupe, si son père était parti, ce n’était pas qu’à cause de ses âneries, c’était aussi parce que ce repas était vain, il ne pouvait pas la marier à ce Sartier, et c’était tant mieux. Cet homme détestait perdre son temps par dessus tout.
Enfin débarrassée des parents et de Clotilde une fois qu’elle eut servi le dessert, Ada se leva de table sans s’intéresser à ce plat sucré, dégagea ses chaussures avec nonchalance et sauta sur le canapé pour s’installer sans la moindre distinction. Elle le regardait, les pieds en l’air sur un coussin, la main dans les replis pour en sortir son cigare entamé qui l’attendait là. Et elle l’alluma.
- Si tu veux y’a des clopes dans le tiroir là.
Elle lui indiquait un vague direction d'un poignet nonchalant et gracieux. C’était les vogues de sa mère et l’idée l’amusait tiens. Lui fumant une Vogue, elle avec son gros cigare cubain, l'image était cocasse.
- T’as failli les charmer, ça tu vois, ça m’donnait des envies de meurtre sur ta personne.
Elle souriait, toujours triomphante, toujours très amusée par tout ça, ses yeux d'un bleu profond qui l'étudiaient.
- Alors, ton frère a passé une agréable nuit ?
Petit sourire un coin, du peu qu'elle s'en souvenait, ça avait été plutôt sympa. Et c’est qu’elle s’inquiétait un peu de ce que les deux frères avaient pu dire d’elle. Elle tira un peu de fumée avant de la laisser s'échapper.