We’re far from the shallow now. Kenneth

1/ (friend) Fils unique d'une femme de ménage et d'un mécano qui se voit sans avenir. Ce n'est pas tous les jours la joie dans la famille. Dans le petit appartement new-yorkais. Mais tu n'es pas malheureux. Aucun de vous ne l'est vraiment dans le fond. Tes parents sont d'honnêtes gens. Gamin, tu les voyais recevoir leurs amis chez vous pour des dîner à n'en plus finir. Des soirées qui apportaient de la vie dans ce petit appartement miteux. Et qui apportaient surtout un couple d'amis. Une petite famille comme la votre. Oliver devenu ton meilleur ami. Ton frère de coeur. Vous avez grandis ensemble. Côte à côte.  Une vraie relation fraternelle pour toi dont les parents ne souhaitaient pas de second enfant. Faute de moyens financiers, principalement. Des années à grandir et à évoluer aux côté des Hicks. A grandir aux côtés de Marybeth également. Gamine toujours dans votes pattes à son frère et à toi. Tu n'as pourtant jamais été contre. T'étais pas forcément un mauvais gamin. T'étais trop heureux d'avoir cette famille en plus de la tienne. 2/ (lover) Les années sont passées. Tu as grandis et évolué. Comme bien des ado aux mauvaises fréquentations, t'as fait quelques conneries à l'adolescence. Surtout avec Oliver. Ton ami de toujours. Ton frère. Jamais rien de grave non plus. A part quand t'as commencé à zieuter sur la petite soeur. Avec vos trois ans de différence, t'étais persuadé que ce n'était pas normal. Que c'était glauque. Que ce n'était pas autorisé du tout, surtout. Alors t'as gardé le silence. T'as tenté d'étouffer cette attirance alors que la gamine devenait jeune femme. Que t'étais toi même incapable de t'intéresser à une autre. Elle était belle Marybeth avec ses longs cheveux blonds et ses grands yeux clairs. Elle était belle quand elle riait à gorge déployée, quand elle souriait à faire pétiller ses prunelles.  T'étais déjà fou d'elle ce fameux 4 juillet. Quand elle t'a donné rendez-vous. Dans un mélange d'assurance et de timidité, qui a eut le don de te faire fondre. T'étais pas sûr encore de la raison de ce rendez-vous secret pourtant. Pas sûr d'avoir le droit d'espérer. Alors tu t'es arrêté devant elle. T'as souris et t'es détendu quand elle a baissé la tête, rougissante comme l'ado qu'elle était. Tes doigts ont été doux dans son dos. Tes lèvres ont été tendres sur les siennes. Quand vous avez échangé votre premier baiser. Quand les papillons se sont envolés, que ton coeur s'est emballé, que ton cerveau a tout enregistré. Souvenir indélébile. T'as su que c'était elle. Que ce serait toujours elle. 3/ (life) Vous vous êtes dis "oui" un an plus tard à peine. Elle avait tout juste seize ans Marybeth. Il a fallut la bénédiction de ses parents. L'évidence, là encore. L'évidence pour tout le monde. Vos familles ont vu votre histoire d'amour naître un beau jour et évoluer au fil des mois. Un dernier cap que tu te refusais à passer parce qu'elle était mineure et toi majeur. Et surtout, qu'elle était bien trop jeune pour ça de ton point de vue. Alors t'as patienté. Un an tout rond. Le mariage. La nuit de noce finalement. Enfin. Amour tendre. Amour grandissant. L'évidence qui n'a eut de cesse que de se confirmer au fil du temps qui est passé. Un amour de plus en plus grand alors que vous viviez une vie d'adulte à même pas vingt ans. Vous avez emménagé dans des appartements de plus en plus grands à mesure que vous avanciez chacun dans votre carrière respective. C'est du haut de vos vingt-cinq et vingt-huit ans que vous avez décidé de fonder une famille. Une première grossesse vous a fait sauter de joie. La fausse couche vous a fait redescendre aussi sec, quelques semaines plus tard. Vous ignoriez à ce moment là que ce n'était que le début. Qu'il y en aurait d'autres des hauts et des bas de ce genre. Vous ne saviez pas non plus que ça n'allait faire que monter crescendo. Être de plus en plus dur au fil des années. Vous avez tout tenté. Vous avez même essayé avec l'aide de la médecine. En vain. Avec les faux espoirs et les peines insoutenables, les disputes. T'étais de plus en plus jaloux et possessif. Parfois tu l'as étouffé Mary. Persuadé qu'elle fauterait parce que vous n'étiez pas capables d'avoir enfin cet enfant. Persuadé qu'elle trouverait mieux dans la haute tour dans laquelle elle bossait. Et il y a eut lui. Ce type en costume cravate. Ils sont venus dîner chez vous, son épouse et lui. Une fois. Deux fois. Plus tard t'as appris la séparation. T'as grincé des dents quand tu l'as vu tourner autour de Mary. T'étais persuadé qu'il avait de mauvaises intentions ce con là. T'as mis en garde ton épouse. Énième dispute. Réconciliation ensuite. Toujours. Et le sourire sur la tronche de ce type qui n'a pas manqué de te promettre qu'il te la prétendrait. Les mots de trop. Ceux qui t'ont fait vriller. Ce jour là déjà t'as été à deux doigts de te donner en spectacle devant l'immeuble où elle bossait. A deux doigts de fracasser la mâchoire de ce type. Elle est arrivée à temps pour t'en empêcher. 4/ (guilty) Tu n'as pas cherché à prétendre le contraire. Ton avocat t'a bien dit qu'il s'occupait de faire passer ça pour de la légitime défense. C'était ça ou parler d'un crime passionnel. Et la peine de prison n'aurait certainement pas été la même. T'étais résigné pourtant. Prêt à accepter la peine qu'on te donnerait / t'infligerait. Parce que ce que tu as fait n'est pas pardonnable. Quand bien même tu ne t'en veux pas. Tu ne regrettes pas d'avoir buté un type qui tentait de te prendre ton épouse. Qui est allé jusqu'à la droguer, tu l'as assez vite compris alors que tu cognais dans la tronche de cet enfoiré. Raison pour laquelle t'as frappé plus fort encore. Que t'as frappé jusqu'à le réduire au silence pour de bon. Pour toujours. T'étais prêt à prendre la plus grosse peine de prison qui soit si c'était vraiment le choix du juge. Ce sont les larmes sur le visage de Marybeth qui sont venues te convaincre qu'il te fallait suivre les conseils de ton avocat. Tu ne pouvais pas te permettre d'accepter une peine interminable. Vingt ans dont quinze de sûreté, ça semblait n'être rien en comparaison des autres peines que tu risquais. 05/ (pain killer) Tu le savais que l'absence serait dure à encaisser. Que la distance et les barrières entre vous allaient être insupportables. T'ignorais juste à quel point. Tu ne pouvais le savoir avant de devoir le vivre. Les lettres d'amour. Les coups de fil de quelques minutes tous les jours, les visites toutes les semaines. C'était le minimum.  Sans ça, tu n'aurais pas tenu plus d'un moi. Sans elle, tu te serais laissé dépérir dans ta cellule froide et mal éclairée.  T'as cherché, t'as joué, t'es merdé salement, t'es tombé. Ta jalousie et ton amour démesuré t'ont trahit à leur façon. En guise de punition, une séparation physique insoutenable, insupportable, invivable. Tu le sais qu'elle t'en veut de ne pas t'être arrêté ce soir là. Tu le sais qu'elle te reproche d'avoir merdé si salement, que t'as pris une peine de vingt ans. Mais elle ne t'en fait pas le reproche pourtant. Elle prend sur elle, tu la connais trop pour ne pas t'en rendre compte. Mais tout ça s'oublie bien vite et bien fort quand, une fois par an pour ton anniversaire, vous vous payez le luxe de quelques heures en compagnie l'un de l'autre. Quelques billets glissés dans la main d'un gardien pour vous permettre de profiter l'un de l'autre comme si tu n'étais pas enfermé. Comme si vous n'étiez pas séparés. C'est la seule chose qui te permet d'avancer. La seule raison pour laquelle tu tiens encore debout. Dix ans. C'est ce que tu finiras par faire. Pas plus. Pour bonne conduite, t'es libéré plus tôt. Bonne conduite pour elle. Grâce à elle. Pour la retrouver au plus vite. Parce qu'elle te manque. Parce que sans elle tu n'es rien ni personne. Parce que chaque jour qui passe, t'as peur d'apprendre qu'elle a trouvé un autre, qu'elle t'a remplacé, que tu l'as perdu.