girls cry when their hearts are breaking. (Ella)

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{  girls cry when their
hearts are breakin }
crédit/ tumblr ☾ w/@Nina Wahlberg

Une soirée de plus, une victime de plus. Elle pourrait les prendre en pitié, Ella. Se dire qu’elle devrait peut-être finir par les libérer. Particulièrement ceux dont elle use et abuse dans la durée. Surtout lui qui est aussi patient, aussi respectueux, aussi gentil. Ils sont rares, ceux qui sont gentils. Ceux qui essaient de la connaître, elle, plutôt que son corps. Ceux qui semblent encore croire qu’ils finiront par trouver un trésor.

Ils ne voient pas, combien tu es pourrie de l’intérieur,
Combien ton cœur est trop rempli de cette noirceur.

Ils ne se rendent pas compte que, d’elle, il n’y a plus rien à tirer. Dans l’incapacité de s’attacher, elle ne se laisse pas davantage aimer. Elle est tout juste capable de les autoriser à l’approcher. Penser la faire leur, quand un autre a déjà condamné son cœur. Elle est là, debout, son verre de champagne entre ses doigts délicats. À se dire qu’elle aurait préféré de la vodka. Mais elle joue le jeu des soirées mondaines, celles où les apparences règnent. L’illusion est là, dans son sourire angélique. Si crédible qu’il en paraît authentique. Seul son regard peut la trahir, lui n’a jamais su mentir. L’ombre de l’ennui dans ses prunelles, jusqu’à ce qu’elle la voit, elle. Elle, c’est cette fille qui tourne autour de Morgan. Celle qui lui tournait autour, en tout cas, lorsqu’elle osait encore faire un tour dans son bar. Elle ne la connaît pas, Ella, ne lui a presque jamais parlé. Mais elle a vu sa complicité avec l’homme qu’elle n’a jamais pu oublier. Elle a vu combien ils sont proches, tous les deux.

Tu as vu, chez elle,
Tout ce que tu n’es pas,
Tout ce que tu n’as pas,
Tout ce que tu n’as plus,
Celui que t’as perdu.

Elle ne la connaît pas. Rose ou bien Nina. Elle ne saurait même plus dire lequel est son vrai nom. Ensemble, elles ont partagé une seule conversation. C’est elle, surtout, qui parlait pendant qu’Ella se taisait. N’acceptait pas qu’une inconnue puisse vouloir la rassurer. Comme si quiconque était capable de l’apaiser. Un trop-plein de fierté, de la part d’une femme blessée. Elle avait pourtant décidé que c’était terminé. Que, désormais, elle s’en fichait. Mais elle ne peut pas empêcher ses prunelles noires de se poser instinctivement sur la belle fleur. Délicate jusque dans sa démarche, elle la voit soudain arriver à sa hauteur. Le regard méfiant plus que surpris, elle ne la quitte pas des yeux. La douceur qu’elle porte sur le visage, dans chacun de ses sourires, elle les illumine tous sur son passage. Jusqu’à venir lui faire face. Avec chaleur, elle vient la saluer quand la sulfureuse daigne tout juste relever un sourcil perplexe. - Je t’accuse sans te parler ? lance-t-elle, le ton beaucoup plus froid que le sien. Aucune envie de l’entendre jouer les anges gardiens. Mais, dans un haussement d’épaules, la sirène accepte de la suivre. Elle pourra au moins s’en griller une. - Ok, si tu veux. elle accepte sobrement, avant de se tourner vers l’homme qu’elle accompagne pour lui signifier qu’elle revient rapidement. Rapidement, parce qu’il est hors de question qu’elle éternise ce moment.

Les ténèbres qui suivent la lumière,
L’ange et le démon,
Tout doucement s’en vont.

À peine à l’extérieur, elle peut enfin souffler. À nouveau, respirer. La main qui fouille dans sa pochette, elle récupère une cigarette. Ce n’est qu’une fois allumée, après la première bouffée, qu’elle repose ses sombres prunelles dans celles de l’ange devant elle. - Je t’écoute, tu avais quelque chose à me dire. Et, déjà, tu t’attends au pire.

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Aimer, la plus belle chose qui lui soit arrivée. Aimer, ce qui l’a sauvée. Aimer, ce qui a manqué de la tuer. Ce qui la tue encore, peu à peu, ce qui la tue doucement à petits feux. Elle a les prunelles trop amères, le cœur qui a trop souffert. Mais qui continue de battre, chaque fois qu’elle pense à lui. Même par le biais de ses… Amis. Elle ne fait aucun commentaire suite aux paroles de Nina. Ne sait que trop bien ce qui se cache dans son regard. La colère, l’irritation, la jalousie. La peur, surtout, de le voir partir auprès d’une autre. De le voir l’oublier dans les bras d’une autre. Et elle sait que ce n’est pas sain, Ella. Elle sait qu’elle ne devrait vouloir rien d’autre que son bonheur. Mais elle ne peut pas, elle n’y arrive pas. Rien que l’idée qu’il puisse l’oublier, elle a cet effet de poignard en plein cœur.

Comme si tu ne l’avais toujours pas oublié,
Comme si ce n’était toujours pas terminé,
Comme si, toute ta vie, il te poursuivrait,

Cet amour empoisonné, éternel,
Cet amour cendré, immortel.

Elle ne veut plus l’aimer. Elle veut l’oublier. Mais elle sait qu’elle est incapable d’y arriver. Parce que, si c’était le cas, elle serait indifférente à la présence de la jolie fleur ce soir. Parce qu’elle aurait refusé de l’accompagner, seule à seule, dans le noir. Mais elle est là, silencieuse, à donner toute son attention à sa cancéreuse. À faire semblant, quand en réalité, toute son attention est braquée sur elle. L’ange sans ailes. L’ange, parce qu’elle fait tout pour la rassurer, au lieu de l’envoyer balader. Au lieu de l’ignorer comme Ella, le ferait. De la bouche d’une autre, ses mots sonneraient faux. Ils sonneraient prétentieux. Comme si elle voulait, au contraire, attiser le feu de cette jalousie acerbe. Il y a quelque chose, chez elle, qui donne à la sulfureuse l’envie de la croire. Mais Ella, elle a perdu tout semblant d’espoir. Elle lève les yeux vers ce ciel sans étoile, avec cette fausse arrogance. Reste terrée dans son silence. Mais qu’elle lui sorte, le couplet sur le frère, c’est une chose, qu’elle poursuive sur la souffrance de Morgan en est une autre. Un ricanement s’échappe de ses lèvres, cette fois un peu trop amère. Comme s’il était le seul à souffrir. Comme si elle n’avait pas eu le cœur brisé quand il a choisi de s’en aller. Mais elle garde ses pensées pour elle. Les barrières de protection trop bien construites pour s’effilocher si vite. – Tu ne me dois aucune explication. On n’est plus ensemble, il faut ce qu’il veut.

Logique implacable dans son esprit,
Quand le cœur s’est enfui.

Elle ne croit pas elle-même à ses propres mots, Ella. Peut-être que, au fond, cela lui fait du bien. Peut-être qu’elle a envie d’y croire. Mais elle se protège, derrière cette barrière, pour éviter de souffrir. Elle voudrait juste en finir. Mais son interlocutrice n’a pas terminé, elle a même encore beaucoup de choses à lui expliquer. Et, visiblement, d'autres à lui demander. – Je ne vois pas pourquoi je me confierais à toi. Je ne te connais pas. Elle refuse de le faire, même avec ceux qu’elle connaît. Elle n’a aucune raison de se dévoiler. Mais elle insiste, la fleur, elle persiste. Plus déterminée qu’elle en a l’air sous sa délicatesse, elle sait l’atteindre. Elle arrive, peu à peu, à la toucher. Plus qu’elle ne le voudrait. Une nouvelle bouffée de nicotine qu’elle respire, la sirène reprend d’un ton placide. – Son malheur aussi, il a l’air de porter mon nom. Constat douloureux. Presque tortueux. De savoir qu’elle fait du mal à la seule personne pour laquelle elle aurait tout donné, celle pour qui elle a tout donné. Tellement de mal qu’il a préféré s’en séparer.

Mais il reste toujours ton point faible, Morgan.

C’est la souffrance évoquée par la belle rose qui finit par la faire flancher. Effacer de son cœur les murs installés. Les mains posées sur le balcon, elle lève son regard sur l’horizon, pas sur Nina. Elle pense à lui, en ce moment, sûrement derrière son comptoir. À se détruire dans ce bar. Les secondes s’envolent avant qu’elle ne confie dans un murmure. – J’ai essayé. J’ai essayé de le sauver. Elle tourne la tête vers elle, pour la première fois. Le regard qui a changé, le regard brillant qui s’est révélé. Empreinte de sincérité. – Je t’assure que j’ai essayé. Comme un besoin de le dire, de s’en persuader. Pour, peut-être, s’ôter cette culpabilité, celle de n’y être pas arrivée.

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Le jour et la nuit, elles sont. Tout en opposition. De la couleur de cheveux jusqu’au son de la voix. La première n’est n’est que lumière quand la seconde s’enfonce dans ses ténèbres. L’une n’est que douceur quand l’autre ne vit encore que par la douleur. Tout les oppose au premier abord. Mais une rose possède autant de pétales qu’elle a de piques. Nina, elle doit avoir ses propres souffrances, ses propres tourments. Elle a juste réussi à voir la vie autrement. Et c’est là que tu réalises, à cette seconde précise. Elle est tout en délicatesse, la fleur. Mais elle est bien plus courageuse, bien plus forte que toi et ta douleur. Comme pour le prouver un peu plus, elle poursuit son discours. De ses prunelles bienveillantes, de sa voix apaisante, elle parvient à briser, peu à peu, tous les murs que la succube avait si bien dressés. Elle arrive, elle, là où tant d’autres ont échoué. Elle lutte encore, Ella, elle lutte toujours plus fort. Mais elle est incapable de faire abstraction de ses mots, incapable de nier tous les sentiments qui lui collent à la peau. Ceux sur lesquels la rose pose son doigt, tout en finesse. La vérité murmurée, comme une caresse. Elle n’ a pourtant jamais été aussi criante qu’à cet instant.

Les doutes doucement immiscés,
Quand l’espoir ne sait plus exister.

Peut-être qu’elle a raison. Peut-être qu’ils seront toujours liés de toutes ces émotions. Mais il a choisi de partir, Morgan. Il a choisi de la fuir. Elle lui a certainement fait trop de mal, ou peut-être qu’il a juste choisi d’écouter sa raison. Taire tous ces sentiments. Il est plus fort qu’elle, finalement. Face à l’ange devant elle, la sulfureuse fait déjà tomber ses barrières. Elle ne supporte pas d’imaginer celui qui détient encore son cœur entre les mains, perdre pied dans ce désespoir sans fin. Elle ne supporte pas l’idée qu’il puisse souffrir. Alors même qu’elle est fautive. Devant ses trahisons, ils l’ont probablement tous jugées sans exception. Aodh lui-même, plus jamais, n’a voulu de son amitié. Ils s’en sont tous détournés, l’ont cataloguée mal-intentionnée. Alors, les mots de Nina, ils lui font du bien. Elle en a peut-être besoin. Une inspiration plus tard, elle ose enfin relever le regard. Les prunelles assombries se laissent bercer par les océans rassurants. Elle a quelque chose d’apaisant. C’en est presque culpabilisant.

Et pour la première fois,
Tu la vois,
Tu la vois réellement,
Tu la vois sous les yeux de Morgan.

Elle ne sait pas comment. Elle ne sait pas, par quel miracle, elle a réussi à gagner sa confiance. C’est juste sa présence. Sa prestance. Elle a quelque chose en elle, Nina. Une bonté dans l’âme. Un ange au milieu des flammes. Peut-être qu’elle aurait été un peu plus chaleureuse dans d’autres circonstances, peut-être qu’elle aurait osé la voir comme une alliée. Mais peut-être qu’elle peut encore essayer. – Il a… abandonné. Comme si sa vie était déjà toute tracée, comme s’il en attendait juste la fin pour respirer enfin. Elle le sait, Ella, parce qu’elle a tendance à se laisser couler, elle aussi. Mais peut-être pas autant que lui. Peut-être qu’il y a encore cette partie d’elle qui s’accroche à la vie. Lui attend la mort comme une délivrance. Mais de ses questionnements suivants, la belle lui fait un peu plus mal. Le désespoir qui perle malgré elle dans ses opales. Ella, elle a cessé d’y croire. Dans un autre moment, elle affirmerait qu’il ne l’aime sûrement pas autant. Avec une autre personne, elle prétendrait que ce n’est visiblement pas si fort. Mais elle a perdu ce mur qui la protégeait. Comme si, en présence de Nina, elle était obligée de se dévoiler. Quelque chose, en elle, qui fait que l’on ne peut qu’être sincère. – On est… On est tous les deux abîmés. Doux euphémisme, pour les deux âmes torturées, les deux cœurs écorchés. La vérité, c’est qu’ils sont brisés. – Tu n’imagines pas combien je me suis raccrochée à lui, il était… toute ma vie. Mais il a décidé de fuir à l’autre bout du monde… Il essayait d’échapper à sa famille, je crois. Mais c’est elle qu’il a abandonnée. C’est avec elle, aujourd’hui, que c’est terminé. Quand son sang est toujours là, lui, pour le ronger. – Je lui en ai voulu parce que je ne demandais qu’à être là pour lui, moi mais… J’ai été incapable de l’avouer, j’ai juste… J’ai juste fini par tout gâcher. Parce qu’elle aurait fait n’importe quoi pour se soulager de cette souffrance. N’importe quoi pour combattre son absence. Mais rien n’y fait, ni le temps, ni la distance. Il lui manque toujours autant. Désespérément.

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Elle ne sait par quelle envoûtement elle parvient, elle, si facilement, à effacer toutes ses barrières. Ou bien simplement, de toute sa délicatesse, elle passe au travers. La Rose est si pure, si authentique auprès d’elle. Qu’elle se sent comme obligée d’ouvrir son cœur devant celle qui n’est pourtant presque qu’une étrangère. Ce n’est pas tant une obligation qu’une évidence. Comme si c’était juste du bon sens. Comme si c’était juste son instinct qui la poussait, enfin, à parler. Peut-être aussi que confier ses sentiments lui fait du bien, finalement. Elle les a si longtemps gardés pour elle, refusant d’en parler, même à ses plus proches amis. Elle est restée debout, fière, tout ce temps, sans admettre qu’elle était en réalité anéantie. C’est la première fois qu’elle se livre autant, il aura fallu qu’elle le fasse à une amie de Morgan. Mais c’est peut-être plus facile auprès de quelqu’un qui est là pour lui assurer, que tout ce qu’elle ressent, son amour maudit continue de l’éprouver également. C’est peut-être plus facile de baisser les armes devant quelqu’un qui ne porte rien d’autre que sa belle âme. C’est plus facile avec la fleur qui, tout en tendresse, tout en finesse, la pousse à se délivrer d’un amour qu’elle a tu tout ce temps. Les prunelles ancrées dans les siennes, devant ses paroles, elle sent comme un soulagement. Elle n’est pas convaincue, toutefois, parce qu’elle se sait responsable en partie de tout ce qui est arrivé. Mais il y a quelque chose qui l’apaise dans les paroles de Nina, comme un besoin de se dire qu’elle n’est pas la seule coupable de tous ces dégâts. – Je crois que je n’arriverais jamais à renoncer totalement à lui. elle avoue, presque fataliste. Car cet amour, elle a trop souvent tendance à le voir comme un destin tragique. Une histoire maudite. Un amour qui l’a prise au piège sans qu’elle ne puisse s’en sortir. Mais, quand elle écoute son interlocutrice, c’est comme si elle lui rappelait tout doucement qu’elle devait se battre. Qu’elle devait se lutter, non pas contre ses sentiments, mais contre toute cette souffrance… Contre Morgan et son besoin de tout arrêter.

Mais peux-tu vraiment aller à l’encontre de sa volonté ?
Quand toi-même, tu n’es plus vraiment sûre de mériter de l’aimer ?

Elle se terre dans le silence. Essaie d’envisager la situation sous un autre angle. Mais elle ne sait pas, elle ne sait plus. Cette conversation va rendre son âme un peu plus perdue. Elle s’est persuadée, durant tellement de temps, qu’elle devait l’oublier. Tirer un trait. Arrêter le massacre. Mais elle a raison, l’ange sans ailes. Elle n’avance pas pour autant, pas plus que Morgan. Seulement elle ignore, même, si elle a encore la force de se battre, pour cet amour qui ne semble plus vouloir d’elle. Non, elle ne sait plus rien. C’est encore plus tourmentée qu’auparavant qu’elle contemple cette nouvelle alliée. Devant ses remerciements, un faible sourire sur ses lèvres vient à se dessiner. – Je sais pas trop comment t’es arrivée à ce miracle. dit-elle, la voix un peu plus légère, malgré l’émotion toujours ancrée dans ses prunelles. Son regard ébène ne manque pas un seul de ses gestes. Et la voilà bientôt, avec entre les mains ce précieux numéro. – Merci à toi… Nina. Ça fait du bien, enfin, je crois. Pas tout à fait sûre. Comme elle ne l’est jamais en amour. Elle ne l’est jamais avec lui. Mais elle est touchée de la confiance que lui accorde celle dont elle découvre, cette fois avec clarté, le véritable prénom. Peut-être que c’est une amie dont elle vient de faire la rencontre. – D’accord. Je suis… contente que Morgan ait quelqu’un comme toi. Elle n’aurait jamais cru avoir ces propos. Mais elle en pense chaque mot. Elle se rend compte de la bienveillance de la jeune femme, elle se rend compte combien elle est face à une belle âme. Elle a cette impression, rare. Agréable. La sensation qu’elle va la revoir. Elle la regarde partir, cet ange sans ailes, en se demandant comment elle est parvenue si facilement à lire en elle. Comme si elle avait pu ouvrir son cœur, pour lire ce qu’il y a à l’intérieur. Peut-être même s’y immiscer un peu, déjà, pour lui redonner un nouvel éclat.  

Et peut-être que tu as de la chance, toi aussi,
Peut-être que tu viens de trouver une précieuse amie,
Ou mieux encore ce soutien,
Celui dont t’as tant besoin.