Le poids de la culpabilité (feat Antek)

A son réveil Caleb ne se sentait pas bien. Il n’avait pas trouvé le sommeil pendant une grande partie de la nuit. La cause de ses insomnies qui devenaient récurrentes était la culpabilité. Caleb n’en pouvait plus de mentir. La veille ses parents l’avait appelé pour prendre de ses nouvelles. Ils s’inquiétaient pour lui, en effet la période des examens de l’université approchaient et ils voulaient s’assurer qu’il n’était pas trop angoissé. Caleb avait répondu qu’il avait travaillé suffisamment et qu’il n’était donc pas trop anxieux. Caleb avait instantanément regretté ce nouveau mensonge, un de plus sur la liste qui devenait dangereusement longue, cependant se sentait obligé de rassurer ses parents. A cet instant Caleb préférait donner à ses proches une vérité réconfortante plutôt que la dure réalité : Caleb n’était pas l’élève de droit très impliqué dans ses études qu’il prétendait être, il avait tout abandonné au bout d’un mois. Maintenant sa vie rimait avec mensonge, cela faisait plusieurs mois déjà que cela durait mais Caleb n’osait pas briser la magie de ses mensonges : avoir un fils avocat, futur père et mari parfait pour une femme. Tous ces espoirs placés dans Caleb faisait briller les yeux de ses proches. Dans leur voix et dans leurs regards il sentait de la fierté et c’était ce dont Caleb avait besoin : l’amour de ses proches et les savoir fiers de lui parce que pour lui la réussite c’était ça, c’était voir la fierté dans les yeux de ceux qu’il aimait. Caleb était partagé entre prolonger le mensonge ou bien sauver les apparences et tout avouer mais il n’en avait pas le courage. Caleb savait que ses secrets finiraient un jour par être découverts, il devait donc trouver une solution, il avait besoin de se confier, de conseils. Caleb avait besoin d’une oreille attentive, de quelqu’un de bon conseils, quelqu’un de neutre. La solution était évidente : l’Église. Il savait que le prêtre serait de bon conseil et il ne s’était pas confessé depuis longtemps, il devait avouer ses péchés devant Dieu. Caleb c’était pas un mauvais gars juste un gamin un peu perdu qui avait peur de décevoir ses proches.
Caleb se mis donc en chemin et chercha une église, il entra dans la première qu’il croisa sans trop faire attention. Il se rendit devant le confessionnal qui était occupé. Il attendit que la personne qui était en train de se confesser sorte puis il se glissa dans le confessionnal. Il pris une grande inspiration avant de commencer la séance de confessions, il n’osait pas regarder son interlocuteur au travers du grillage, il avait honte de ce qu’il faisait, mentir était vraiment un acte immoral. Et puis il n’y avait pas que le mensonge, il y avait toutes ses attirances pour les garçons, ces hommes qu’il regardait attentivement dans la rue, il se sentait anormal, comme sale. Le regard dans le vide il commença :

« Bénissez-moi, mon père, parce que j’ai péché.

Après avoir reçu la bénédiction du prêtre il avoua qu’il ne s’était pas confessé depuis longtemps. Il avait l’habitude de le faire très régulièrement lorsqu’il vivait avec ses parents mais l’arrivée en ville l’avait un peu éloigné de ses habitudes.

- Je ne me suis pas confessé depuis plusieurs mois mais j’ai commis beaucoup trop de pêchés récemment. Je mens à ma famille, je leur fais croire que je suis des études de droit alors que j’ai abandonné dès le début. En réalité ce que je veux c’est être un artiste, j’ai postulé pour une grande école d’art mais je n’ose pas leur dire la vérité. J’ai peur de leur réaction mais je ne peux plus continuer mes mensonges. Je n’arrive plus à me regarder dans une glace.

Caleb n’osait toujours pas regarder le prêtre il attendait de voir quel était son point de vue sur sa situation, une chose était sûre Caleb avait besoin de se débarrasser du fardeau qu’était le poids de ses péchés.

Antek était littéralement en train de rêvasser dans le confessionnal. Longtemps, il avait attendu pour rien, puisque personne ne venait, mais lorsqu'enfin quelqu'un s'était approché pou faire part de ses péchés au jeune prêtre, ou plutôt à Dieu par son intermédiaire, ce fut une vieille femme. Antoni la connaissait par coeur. Elle venait presque tous les jours à l'église, et à chaque permanence, venait dans le confessionnal et racontait exactement la même chose, l'histoire de sa vie. Les premières fois, alors qu'il était novice dans la paroisse, notre jeune homme l'écoutait attentivement, de peur de manquer quelque chose, et désireux de s'assurer qu'il n'y avait là aucun péché mortel, mais les fois suivantes, il était devenu beaucoup plus distrait. D'ailleurs, ce n'était pas étonnant, puisque c'était dans sa nature que d'être distrait et rêveur. Comme d'habitude, il lui donna l'absolution, avant de se remettre à rêvasser de nouveau.
Cependant, son rêve éveillé fut de courte durée car une voix vînt le sortir de ses pensées. La voix d'un jeune homme qu'il ne lui semblait pas connaître.
Il le bénit, comme demandé, avant d'écouter ses peines. Visiblement, le pauvre s'en voulait de mentir à sa famille. Antek afficha un petit sourire, le regardant à travers le grillage du confessionnal, d'un air serein. "Tu sais que la vérité est toujours la meilleur des voies, qu'elle, seule, peut te libérer. Tu en as conscience puisque tu souffres de ce mensonge. Mais pourquoi mens-tu à ta famille? S'ils t'aiment, ils te veulent heureux, et peu importe le métier que tu auras choisi, ne penses-tu pas? Veux-tu qu'ils l'apprennent eux-mêmes et se trouvent blessés par ton silence?" indiqua-t-il doucement, de façon légèrement autoritaire, mais surtout compréhensive. Ce n'était pas un jugement de valeur, mais des questions, que son interlocuteur devait se poser pour faire les choses au mieux. Antek essayait d'appliquer les règles que lui avaient dit le curé. Autrefois, il aurait posé de nombreuses questions existentielles au jeune homme, et ce dernier aurait sans doute fui, intimidé. Là, peut-être que ses mots étaient bateau, mais... Si cela se trouvait, l'autre avait juste besoin d'être rassuré. D'entendre de la part d'un prêtre que seul la vérité le libérera, et qu'il ne pouvait en être autrement bien longtemps.

@Caleb Reed

Alors que le regard de Caleb était toujours baissé une voix s’éleva. Elle était douce, chaleureuse mais aussi atypique grâce à l’accent étranger qu’avait le prêtre lorsqu’il essayait de réconforter Caleb. Caleb n’arrivait pas à identifier l’origine de cet accent et il était très curieux de voir à qui appartenait cette voix suave, il décida de lever les yeux dans la direction de son interlocuteur alors qu’il était en train de parler :

"Tu sais que la vérité est toujours la meilleur des voies, qu'elle, seule, peut te libérer. Tu en as conscience puisque tu souffres de ce mensonge. Mais pourquoi mens-tu à ta famille? S'ils t'aiment, ils te veulent heureux, et peu importe le métier que tu auras choisi, ne penses-tu pas? Veux-tu qu'ils l'apprennent eux-mêmes et se trouvent blessés par ton silence?"

Caleb n’avait pas lâché le prêtre du regard, le grillage très serré qui les séparait l’empêchait de pouvoir observer sous toutes ses coutures son interlocuteur. Cependant, même à travers le grillage il pouvait apercevoir un jeune homme aux cheveux châtains clairs avec un beau sourire. Caleb le fixait et il essayait de se concentrer sur les paroles du prêtre mais il était trop occupé à le regarder. Le ton du prêtre avait changé, il était plus ferme sur la fin. L’inconnu avait pourtant raison, il n’y avait que la vérité comme solution à son désarroi, mais comment trouver le courage de tout avouer ? La déception dans leurs regards, le rejet, voilà ce qui effrayait Caleb. La famille était quelque chose de sacré pour lui il ne pouvait pas s’imaginer seul en étant rejeté par sa famille. Le prêtre avait soulevé une possibilité qui trottait sans arrêt dans la tête de Caleb : et s’ils découvraient tout ? Et s’ils apprenaient pour tous ses mensonges par hasard avant que Caleb ait pu tout leur expliquer ? La situation serait certainement encore plus difficile après cela, ses parents condamnaient le mensonge, c’était une des valeurs principales qu’ils avaient toujours inculqué à leurs enfants. Et puis il y avait plus grave que son métier, il y avait ses attirances pour les hommes qui devenaient de plus en plus présentes et contre lesquelles Caleb essayait de lutter en vain. Il refoulait ses attirances, il devait suivre le même chemin que James : épouser une femme et avoir des enfants. La Bible mentionnait Adam et Eve, et non pas deux hommes ensemble. Alors comment imaginer avouer à son père qui était pasteur qu’il aimait les hommes ? Caleb ne pouvait pas imaginer la réaction de son père, il ne savait pas vraiment à quoi s’attendre mais les récits d’homosexuels rejetés par leur famille étaient nombreux et le dissuadaient de faire son coming out. Les pensées se bousculaient dans la tête de Caleb : d’un côté le besoin de régler ses problèmes, d’avouer un autre de ses péchés et de l’autre l’envie de découvrir le visage de son interlocuteur sans l’obstacle que représentait le grillage.

-Oui vous avez raison, seule la vérité pourra me délivrer de ce fardeau, mais comment trouver le courage de tout leur avouer ? Je sais qu’ils m’aiment pour ce que je suis mais j’ai peur de les décevoir quand ils sauront que je ne serais pas le brillant avocat qu’ils espéraient. J’aimerais être à la hauteur de mes frères et sœurs. James qui est mon frère aîné fait des études tout en travaillant, il est marié à une femme et il a des enfants. Je ne pourrais pas faire tout ça parce que il fit une pause cherchant le courage de terminer sa phrase j’aime les hommes. Mon père est pasteur et je ne pense pas qu’il serait très heureux de savoir que son fils est homosexuel.

Pendant que Caleb parlait il avait détourné le regard, il n’osait pas regarder le prêtre dans les yeux pour sa confidence sur son orientation sexuelle. Cependant il se sentait attiré par lui, il ne pouvait pas s’empêcher de le regarder alors il le regarda avec un peu trop d’insistance en prononçant sa dernière phrase :

-Mais le problème c’est que même si j’essaie je n’arrive pas à refouler mes attirances, elles sont bien trop fortes.

Caleb avait planté ses yeux dans ceux du prêtre et il n’avait qu’une envie : passer de l’autre côté du confessionnal pour découvrir de manière plus nette le visage du prêtre à la voix si douce.

Penché sur le côté, laissant paraître un oreille attentive en direction du jeune homme, Antek n'avait pas vraiment pris la peine de le regarder. De toute façon, à travers le grillage, il n'y voyait pas grand chose, c'était justement fait dans l'optique de garder l'anonymat et de mettre en confiance ceux qui aimeraient se confesser. Evidemment, lorsqu'il s'agissait d'une de ses ouailles, Antek reconnaissait la voix, et l'anonymat n'était pas préservé... Mais de toute façon, le secret de la confession était inviolable, et dans cette configuration, le prêtre n'était qu'une oreille pour Dieu.
Le jeune abbé tenta de rassurer son interlocuteur, ou du moins, de lui faire se poser de nombreuses questions, afin qu'il comprenne pourquoi ce qu'il faisait était mal, et pourquoi, surtout, c'était absurde. La vérité était la seule façon de se tirer d'affaire dans son histoire.
Visiblement, son interlocuteur avait compris où il voulait en venir. Il ne trouvait juste pas le courage de cesser de mentir, car il avait peur d'être rejeté de ses proches. C'était bien naturel et humain, dans sa situation. Mais ce fut la suite de ses paroles qui laissèrent un instant le prêtre sans voix. Antek ne s'attendait pas à cet aveu, mais surtout, il n'aurait jamais cru recevoir un protestant en confession. Entre les catholiques et les protestants, il s'agissait davantage d'une longue histoire de désamour. Cependant, notre jeune polonais sourit, tendrement, même si ce sourire devait être imperceptible pour son interlocuteur, placé derrière le grillage.
"Et pourquoi ne serais-tu pas à la hauteur? Tu peux atteindre beaucoup de choses, en suivant un autre chemin que celui qu'on pensait t'être destiné. En écoutant ton coeur, et en t'ouvrant à Dieu, tu peux tout faire. Je suis certain qu'ils seraient capable de te comprendre, en ce qui concerne tes projets professionnels. Mais il faut que tu en parles, pour mettre un terme au mensonge." répondit-il, butant un peu sur les mots. Il manquait parfois de vocabulaire en anglais, mais, pour le coup, il s'en sortait vraiment pas mal.
En ce qui concernait l'homosexualité, c'était plus complexe. Il ne connaissait pas le père du garçon, il ne savait pas si c'était quelqu'un de traditionaliste, de fermé, ou plutôt un esprit ouvert sur d'autres moeurs, sur d'autres modes de vie. L'église indiquait qu'il ne fallait pas rejeter les homosexuels, qu'il fallait les accueillir, au contraire, car eux-mêmes se sentaient déjà exclus de la Création. Pour Antek, c'était beaucoup plus simple.
"C'est ainsi que Dieu t'a fait, pourquoi devrais-tu en avoir honte? As-tu commis quelque péché mortel à cause de ça?" demanda finalement le polonais, sur un ton doux et serein. "Je ne connais pas tes parents, mais... je pense que l'amour familiale ne devrait pas avoir de conditions." conclut-il simplement.

"Et pourquoi ne serais-tu pas à la hauteur? Tu peux atteindre beaucoup de choses, en suivant un autre chemin que celui qu'on pensait t'être destiné. En écoutant ton coeur, et en t'ouvrant à Dieu, tu peux tout faire. Je suis certain qu'ils seraient capable de te comprendre, en ce qui concerne tes projets professionnels. Mais il faut que tu en parles, pour mettre un terme au mensonge."

Le prêtre ne regardait pas Caleb ce qui permettait à ce dernier de continuer de l’observer, d’essayer de deviner la douceur des traits de son visage. Le prêtre avait su trouver les mots bien que Caleb savait depuis le début qu’il n’y avait que la vérité pour le sortir de son mal être. Il devait tout avouer, avoir confiance en lui. Il avait fait déjà un grand pas en se lançant dans sa passion, il avait pris un risque et il devait aller jusqu’au bout. Son interlocuteur avait raison : pourquoi pas lui ? Il pouvait réussir. Cependant pour y parvenir il avait besoin d’être serein, d’arrêter d’avoir peur d’être découvert, d’avoir peur de ce qui pourrait ou non se passer s’il avouait tout. De toute façon il n’avait pas le choix, il devait tout leur dire.

"C'est ainsi que Dieu t'a fait, pourquoi devrais-tu en avoir honte? As-tu commis quelque péché mortel à cause de ça?". Je ne connais pas tes parents, mais... je pense que l'amour familial ne devrait pas avoir de conditions."

Le prêtre avait tout dit, il n’aurait pas pu donner meilleure réponse. Il avait raison, il était une création de Dieu alors il ne pouvait pas avoir honte de ce que le tout puissant avait créé. Les attirances qu’il avait pour les hommes n’avaient jamais causé de mal à personnes. Comme le soulignait le prêtre il n’avait tué personne, il n’avait blessé personne. La seule chose qu’il avait fait c’était d’aimer, et l’amour c’était ce que la religion prêchait après tout.

« Non je crois que vous avez raison, la seule chose que j’ai fait c’est d’aimer et de vouloir rendre les gens autour de moi heureux. De toute façon je ne peux pas changer même si j’essayais, même si je le voulais je ne pourrais pas me forcer à aimer une femme. Cela ne ferait que me rendre malheureux et elle aussi en même temps. Et puis pour ce qui est de ma famille je pense que vous avez raison, il faut que je leur dise, s’ils m’aiment vraiment ils préféreront me voir heureux et épanoui même si ce n’est pas avec une femme. Caleb fit une pause. Et s’ils ne me m’acceptent pas tel que je suis je m’en remettrais à Dieu, il m’aidera à trouver la force de m’épanouir et de trouver le bonheur même sans ma famille. »

Caleb se sentait bien avec le prêtre, il savait trouver les mots pour le rassurer, il était très bienveillant bien qu’ils n’avaient pas vraiment la même foi. En effet Caleb qui était protestant était rentré dans la première église qu’il avait croisé sans avoir remarqué qu’il entrait dans une église catholique. Cette différence n’avait pas influé sur le comportement du prêtre et cela avait rassuré Caleb qui avait réellement besoin d’aide et d’une oreille attentive. Malgré leurs différences l’altruisme était une valeur commune aux deux fois et pour cela Caleb voulait remercier le prêtre. Caleb se sentait mieux, il avait terminé ses aveux et la discussion avec le prêtre l’avait apaisé. Il voulait cependant en savoir plus sur son mystérieux interlocuteur, il n'attendait qu'une chose : pouvoir le voir sans le grillage comme obstacle. Il voulait en savoir plus sur lui.

« Quel est votre nom ? J'aimerais vous remercier personnellement, vous m'avez été d'une grande aide, vous m'avez apaisé. » dit-il en regardant le prêtre à travers le grillage.