illusions perdues. (Meg)

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{ illusions perdues }
crédit/ tumblr ☆ w/@Meg Arganza

C'est peut-être trop tard. Leur relation, peut-être qu'elle est terminée pour de bon. Peut-être qu'elle a perdu toute la place qu'elle avait dans le cœur de Meg en même temps qu'elle a renoncé à celle qu'elle avait dans sa vie. Mais ce n'est pas ainsi qu'elle le ressent, Ella. Elle est sa nièce, sa famille, presque sa seule famille. Peu importe tout ce qui peut bien arriver, peu importe le temps et la distance qui peuvent s'immiscer, elle en fera toujours partie. La retrouver ce soir, même par hasard, c'est comme un électrochoc. Un besoin viscéral de la récupérer, ne pas la laisser lui filer entre les doigts. Ne pas faire cette erreur une seconde fois. Ce n'est pas simplement pour une soirée, elle a envie de renouer avec elle. Retrouver un rôle auprès d'elle. Redevenir la tante qu'elle était. C'est certainement égoïste d'insister autant alors que c'est elle qui l'a abandonnée mais cela le serait plus encore de la laisser encore tomber. - Ce n'est pas juste pour ce soir, Meg. lui assure-t-elle, sans réfléchir. Peut-être qu'elle se lance dans une nouvelle promesse qu'elle ne saura pas tenir. Ce ne serait pas la première, ni la dernière.

Mais tu ne peux pas rester sans rien faire,
Tu ne peux pas encore la perdre.

Pas alors qu'elle vient de la retrouver. Des retrouvailles encore mitigées, à cause de la rancœur de sa nièce, mais semble-t-il aussi à cause d'autre chose. Quelque chose qu'elle ne saurait comment identifier, Ella, mais qu'elle ressent bien. Elle a changé, Meg. Son attitude le laisse deviner, ses réponses ne font que le confirmer. La jeune femme garde le silence. Comme demandé par sa nièce, elle ne cherche pas plus loin. Pas maintenant. Ce n'est pas le moment. Mais ce ne sont pas des mots qu'elle pourra oublier, elle les garde seulement dans un coin de son esprit pour plus tard. Pour quand, peut-être, elle pourra enfin se comporter comme la tante qu'elle a toujours été. En attendant, elle acquiesce aux paroles de la belle brune et termine son verre d'une traite. - Je t'attends dehors. Elle se lève, décide de lui laisser un peu de répit. Elle se faufile à l'extérieur du bar, pour retrouver un peu d'air. Elle se met à l'écart des autres fêtards pour s'allumer une cigarette. Elle la termine tout juste quand elle voit le doux visage de Meg sortir à son tour. Un faible sourire sur les lèvres, Ella, elle approche d'elle. - Alors, tu bosses ici depuis quand ? Première tentative pour la connaître, connaître celle qu'elle est devenue aujourd'hui. Et espérer, surtout, retrouver une place dans sa vie.

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— @ella gardner

Avec Ella, il y a toujours eu cette complicité. Cette relation qui va bien au-delà de celle d’une tante et sa nièce. Cette complicité, peut-être dû au jeune âge d’Ella, qui s’est transformée les années passant en un amour sans limite. Parce qu’Ella, elle a pris la place de la mère que Meg n’a pas eu la chance d’avoir. Pas parce qu’elle se comportait comme une mère, mais parce qu’elle était la seule femme de sa vie. La seule femme de son existence. C’est pour cette raison que t’as si mal, Meg, en pensant qu’elle s’en est allée. En pensant qu’elle est partie. En pensant qu’elle a tout lâché. Qu’elle a simplement continué sa vie, sans toi. C’est difficile. C’est compliqué. D’autant plus en la revoyant ici, soudainement, sur son lieu de travail. Elle n’est pas prête. Elle souffre déjà trop. Rongée par cette culpabilité qui l’assaille. Rongée par toutes les personnes qu’elle a la sensation de faire souffrir, encore et toujours. Et pourtant, devant l’insistance de sa tante, elle n’a pas d’autre choix que de lui promettre une discussion, ailleurs. Loin de l’effervescence du bar. Loin du bruit, de l’agitation. Elle acquiesce simplement, terminant son service. Terminant son service avec cette boule au ventre. Anxieuse, à l’idée de devoir mettre des mots sur tout ce qui s’est passé. Anxieuse, à l’idée de devoir se livrer. Anxieuse, à l’idée de sentir ses démons l’envahir, encore une fois. C’est ce qui risque d’arriver, beaucoup trop vite. Parce que tu sens, Meg. Tu sens qu’elle est comme toi, Ella, une véritable bombe à retardement. Mais elle puise en elle toute la force qu’il lui reste pour sortir du bar, par la sortie des employés, avant de retrouver Ella à l’extérieur. La brune sort à son tour une cigarette qu’elle allume, juste avant de s’approcher d’elle. - Ça va faire un an. Qu’elle lâche sans vraiment oser la regarder. Un an qu’elle travaille dans ce bar. Une année de plus durant laquelle elle s’est battue pour survivre. Battue pour avoir la chance de vivre, elle, comme toutes les autres jeunes femmes de son âge. - Et toi ? Tu fais quoi ? Tu réalises que tu ne sais plus rien d’elle, Meg. Que tu ne sais plus qui elle est. Ni même ce qu’elle fait. Tu réalises qu’elle n’a peut-être plus rien de la tante qu’elle était, de la femme que tu as connue. Comme elle n’est plus la petite fille qu’elle était, l’adolescente qu’elle était. Elle a changée, elle aussi. Elle n’est plus la même et elle ne le sera jamais plus.

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Debout, contre le mur du bâtiment, elle laisse échapper la fumée de sa cigarette. Et tous les souvenirs, en même temps, remonter. Les souvenirs avec Meg, avec Djawny, avec ce semblant de famille qu’ils s’étaient construite. Ils étaient, presque, heureux, tous les trois. Elle était presque heureuse avec eux, Ella. Elle s’est sentie à sa place parmi eux. Elle sentait qu’ils avaient besoin d’elle, presque autant qu’elle avait besoin d’eux. C’est peut-être là qu’elle s’est trompée. Meg, elle avait besoin d’elle. Bien plus qu’elle ne le croyait, bien plus qu’elle ne le méritait. Elle n’avait rien d’une mère, pour elle. Elle était la tante un peu cool, celle qui lui expliquait tout ce qu’elle jugeait nécessaire qu’elle sache. Celle qui lui faisait promettre que, si elle voulait essayer de la drogue, c’était à elle qu’elle devrait demander, plutôt qu’aux petits dealers de la cité. Elle avait sa tendresse et sa confiance. Contre un peu de sa présence. Jusqu’à ce qu’elle s’en aille. Jusqu’à ce qu’elle faille. Jusqu’à ce qu’elle fasse tout exploser, comme elle a toujours tout gâché.

Parce que tu peux pas t’en empêcher,
De détruire tous ceux qui peuvent t’approcher,
Tous ceux qui se risquent à t’aimer.

Et elle l’a aimée, Meg. Elle se rend compte combien elle l’aimait. Un amour si fort qu’aujourd’hui, la rancœur qu’il en reste est d’autant plus forte. Elle aurait dû faire autrement, elle aurait dû… Elle aurait dû faire preuve de courage. Affronter ce qui s’est passé avec Djawny, peut-être. Ou, juste, ne pas la sortir elle aussi de sa vie. Ne pas abandonner le père et, en même temps, la fille. Un regret de plus qui l’assaille, un de plus qui lui sera peut-être fatal. Submergée par ses pensées, elle en sort aussitôt qu’elle voit la silhouette de sa nièce sortir par la porte qui lui est réservée. Maladroite, sans doute, elle essaie d’engager la conversation à son sujet. En savoir plus sur son métier. – Et… Tu danses toujours ? elle lui demande, sincèrement intéressée. Elle se souvient, il y a de ça quelques années, combien elle était passionnée. Combien la danse la faisait vibrer. Elle réchauffait son cœur chaque fois qu’elle dansait, Meg. Mais la question lui est renvoyée, à elle, elle qui n’a jamais su vivre de sa passion. Elle qui a oublié ses rêves de comédie, quand sa vie en est devenue une. – Arf, pas grand-chose. Elle évacue la vérité, parce qu’elle a trop peur de la laisser filer. Elles commencent à marcher, côte à côte, dans un bref silence avant qu’elle ne reprenne. – Tu sais, je n’allais pas bien quand je suis partie. Je croyais que… Je croyais que j’avais besoin de prendre l’air. Mais ce n’est pas ce qui s’est produit. Elle s’est seulement isolée, elle s’est seulement perdue, un peu plus qu’elle ne l’était déjà. – J’aurais dû revenir vers toi. Mais je… J’sais pas, je pensais que t’avais plus besoin de moi. Parce que, c’est vrai, elle n’a pas besoin d’elle. Qui aurait besoin d’une âme sans vie comme modèle.

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— @ella gardner

Elle se retrouve face à Ella, après tant d’années, après tant de vies brisées. Elle se retrouve face à Ella, comme s’il suffisait de quelques mots pour tout réparer. Mais quelques mots ne suffiront pas, quelques explications ne suffiront pas, parce qu’il y a cette cassure entre elles. Cette cassure qui est venue détruire bien plus encore leur famille. Ce semblant de famille qu’ils formaient par le passé. Ce semblant de famille qui aurait pu, peut-être, avec le temps, devenir plus forte. Qui aurait pu faire taire les démons du passé. Qui aurait pu effacer les souvenirs trop douloureux, les souvenirs trop noirs. Comme la mort de sa mère. Parce qu’au fond, il n’y avait qu’avec Ella que tu ne te sentais pas coupable, Meg. Que tu ne te sentais pas responsable de la mort de celle qui aurait dû être ta mère. De celle qui aurait dû t’aimer pour le restant de ta vie. Ella, elle lui a pardonné. Elle lui a toujours pardonné. A l’inverse de son père, à l’inverse de Djawny, qui s’est toujours comporté comme si elle n’était qu’une meurtrière. La meurtrière de la femme qu’il aimait. Et elle se souvient d’Ella, comme si c’était hier. Elle se souvient d’elle et de tous ces moments passés ensemble. Ella aussi, semble s’en souvenir, lorsqu’elle évoque la danse. - Oui. J’aimerais intégrer une école. Mais pas maintenant. Pas maintenant, parce que ce n’est pas le moment, ce n’est plus le moment. Pas après tout ce qu’elle vient de traverser, elle n'est pas prête. Et t’es en train de sombrer, Meg. T’as plus les moyens de te battre pour t’en sortir. T’as plus les moyens de te battre pour aller au bout de tes rêves. Pour te démarquer des autres. Elle chasse ces pensées de son esprit. Elle oublie tout, pour se concentrer sur ce que lui dit Ella. - T’as été lâche. Ce n’est pas une question d’avoir besoin de toi ou non. Simplement tu étais là, dans ma vie et… Et d’un coup, t’es partie. C’est violent, très violent, mais c’est de cette façon qu’elle l’a ressenti, Meg. Et elle n’avouera pas qu’elle avait besoin d’elle, mais c’était pourtant le cas. Elle était tout, Ella, à ses yeux. Elle était sa famille. Elle était la seule femme de sa vie. Et du jour au lendemain, elle est devenue une inconnue, un souvenir effacé, perdu à jamais. Ella, perdue à jamais, c’est ce que tu pensais, Meg. Mais ce soir, c’est comme si la vie voulait te voir la retrouver. C’est comme si elle n’était pas ici par hasard.

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Tout le mal qu’elle a pu faire autour d’elle. À tous ces hommes qu’elle prend pour cible, à tous ceux qui ne sont que de vulgaires victimes. Tout ce mal, il ne l’a jamais atteinte. Jamais comme celui qu’elle ressent devant sa nièce. Meg, elle aurait tout fait pour la protéger. Elle a veillé sur elle, comme elle l’a pu, plus qu’elle ne l’a fait pour n’importe qui. Mais cela n’a pas suffi. Tout son amour, il n’a pas suffi. Parce que tu fais le mal bien mieux que tu n’sais faire le bien, Ella, peut-être que c’est ce dont t’as besoin. Peut-être que tu ne sais rien faire d’autre. Mais il y a quelque chose, dans les prunelles de sa nièce, qui lui fait espérer le contraire. Quelque chose qui lui donne l’espoir qu’il peut encore y avoir un peu de lumière. Elle lui a fait du bien, autrefois, elle a été là. Elle a envie de redevenir cette personne-là. Ne serait-ce qu’avec elle, ne serait-ce que pour elle. Parce qu’elle t’a sauvée, ils t’ont tous les deux sauvés. C’est peut-être à toi maintenant de te battre pour les retrouver. Elle a conscience que ce ne sera pas facile. Que ce sera peut-être même impossible. Mais si elle a une infime chance de retrouver sa place dans le cœur de Meg, elle veut la saisir. Par leur amour, elles sont toujours liées. Il y a des choses que rien ne peut modifier. Elles perdurent même avec le temps, même avec la distance. Comme l’exemple flagrant, sa passion pour la danse. Un faible sourire apparaît sur le visage de la sulfureuse quand elle entend sa nièce confirmer qu’elle voudrait intégrer une école spécialisée. – C’est génial. T’as raison, il faut s’accrocher à son rêve. Elle ne le sait que trop bien, elle qui a lâché le sien. Plus de but dans sa vie, elle erre, sans avenir, avec un passé trop rempli. La réalité, exposée si brute par celle qu’elle a vu grandir, elle lui serre le cœur. – Je sais, j’ai… j’ai aucune excuse. Ou peut-être que si, elle pourrait lui expliquer. Lui confier ce secret. Mais elle n’est pas prête à lui avouer. Elle préfère encore subir ses foudres, plutôt que le déterrer. – Je regrette. Je regrette vraiment… Et j’aimerais revenir en arrière, sauf que je peux pas. Tout ce que je peux faire, c’est te demander de me laisser une autre chance… Et je t’assure que je ne t’abandonnerai pas cette fois... Les mots difficilement avoués, elle aimerait tant qu’elle lui accorde cette chance. Qu’elle lui laisse lui prouver toute son importance. Qu’elles se retrouvent, toutes les deux, comme la famille qu’elles étaient. Parce qu’elle avait besoin d’elle, besoin d’eux, autant que le contraire.

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— @ella gardner

En acceptant cette discussion avec Ella, elle tombe dans un piège. Elle tombe dans son propre piège. Parce que parler avec elle, c’est prendre le risque de lui pardonner. C’est prendre le risque de ne pas pouvoir la repousser. De lui ouvrir une nouvelle porte dans sa vie, elle qui fait tout pour en fermer un maximum. Elle n’est pas prête, Meg. Pas prête à donner de nouveau. Pas prête pour prendre un si grand risque, celui de s’attacher, encore, et de perdre quelqu’un, encore. Elle n’est pas prête, parce qu’elle ne survivrait peut-être pas à une nouvelle perte. Au fond, survivre, c’est tout ce que tu fais, Meg. C’est tout ce que tu as toujours fait. Parce que tu t’es débattue contre la vie et ce depuis ta naissance. C’est peut-être le moment de tout lâcher, tout abandonner, non ? Ella est pourtant là, juste sous ses yeux, à s’excuser. A réclamer une nouvelle chance. Et sans le savoir, en le faisant, elle la ramène à la vie. Un peu, rien qu’un peu. Elle la ramène à ce qu’elle connaissait, avant, la famille, l’amour. Elle la ramène à tout ce qu’elle tente de bannir de sa vie. Et elle reste sans voix, la danseuse. Elle reste sans voix parce qu’elle n’est pas certaine d’avoir la force de la laisser s’approcher. Parce qu’elle n’est pas certaine d’en avoir envie. Tu l’aimes toujours, Ella. Tu l’aimeras toujours. Et il y a cette mort qui plane autour de toi, qui traine contre tes épaules. Cette mort que tu ne veux pas lui infliger, à elle aussi. Peut-être qu’elle devrait la protéger, la repousser pour la protéger, comme elle le fait avec Aquila depuis des mois. Peut-être qu’elle devrait lui dire de s’en aller et de ne jamais revenir. Mais il y a une différence, entre Ella et Aquila. Aquila, t’as toujours fait que prendre soin d’elle. T’as toujours fait qu’essayer de la sauver. Seulement aujourd’hui, t’en es juste plus capable. Ella, c’est elle qui était là pour toi. C’est elle, qui a substitué comme elle le pouvait au rôle de mère que tu n’as jamais eu la chance d’avoir. Et la vérité, c’est que t’en as peut-être encore besoin. - Je ne suis plus la personne que tu as pu connaître. Tu ne devrais pas chercher à revenir, crois-moi. Parce qu’elle n’a rien de bon à apporter. Rien d’autre qu’une tristesse incommensurable, qu’une douleur irréparable. Rien d’autre qu’une âme brisée, perdue, perdurant à travers le souvenir de l’être aimé. De celui qui n’est plus.

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C’est son instinct qui parle avec Meg. Comme un instinct de survie ou, plus fort encore, son instinct maternel. C’est ce besoin qu’elle a d’être auprès d’elle. La retrouver, après toutes ces années, après l’avoir trop longtemps délaissée. Elle n’a jamais voulu que son bien. Seulement elle ne pensait pas qu’il passait aussi par sa présence à ses côtés, Ella, elle ne pensait pas qu’elle aurait besoin d’elle pour lui tenir la main. Trop habituée à faire souffrir plutôt qu’à guérir, elle n’imaginait pas un instant que son absence laisserait un tel vide. Elle n’a pensé qu’à son propre ressenti, à sa relation avec Djawny... Au détriment de la seule à laquelle elle aurait dû penser. Mais elle compte bien se rattraper. Elle saisit cette soirée comme une nouvelle opportunité, une chance que la vie lui donne de la retrouver. Des chances, elle n’en a pas beaucoup, Ella. Impossible qu’elle gâche celle-là. En saisissant la brèche qui s’ouvre dans le cœur de sa nièce, la louve s’immisce à l’intérieur sans hésiter. Retrouver la place qu’elle a fait l’erreur de laisser.

Tu espères, Ella,

Pour la première fois depuis une éternité, tu oses l’espoir,
Tu oses y croire.

Parce que la rancœur de Meg est à la hauteur des sentiments qu’elle lui portait. Des sentiments qu’elle lui porte peut-être toujours, au fond, bien au fond de son cœur. Elle ne se doute pas des craintes qui l’habitent, Ella. Elle ne se doute pas que c’est aussi pour elle qu’elle a peur. Elle ne pense qu’à sa méfiance légitimée, celle qu’elle a elle-même engendrée. Alors elle essaie, Ella, elle essaie de la rassurer autant qu’elle le peut. En même temps qu’elle se fait, à elle aussi, la promesse de ne jamais plus l’abandonner, pas elle. Surtout pas elle. Mais les paroles de sa nièce lui donnent cette sensation amère, celle qu’elle ne sait pas tout. Elle ne sait rien, en vérité, rien de ce qu’elle a vécu durant toutes ces années. Elle ne sait rien, et pour la première fois, cela l’inquiète. En pleine marche, la jeune femme s’arrête. Elle se met en face de Meg pour plonger ses prunelles dans les siennes. - Écoute, je ne sais pas ce que c’est, mais je vois bien qu’il t’est arrivé quelque chose. Je ne vais pas te poser de question. Non, elle ne le fera pas. Parce qu’elle sait qu’elle n’en a pas le droit. Pas le droit de débarquer après tout ce temps pour lui demander des explications sur celle qu’elle est devenue. Mais elle attendra, Ella, le temps qu’il faudra. - Mais il n’y a rien de toi qui me fera peur. Si je suis partie, ça n’avait rien à voir avec toi, mais si je reviens, c’est bien pour toi. confie-t-elle dans un murmure, presque embarrassée. Elle n’a pas l’habitude de se livrer. Sa main qu’elle prend doucement dans la sienne, elle ajoute sans quitter son regard. - Je veux pas faire la même erreur deux fois. Encore faut-il qu’elle lui laisse une chance. Qu’elle leur laisse, à toutes les deux, une chance.

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— @ella gardner

Ne pas faire la même erreur deux fois. Pourtant, c’est bien par hasard, qu’elle se retrouve là dans sa vie ce soir. C’est bien par hasard, qu’elle a la possibilité de saisir une deuxième chance. Elle ne semble pourtant pas prête à laisser tomber, Ella. Elle ne semble pas prête à baisser les bras. Et tu ne sais pas si c’est exactement ce dont tu as besoin, Meg, ou si au contraire, c’est tout ce qu’il ne te faut pas. Elle n’en sait rien, mais elle n’a pas la force. Pas la force de lutter. Pas la force de la repousser en bloc. Parce que c’est ce qu’elle fait déjà au quotidien, repousser les personnes qu’elle aime. Repousser les personnes qui comptent le plus pour elle. Peut-être que ce sera différent, avec Ella. Peut-être qu’elle parviendra à l’adoucir, à la faire revenir à la raison. A ce qu’elle était, avant. A ce qu’elle était, lorsqu’elle était encore elle-même. Et elle voit bien, Ella. Elle voit bien que t’es différente. Que t’es plus la même battante. Que quelque chose t’a brisé. Détruite, peut-être à jamais. Mais elle a toujours été un peu comme son seul parent, Ella. Parce que Djawny, lui, il n’a jamais vraiment été là. Il ne s’est jamais comporté comme un père. Il n’a jamais eu, envers elle, ni l’amour, ni la douceur. Il s’est contenté de lui inculquer quelques valeurs militaires, rien de plus. Rien d’autre. - Bien, si je n’ai pas le choix. Qu’elle souffle, attrapant un stylo dans son sac. Puis elle s’approche de nouveau d’Ella et inscrit son numéro de téléphone sur sa main. - T’auras qu’à m’appeler quand… Quand t’auras envie. C’est tout ce qu’elle peut faire, pour ce soir. C’est tout ce dont elle est capable. Est-ce qu’elle répondra à ses appels ? Elle n’en sait encore rien. Mais c’est une ouverture, qu’elle lui laisse. Une petite porte ouverte pour entrer dans sa vie. - Bonne soirée. Et elle disparait, dans l’obscurité. Laissant en suspens cette promesse de retrouvailles.