[-18] Réconfort. (James)

Cette fois, son épouse était allée trop loin. Il pouvait tout accepter, les insultes, les coups, mais lorsqu'ils étaient dirigés envers lui. Cette fois, énervée, sa femme avait fini par frapper l'une des jumelles. Une gifle. Et pour rien en plus, pour une crise de gamine. James s'était interposé et cela avait fini en dispute... Une nouvelle dispute, comme toutes celles qu'il vivait en ce moment, depuis des mois, des années. Il se disait que quelque chose clochait chez lui, que c'était de sa faute, mais, pourtant, il faisait tous les efforts possibles pour retrouver l'amour de Felicity...Et surtout l'amour qu'il avait lui-même perdu. Il n'avait plus d'étincelle dans le regard lorsqu'il regardait la quadragénaire. Il n'avait plus rien que de la crainte, la peur de mal faire, la peur des mots qu'elle pourrait lui dire, encore et encore, toujours. Il aimerait que leur romance redevienne ce qu'elle était à ses débuts, mais plus le temps passait, plus il se résignait à n'être que l'objet de son épouse... Celui qu'elle prenait lorsqu'elle le voulait. Cela faisait longtemps qu'il n'avait plus de désir pour elle, que leurs ébats n'avaient lieu que pour éviter les prises de tête.
Les cris s'élevèrent, les insultes fusèrent... Encore et encore. Puis le calme retomba, lorsqu'elle lui annonça aller dormir. James alla border les fillettes, leur raconta une histoire, sécha leurs larmes. Elles devenaient de plus en plus grandes, elles n'étaient ni aveugles ni sourdes. Elles se rendaient compte que la vie de leurs parents n'était pas comme celle des autres, même si notre secouriste faisait tout pour les préserver. Encore sous le choc, effrayé, tremblant, et surtout très peu désireux de rejoindre celle qu'il avait épousée dans son lit, James sortit de la maison. Il savait parfaitement que cela lui vaudrait une énième bataille, une énième humiliation. Mais il devait prendre l'air. Mieux, il devrait parler à quelqu'un. Reprenant ses esprits, il se dirigea vers la nouvelle adresse de son amie, Camilla. Il ne voyait qu'elle pour discuter, là, maintenant. Seul son nom était apparu à son esprit alors qu'il se trouvait perdu. A ce qu'il avait compris, elle était hébergée chez une amie. Il sonna à l'appartement indiqué et patienta sagement jusqu'à ce qu'on lui ouvre. Ce fut Camilla elle-même qui apparut dans l'embrasure de la porte, en petite tenue. "Cam.." souffla-t-il. "Je suis désolé de te déranger ici, mais... j'ai besoin de parler un peu... Ou simplement de passer un peu de temps avec une amie." déclara-t-il, les yeux baissés, les joues rouges et l'air penaud sur son visage.

Camilla, c'était la seule personne à savoir ce qui se passait. Enfin, pas dans les détails. James ne lui avait nullement raconté les détails, mais il avait avoué, un soir de faiblesse, que sa femme avait déjà levé la main sur lui. Une fois. Et son amie devait penser que ce n'était pas quelque chose de quotidien. James voulait absolument éviter de créer des ennuis à Felicity... C'était son épouse, il l'avait épousée pour le meilleur et pour le pire. Et puis, il y avait les gamines... Elles avaient besoin de leur maman, malgré les accès de colère dont elle était l'objet. Au moins, elle ne les frappait jamais. Elle était une bonne mère, en somme. Sauf ce soir-là. Ce soir qui pourrait tout remettre en question. L'esprit de James se perdait encore davantage. Il devait prendre du recul, quitte à se faire encore disputer à son retour. Car il y aurait droit à la crise. Encore. Comme à chaque fois qu'il sortait seul, qu'il ne prenait pas la direction du travail. Heureusement, en partant, il avait bien vu que la quadragénaire dormait, à poings fermés, sans doute épuisée par les émotions. Ce devait être compliqué pour elle aussi. Compliqué de vivre avec un homme qui ne l'aimait plus. Jamais s'en voulait terriblement pour cela.
Camilla l'attrapa par la main et le tira à l'intérieur, rapidement, il sourit doucement. "Je..." Aussitôt les soupçons de son amie se posaient sur son épouse. En même temps, avec les éléments qu'elle avait à sa disposition, il fallait être aveugle pour ne pas comprendre. James baissa les yeux. Il ne pouvait pas la regarder. "J'ai encore merdé." Oui, car tout était de sa propre faute, il en était persuadé. "On s'est encore disputé et... Elle a giflé une des petites..." déclara-t-il. "J'étais hors de moi. Je suis peut-être un mauvais mari, et un mauvais père. Qu'est-ce qui cloche chez moi, Cam?" demanda-t-il simplement, se laissant tomber sur le canapé, de dépit. Il savait que son interlocutrice ne se formaliserait pas s'il prenait ses aises. De toute façon, il était trop éprouvé pour rester debout.

C'était logique qu'elle ne puisse pas comprendre. Personne ne pouvait comprendre. Un homme qui battait sa femme, tout le monde était d'accord sur le fait que c'était condamnable. Mais une femme qui bat son époux, on se demande aussitôt si ce n'est pas le mari le problème... Une altercation de ce type dans un lieu public? Dans le premier cas, on s'interpose, dans le deuxième cas, on rit. Cependant, en public, Felicity était quelqu'un de doux et de très respecté. Elle donnait la sensation d'être une femme parfaite, dans une famille parfaite. Mais derrière toute cette image idyllique, se cachait des choses bien plus terribles.
De même, personne ne parvenait à comprendre qu'il puisse avoir honte, mais surtout, envie que tout soit réparé, de pouvoir aimer à nouveau la femme de sa vie, comme autrefois, comme avant la perte de leur bébé. Si seulement la vie avait été plus douce, rien de tout cela n'aurait lieu. Tout ça pour un sac à mains qui contenait trois fois rien.
"Elle a fait ça parce qu'elle était énervée, à cause de moi. Comme d'habitude. Le plus ahurissant, c'est que je ne me souviens même pas de ce qui s'est produit, du pourquoi de la dispute..." Il haussa les épaules, reprenant son souffle, tentant de se calmer pour parler le plus posèment possible. Il finit  par sourire avec énormément de tendresse à l'attention de la demoiselle, assise à ses côtés. "C'est gentil ce que tu me dis, merci, Cam.." souffla-t-il simplement, posant une main contre celle que la jeune femme avait posé contre sa joue, dans l'optique de la caresser doucement, de manière à rassurer le père de famille. Ces mots le touchaient, vraiment. Il n'était pas habitué à entendre ce genre de paroles douces, mais plutôt des réprimandes et des insultes. Dans la bouche d'une femme, cela sonnait étrangement pour lui. Il en rougit même... Cam, elle avait ce côté hypnotisant, ce côté tendre qu'il appréciait. Si seulement Felicity pouvait agir comme elle...

Ce dernier hocha la tête en réponse à sa question. "Non merci, ne te dérange pas à ce point pour moi, mais..je veux bien un petit verre d'eau..." déclara-t-il timidement, comme s'il était en train de demander le plus grand sacrifice qui soit, comme si c'était une demande énorme. "Et encore désolé de te déranger comme ça, à cette heure... J'espère que je ne réveille personne..." souffla-t-il ensuite, presque chuchotant, tournant la tête dans tous les sens, attrapant la main de la brune dans la sienne, avant de pousser un large soupire, se rendant compte qu'ils étaient vraisemblablement seul.
Camilla, c'était sa confidente. Il l'appréciait énormément, car il savait qu'elle n'allait jamais rien dire ni faire contre son gré. Elle avait promis. Et il savait qu'il pouvait lui faire confiance à 100% sur ce point. De toute façon, elle ne pouvait rien faire, toutes les décisions reposaient sur les épaules du jeune homme. Et il n'était pas prêt à quitter son épouse. Non, jamais. Le mariage, c'était sacré. Il ne savait pas ce qu'il devait faire, mais il améliorerait la situation un jour. Il devait juste trouver ce qui clochait chez lui. Ou alors, il accepterait la situation et vivrait joyeusement, une fois tout cela dompté.  

Comme il s'en doutait, Camilla ne comprenait pas les événements qui marquaient tous les jours la vie de son ami James. D'un point de vue, cela pourrait paraître simple: il était dans un conflit ouvert avec sa femme, elle ne faisait aucun effort, alors il devrait divorcer. Mais dans les faits, et dans l'esprit du jeune homme, c'était bien plus complexe que cela. Il avait des enfants, deux fillettes. Celle qui avait la meilleure situation, ce n'était pas l'étudiant en médecine, à mi-temps dans le secourisme, mais bien l'avocate pleine aux as, à qui appartenait la maison et tout le reste. A vrai dire, avec le contrat de mariage formulé, s'il divorçait, il n'aurait rien. Rien du tout. Et cela ne le dérangerait pas le moins du monde, s'il n'y avait pas le risque de perdre ses filles. Et puis, un mariage, c'était pour la vie. Même s'il le feu n'était bien plus ardent en ce qui le concernait. C'était comme un voeux que l'on faisait à l'autre: le chérir pour toujours. Mais, James, il avait quitté le nid. La proximité de son amie lui faisait du bien. Un peu de tendresse, dans ce monde de violence.
"C'est ma faute. Elle... Elle est... fragile. Il faut que je fasse attention." Et encore, il rejetait la faute sur lui-même, alors qu'il était évident que Felicity était la seule coupable dans l'histoire.

Il but le verre d'eau donné gentiment par son amie, lui envoyant un petit regard et un sourire timide. Ses mains tremblaient encore un peu, mais il se sentait plus calmé. Par les mots de Camilla à son encontre. "Ah...Ah bon?" demanda-t-il alors qu'elle lui rétorquait qu'il venait de sauver sa soirée. Elle le serra dans ses bras et il ferma les yeux pour profiter de ce câlin improvisée. Ce que c'était bon de se sentir apprécié... D'avoir un geste et un mot tendre envers soi.
Dans quelle sens disait-elle cela? Il sourit. Elle avait une idée derrière la tête, vu le regard malicieux qu'elle lui lança, avant de lui demander de la suivre dans la petite chambre. Il attrapa sa main et la suivit simplement, en toute confiance. Là, elle s'assit sur ses genoux, naturellement, l'enlaça et le regarda droit dans les yeux. "Qu'est-ce... Qu'est-ce que tu fais, Camilla?" demanda-t-il, pas très sûr de comprendre. Il était marié, il ne pouvait pas... Et en même temps, l'appel de la tendresse, l'appel d'un moment intime de lâché prise, d'un moment où il pouvait prendre son pied sans crainte. Les relations charnelles avec son épouse n'étaient plus que des moments obligés, où il se donnait à elle, parce qu'elle le voulait, parce qu'il voulait éviter la dispute. Avec Camilla, ce serait différent, ce serait un moment... choisi. Un moment de réconfort, un moment voulu. Mais là, comme ça... Tromper son épouse? "Tu veux qu'on...? Oh..." souffla-t-il simplement, ses joues se mettant à rougir. "Ce ne serait pas sage. Je suis marié.. Mais toi, tu.. Tu veux vraiment ça, avec moi?" demanda-t-il. C'était bizarre, de se sentir désirable, dans sa situation. Se sentir désirable, là, comme ça, d'un coup.

James passa une main sur la joue de son interlocutrice, tendrement, délicatement. Elle se faisait du souci pour lui. C'était bon à entendre, même si ce n'était certainement pas une situation enviable. Elle n'était pas là pour lui faire entendre raison, même si elle émit quelques phrases sur sa relation avec son épouse. Elle n'avait pas le droit de le traiter comme cela. Non, elle ne pouvait pas. Et Camilla, qui lui disait ses mots, tout en se montrant si douce... James se laissa enivrer un instant. "Je sais bien, mais... Tous les jours, j'espère qu'elle va changer, que ça va redevenir comme avant. Je dois faire preuve de patience, n'est-ce pas?" Pourtant, courir après un amour éteint, c'était certainement la pire chose d'une vie. Mais il pensait à ses filles, qui méritaient une vie normale, dans une famille saine et aimante. Il ne perdait pas l'espoir que tout cela soit possible, et c'était ce qui le boostait tous les jours.
Les deux jeunes gens quittèrent le salon pour se retrouver dans la chambre habitée par la demoiselle en ce moment. Une chambre sobre, très confortable. Assis sur le lit, il laissa la demoiselle venir se poser contre ses genoux, tout en l'enlaçant. "Mais l'adultère..." Il la regarda un instant, se perdant dans ses yeux, yeux remplis de tendresse et de désir. Dans ceux de son épouse, il voyait le désir, mais pas la tendresse, ni la douceur. Il voyait juste l'envie de posséder. L'adultère était un péché. Un péché terrible... Et en même temps, c'était comme une évidence. Ce manque d'affection grandissant qui le submergeait chaque jour, il pourrait le soigner entre les reins de la demoiselle. Camilla avait l'air sûre d'elle, d'ailleurs, elle ne tarda pas à le lui prouver, laissant tomber sa nuisette à ses pieds, avant de venir l'embrasser fougueusement. Il ne se débattit pas... Et l'incrédulité du premier baiser échangé s'évapora subitement lorsqu'il sentit de nouveau les lèvres brûlantes de la demoiselle sur les siennes, lorsqu'elle lui ôta son haut pour caresser son torse et le couvrir de baisers. "Cam..." souffla-t-il simplement, avant de s'emparer de ses lèvres à son tour. Un peu d'affection, de tendresse, de douceur... Faire l'amour par volonté, par désir. Il se laissa alors tomber sur le dos, la tirant jusqu'à lui. Il finirait en enfer pour ça, c'était certain. Mais, au moins, cette fois, il y aurait une vraie raison à la jalousie de Felicity. Il déposa un baiser dans le creux de son cou, cherchant ensuite de la main à dégrafer son soutien-gorge. "Je suis fou..." souffla-t-il, en sentant dans son pantalon se lever le signe de son désir pour sa partenaire. Son amie. Sa confidente. Il s’apprêtait à avoir des relations intimes avec son amie. A tromper sa femme... Dans sa tête, c'était une explosion de pensées, de troubles... Et en même temps, une excitation d'avoir droit à quelque chose de nouveau, quelque chose de plus vrai.