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| Sujet: melancholia (kaz) Mar 19 Mar - 18:08 |
| C’est sur l’asphalte que crissent les pneus, diable au volant et Thelma qui tente de pas vomir ses tripes côté passager. Butch a ces airs de vieux boxeur, le nez gondolé, souvenir d’un os brisé, les traits taillés à la serpe, un charme étrange qui effraie plus Thelma qu’il ne l’attire mais c’est le moins chiant de l’équipe. Il ne la regarde pas avec mépris, désir mal placé ou comme si elle n’était qu’une idiote. Il la regarde avec réserve et un fond de respect. Respect qui se fait rare dans le service, qu’on lui offre pas souvent juste parce qu’elle est la plus jeune, la plus inexpérimentée, la plus femme aussi, sa face de gosse rendant peu crédible chaque mots qu’elle peut sortir de sa voix qui ne porte pas beaucoup. “Tu peux pas ralentir ?” qu’elle jette au travers des bruits de la rue qui passe par la fenêtre entrouverte, le vent fouettant sa queue de cheval et leurs visages concentrés sur la route. Butch grogne, secoue la tête et elle prend ça pour un non bien significatif. Ses doigts crispés sur sa ceinture de sécurité, elle s’y cramponne comme pour s’assurer qu’elle ne passera pas à travers le pare brise. “Ok alors tu peux m’expliquer où on va ?” “Squat.” Butch il parle peu, il essaie jamais d’entrer dans les détails, il bougonne des insultes, il crache par terre pour montrer son dédain et il use trop vite des poings sur ceux qui l’emmerdent. Mais jamais les femmes. Elles, il leurs parlent comme aux autres, sans distinction. Elle de la chance Thelma, d’arriver à lui arracher quelques bribes de mots, des phrases entières plus rarement mais ça arrive. Elle fronce les sourcils, sans comprendre pourquoi ils doivent descendre dans ce genre d’endroits, sorte de dimension parallèle aux odeurs de morts et de maladies. “P-Pourquoi on va là-bas ?” Butch prend un autre tournant et Thelma retient un couinement vite ravalé, elle s’étrangle avec sa panique mais se force à ne pas trembler face à l’arrivée imminente dans un Enfer d’accros à la morphine, à l’héro ou à la poudreuse qui se tapent des tripes dans des recoins cachés du monde. “C’est samedi soir, on chopera forcément quelques uns de ces enculés.” La vulgarité hérisse sa peau, scalpe sa pudeur et elle se trouve hypocrite de s’insurger silencieusement de ce genre mots. T’es pas une sainte Thelma, t’as été la maîtresse d’un Diable alors baisse les yeux. Déglutissant difficilement, elle observe les lieux de bétons qui s’offrent à eux quand ils arrivent, deux autres bagnoles banalisées derrière eux. “Mais on va pas attirer l’attention ?” Cessant de faire ronronner le moteur, Butch se tourne vers elle, son air sérieux, blasé de vivre et de ce métier plaqué sur le visage “On est pas dans Alias, on est pas là pour s’infiltrer. Alors détends toi, tu veux pas faire tout foirer.” C’est pas une question, juste une affirmation qui remet de l’espoir sur les plaies de ses doutes. Sortant de la voiture, elle entend au loin les rires et les cris des squatteurs, y’a même une musique aux airs de guitares tellement métalliques que ça en devient sordide. Les mains plongées dans les poches de sa veste, elle reste là Thelma, figée dans le sol à observer la bâtisse abandonnée. Ca aurait dû être des bureaux ou une résidence peut-être, elle en sait rien. Il reste qu’un squelette de pierres taguées, de l’herbe qui survie entre les interstices des briques et des vestiges de passages éphémères à tous les coins. “Allez s’coue toi Galloway.” Butch la hèle lui fait signe d’avancer alors elle le fait, instinctivement, traînant un peu des pieds avant d’assurer un peu plus sa démarche, de le rattraper en quelques foulées. Il suffit de quelques marches remontées pour qu’ils atteignent l’étage saccagés par un groupe qu’elle entend au loin. De là où ils se cachent, Thelma aperçoit des corps couchés à même le sol, visages couverts par des vêtements. D’autres s’embrassent quand d’autres encore ont la face blêmie par la défonce trop récurrente. Thelma observe ces ruines humaines en sentant une profonde tristesse lui remonter dans la gorge pour venir brûler ses yeux. Elle se remet à trembler, les muscles en titanes sous l’angoisse. Mais elle a pas le temps d’intercepter les signes silencieux d’une attaque imminente que le chaos éclate. “POLICE, PERSONNE NE BOUGE !” Aux côtés de Butch qui pointe déjà son flingue sur ceux qui paniquent et tentent de s’enfuir, Thelma observe l’arrestation avec un air absent, ses lèvres entrouvertes sur un souffle à l’agonie. S’avançant dans la pièce où un feu ronronne dans un tonneau d’essence, elle attrape des regards où diverses émotions tanguent. De la crainte, du mépris, de la rage, beaucoup de rage et d’autres qui n’ont pas l’air de comprendre ce qu’ils se passent. C’est quand elle sent une ombre bougée sur le côté qu’elle a le mauvais réflexe. Celui d’attraper l’arme qui trône à sa hanche, de la pointer trop vite sur la silhouette qui s’avance, qui a l’air de danser avec la mort et c’est elle, qui a l’impression de se prendre une balle en pleine tête. Ca éclate. Ca la frappe ces traits du passé, un revenant sortie de l’Enfer. “Kaz ?” Elle murmure. Personne l’entend et elle reste figée Thelma, le cœur brinquebalant, prêt à craquer sous la pression. Alors baisse ton arme Thelma, baisse la avant de tirer sans faire exprès. De faire une bavure de plus. Mais non, elle veut être sûre que c’est lui, qu’il est pas juste un sosie qu’on a mis sur son chemin pour lui rappeler tout ce qu’elle a perdu des années auparavant. Ce serait le châtiment de trop. |
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| Sujet: Re: melancholia (kaz) Jeu 21 Mar - 22:20 |
| J'voudrais arrêter de fuir, mais j'peux pas. J'voudrais en finir, mais j'y arrive pas. Kaz a marché longtemps. Il n'a pas su où aller, s'est contenté de traîner sa carcasse fatiguée jusqu'au point de non-retour. Il ne serait certainement pas arrêté si son corps n'avait pas lâché d'épuisement. Dans son sommeil, il sent les griffes de ses démons agripper à sa chair et en faire de la charpie. Ses bras sont refermés autour de lui pour le protéger du froid et de l'impact de son cauchemar. Il tremble excessivement, la sueur perlant son visage fantomatique. Une dose manquée et Kaz n'est plus que l'ombre de soi-même. Le sol est gelé, sa froideur traversant ses faibles vêtements pour venir embrasser sa peau volcanique. Il a les dents qui claquent malgré la fièvre. Marek apparaît derrière ses paupières closes et il se recroqueville sur lui-même, relevant ses avant-bras à son visage. Kaz retient sa respiration, son corps entier raidi dans l'attente d'un coup qui ne vient pas. Le rire de son frère résonne dans sa boîte crânienne. Il n'était pas aussi effrayant, avant. Il y a un temps où Kaz adorait entendre Marek rire. Aujourd'hui, dans chacun de ses rêves, ce son n'annonce jamais rien de bon. Les mains fermes de son frère l'attrapent et il se laisse faire, se comportant plus comme un objet inerte qu'un être vivant. Il n'a pas la force de se battre. Pas aujourd'hui. Tue moi, j'suis prêt. Tue moi, c'est la seule chose que j'attends. Un flingue apparaît entre eux, le doigt de Marek sur la gâchette. Il sourit. Enfin, petit frère. Enfin. Kaz sourit aussi. Dans une seconde, tout sera terminé. Toutes les souffrances s'effaceront, la culpabilité envolée et le manque oublié. Son aîné tire. Il tire et les yeux de Kaz s'ouvrent sur la réalité, des mains fermement accrochées à ses épaules pour le secouer. Il fronce les sourcils dans l'incompréhension, essayant de s'habituer à son environnement. Le visage au dessus de lui est inconnu – tout comme l'endroit où il se trouve. – Il y a les flics, que l'étrangère murmure, une lueur de panique dans la profondeur de ses opales émeraudes. Elle aide Kaz à se relever, le retenant par la taille. Ses paupières se font de nouveau lourdes, la gravité de la situation vite effacée de son esprit. Un corps se percute au sien dans l'affolement et il tombe à terre, entraînant l'inconnue avec lui dans sa chute. – Laisse moi, qu'il chuchote dans la pénombre. D'un coup de la main, il refuse son aide. Barre toi, allez. T'en fais pas pour moi. Kaz n'est pas même sûr d'avoir réussi à parler, trop épuisé pour articuler convenablement. La demoiselle ne bouge pas pendant quelques secondes, ses yeux à la fois terriblement perdus et sincères plongés dans ceux de Kaz. Sans un mot de plus, elle s'éloigne. Il n'en attendait pas moins de la part d'une camée, son aide précédente étant déjà plus que ce qu'il aurait pu rêver. Ses paumes plaquées contre les briques, il se relève finalement, ses jambes lourdes et le crâne en bouillie. C'est la panique autour de lui. Tout le monde se bouscule. Kaz, lui, porte sa carcasse sans une once de peur – très certainement parce qu'il n'arrive toujours pas à comprendre le sérieux de ce qui se passe autour de lui. Il ne fait pas attention où il marche, trébuchant sur un corps recroquevillé au sol et manquant de tomber aux pieds de quelqu'un d'autre. Le métissé relève les yeux avec une lenteur à en faire damner le monde entier. Ce qu'il voit en premier, c'est une arme pointée sur lui, un doigt inconnu posé sur la gâchette comme l'était celui de son frère quelques minutes auparavant. Vite, son regard se concentre sur la personne qui se tient derrière. – Kaz ? Si son cœur battait fort avant, il semble maintenant prêt à s'échapper de sa poitrine. La familiarité des traits devant lui lui retourne le bide, bien plus encore que la cible sur son front. Il ne lui faut que quelques minuscules secondes pour que ça le frappe, que le passé revienne avec la force d'un ouragan. – T–Thelma ? Il bredouille, les yeux écarquillés. Oh, Kaz a marché longtemps. Il a marché jusqu'à s'en défoncer les chevilles. C'est sans destination qu'il s'est déplacé, continuant toujours tout droit avec l'espoir que ça le sauverait de ses démons. De son frère. De Moïse. De son passé. Du monde entier. Evidemment, il s'est trompé. Il ne pourra jamais se débarrasser complètement de ses souvenirs, ni de l'être qu'il a été et de ses conneries antérieures. Thelma est là pour le lui rappeler. Et Kaz se retient d'hurler à la mort, l'entièreté de ses muscles menaçant de lâcher sous le poids de l'épuisement et de la douleur. Ce n'est pas Marek, ni Moïse. Ce n'est pas quelqu'un qui veut sa mort et pourtant, il se sent pris au piège. C'est peut-être le flingue, l'insigne, la situation. Ou c'est peut-être autre chose. Mais Kaz, tu sais que c'est foutu. Tu sais qu'il n'y a pas répit pour les mecs comme toi, et que ça reviendra toujours, quoique tu fasses.
@thelma galloway |
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| Sujet: Re: melancholia (kaz) Ven 22 Mar - 0:33 |
| Elle doit tuer. Tuer les fantômes revenus hanter sa vie. Transformer en cendres ces souvenirs qui l’attachent à une vie où c’était le sucre du bonheur qui avait toute la place sur ses lèvres, les bruits sacrés d’une mer aux vagues chantantes qu’elle admirait, princesse de ses rêves d’enfant maladroite. Thelma qui tremble, qui entend le cliquetis angoissant de la gâchette que son index percute sans intentions malsaines. Le visage qu’elle n’espérait jamais revoir est transformé, creusé par le passage des scalpels du désespoir, attaqué dans ses moindres recoins connus et reconnus par le temps assassin qui est passé sur lui comme un coup de poing en pleine gueule. Elle est sourde Thelma, sourde au bordel qui prend forme à côté d’elle, à ces gens qu’on attache, fer aux poignets, à ces hurlements de flics qui fouillent les alentours mais ça ne semble qu’une image flou à ses yeux. Thelma qui redevient une gosse avant de sentir tout le poids de l’adulte qu’elle est sur ses épaules. Elle a froid sous le regard hanté de Kaz. “T–Thelma ?” Sa voix semble venir avec la poussière d'une relation laissée en suspend. Elle sursaute, recule d’un pas avant de lentement baisser son arme. Son souffle n’est plus qu’une tempête impossible à calmer, le feu de larmes d’acides remontant sous ses paupières. Elle ne comprend pas. Qu’est-ce que t’as foutu ? Qu’est-ce que j’ai mal fait pour que tu finisses ici Kaz ? Il est où ton sourire ? Elles sont où les étoiles que t’avais dans les yeux ? Il est où Kaz ? Parce qu’elle ne voit que son ombre, un corps, une silhouette, peut-être une épave qui a pris l’eau et qui coule devant ses yeux. Elle secoue doucement la tête, comme pour faire cesser cette vision qu’elle pense cauchemardesque. Elle l’a tellement rêvé Kaz. Espérant le retrouver avec son âme intacte, le corps moins éteint que ce qu’il est à présent. Pourtant, on iui avait dit, on l’avait prévenu qu’il avait trébuché, qu’il était tombé dans le mauvais trou. Un néant dont on ne sort pas sans mains tendues. Et sa propre main la démange, fourmille et brûle sous le poids d’un flingue qu’elle finit par ranger à sa place, sécurité enclenchée. Ses lèvres sèches soufflent toujours une respiration complexe mais elle s’avance d’un pas. Pardonne moi. D’un autre. Pardonne moi putain. Et un troisième qui la mène assez proche pour qu’elle puisse le toucher sans oser le faire. Pardonne moi de pas être apparue plus tôt. De t’avoir laissé te noyer. Les sanglots menacent de prendre le pouvoir, sa gorge qui prend l’eau et y’a que le silence des pleurs qui résonnent en elle, de ces larmes qu’elle sent au bord de ses yeux. “P-Pourquoi ?” Pourquoi t’es là à traîner ce corps que personne n’entend ? Pourquoi tu m’regardes comme ça ? Pourquoi t’es parti sans rien dire ? Pourquoi je t’ai pas trouvé à temps ? Ce pourquoi a tellement de sens cachés que ça ricoche trop fort contre le cœur, ça plante à chaque fois un clou rouillé de plus dans un organe déjà malmené par les souvenirs qui ne la lâchent pas. Leurs regards s’affrontent, mêlant ces images qui ne quittent jamais leur esprit. Et toi, Kaz, qu’est-ce que tu vois maintenant ? Ce n’est que maintenant qu’elle comprend toute l’ampleur de la situation, baissant les yeux sur l’insigne qui s’accroche à sa veste. Ses lèvres s’entrouvrent à nouveau avant qu’elle ne lâche “J’te ferais pas de mal. J’te promets.” Mais qu’est-ce qu’elles valent ses promesses ? Tu vaux pas grand chose Thelma. T’abandonnes les gens. Lui, ta sœur et même ta propre gosse. Tu finis toujours par reculer. Par tomber. Et tu chiales que ça fasse mal. Dans un réflexe venu des tripes et de l’instinct, elle tend la main vers lui, la distance qui s’avale avant que des voix ne s’élèvent à nouveau de l’autre côté d’un mur. La main se fige, se fane avant de retomber. Fébrile, elle tourne un regard nerveux vers le béton qui les dissimule du reste mais elle gratte des minutes, se tourne à nouveau vers Kaz, de nouveau prise au piège dans ses yeux qui racontent beaucoup trop et pas assez. “J’peux t’sortir de là.” Elle prend l’mauvais virage Thelma. Elle dérape sans contrôler le volant qu’elle a entre les mains et le ravin se rapproche, lui tend ses bras vides. Flic droite, bien respectueuse des lois, ce soir elle déchire un bout de sa fierté sous l’emprise des souvenirs, d’une nostalgie douloureuse, d’une joie tâchée par le chagrin. De nouveau, elle lui tend la main, paume vers ce ciel de pierre, offrant une aide qu’elle sait à double-tranchant. Une lame qu’il pourra lui ficher dans le coeur ou non. @kaz zuniga |
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| Sujet: Re: melancholia (kaz) Sam 23 Mar - 15:18 |
| Kaz pourrait reconnaître Thelma entre mille, entrevoir ses traits angéliques dans une foule en délire. Peu importe les années qui les séparent, il y aura toujours ce lien invisible entre eux, cette fraternité qui ne s'est jamais envolée. C'est ce qui a été le plus à gérer. Si son cerveau bousillé a oublié des milliers de détails, Thelma n'a jamais disparu de son esprit. Il a souvent rêvé d'elle, Kaz. Ses yeux étaient là pour le bercer, adoucir ses nuits les plus obscures. Il a pensé à elle, à son incompréhension et sa tristesse face à la situation. Il aurait pu lui laisser une lettre, un sms, un appel, une trace de son passage sur Terre, mais rien n'a été déposé sur le palier. Kaz a disparu dans la nature sans un mot. Il n'a jamais essayé de reprendre contact, enterrant Thelma avec l'être qu'il était et son existence passée. Et il sait que tout aurait pu être différent s'il l'avait fait. Si Kasimir avait pris la décision de se faire aider, la main de Thelma dans la sienne, il ne serait certainement pas où il en est aujourd'hui. Le problème est que son addiction a toujours été plus forte que lui. Plus puissante encore que sa famille et ses amis. Et il lui arrive de regretter, tellement que ça le tuerait presque. Il regrette de s'être éloigné de Thelma et d'avoir choisi la drogue plutôt que sa compagnie. Il regrette d'avoir abandonné ses parents et sa sœur, d'avoir trahi la confiance de son frère et craché sur l'amour de Moïse. Il regrette d'avoir tout foiré, finalement. Kaz n'a plus la possibilité de se rattraper, trop enfoncé dans ce trou creusé de ses propres mains. Revoir Thelma lui rappelle toutes les belles choses qu'il a laissé derrière lui et à quel point il a merdé. A cet instant, il donnerait tout pour revenir en arrière et ne jamais partir. S'il n'avait pas été aussi, ils ne seraient pas dans cette situation, Thelma pointant un flingue en sa direction et ses propres jambes l'empêchant de bouger. C'est à peine s'il cligne des yeux, effrayé qu'elle disparaisse et que tout ça ne soit qu'un rêve. Il ne sait pas bien ce qu'il attend ; qu'elle le sauve ou l'achève. La seconde option est sûrement celle qu'il mérite le plus, lui qui n'a fait qu'abandonner et détruire. Kaz voudrait dire des millions de choses, se rattraper par des mots avec lesquels il n'a jamais été très doué. Les excuses sont à la frontière de ses lèvres mais comme toujours, il est trop lâche pour les laisser sortir. Bientôt, l'arme n'est plus pointée à son front. Ce qui devrait être un soulagement ressemble plutôt à une malédiction. Kaz ne bouge pas d'un centimètre, ses muscles tous soudainement endormis. Il n'y a que ses yeux qui détaillent, observent le voyage de Thelma jusqu'à ce que la distance entre leurs deux corps ne soit qu'infime. Il est incapable d'affronter son regard, se concentre sur le tissu de sa veste plutôt que son visage. Il a honte, Kaz. Honte d'être comme il est, ses vêtements dépareillés et les iris défoncés. Honte de ne pas savoir dire, faire, tout ça à la fois. – P-Pourquoi ? Ça résonne jusqu'au plus profond de son être, remue tout à l'intérieur jusqu'à ce que Kaz ne ressente qu'un trop plein d'émotions à en vomir. Son cœur n'est plus ankylosé. Il se remet à fonctionner quand son propriétaire voudrait ne rien ressentir. Ce dernier relève les yeux et ce qu'il voit dans ceux de Thelma est tellement douloureux qu'il ne peut pas la regarder plus longtemps. C'est de nouveau sa veste qui l'intéresse. Il se dit qu'elle, elle doit avoir chaud. Et c'est bien parce que Kaz, s'il savait qu'elle avait froid, il lui passerait la sienne alors que lui-même est gelé. Il l'a tellement fait avant, sacrifiant son bien-être pour celle qu'il considérait être sa seconde sœur, qu'il ne pourrait pas s'empêcher de le faire – peu importe le fossé entre eux. Sa question percute les parois de sa boîte crânienne. Il souhaiterait avoir une réponse, mais il n'en a pas. Il n'en a aucune qui puisse expliquer ses gestes, sa prise de stupéfiants, son départ, toutes ces années sans nouvelle, le vol, les mensonges, la trahison, la douleur. Tout ça, c'est par impulsivité qu'il l'a fait. Fallait qu'il parte, il l'a fait. Fallait qu'il vole son frère, il l'a fait. Fallait qu'il se tue à petit feu et ça aussi, il l'a fait. Kaz a suivi son instinct dicté par la dépendance. Qu'est-ce que tu veux que j'te réponde, Thelma ? Qu'est-ce que t'attends d'moi ? J'suis rien, rien qu'un pauvre con qui n'a pas su s'arrêter. Pourquoi t'as baissé ton flingue, dis ? J't'ai fait souffrir, pas vrai ? Alors pourquoi tu t'venges pas ? Ce n'sera pas un meurtre, Thelma. Tu sais pourquoi ? Parce qu'on ne peut pas tuer un mort. J’te ferais pas de mal. J’te promets. Elle aussi, elle lui offre une rédemption qu'il ne mérite pas. Mais qu'est-ce que vous avez tous à n'pas comprendre ? J'veux pas être pardonné, j'veux payer pour mes péchés. Il y a la main de Thelma qui se tend et Kaz, il a l'impression de se rétamer la gueule sur le béton. Il ne comprend pas pourquoi on veut le rattraper, le sauver alors qu'il seulement capable de briser. Malgré tout, ses propres doigts le démangent. Son corps tout entier le supplie d'attraper la main tendue de sa sœur, de se raccrocher à elle et de la laisser l'élever vers le haut. Avant qu'il ne puisse se laisser entraîner par ses envies, la distance s'installe de nouveau. Cette fois, son regard s'ancre dans celui de Thelma et il ne le détourne pas. Il a mal. Il crève intérieurement de voir autant de douleur sur son visage, mais s'il faut qu'elle disparaisse encore, alors il a besoin d'imprimer ses prunelles dans son esprit pour ne jamais, jamais les oublier. J’peux t’sortir de là. Et ça, c'est encore plus fort que le reste. Elle ne lui offre pas seulement sa rédemption, mais la liberté également – liberté qui pourrait lui coûter beaucoup. – J'peux pas te laisser faire ça, Thelma. Sa voix l'étonne lui-même. Il ne bredouille pas, n'écorche pas les mots sous les tremblements de ses cordes vocales. Kaz est sûr de lui. Il est égoïste, il le sait. Il est égoïste, mais pas aujourd'hui. Il sait ce qu'il en coûtera à Thelma – parce qu'il a compris qui elle était maintenant et qu'il ne veut pas lui voler cette vie. Ses iris descendent à sa main de nouveau tendue. J'comprends pas... J'comprends pas pourquoi tu voudrais sacrifier tout c'que t'as pour m'aider. Ses doigts rencontrent furtivement les siens avant de repartir. J'mérite pas ton aide. J'mérite plus rien et on l'sait aussi bien l'un que l'autre.
@thelma galloway |
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| Sujet: Re: melancholia (kaz) Mer 27 Mar - 11:35 |
| C'est quand il recule qu'elle prend une seconde balle dans le cœur Thelma. Elle cille, le peu de souffle qu'il lui restait emporté avec le corps de Kaz qui rejette sa main sans violence, avec la fragilité qui a l'air de l'habiter. Elle se souvient pas de lui comme ça, l'être entier semblable à une carcasse de chagrin, un spectre parmi d'autres dont les traits lui restent pourtant gravé dans la rétine. Elle entend les cris des policiers attrapant sûrement d'autres types aux pupilles éclatées, les veines shootées au poison. Et toi aussi Kaz ? Toi aussi tu t'envoles souvent avec tes drogues de papillons ? Toi aussi tu quittes le monde, préférant tes chimères artificielles plutôt que le réel ? Plutôt que moi. ça la démange de le bombarder de questions, ça hurle au fond de ses tripes de l'emporter loin de tout ça avec elle, de prendre sa main de force, de l'enrouler dans un cocon de chaleur dont il sortira plus. Elle l'en empêchera. Son absence a laissé un trou béant dans son âme où d'autres ont déjà été arrachés. Il est un deuil qu'elle porte depuis son départ, une plaie béante qui n'a jamais cicatrisée. Dans le silence qui les poursuit, qui vient se glisser entre eux comme un vent hurlant, elle a l'écho de leurs complicités dans la tête, les rires fantômes, les squelettes de sourires plein la tête, les nuits d'apaisements où elle se glissait chez lui parce que loin de lui la vie semblait parfois bien morne, aussi grise que le béton qui leur servait de maison tout comme celui qui les entourent à présent. Le pouls battant contre son cou, elle réfléchit à toute vitesse. Le laisser l'emmener, menottes aux poignets ce serait le condamné, jouer les juges de son existence. Elle peut pas faire ça. C'est au-dessus du peu de force qu'elle garde encore en elle. Ca la ferait définitivement chavirée dans l'eau, avalée par les eaux noires de ses démons. "J'peux pas te laisser faire ça, Thelma." Et compulsivement elle secoue la tête, ravalant les sanglots hystériques qui lui remontent dans la gorge. "B-Bien sûr que si. J'peux … J'peux te sauver. Laisse moi faire ça." Mais il n'a pas l'air de l'entendre, de la comprendre à travers les bégaiements qu'elle laisse échapper, telle l'enfant qu'elle était quand il l'a connu, parlant tellement vite qu'elle butait sur plusieurs mots à la fois. Si avant ça pouvait lui arracher un rire, aujourd'hui ça l'agace d'être aussi pathétique. "J'comprends pas... J'comprends pas pourquoi tu voudrais sacrifier tout c'que t'as pour m'aider." Elle fronce les sourcils, interdite, le corps enserré par l'urgence de la situation. Kaz lui fout le coup de grâce d'un "J'mérite pas ton aide." qu'elle absorbe mal. Il la met face à une impasse à laquelle elle était pas préparée. Escalader le mur ou se retourner vers les phares qui les lorgnent, attendant qu'elle fasse son travail. Tu finiras écroué derrière les barreaux, à cause de moi, à cause de mon hésitation. Mais j'donnerais ma vie pour toi Kaz, j'te donnerais toute la chaleur qui vient de mon corps pour que t'aies plus jamais froid, le peu de bonheur qui réside au fond de mes entrailles pour que tu cesses jamais de sourire. J'aimerais que tu sois jamais parti et qu'on ait jamais connu le goût de l'absence de l'autre. Tout ça elle le dit pas, ça doit pas se sentir dans son corps nerveux, ses yeux qui passent d'un point à l'autre, cherchant une solution, un combat à balles réelles se perdant dans sa tête, oscillant entre son devoir et ses émotions trop souvent maîtresses de sa vie. Et il lui faut entendre la voix de Butch au loin pour sursauter, pour se remettre en action, attrapant la main de Kaz sans essayer de l'écouter. Ce sont des dédales de bétons qu'elle arpente, ses doigts enserrant une main qu'elle a si souvent tenue auparavant, tirant dessus pour toujours plus capter son attention. Le visage blême parfois obscurci par les ombres des monstres de pierre, elle cherche surtout une cachette ou une porte de sortie. C'est au bout de ce qui lui semble être une éternité de marche qu'elle repousse le métal d'une porte menant vers une cours déserte. Cherchant son souffle en quelques inspirations paniquées, elle se retourne vers lui sans lâcher sa main, certaine de faire une connerie qui lui coûtera cher plus tard. Mais l'abandonner en serait une tout aussi énorme qu'elle paierait avec la torture de la honte quotidienne. "Attends moi ici. Vraiment, s'il te plait Kaz. J'peux pas te livrer à eux, tu ressortiras peut-être jamais." Et cette fois la séparation sera définitive. Hochant la tête, comme pour marquer une décision silencieusement prise, elle le relâche enfin dans un geste doux qui laisse une brûlure au creux de sa paume. Puis tout à coup, elle relève les yeux vers lui, presque sereine "Mais il faut que tu me frappes. Frappe moi." elle insiste, prête à avaler la douleur. Je leur ferais croire à n'importe quoi pour qu'ils ne te pourchassent pas. J'suis une ratée, une flic à moitié compétente, ce sera facile à avaler pour eux. Bien plus facile que de te ramener à eux, fer aux poignets, le cœur morcelé de douleur. Et elle supplie du regard Thelma, prête à basculer dans l'hystérie s'il refuse, à éclater en morceaux s'il lui offre pas ça. |
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| Sujet: Re: melancholia (kaz) Jeu 28 Mar - 18:53 |
| Il y a une époque où les rôles étaient inversés. Une époque où Kaz était celui qui tendait sa main à Thelma, la relevant à chaque trébuchement. Celui qui la protégeait, la couvait de sa présence protectrice. Il y a un temps où Thelma se reposait sur Kaz – comme une sœur sur son grand frère. Un temps où elle était aussi fragile que de la porcelaine et qu'il recollait les morceaux de son âme ébréchée. Puis il est parti sans avoir l'intention de revenir. Il est parti et ils ont grandi l'un sans l'autre, les années comme un océan impossible à traverser. Les vagues ricochent contre les parois de son cœur malmené, réveillant les maux depuis longtemps endormis. Il y avait une époque, un temps, un âge où Kaz était responsable de Thelma. Et de cette moitié de vie, il ne reste rien d'autre que des souvenirs poussiéreux. Kaz s'attendait à tout, à des insultes jetées à la volée, des reproches ou des coups mérités. Il s'attendait à tout, sauf à ce que Thelma lui tende la main comme lui en avait l'habitude. Si son être entier le supplie de l'accepter, sa raison remporte le combat sanglant. Glisser sa paume dans la sienne serait comme signer son arrêt de mort, l'insigne à sa poitrine à jamais retiré et ses rêves envolées. – B-bien sûr que si. J'peux… j'peux te sauver. Laisse moi faire ça. Thelma butent sur ses mots, faisait réapparaître l'enfant sous les traits de l'adulte. Il a cœur remonté dans la gorge, ses battements réduisant les paroles de sa sœur d'une autre vie au néant. Il refuse de la laisser gâcher sa vie pour sauver la sienne. Tu ne vois pas comme je n'vaux plus rien, Thelma ? Ton existence vaut mille fois la mienne et j'te laisserais pas tout foutre en l'air. Kaz affronterait les barreaux, la prison et ses souffrances pour le bonheur de Thelma. Il irait à l'encontre de ses convictions pour s'assurer qu'elle aille bien, ses aspirations non entachées par son passage éclair. Les mots s'écoulent comme du sable entre ses doigts, l'intention claire derrière chacune de ses syllabes. Écoute-moi, je t'en prie. Sauve ta peau tant qu'il en est encore temps. Que je survive ou pas, je saurais au moins que ta vie est intacte. Et ça s'enraille. La situation lui échappe, son cerveau réagissant trop tard pour arrêter la machine en marche. Thelma l'emporte comme un ras-de-marée dévastateur, la force de son toucher pour l'empêcher de dévier. Les protestations de Kaz restent bloquées à la frontière de ses lèvres sous la surprise. Il se laisse tirer sans grand mal, les neurones déconnectées jusqu'à ce qu'ils s'arrêtent et que sa vision redevienne normale. Il n'y a vite plus d'étonnement pour engourdir ses membres, mais une panique sourde qui grandit au fond de ses entrailles. Le toucher de Thelma est la seule chose qui le retient de tomber dans ce trou noir au nom d'angoisse. Tu gâches tout, Kaz. Tout s'effondre à tes côtés. Les fleurs s’effeuillent sous ton toucher, les cœurs se brisent et les chairs saignent sous tes doigts maudits. Tu aurais partir quand il en était encore temps, sauver Thelma de la malédiction de ton âme. Cette dernière ne le lâche pas, sa paume refusant de quitter la sienne. Kaz voudrait hurler à la mort, crier jusqu'à ce qu'il en souffre. – Attends moi ici. Vraiment, s'il te plait Kaz. J'peux pas te livrer à eux, tu ressortiras peut-être jamais. J'mérite que ça, tu vois pas ? J'mérite de finir ma vie derrière les barreaux, le poids de mes regrets pour m'étouffer jusqu'à ce que la Faucheuse m'ouvre les bras. J'mérite de mourir les menottes au poignet pour tout ce que je t'ai fait. Kaz ne bouge pas d'un millimètre, ne dit rien non plus. Ses opales sont attachées à leurs doigts joints et son myocarde contracté à la vue qui s'offre à lui. Il ne voulait jamais lui lâcher la main, gamin. Et s'il avait été assez fort, il ne l'aurait jamais, ô grand jamais, lâché. Lorsque Thelma termine par le relâcher, Kaz a l'impression de revivre son propre abandon et le voyage qui l'a emporté loin de ses parents. Ça réveille la douleur qu'il s'est refusée de ressentir jusqu'à maintenant. Mais il faut que tu me frappes. Frappe moi. Son regard remonte à celui de Thelma, incrédule. – P–pardon ? C'est lourd, dans sa poitrine. C'est si lourd qu'il pourrait se foutre à genoux et supplier Dieu d'en finir sur le champ avec sa misérable vie. T'es complètement malade, qu'il s'exclame d'une voix à la fois faible et puissante. Il se recule d'un pas, de deux, manque de tomber au troisième. J'peux pas. C'est catégorique. Il ne peut pas blesser sa petite sœur, peu importe pour quelles raisons. J'en ai rien à foutre de la prison, Thelma. Tu comprends ça ? J'suis déjà foutu, ça pourra jamais être pire que maintenant. Kaz trébuche sur ses mots tremblants, la boîte crânienne en feu. Ses jambes le rapprochent, son corps revenant à la hauteur de Thelma et ses mains fermes attrapant ses épaules. Tu veux m'sauver ? Alors arrête-moi. Il crèvera sûrement entre les murs bétonnés de la taule. Il crèvera, mais Thelma survivra.
@thelma galloway |
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| Sujet: Re: melancholia (kaz) Lun 8 Avr - 15:58 |
| Le temps des retrouvailles pleins de sourires et de pleures imbibés de joie est trop loin d'eux. Il n'y a que les tambours vibrant de la panique qui court dans son cœur, la douleur qui cisaille les entrailles de le voir sans vraiment le reconnaître, à peine le temps de savourer le fait d'avoir sa main entre ses doigts qu'elle la lui arrache. Elle suffoque Thelma, elle perd pied, sentant le béton sous leurs pieds craquelés pour leur tendre les bras vers l'Enfer. On mérite pas ça, on mérite pas le mal qu'on s'inflige, on mérite pas les morceaux de cœur qu'on s'arrache, les mutilations que la vie nous fait en nous roulant dessus sans se retourner. Il a l'air de venir d'ailleurs Kaz, d'avoir été pris dans la spirale des âmes damnées, sans cesse torturées par leur douleur et l'observer sans pouvoir rien faire la remplie d'émotions épineuses, plantant férocement leurs dards dans son cœur déjà à l'agonie. Son souffle se perd en nuage de condensation dans la nuit de cauchemars, son visage à la peau blême auréolé de ses cheveux attachés à la va vite, elle a tout de l'enfant qui tente de recoller les morceaux alors qu'ils ne tiennent pas, que la glu de l'amour ne suffit jamais à réunir. Une partie d'elle lui ordonne de l'emmener, menottes aux poignets, devant ses collègues, de le relâcher à la justice pour qu'ils puissent en faire ce qu'ils veulent. Elle lui hurle de faire ce travail qu'elle n'a jamais bien fait, de le traiter comme tous les autres mais y'a la part d'ombre qui se réveille, l'enfant abandonnée par un frère du cœur qui supplie de ne pas le faire, de trouver une solution, la plus folle qui puisse exister, de piétiner ses principes pour en faire des cendres. Se couper de sa tête ou de son cœur, elle hésite un instant Thelma mais elle prend vite sa décision, comprend bien que sa demande peut paraître étrange ou trop violente. "– P–pardon ?" Il n'y a que de la surprise dans sa voix "T'es complètement malade" puis le choc et l'insulte qui glisse sans qu'elle ne s'en vexe. Oui, peut-être qu'elle est folle. Peut-être que quelques boulons manque à la mécanique de son esprit mais elle se fiche de ça. Elle est prête à encaisser la douleur, à prendre un autre poing en pleine gueule si ça peut permettre de trouver une excuse, la plus bancale, de poursuivre son rôle de flic ratée qui gerbe dès qu'elle sent l'odeur de la mort. Oui, elle s'en sent capable Thelma mais ses espoirs se fanent quand il recule. Un pas loin d'elle. Deux pas loin d'elle. Un troisième qui manque de l'éloigner toujours plus. J'aimerais que tu restes près de moi, que tu ne t'enfuis plus, qu'on refasse encore le monde, qu'on croise encore nos yeux qui rêvaient à un ailleurs plus léger, qu'on continue de rire comme si y'avait rien à craindre du monde et des autres. Mais depuis ma sœur a pris des balles dans le corps, depuis t'en as pris d'autres aussi qui te font vriller le cerveau, addict à tes rêves artificiels quand Joy n'est plus qu'un rêve tout court. "J'peux pas." Elle ferme les yeux un instant comme pour encaisser son refus, tremblant jusqu'à l'âme de sa rage, de son chagrin. "J'en ai rien à foutre de la prison, Thelma. Tu comprends ça ? J'suis déjà foutu, ça pourra jamais être pire que maintenant." Son visage n'est plus qu'un amas de chagrin, sa bouche frissonnant sous les sanglots qu'elle finit par relâcher, frôlant l'hystérie. Tu veux m'sauver ? Alors arrête-moi. Elle secoue vivement la tête, consciente des larmes qui creusent leurs sillons sur ses joues pour mieux rejoindre ses lèvres, ses pas la menant à lui, sa main retrouvant la sienne "S'il te plait. S'il te plait m'demande pas ça." Soupir douloureux. Thelma respire. Essaie. ça rate. "On-On vient juste de se retrouver." Sa voix n'est plus celle de l'adulte mais celle de la gosse qu'il a laissée derrière, ses doigts crispés autour des siens à s'en faire mal. Son front percute sa poitrine, s'imposant un répit qui n'en est pas un, relâchant son mal dans des soupirs mal contrôlés. Elle a la sensation étrange de serrer la main d'un étranger autant que de retrouver un être qui lui semble essentiel à son existence. Seconde après seconde, elle sent ses muscles se détendre sous le poids de la résignation, gommant les traces de ses sanglots du dos de sa main. Finalement, elle se recule, relâchant sa main pour attraper les menottes qui chantent leurs cliquetis à sa ceinture. Et le reste de ses gestes se perd dans le brouillard, chaque bruits étouffés par un sifflement incessant. Elle menotte ses poignets avant de relever les yeux vers lui "On dirait que t'as fait tes choix depuis longtemps." T'as jamais voulu survivre avoue-le, t'as jamais cherché à revenir vers moi, avoue-le. T'as trouvé ton enfer paradisiaque loin de ce passé que tu cherches tellement à fuir, avoue-le putain. "Est-ce que … Est-ce que tu m'as cherchée au moins ?" C'est demandé sans prévenir, laissant les mots dévaler le long de sa gorge pour ressortir de sa voix plombée de regrets. Mais elle veut savoir Thelma, elle veut comprendre pourquoi elle a dû vivre jusqu'ici en étant amputée de deux personnes avec qui elle ne semblait faire qu'un. |
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| Sujet: Re: melancholia (kaz) Jeu 6 Juin - 16:47 |
| Kaz laisse la situation lui échapper, la main de Thelma l'emporter et ses pieds maladroits buter sur le béton armé. Il est incapable de comprendre pourquoi – encore moins d'accepter les possibles raisons qui lui viennent en tête. Elle n'a pas le droit, Thelma. Elle n'a pas le droit de bousiller sa propre vie pour sauver la sienne – pas après la douleur qu'il lui a infligée et les années pendant lesquelles il l'a laissé s'inquiéter. Au creux de sa poitrine, ça se réveille sous le toucher salvateur de cette sœur abandonnée dans sa course. Ça se réveille et lorsqu'il reprend conscience de la situation, sa respiration saccadée et la paume de Thelma collée à la sienne, ça saigne. C'est l'hémorragie interne, la mort assurée. Tout est renversé par la douleur de ce cœur trop souvent écorché. J'continue de briser ton cœur et de malmener les souvenirs de nos jours passés. J'continue d'obscurcir ton ciel aux mille-et-une couleurs et de crever la joie qui danse dans ta cage thoracique. Des années plus tard et j'continue. J'continue et j'comprends pas pourquoi tu m'regardes avec autant d'amour – comme si j'étais pas en train d'te dépouiller de tes rêves et que j'risquais pas de détruire ta vie entière. La vérité est que Kaz est perdu, tiraillé entre l'égoïsme qui pourri son âme et l'amour dégoulinant de son cœur tailladé au scalpel. Ça aurait été tellement simple d'accepter la proposition de Thelma – si seulement ce n'était pas elle qui la lui faisait. Si seulement ce n'était pas la même gamine au cœur d'or, au sourire contagieux et aux opales étincelantes dans la nuit noire. Si seulement ce n'était pas sa sœur d'un autre univers, sa moitié d'être abandonnée depuis trop longtemps. Ce sont les souvenirs qui l'empêchent de sauver sa peau au détriment de Thelma. Ils lui donnent la force d'affirmer son choix d'une voix déterminée, ses pieds bien ancrés dans le sol et ses épaules droites. Ça craque dans sa cage thoracique, tambourine à lui en briser les os et libérer un cœur qui atterrira vulgairement aux pieds de Thelma. Il pourrait bien le lui donner, Kaz. Il pourrait bien se l'arracher lui-même et le lui offrir entre ses mains ensanglantées. Après tout ce qu'il a fait, les dégâts causés par son départ et les secrets à jamais enfouis dans sa boîte crânienne endommagée, donner sa vie pour elle ne serait que rembourser les années à continuellement la bousiller sans même être présent physiquement. Il est terrifié, Kaz. L'angoisse le bouffe de l'intérieur, mais il refuse de faire marche arrière et d'envoyer Thelma sur le bûcher. Et il a mal, Kaz. Mal de voir sa seule amie se décomposer devant ses yeux et d'entendre ses sanglots résonner dans l'immensité new-yorkaise. Mal de ne plus savoir comment agir avec elle, ni quoi faire pour apaiser sa peine. Lorsque la main de cette dernière retrouve la sienne, les morceaux de son cœur brisé se multiplient au creux de sa poitrine. Il a tellement mal, Kaz. Tellement mal d'elle, de lui, d'eux. S'il croyait mériter son pardon, ce serait certainement à ce moment qu'il se mettrait à genoux pour la supplier de le pardonner. – S'il te plait. S'il te plait, m'demande pas ça. On-on vient juste de se retrouver. Kaz en crève – véritablement. Il crève de revoir la gosse apeurée derrière ses traits de femme assumée. Pourquoi il a fallu qu'on se revoit comme ça, Thelma ? Pourquoi il a fallu que nos chemins se recroisent dans la pire des situations ? – T'as pas l'choix, Thelma, qu'il répond presque inaudiblement, étouffant un sanglot aux deux dernières syllabes prononcées. J'te laisserais pas risquer ta carrière et ta vie entière pour moi, tu m'entends ? J'le mé– Le reste de sa phrase est coupé – oublié en même temps que le corps de Thelma percute le sien. Il faut plusieurs secondes à Kaz avant qu'il ne réalise ce qui se passe et réponde à son étreinte, tremblotant comme une feuille sur la branche d'un arbre. Et il ne sait pas comment il devrait se sentir, ne saurait même pas décrire les émotions qui le traversent à cet instant précis. Étreindre Thelma a toujours été naturel, mais Kaz se sent désormais maladroit dans chacun de ses gestes, à ne pas savoir exactement ce qu'il devrait faire, où placer ses mains et à quelle intensité serrer Thelma contre lui. Quand cette dernière se détache, les mots restent bloqués dans sa gorge. Il se contente de la fixer de ses iris tourmentés, la respiration affolée et l'impression d'étouffer. Ses poignets tendus, Kaz attend que le métal vienne refroidir sa peau et laisser sa marque indélébiles. Et à cet instant, il ressent le poids de la tragédie qui s'écrase sur leurs deux crânes. Ça va nous ruiner tous les deux, Thelma. Ça va nous ruiner et j'aurais voulu t'épargner. – On dirait que t'as fait tes choix depuis longtemps. Il entend les reproches étouffés derrière son timbre tremblant et même si ça le blesse, Kaz ne peut pas lui en avoir. Tu sais pas, Thelma. Tu sais pas c'que c'est de crever à petit feu et de pas entrevoir de porte de sortie. Même si j'voulais m'en sortir, Thelma, c'est bien trop tard pour moi et si t'en as pas conscience maintenant, reste quelques heures de plus et tu verras que j'te raconte pas de bobards. Que j'suis foutu jusqu'à la moelle. Est-ce que … est-ce que tu m'as cherchée au moins ? Ses lèvres s'entrouvrent, puis se referment. Il détourne soudainement le regard pour le poser sur ses poignets joints par les menottes. Tu sais pas, Thelma. Tu sais pas combien d'fois j'ai souhaité revenir en arrière, mais que j'en étais juste incapable. J'me suis vite résigné, Thelma, parce que j'allais crever sinon. – Non, qu'il lâche dans un murmure douloureux, et c'est pas plus mal. Kaz relève doucement ses yeux trempés jusqu'aux siens. C'est pas plus mal pour toi, Thelma. Si je t'avais cherché et retrouvé, j't'aurais complètement bousillé. Sa voix craque dans un sanglot silencieux, alors que son attention dévie une nouvelle fois pour ne pas affronter les opales tristes à en crever de son interlocutrice. Tu peux l'demander à Marek. Ça fait des années que je l'ai pas vu, mais j'sais. J'peux sentir à quel point j'l'ai foutu en l'air et... J'me pardonne déjà pas de t'avoir blessé en partant, alors si je t'avais détruite comme j'l'ai fait avec lui, je... J'y aurais pas survécu, Thelma. Ça s'enchaîne et jusqu'au bout, il évite son regard. Jusqu'au bout, il évite de faire face à une haine qu'il n'est pas sûr d'avoir la force d'affronter.
@thelma galloway |
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| Sujet: Re: melancholia (kaz) |
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