battle scars (ilyès)

si tu le pouvais, tu ferais demi-tour. tu demanderais au chauffeur payé par tes parents de rouler loin d'ici, au-delà de la ville, pour sortir de l'oppression. t'es constamment oppressée, t'as constamment la sensation que t'enserres le cœur, la gorge.
t'es plus la même kara. plus depuis qu'il n'est plus là. t'as pourtant eu des distractions qui t'ont fait penser à d'autres choses ces derniers temps. ton boulot, tes enquêtes, celles dont tu te penches de chez toi parce qu'on t'autorise pas encore à repartir sur le terrain. et puis, il y a eu cet homme. cet ex avec qui tu t'es amusé avant qu'il disparaisse subitement. comme une putain de gamine, t'as ruminé, tu l'as haï de t'avoir abandonné de cette manière. avant de t'en remettre, de te traiter de conne. t'as pas besoin de ce connard de fils à papa pour t'occuper. tu t'es donc penchée plus encore dans tes affaires, aidant une vieille amie à écrouer son mari.
t'as tout fait pour te sortir tes angoisses de la tête, des peurs et tes peines. t'as tout fait pour ne pas penser à cette journée qui arrivait beaucoup trop vite. tu sais qu'il va te cuisiner bien plus parce qu'il a été absent pas mal de temps, en voyage pour ses défilés.
soupir pour te donner du courage, tu sors finalement de la voiture, remercie george avant de passer rapidement la porte du restaurant luxueux. pas besoin de chercher, d'attendre à la porte, tu sais où il est. c'est toujours la même table qu'il réserve pour toi quand vous venez manger ici. celle près de la fenêtre dans le fond, celle qui permet à ton regard de vagabonder quand tu te mets à trop penser. tu t'approches de lui, montes le coin de tes lèvres quand il te regard. le masque est enfilé. salut toi. sourire aux lèvres, ton visage que t'approches du sien en te penchant. baiser contre sa joue, tu viens t'asseoir rapidement face à lui. le manteau que tu retires de tes épaules, tu le laisses choir sur le dossier dans ton dos. désolée pour le retard, il y avait du monde sur la route. ça ou autre chose. t'aimes retrouver ton grand-frère mais t'appréhendes toujours cette journée de la semaine. celle où tu dois faire semblant d'aller bien et surtout mieux. celle où tu t’assoies devant ton frère et que t'essaies de paraître normale. à chaque instant du repas, tu te sens analyser, passer au rayon x par ses yeux clairs, bien différents des tiens... celle où tu dois afficher un sourire sur tes lèvres, pas trop grand pour pas qu'il trahisse. t'as jamais souris ainsi. ou du moins, t'as jamais re-souris de cette manière depuis la mort de callum, ton mari. son beau-frère. et tu ne risques pas de re-sourire de la sorte un jour, que tu crois.

tu as déposé un baiser sur les lèvres de noor, riant un peu en la sentant te retenir, avant de l'embrasser un peu plus longuement, tes mains glissant contre sa taille, avant qu'elle ne te laisse finalement t'échapper pour rejoindre le centre-ville. tu as rendez-vous avec kara, comme chaque semaine, parce que c'est votre rituel à tout les deux. le frère et la sœur. le digne héritier et la jeune rebelle, au métier loin de la mode, des strasses et des paillettes. tu n'en apprécies que plus ta cadette, même si tu ne peux t'empêcher de t'inquiéter, d'essayer de la persuader de rester à new-york cette fois, d'arrêter de vouloir enquêter sur tout et n'importe quoi, de mettre sa vie en danger d'une manière ou d'une autre. elle en a déjà fait les frais. durement. tragiquement, depuis la disparition de celui qui a été son mari. tu l'appréciais, callum. tu l'appréciais réellement, et il rendait kara heureuse, alors quoi lui reprocher ? rien. t'aurais aimé être assez persuasif que pour forcer les deux jeunes gens à rester ici. à ne pas partir à l'autre bout du monde ensembles. il n'y a que ta sœur qui en est revenue. tu fermes les yeux un bref instant en pensant à tout ça, avant de secouer un peu la tête, démarrant le moteur de la voiture. tu pourrais demander à être conduit, sans mal, mais tu n'en as pas envie aujourd'hui. souhait ridicule d'une vie ressemblant à celle de tout ces passant dans la rue. et pas de comptes en banque à ne plus savoir comment les vider. nouveau soupir au bord des lèvres.

tu arrives avec un peu d'avance dans ce restaurant ou tu es plus que reconnu par le personnel. vous avez vos petites habitudes, avec kara. et tu ne comptes pas changer ça. ça t'empêcher de te dire que les choses ont trop changées. et pourtant, rien n'est plus comme avant. tu t'en voudrais presque de vouloir d'elle à tes côtés le jour ou tu diras oui à noor. parce que tu sais que la cicatrice n'est pas encore refermée. tu ne le sais pas vraiment, tu t'en doutes, c'est tout. et toutes les semaines, tu fais des efforts pour ne pas aborder le sujet. elle t'en parlera si elle le souhaite, ta petite sœur. tu ne veux pas être trop intrusif.
la jeune femme termine par arriver, et tu te lèves pour déposer un baiser contre sa joue. salut toi. désolée pour le retard, il y avait du monde sur la route. ce n'est pas grave. tu réponds simplement, haussant les épaules et esquissant un petit sourire face à la jeune femme. un serveur vient rapidement vous apporter les cartes. tu veux boire quelque chose ? tu demandes à kara avec un sourire. tu ne sais pas s'il est très crédible, t'es encore dans le jetlag de ton dernier voyage à paris. mais tu tenais à voir ta frangine aujourd'hui, ne pas déroger à votre rencontre habituelle. le serveur s'éclipse finalement avec le début de la commande. et tu ne prêtes pas grande attention à la carte pour le moment. comment ça va ? tu demandes finalement. excuse-moi si je ne suis pas très en forme, le décalage horaire, tout ça. tu souffles avec un petit rire, haussant les épaules, cherchant un bref instant le regard de ta sœur.