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 love and war / henrik.

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Message Sujet: love and war / henrik.   love and war / henrik. Empty Mer 6 Mar - 5:47

Journée tranquille, à la librairie. Les âmes passent et repartent, sans faire de vagues. Les minutes qui défilent doucement, sans être trop longues, sans être trop courtes. Une journée où le soleil se pointe le bout du nez, à l’extérieur. Où ça sent le printemps un peu partout, le froid qui se défile et les bourgeons qui apparaiteront bientôt. Et ça fait du bien, cette odeur, cette sérénité. La paix de la renaissance, apportée par le passage de l’hiver au printemps. On a un peu moins peur de sortir de chez soi, et Agnes peut apercevoir de nombreux passants, dehors. Ceux qui ne sont pas retenus par le travail ou les obligations vont profiter de cette délicieuse brise. Ça donne envie de se promener, main dans la main, de regarder autour de soi, et de juste respirer. Ça fait rêver Agnes, ça guide son pas à travers la petite boutique. Alors qu’elle conseille, et qu’elle classe, ses doigts effleurent les reliures et les pages, et elle s’autorise à s’égarer sur quelques lignes quand les clients se font rares. Ça passe doucement, et elle se sent bien quand elle mets le pied à l’extérieur. Sac sur l’épaule, et la perspective d’une douce soirée. La compagnie de Joel, sans doute, pour la bercer. Premiers baisers échangés, la promesse de quelque chose. Sans trop savoir ce que c’est. Un inconnu qui lui plaît.

Elle ne fait pas quelques pas, Agnes, qu’elle s’arrête devant une silhouette familière. Ça l’arrêt net dans son pas et dans ses rêveries. Jette un voile noir sur ses pensées paisibles, les étrange et les balaye. Les nuages qui remplissent le ciel, et le choc qui la fait vaciller. Pas prête à affronter ça, pas maintenant, surtout pas maintenant. Mais le destin en a choisi autrement, il en a choisi autrement. Là, juste devant elle. Le visage qu’elle connaît trop bien, qu’elle a aimé si fort, qu’elle aime peut-être encore, celui de son bourreau. Henrik, elle pensait passer sa vie avec lui, se marier et avoir des enfants, s’acheter une maison et vieillir avec lui. Comme elle se trompait. Et il est toujours le même, toujours aussi charmant, et sa présence là, dans le soleil printanier, lui rappelle le romantisme d’une autre vie, les soirées ensemble, les aventures ensemble, ensemble.

« Henrik. » Ce qu’il fait là, elle n’en sait rien. Elle déglutit, évite son regard. Trop tard pour faire demi-tour, pas le choix de l’affronter. Une certaine appréhension dans la gorge, l’estomac noué. Nerveuse, Agnes, de ce que sa présence signifie. Peur, de se retrouver à devoir lui parler. Expliquer. Confronter. Pas douée, pour ça. Surtout pas alors qu’il la regarde comme ça. « Qu’est-ce que tu fais ici ? » Qu’elle parvient à articuler, relevant brièvement les yeux vers lui. Heureusement y’a le soleil pour l’aveugler, et lui donner l’excuse pour dévier le regard.
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Message Sujet: Re: love and war / henrik.   love and war / henrik. Empty Mer 6 Mar - 22:16

Énième voiture trouvée et contrat signé. Challenge ridicule qui lui aurait presque fait lever les yeux au ciel. Les clients trop faciles à contenter sont une perte de temps, mais l'argent qui suit est toujours bon à prendre, peu importe s'il est gagné durement ou avec une facilité ennuyante. C'est lourdement que Henrik se glisse dans sa propre voiture, un bruyant soupir s'échappant de ses lèvres et brisant le silence à l'intérieur. Son front s'écrase sur le volant tandis que ses doigts l'agrippent jusqu'à ce que ses jointures en deviennent blanches. Il y a un truc qui pèse lourd au fond de sa poitrine, qui l'écrase et l'empêcherait presque de respirer. Les bagnoles ne sont même plus assez pour l'apaiser et c'est ce qui le terrifie le plus. Se retrouver derrière un volant a toujours été suffisant pour le faire reprendre pied. Et aujourd'hui, il n'y a rien qui puisse calmer la douleur qui s'est réfugiée sous sa peau. Ses maux portent tous le même nom. Agnes. Agnes qui, en décidant de le quitter, a tout emporté avec elle. Henrik pensait que leur amour était plus fort que le reste, plus puissant qu'une erreur aux contours floutés par la rage. Il croyait qu'ils se relèveraient, l'espoir qu'Agnes ne se souvienne plus jamais de rien pour soulager son cœur malade. Et au fond, même après des mois de séparation, il n'a pas réellement abandonné l'idée de la retrouver et de lui montrer qu'il n'y a qu'avec lui qu'elle doit être – et très sûrement qu'elle ne l'abandonnera jamais. Reprenant son souffle après l'avoir retenu plusieurs secondes, Henrik se redresse et, d'une main agile, retire son portable de sa poche arrière. L'appel qui suit est rapide et précis, rien que son nom à donner pour que la meilleure table lui soit réservée. Il sait qu'Agnes va adorer – comme du temps où il l'invitait dans les restaurants les plus romantiques du Queens, un bouquet de roses à la main et son sourire le plus charmeur aux lèvres. Les clés sur le contact, Henrik allume le moteur. Elle est peut-être partie, Agnes, mais il connaît encore tout d'elle.
Le chemin de son bureau jusqu'à la librairie où elle travaille est relativement calme, le soleil étant encore trop élevée dans le ciel pour voir les voitures se multiplier sur la chaussée. C'est à quelques mètres de la boutique qu'il se gare, le cœur battant la chamade. Elle lui fait cet effet là, Agnes. A chaque fois qu'il pense à elle, que ses iris se posent sur ce visage dont il ne cesse de rêver, Henrik se sent comme un gamin devant son premier amour – il n'en est pas loin, quand on y pense. Inspirant un grand coup, il sort de la voiture, s'y adossant pour l'attendre. Il n'est même pas sûr qu'elle soit là, mais il ose croire à sa bonne étoile – et finalement, ça porte ses fruits. Dès que son regard rencontre sa silhouette, c'est comme si le monde s'était arrêté de tourner. Un réel sourire s'étend sur ses lippes, le premier depuis plusieurs jours à broyer du noir. Qu'elle est belle, Agnes, si belle qu'elle en ferait pleurer les divinités. Ses jambes le rapprochent, détruisant autant de distance que possible. Il s'arrête à quelques mètres d'elle pour ne pas la faire fuir. Ne pas pouvoir la toucher ni l'embrasser est un supplice, mais il est conscient qu'elle est apeurée et c'est ce qui le blesse le plus à cet instant. – Henrik. Le timbre de sa voix est si faible, si vulnérable que ça ne fait que remuer le couteau dans la plaie. – Agnes, qu'il dit avec autant de douceur que possible. Ses yeux cherchent désespéramment les siens mais à son plus grand désarroi, il comprend très vite que c'est peine perdue. Il passe sa langue sur ses lèvres, les humidifiant avant de les rouvrir pour reprendre la parole. La voix d'Agnes le coupe dans son élan. – Qu’est-ce que tu fais ici ? Ses opales se mêlent brièvement aux siennes, arrêtant son cœur de battre pendant quelques minuscules secondes. Qu'est-ce qu'il donnerait pour se plonger dans l'océan de ses yeux et ne jamais en ressortir, se noyer sous leur beauté et en mourir. Un rire aérien dépasse la frontière de ses lèvres. – Je voulais te voir. Ça sort comme une évidence. Il n'a aucune raison d'être là, dans ce quartier qui n'est pas le sien, si ce n'est pour la voir elle. Tu m'as l'air en forme, qu'il glisse avec honnêteté. C'est avec difficulté qu'il cache la pointe de douleur dans sa cage thoracique. T'as l'air en forme sans moi et moi, je suis misérable.


@agnes delacroix
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Message Sujet: Re: love and war / henrik.   love and war / henrik. Empty Mer 13 Mar - 1:24

Les nuages viennent assombrir le ciel. La quiétude envolée, dans le coeur d’Agnes. Inévitable ombrage au tableau, de voir Henrik débarquer. Ça la prend aux tripes, de le voir. Pas bien loin, juste à quelques pas. Assez près pour discerner ses traits. Ce visage qu’elle connaissait si bien, malgré l’amnésie. Sa peau, son nez, ses yeux, ses lèvres. Elle le connaissait si bien. Tout ce temps ensemble, à se regarder, à se parler, à s’aimer. Henrik avait été tout, pour elle. Toute sa vie. Son coeur entier, dévoué à lui, déposé entre ses mains où il avait pu le contrôler. Il est magnétique, Agnes. Elle doit se rappeler ce qu’il a fait. C’est lui qui t’a poussé. Les voix qui se fracassent dans sa tête. Vous vous aimiez. Vous étiez heureux. Et celle qui gronde. Celle à qui elle a appris à donner plus de pouvoir qu’aux autres. C’est lui qui t’a poussé. Mais il est beau à en crever, à se tenir là. Ses cheveux en bataille et l’éclat dans son regard. Aussi beau qu’à leur première rencontre, aussi beau qu’à toutes les fois où elle l’avait retrouvé, au restaurant, au travail, à la maison, entre les draps. Le coeur qui dérape. Qui s’égare. Henrik. On a été heureux ensemble. Il est beau à en crever, son visage illuminé vers elle. Agnes est propulsée dans le temps, des années en arrière. Son coeur plus jeune, pas encore meurtri. Le romantisme qui avait su la faire céder, si facilement. Et encore une fois, elle a presque le réflexe de le faire. Une partie d’elle qui a envie de sourire, de le serrer contre elle. L’embrasser. Se laisser tenter. Mais la voix continue de gronder, et de la rappeler à l’ordre.

Elle en tremble, Agnes. En tremble, de le voir là, de le voir ainsi. De lutter contre tout ce qui tempête à l’intérieur d’elle. La voix d’Henrik, jusqu’à ses oreilles. Il dit son nom, avec douceur, avec tendresse. Ça vient la chercher, profondément, ça lui rappelle trop à la fois. Alors elle fuit son regard, apeurée, intimidée. Elle aimerait qu’il parte. La laisser respirer. Et elle ne veut pas qu’il disparaisse. Son rire la surprend. La fait relever les yeux vers lui. Sourire de gamin, à en décrocher les étoiles. « Je voulais te voir. » Et elle déglutit, acquiesçant doucement. Bien sûr. Il ne peut être là que pour ça, avec ce regard. « Je vois. » Ça ne sort qu’en un murmure, la nervosité qui la gagne de plus en plus. « Tu m’as l’air en forme. » Quelque chose dans sa voix attire son attention. Il n’est pas brusque. N’est pas sec, comme il a pu l’être. Dans sa voix, y’a de la douleur. Un appel, lancé vers elle. Un drapeau blanc. Elle ne veut pas lui faire confiance. Ne veut pas croire qu’il ait pu changer. Mais elle a toujours été trop sensible, Agnes. « C’est gentil. » Elle lui adresse un petit sourire. Faible, plus ou moins sincère. Mais un sourire tout de même. « Toi aussi. » Elle trébuche, la politesse est trop instinctive chez elle. Petit sourire nerveux sur les lèvres, alors qu’elle hausse les épaules. Les regards brefs qui ne s’attardent pas, mais qui se multiplient. « Je peux faire quelque chose pour toi ? » Qu’elle demande. Toujours prudente, Agnes. Mais peut-être un peu moins hostile. Peut-être un peu moins sur ses gardes. Attention, Agnes. Mais difficile de le rejeter, Henrik, quand il a ces yeux-là. Difficile de lui dire de dégager, quand y’a une partie de son coeur qui bats toujours pour lui.
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Message Sujet: Re: love and war / henrik.   love and war / henrik. Empty Sam 16 Mar - 14:32

Agnes a la beauté d'un millier de femmes réunies, d'une pureté intouchée et sans limite. Elle est naturellement lumineuse, brillant de mille feux sous les rayons du soleil hivernal. Peu importe les années écoulées, Henrik ne cesse jamais d'être émerveillé par la noblesse de ses traits et la splendeur de son corps tout entier. De toutes les femmes qu'il a rencontré, Agnes en reste la plus belle, la seule qu'il ne lassera jamais de découvrir, ses lèvres glissant sur sa peau et ses doigts parcourant chaque parcelle de son être. Henrik souhaiterait refermer le fossé entre eux, détruire chacune des barrières qui l'empêche d'atteindre la femme qu'il aime, tout ça pour pouvoir la prendre dans ses bras et la serrer contre lui jusqu'à ce qu'ils ne fassent plus qu'un. Comme avant. Comme quand ils s'aimaient à en faire jalouser la Terre entière, peut-être même chacune des planètes de l'univers. À défaut de pouvoir tuer la distance jusqu'au dernier millimètre, Henrik se rapproche assez pour sentir le parfum d'Agnes. Ce n'est pas le même qu'avant, mais l'hongrois n'en reste pas moins hypnotisé. Chaque once de contrôle dans ses veines semble s'évaporer dans les airs, se mêlant à l'odeur florale du parfum d'Agnes et s'envolant par-dessus la couche d'ozone. Il sent son cœur s'affoler dans sa poitrine. C'est comme s'il revenait quelques années en arrière, lorsqu'ils commençaient seulement à se fréquenter et que Henrik ne comprenait pas ce qui lui arrivait, maudissant les cieux de l'avoir créé aussi faible. Il restera toujours ce jeune homme angoissé par ses propres sentiments, tremblant intérieurement à chaque je t'aime prononcé. Henrik donnerait l'entièreté de son argent, vendrait son âme au Diable et se foutrait à genoux devant Dieu si tout ça pouvait lui rendre Agnes, la ramener à lui pour l'éternité.
Sa voix se veut sûre d'elle, mais chacun de ses mots sonne faux à ses oreilles. Des milliers de syllabes souhaiteraient rejoindre le ciel, réparer les fissures et cicatriser les plaies béantes. Un autre homme réussirait certainement à se rattraper par les paroles, glissant des mots doux jusqu'à ce que l'amour ressorte des blessures fraîches et saignantes. Un autre homme pourrait tout arranger, raviver la flamme intérieure et lui donner assez de force pour ne plus jamais s'éteindre. Cependant, un autre homme n'est pas Henrik et ses paroles ne seront jamais assez puissantes pour rattraper ses erreurs. S'il ne sait pas manier les mots, il tente d'utiliser un ton tendre, ses yeux animés d'une lueur douce pour l'accompagner. Il ne veut la faire fuir, souhaite lui prouver qu'il a changé. – C’est gentil, qu'Agnes répond doucement, un léger sourire s'étendant sur ses lèvres. L'hongrois voit que son cœur n'y est pas et pourtant, il ne peut s'empêcher de ressentir une pincée d'espoir. Ce n'est peut-être rien pour les autres, mais pour lui, ce sourire veut dire beaucoup. Toi aussi. Henrik sourit à son tour, ses opales croisant furtivement les siennes. Un nouveau rire aussi léger qu'une plume s'échappe de sa bouche étirée. – Merci. Ce n'est qu'un murmure – comme s'ils échangeaient un secret. Si elle savait, Agnes. Si elle savait à quel point il souffre d'être loin d'elle, son cœur bousillé et irréparable depuis qu'elle est partie. Qu'il pense à elle tout le temps, ses yeux se posant seulement sur les femmes qui ramènent ses pensées à elle. Qu'à chaque montée au septième ciel, il n'a que son prénom à la bouche et son visage derrière ses paupières closes. Qu'il dort à peine depuis que son côté du lit est vide. Qu'il crève d'être seul – sans elle. – Je peux faire quelque chose pour toi ? L'hongrois lève doucement une main à sa nuque, la caressant avec une nervosité passagère. Ses yeux voyagent du visage à Agnes à la boutique derrière eux, puis retournent s'ancrer dans les siens. – Je souhaitais t'inviter au restaurant, qu'il répond, sa voix sûre malgré le tumulte à l'intérieur de ses entrailles. Je te force à rien, évidemment. Il enchaîne rapidement pour être sûr qu'Agnes ne va pas prendre ça pour une obligation. C'est juste... Ça me manque de passer du temps avec toi et je me disais que ça pourrait être l’occasion de rattraper le temps perdu. Son regard ne se détache pas du sien, implorant silencieusement. Dis moi oui, Agnes. Donne moi une chance de me rattraper. Laisse moi te rappeler ce qu'on était et l'amour que l'on partageait. Dis moi oui, je t'en supplie.


@agnes delacroix
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Message Sujet: Re: love and war / henrik.   love and war / henrik. Empty Mer 20 Mar - 3:20

Elle ne veut pas trop s’approcher. Veut garder ses distances, rester prudente. Elle le doit. Toutes les promesses qu’elle a pu se murmurer à elle-même, aux autres autour d’elle. Henrik n’est pas bien pour toi, qu’on lui a dit. Elle ne comprenait pas. Pourtant, y’avait des mois et des années de souvenirs qui étaient revenus dans sa tête, et qui étaient heureux. Le romantisme, les étoiles, le bonheur, l’amour. Le coeur d’Agnes ne savait pas mentir, elle savait l’écouter. Il était un peu bête parfois, mais il était sincère. Et il battait pour Henrik, même encore aujourd’hui, même après tout ce qu’il avait fait. Mais elle avait bien compris, elle s’était rappelée, de tous les mauvais côtés, de la noirceur qui faisait ombre à tout ce bonheur, que ce dernier n’avait parfois été qu’illusion pour oublier l’amertume de l’abus. Juste des mots, par ci, par là, des murmures et des regards échangés, Agnes murée dans le silence et dans la peur de le brusquer, d’aller à l’encontre de sa volontée et de provoquer sa colère. Et surtout, l’odeur de l’alcool dans ses narines, qu’elle s’était tellement acharnée à ignorer, mais qui avait finalement contaminée leur relation et leur vie entière jusqu’à cette soirée-là, où elle n’avait pas su repousser Flip et que Henrik avait crié et que -

Respire, Agnes.

Il la remercie. C’est envirant, l’étincelle dans son regard, le sourire latent sur ses lèvres. Il est là comme il était à leurs débuts, quand ils étaient encore jeunes et pas tout à fait accidentés par la vie. Ça l’enveloppe, Agnes, ça lui donne envie de céder et de tout relâcher. Mais elle sait que ça serait abandonner tout ce pour quoi elle s’est battue, dernièrement. Regagner son contrôle sur sa vie, sur ses pensées et sur son coeur. Faire ce qu’elle aimait, et apprendre à vivre avec les lésions à sa mémoire. Lésions qu’il avait causé. La voix de raison qui s’anime, et celle du coeur qui continue à s’acharner. Mais peut-être qu’il a pas fait exprès. Pourquoi il t’aurait dit que t’étais tombée, hein ?

On dirait un adolescent, à la manière qu’il frotte sa nuque et qu’il semble incertain de ses prochains mots. Agnes ne bouge pas, même si lui s’est approché, elle reste là, bien plantée dans le sol. La peur de ce qui arriverait si elle mettait ses muscles en mouvement, la peur de chuter, que ses genoux s’éraflent sur le bitume et que tout s’écroule. Encore. Elle aimerait qu’il parte, pour qu’elle puisse respirer à nouveau, et en même temps elle veut savoir ce qu’il fait là, pourquoi il est là, pourquoi maintenant. « Je souhaitais t’inviter au restaurant. » Agnes sent sa gorge gonfler, son coeur s’arrêter. Au restaurant ? La nervosité qui la gagne, la vague de panique qui l’empêche de respirer. Il t’a invité au restaurant, faudra que tu lui répondes. « Je te force à rien, évidemment. C’est juste… Ça me manque de passer du temps avec toi et je me disais que ça pourrait être l’occasion de rattraper le temps perdu. »

Le temps perdu.
Le temps que t’as perdu.
Le temps qu’il t’a arraché
.

« Je sais pas si c’est une bonne idée. » Elle ne sait pas ce qui lui donne la force d’être aussi honnête, mais les mots lui échappent avec une facilité désarmante. L’anxiété dans la gorge, qui menace de tout faire débouler. Le coeur serré, elle espère qu’il ne peut pas entendre à quel point il bats fort dans sa poitrine. « Je sais pas, Henrik... » Et elle se trouve stupide de ne pas savoir quoi répondre d’autre, d’avoir envie de pleurer parce qu’elle n’est pas capable de dire non, elle ne l’a jamais été. Incapable de refuser quoi que ce soit, à qui que ce soit, même à celui qui t’a poussé, même à celui qui t’a brisée. Même à celui qui t’a aimé, et que t’as aimé aussi. Que t’aimes sans doute encore, un peu, au fond de toi. « Juste pour discuter ? Rien d’autre ? » La honte est cuisante, dans le fond de son estomac. Le petit regard relevé vers lui, l’hésitation dans ses yeux. La peur de dire oui, la peur de dire non.

Agnes qui ne sait pas dire non.

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Message Sujet: Re: love and war / henrik.   love and war / henrik. Empty Mer 20 Mar - 22:47

Son invitation semble avoir l'effet d'une bombe en Agnes. Elle est nerveuse, il le sait. Seulement, ce n'est pas la même nervosité qu'à leur premier rancard. Cette dernière est bien plus forte, mêlée à une émotion qui ressemblerait presque à de la peur. Le cœur serré, Henrik s'empresse d'affirmer que ce n'est pas une obligation et que de ce fait, elle a le droit de refuser. Cela ne semble pas l'apaiser, la lueur de panique scintillant plus fort encore au fond de ses iris. La mâchoire de l'hongrois se crispe, non pas par colère mais par douleur. C'est aussi puissant qu'un coup en plein visage. Elle a peur de toi, Henrik. Elle a peur que tu recommences. Mais qu'il recommence quoi, exactement ? Ce qui s'est passé était une erreur, une foutue erreur qu'il regrette tous les jours de sa vie. Il lui a répété des milliers de fois, s'excusant jusqu'à ce que sa voix le lâche. Comment peut-elle croire qu'il recommencera ? Tu ne comprends pas, Agnes. Tu ne comprends pas à quel point j'crève d'être loin de toi. Tu ne comprends pas que j'mourrais avant d'te refaire du mal. J'voulais pas, Agnes. Regarde-moi dans les yeux. Vois comment j'suis sincère. Comment j'regrette d'avoir levé la main sur toi et d'avoir gâché ta vie. Regarde-moi et pardonne moi, j'demande que ça. Ses yeux cherchent ceux d'Agnes, suppliant silencieusement cette dernière d'accepter de lui laisser une seconde chance. Un refus de sa part serait le coup de trop, la droite qui le mettrait ko, et Henrik en a conscience. Si elle dit non aujourd'hui, il n'y aura pas de prochaine fois, tous ses espoirs brisés par un seul mot à l'impact dévastateur. Il voudrait seulement qu'elle voit, Agnes. Il voudrait qu'elle se rende compte d'à quel point il s'efforce de changer pour elle, pour se rattraper et la mériter. Et il souhaiterait qu'elle comprenne qu'il n'y a qu'avec lui qu'elle pourra trouver le bonheur. Peut-être qu'il ne l'a pas rendu si heureuse que ça à la fin de leur relation, mais il est capable du meilleur pour elle. Elle le sait. Il faut qu'elle le sache et Henrik n'abandonnera pas tant que ce ne sera pas le cas.
– Je sais pas si c’est une bonne idée. Son sang se met à bouillir, vite, trop vite pour qu'il puisse contrôler ses émotions. Son être entier le pousse à secouer Agnes pour lui remettre les idées en place, mais il refuse de laisser son impulsivité gâcher sa dernière chance. Il ne touchera pas Agnes. Pas maintenant. Pas tant qu'elle ne lui aura pas donner son autorisation. Mais elle est à toi, tu ne devrais pas avoir besoin d'autorisation. Henrik inspire profondément, ressentant une soudaine envie de vomir. Pourquoi faut-il que tu sois si compliquée, Agnes ? Je sais pas, Henrik... Ses dents attrapent l'intérieur de sa joue, serrant jusqu'à ce que le goût du sang atterrisse sur sa langue. Il n'a pas le droit d'être énervé par l'hésitation d'Agnes et pourtant, il n'arrive pas à empêcher son agacement de grandir en son être. Nouvelle inspiration silencieuse avant d'étirer ses lèvres dans un sourire éclatant. – Ça ne te manque pas, à toi ? La question sort innocemment des lèvres d'Henrik, mais il sait l'effet qu'elle aura. Il connaît assez la femme qu'il aime pour le savoir. C'est presque immédiatement qu'il arrive à entrevoir le trouble au fond de ses prunelles. Elle est toujours la même, ses joues rougies face aux souvenirs. Les dernières semaines de leur relation ont été un désastre, mais le reste ne l'était pas et Agnes ne peut pas dire le contraire. Il y a un temps où elle aimait passer tout son temps avec lui, son corps blotti contre le sien, ses doigts perdus dans ses cheveux et son rire retentissant à chaque baiser plume qu'Henrik déposait dans le creux de son épaule. L'amnésie n'a pas pu effacer ce qu'elle ressentait, ni la sensation de la peau de l'hongrois collée à la sienne ou celle de ses lèvres faisant leur voyage sur chaque parcelle de son corps. Il refuse de le croire. – Juste pour discuter ? Rien d’autre ? Et avec ça, toute la tension s'envole de ses épaules. Son sourire s'étire jusqu'à ses yeux, dévoilant ses canines. – Rien d'autre, qu'il affirme rapidement. J'te le promets. Promesse en l'air, l'espoir de pouvoir briser la distance entre leurs deux êtres trop présent pour qu'il puisse s'imaginer la quitter sans poser ses lèvres sur les siennes. Il continue de sourire comme un gamin, ses opales pétillantes refusant de quitter celles de la femme qu'il aime. Tu acceptes mon invitation, alors ? C'est aussi incertain qu'excité. S'il doutait quelques secondes auparavant, il sait maintenant qu'elle va accepter et il est aussi heureux qu'un enfant devant ses cadeaux de Noël. Ça me ferait vraiment plaisir, Agnes. Henrik en rajoute une couche, jouant la carte de la sincérité pour être sûre qu'elle dise oui. Il l'a laissé partir une fois, il ne fera plus jamais la même erreur.


@agnes delacroix

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Message Sujet: Re: love and war / henrik.   love and war / henrik. Empty Mar 26 Mar - 2:17

« Ça ne te manque pas, à toi ? » C’est cruel. C’est cruel, parce que ça fait remonter à la gorge tout le bonheur qu’ils ont pu partager. Ça lui rappelle comment elle était bien, avec Henrik, autant qu’elle était malheureuse. Ça lui rappelle les fleurs et les baisers et les soirées ensemble, ça lui rappelle le confort de leur petite tranquilité, les étincelles dans les yeux et les peaux enflammées. Bien sûr que ça me manque, qu’elle aurait envie de murmurer. De se fracasser contre lui, de retrouver tout ce qui lui manque. Sa proximité, sa sécurité. Bien sûr que ça me manque. Tu crois pas que ça me manque ? D’entendre son pas quand la porte se referme, de sentir son odeur sur l’oreiller, de sourire en voyant une petite tache de moutarde sur sa chemise en faisant la lessive. Elle et Henrik, ils étaient solides, ils étaient quelque chose. Beaux ensemble, admirés, on leur présageait tout, le monde leur appartenait. Sauf qu’il n’a toujours appartenu qu’à lui, en fait. Et qu’Agnes devait rester à son bras, sourire, et accepter. Encaisser. Encore et encore et encore. La gorge serrée, elle se déteste d’être aussi hésitante. Elle devrait être cinglante, comme elle a toujours voulu l’être. Trop douce. Ça va finir par te détruire, qu’on lui a déjà dit. Aujourd’hui, c’est fait. Elle doit se reconstruire. C’est pas en acceptant son invitation qu’elle le fera.

Mais bien sûr, que ça me manque.

Il sourit, quand elle lui pose la question. Et ça lui donne presque envie de sourire aussi, à le voir s’illuminer comm un gamin. Le petit sourire qui reste discret, sur ses lèvres. « Rien. J’te le promets. » Pointe au coeur. Sourire qui s’efface. Et tes promesses, elles valent quoi, Henrik ? « Tu acceptes mon invitation, alors ? » Elle pince des lèvres, légèrement. Le coeur qui bats trop vite, qui l’empêche de se concentrer, de penser. L’envie de se cacher le visage entre les mains, pour s’empêcher de rougir comme elle le fait. Arrête de me regarder comme ça, Henrik. Arrête de me regarder comme si tu m’aimais encore. « Ça me ferait vraiment plaisir, Agnes. » Le coeur qui tambourine. « Hm… Je…  » Tu peux dire non, Agnes. Tu devrais. Tu devrais vraiment.

« D’accord. » Elle acquiesce finalement. Le regard timide, relevé vers lui. Elle sait qu’elle commet sans doute une erreur, mais il est doux. Il est gentil. Il semble sincère. Mensonges, mensonges. Une voix dans la tête d’Agnes. Peut-être pas cette fois. « Juste pour discuter. » Et y’a le petit sourire qui revient. Tranquille. Les mains nerveuses, alors qu'elle avance d'un pas en sa direction. Quelque chose qui la grignote, qu'elle a besoin de placer là. Entre les deux. Une barrière, qui se dresse. Joel. Il est là, elle ne l'oublie pas. Bien avec lui. Pas prête à tout laisser tomber. « C'est juste que... Je - je fréquente quelqu’un en ce moment, alors… Voilà. » C’est dit un peu trop vite, sans doute. Sans peser les conséquences, sans penser à quel tornade ça pourrait déclencher. « Je voulais juste que tu le saches avant toute chose. » Avant de te faire trop d'idées. Et que je m'en rappelle aussi, avant que tu m'en donnes. Elle déglutit, sentant la brise soudainement bien plus froide. « Tu voulais y aller quand ? » Peut-être que ça passerait bien, après tout. Peut-être qu'il ne le prendrait pas trop mal. Peut-être qu’il était juste là en ami.


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Message Sujet: Re: love and war / henrik.   love and war / henrik. Empty Dim 31 Mar - 15:19

L'incertitude, la peur, l'hésitation, l'angoisse. Tant de mots négatifs pour décrire ce qu'Agnes semble ressentir et échauffer les nerfs d'Henrik. Il y a de l'incompréhension dans ses regards, couplée d'une irritation qui ne cesse de s'agrandir au plus profond de son être. La pression monte jusqu'à ce qu'Agnes se retrouve à la frontière de l'acceptation et du refus, un pied au dessus de la ligne décisive. Bientôt les doutes sont remplacés par la certitude. Tu n'as jamais été capable de me dire non, Agnes, et ce n'est pas aujourd'hui que cela commencera. Henrik joue de son charme, de ses sourires qui l'ont trop souvent fait craquer. Il rajoute une couche pour ne laisser aucune chance à Agnes de refuser son invitation. – Hm… Je… Malgré son hésitation passagère, il n'a besoin que d'un regard pour savoir qu'il a gagné. Que la limite a été franchis et qu'elle ne peut plus faire marche arrière. Le piège se referme sur elle comme à l'époque, les jolis mots d'Henrik pour l'attirer dans ses filets. D’accord. Il ne s'arrête pas de sourire, les lèvres étirées jusqu'à ses yeux pétillants. Ses entrailles se tordent dans tous les sens sous le regard de la femme qu'il aime. Si tu savais comme tu m'as manqué, comme je t'aime à en crever. Il la dévore de ses opales amoureuses, le cœur dans la gorge. Si elle se croit vulnérable face à lui, Henrik lâche toutes ses armes à ses pieds, lui laissant libre accès à son être tout entier. Agnes n'a jamais été conscience de l'effet et du pouvoir qu'elle a sur lui. Elle pourrait tout lui faire qu'Henrik la laisserait, l'aidant même à se foutre lui-même en pièces si c'est son désir le plus cher. Juste pour discuter. Il acquiesce d'un hochement de la tête, la poitrine enflammée par le timide sourire qui s'étire sur les lèvres de son interlocutrice. Il est beau, ton sourire. Il est si beau qu'il réchaufferait les cœurs les plus froids et ferait fondre la glace à l'intérieur des êtres oubliés par l'amour. Qu'il pourrait arrêter les guerres et instaurer la paix dans les poitrines des Hommes. Il est beau, ton sourire. Il est si beau que je pourrais le regarder cent ans sans jamais m'en lasser. Elle se rapproche d'un pas, réduisant doucement la distance entre leurs deux corps. Henrik retient son souffle, les battements frénétiques de son cœur contre sa cage thoracique pouvant se faire entendre à des kilomètres à la ronde. Agnes est nerveuse, mais lui l'est aussi. Derrière ses airs assurés, il ressemble à rien d'autre qu'à un adolescent amoureux, le premier baiser à l'horizon et la peur de se foirer. C'est juste que... Je - je fréquente quelqu’un en ce moment, alors… Voilà. Le reste de ses mots se perd dans les abysses, l'obscurité les embrouillant jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien. À l'intérieur, il n'y a plus qu'un trou noir sans fond, qu'un néant à en faire disparaître son être entier. Il lui faut plusieurs secondes pour réaliser la signification des paroles d'Agnes, son cœur semblant cette fois sans vie au milieu de sa poitrine. Sa mâchoire se serre, l'intérieur de sa joue de retour entre ses dents. Ça se mélange, s'emmêle, tourbillonne dans sa boîte crânienne. – Pardon ? Qu'il s'entend lointainement articuler. Son regard doucereux se transforme, s'obscurcit sous la puissance de ses émotions. Il a mal. Il a mal et il est fou de rage. Il y a tout qui se mêle pour ne former qu'une masse incompréhensible. Comment tu peux me faire ça, Agnes ? J'suis pas sûr d'avoir bien compris. Sa voix est dure, aussi orageuse que la furie dans ses entrailles. Les images reviennent le frapper de plein fouet. Agnes. Flip. Ses doigts refermés autour du col de son frère. Ses paumes plaquées contre les épaules de sa petite amie. À cet instant, il n'y a plus d'amour. Il n'y a qu'une colère assourdissante qui crame tout sur son passage – la même que quelques mois auparavant. C'est qui ?

Henrik se retient au bord de la falaise,
et c'est la chute.


@agnes delacroix
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Message Sujet: Re: love and war / henrik.   love and war / henrik. Empty Mar 16 Avr - 16:28

Trop naïve, Agnes. Trop naïve de penser qu’elle peut lâcher une bombe comme ça, et de s’en tirer indemne. De poser l’orteil sur la mine et de fermer les yeux, compter jusqu’à trois, et que le miracle se produira. Aucune explosion, aucun bruit assourdissant, aucun coeur déchiqueté sous l’impact. Qu’il n’y aura que la quiétude pour suivre le déclic, que le silence pour les bercer. Que tout ira bien, que le fleuve restera tranquille. Tellement naïve, Agnes. Trop romantique, la tête dans les étoiles, à se perdre dans leur splendeur, à glisser dans les nuages et à se raccrocher au fait que la pluie n’est là que pour emmener l’arc-en-ciel. Ça serait si facile de se laisser écraser, de se fracasser au sol. De baisser les bras, accepter la défaite. Elle doit se raccrocher, Agnes. Comme une gamine de cinq ans aux ambitions trop grandes, qui croit fermement qu’un jour elle sera guerrière. Elle doit se raccrocher à l’épée dans sa ceinture, se disant qu’elle n’aura pas à la brandir, que le monde n’est pas si noir, pas si cruel. Elle a du réapprendre, Agnes. Depuis la chute, depuis le vide, réapprendre à aimer le monde, à y voir de la beauté. À ne pas se laisser empoisonner par les toxines, et à se répéter qu’il restait du beau. En Henrik aussi. Il est là, non ? Il est là, il sourit, il est beau. Il est là, juste pour discuter. Tout ira bien. Tout ira bien.

La corde coupée. Les corps suspendus, le souffle brûlant. En espérant juste que l’abysse ne soit pas trop profonde.

« Pardon ? » Quelque chose a changé. Une noirceur sur ses traits, une ombre dans le regard. Le ciel de ses yeux est devenu orageux, nuages menaçants à l’horizon. Elle le connaît, Henrik, reconnaît cette mâchoire serrée et cette manière de se recroqueviller sans bouger. Elle déglutit, Agnes. Comment t’as pu croire que ça allait bien passer ? Que tu pouvais larger le missile sans qu’il n’y ait de victimes ? « Je… » Le point glacial sur sa nuque descend le long de son échine. La nervosité, qui laisse place à l’anxiété. « J’suis pas sûr d’avoir bien compris. » Et le ton de sa voix la ramène des années en arrière, dans toutes ces remarques qu’elle a pu se prendre, comme des claques sans qu’il la touche, cette voix noire et glaciale qui serre sa gorge entre des doigts épineux. Henrik. Non. S’il te plaît. Fais pas ça. Elle ne sourit plus, Agnes. Ne sourit plus du tout. Et lui non plus. La douceur du jour n’est qu’une illusion, lumière artificielle pour dissimuler les plaies encore béantes. « C’est… hm… » Elle essaie de trouver sa voix, Agnes. Mais on dirait qu’il lui a arraché, avec sa rage, avec ses ombres. « C’est qui ? » Et il parle comme si elle lui appartenait encore, comme si leur histoire n’était pas terminée, comme si rien n’avait été conclu. Et peut-être que c’est vrai, peut-être que c’est toujours le cas, et que la liberté qu’elle s’était donnée n’avait été qu’un mirage. Raccroche-toi, Agnes. Elle se racle la gorge, mais est incapable de soutenir son regard. « Il s’appelle Joel. » Raccroche-toi, Agnes.

Raccroche-toi à Joel.
À sa manière de te regarder.
À sa manière de t’embrasser.


« On s’est rencontrés au groupe de soutien que j’anime le mercredi. Pour les amnésiques. » Elle est incapable de le regarder, à ces derniers mots. Tu te souviens, Henrik ? Tu te souviens de ce que tu m’as fait ? « C’est assez récent, mais… Voilà. » Sac replacé sur son épaule. Elle piétine sur place. « Ça ne change rien, de toute façon, Henrik. » Petite voix, qui s’assume à peine. Raccroche-toi, Agnes. Elle hausse un peu les épaules, relève les yeux vers lui. Comme j’t’ai aimé, Henrik. Comme j’t’aime encore. Mais c’est terminé, toi et moi. « Tu voulais juste discuter, non ? » Et ça tremble trop pour être affirmé. Trop instable pour vraiment faire le point que ça devrait. Mais le monde a bousculé et Agnes essaie de faiblement se raccrocher. Je suis désolée, Henrik. Mais toi et moi, c’est terminé.

Est-ce que tu ne pourrais pas être heureux pour moi ?

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Message Sujet: Re: love and war / henrik.   love and war / henrik. Empty Jeu 18 Avr - 16:56

Les vagues déferlantes emportent la raison qui se débat avec hargne. Les résolutions, elles, se noient dans l'océan qu'est la rage d'Henrik et disparaissent dans les tréfonds aussi obscurs que sa haine brûlante. Il se laisse ensevelir par la noirceur du monstre qu'Agnes a réveillé en quelques mots, se perd dans le néant qui termine bientôt par obscurcir les traits de celle qu'il a un jour aimé – ou plutôt celle qu'il aime toujours comme un chien. Celle qui le suit partout où il va, le jour et la nuit. Celle qui rampe sous sa peau et coule dans ses veines. Ses émotions s'emmêlent jusqu'à en devenir incompréhensibles. Je fréquente quelqu'un en ce moment. Ça tourne en boucle dans son esprit tourmenté, remue un couteau ardent en plein milieu de sa poitrine. J'étais prêt à t'attendre une vie entière, à te vénérer jusqu'à ce que le monde s'effondre sous nos pieds. Elles sont où tes promesses d'amour éternel, Agnes ? Elles sont où les images d'anneaux échangés et de vœux prononcés ? Tu m'as fait croire à la Lune pour venir ensuite retirer toutes les étoiles d'un ciel dessiné de tes doigts. Les syllabes s'enchaînent sans qu'il n'entrevoit leur sens, trop aveuglé par la colère sourde qui bourdonne jusque dans ses oreilles. Henrik sent la trahison brûler sa chair laiteuse, puis se faufiler à l'intérieur pour consumer son être balafré. Ses doigts tapotent le tissu de sa veste dans un mauvais rythme, alors qu'une partie de lui se bat pour ne pas attraper Agnes et l'entraîner de force dans sa voiture. Tu croyais à une vie sans moi, mais la vérité est qu'il n'y en a pas. Il n'y a pas d'après moi. Pas d'après mon corps contre le tien et ma langue dansant avec la tienne. J'pensais avoir été clair, mes lèvres glissant les mêmes mots à répétition pour les ancrer à jamais sous ta peau porcelaine. Et j'refuse de te laisser jouer la carte de l'oubli. Les fondations de notre relation étaient trop profondes pour que l'amnésie te prive de ses souvenirs. Tu croyais à une vie avec un autre, mais j'refuse de l'accepter. Personne ne t'aimera jamais autant que moi, Agnes. On en a déjà parlé des centaines de fois et j'continuerais de te le rappeler. – Il s’appelle Joel. C'est un frisson de dégoût qui traverse le corps d'Henrik. Aucun mot ne s'échappe, juste un souffle enflammé retenu trop longtemps pour ce soit supportable. Il la regarde toujours de ses opales aussi noires qu'une nuit où les étoiles sont cachées par les nuages. Son visage ne montre aucune trace visible de sa rage intérieure, mais Agnes le connaît assez pour lire à travers les lignes et voir au dessus de ses traits impassibles. On s’est rencontrés au groupe de soutien que j’anime le mercredi. Pour les amnésiques. Elle continue de parler comme si tout était normal. Comme si elle n'était pas en train de foutre en l'air des années de vie commune pour une amourette. Il se prend une claque en pleine gueule à ses trois derniers mots. Pour les amnésiques. C'est de ses propres mains qu'il l'a poussé dans les bras d'un autre homme à la mémoire trouée. Et si j'perdais la mémoire, est-ce que tu voudrais de moi ? Si j'me vidais de tous mes souvenirs, est-ce que t'aurais pitié de moi ? T'es trop naïve pour voir à quel on se joue de toi. C’est assez récent, mais… Voilà. Ça ne change rien, de toute façon, Henrik. Elle ne se rend pas compte, Agnes, de toutes les plaies qui portent son nom à l'intérieur de lui. Tu voulais juste discuter, non ? Il y répond d'un rire amer, une main nerveuse passant dans ses cheveux en bataille. Des milliers de remarques cinglantes font leur nid dans sa gorge. Ses doigts tremblent, son corps entier et son esprit tourmenté lui criant de tuer leur douleur par l'alcool. – Pourquoi tu fais ça, Agnes ? C'est calme au milieu de la mer qui se retire pour créer sa vague meurtrière. Pourquoi tu nous fais ça ? Qu'il rectifie, accentuant le nous plus qu'il ne le devrait. Tu te rappelles de nous, Agnes. J'le vois dans tes prunelles où j'me suis tant noyé. Je l'entends dans ta voix et l'aperçois dans chacun de tes gestes. Tu pourras prétendre autant que tu veux, mais j'suis dans ta peau comme toi dans la mienne. Il y a son regard qui ne quitte pas le sien et ses paumes qui le démangent. Il voudrait la blesser autant que l'embrasser à lui en faire oublier ce qu'elle croit être sa nouvelle existence. Tu crois que ce Joel est avec toi pour quoi ? Le prénom sort de sa bouche comme une insulte, pique sa langue du venin qui échappe de ces deux syllabes. Probablement parce que c'est plus attrayant, une femme qui a perdu la mémoire. On peut en faire ce qu'on veut, modeler sa vie comme on l'entend. La vulnérabilité attire, Agnes. Il lui parle comme à un enfant à qui il faut apprendre la vie. Et dans son récit, Henrik en oublie qu'il a lui aussi essayé de modeler l'existence d'Agnes pour la faire rester à ses côtés. Mais comme tout, ça termine par lasser. L'ombre d'un rictus aux lèvres, le même qu'il arborait à chaque tentative de manipulation, ces dernières parfois inconscientes, et qui fonctionnait toujours pour retourner la tête d'Agnes. La différence entre lui et moi, Agnes, c'est que j'me lasserais jamais de toi, qu'il laisse glisser comme une caresse invisible sur la peau de la femme qu'il aime. On sait tous les deux qu'on est fait l'un pour l'autre, alors pourquoi essayer de se persuader le contraire ?

@agnes delacroix

hj:
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