enfers.

franchir le pas ? tourner le pas ? c’est encore bien trop dur pour toi. et si j’en ai pas envie ? tu renchéries entre deux de ses paroles, le sourire sans joie sur tes carmins, le sourire par principe, celui qui n’est là que pour faire beau. et ta tête que tu tournes vers lui, tes yeux dans les siens, tu restes bien trop longtemps silencieuse. sans réfléchir à ce qu’il vient de te dire, le prêtre. tout simplement parce qu’il a raison. parce que c’est exactement cela. ce discours, tu le connais déjà. tu sais déjà les raisons de ton surplace. tu sais déjà que sa mort a fait mourir une partie de ton coeur, tandis que la rupture quelques mois plus tôt a fait mourir l’autre partie. t’as jamais cherché à réparer la machine. t’as jamais pansé tes cicatrices car ils font partie de toi, car sans eux tu croyais ne pas pouvoir avancer,  que tu n’avais plus le droit à rien. et surtout, il dit vrai, la peur en cause. je suis terrorisée à l’idée que tout recommence. un chuchotement, presque inaudible, une confidence rare que tu accordes à cet homme que tu ne connais ni d’adam d’ève, mais que lui s’y connaît sur le sujet. le ricanement sur les lèvres, le clin d’oeil balançait en même temps que tes paroles. sa main sur ton épaule, tu ne te décales pas. l’observes encore un peu, ses dernières paroles qui résonnent encore dans ton crâne, te font passer par plusieurs émotions, pensées, jusqu’à ce que ce soit la colère qui envahisse tes pores petit à petit. est-ce que vous avez déjà perdu quelqu’un ? jvais pas vous demander un enfant vu votre choix de carrière et de vie. certes, que tu respectes totalement. le reniflement alors que tu fais en sorte que sa main dégage de ton épaule. je vis déjà. je sais pertinemment que ce n’est pas ce qui la fera revenir. merci. le ton neutre, qui n’a pas monté, respectueuse des lieux mais qui pourtant, gronde. tu t’es levée, t’as ramassé ton sac, le regard encore sur lui. je gère ma vie comme je l’entends. j'honore ma fille comme je l’entends. vous npouvez pas savoir ce que ça fait. vos paroles pieuses comme si vous saviez tout, les textes de votre Dieu trouvés dans un vieux machin, c’est pas la vraie vie. vivre l’amour, les ruptures, les décès, les drames par procuration, c’est pas non plus vraie vie. la vie, c’est des galères, des merdes, des instants de bonheur, des morts et des choses sentimentales. c'est l'amour avec une autre personne, la perte, les ruptures, les retrouvailles. alors avant de parler, vivez l’expérience et on en reparlera de ma manière de vivre à ce moment-là, ok ? les sourcils que tu lèves comme si t’allais attendre une confirmation, tu finis par lui lancer un bonne journée grogné avant de te barrer. c'est pas comme si ça allait arriver, qu'il vive l'expérience. pour toi, ce beau gosse de prêtre resterait dans sa ligne de conduite. tu ne peux savoir que certaines de ces questions de vie envahissent bien trop son esprit ces derniers temps. tes talons qui claquent contre le carrelage au sol, tu passes à côté de ta mère dans la plus grande des ignorances. en colère, blessée, vexée, absolument pas apaisée. c’était vraiment de la merde cette idée de suivre ta mère. plus jamais.

Bien évidemment qu'il y était allé bien trop fort, qu'il avait poussé le bouchon. Mais on aurait dit que c'était ce qu'elle demandait, Nana. Au départ, elle n'avait pas l'air si énervée. Elle avait l'air d'être en pleine réflexion, plutôt. Elle était terrorisée, et il pouvait le comprendre, mais justement, elle devait sortir de la peur. La peur l'empêchait de vivre. Peut-être d'avoir d'autres enfants. D'aimer, tout simplement. La peur de perdre l'autre.
Puis, elle se mit en colère. A sa question, il se contenta de hocher la tête. Bien sûr qu'il avait perdu quelqu'un. On perdait tous des proches, car aucun de nous ne venait de nulle part. On les perdait de façon différente. Parfois, la mort nous séparait. Parfois, un départ. Mais la tristesse était bien là lorsqu'il s'agissait de vivre son deuil. Il ne répondit pas, la laissa enchaîner sa tirade et se lever, sans la retenir pour autant. Elle balançait les mots, sans se rendre compte de leur portée sans doute. Les textes... Les connaissait-elle seulement? Les avait-elle compris? Toby n'émit aucun jugement et décida de ne pas répondre. Encore une fois, son col blanc le faisait paraître inhumain. Oui, c'était cela. Pourtant, il était un homme, comme un autre. Et les expériences, il les connaissait. Certainement pas les mêmes, et pas de la même façon. Mais il avait vécu avant d'être prêtre. Et en l'étant, il vivait toujours, comme tout un chacun. Le choix d'une vie de célibat ne le rendait pas moins émotionnellement touché qu'un autre. Mais il pouvait comprendre la colère de Nana. Il avait touché la corde sensible. Et au lieu de puiser au fond d'elle, elle fuyait. Elle remettait la cause sur les autres. Il afficha un simple sourire à l'attention de la mère de la jeune femme, qui le regardait, interloqué. Le trentenaire affichait un air désolé, penchant la tête sur le côté, jusqu'à ce que celle qui partageait son échange de regard se lève et s'en aille pour rattraper sa fille. Toby poussa un soupire et se leva à son tour.