sinner from another mother } renny

si on crève pas là, ce sera une autre fois. un sourire presque triste passe comme une ombre sur les lèvres de rex. carpe diem, disent-ils tous. cueille le jour. s’ils doivent se mettre la moitié la plus dangereuse de new-york à dos, autant qu’ils le fassent maintenant, autant qu’ils le fassent ensemble ; parce qu’on ne sait jamais qui pourrait avoir raison de leur peau avant que le big boss des mafieux se pointe. c’est ça le truc avec les idiots : ils ont l’art de se mettre dans tellement d’emmerdes, ça finit par en devenir impossible de deviner laquelle va finalement réussir à les foutre six pieds sous terre. la témérité vieillit mal, la stupidité encore plus. il a raison, kenny : tout le monde meurt et pourtant, ça arrive encore à nous surprendre. puis ken plaisante et rex ne sourit pas. s’il n’est pas forcément d’accord avec le fait que son meilleur pote soit le corps du duo – il pourrait probablement lui casser la gueule en un bon jour – il ne peut s’empêcher de se dire que sa deuxième remarque, aussi humoristique qu’elle se veuille est ancré dans du vrai. c’est toujours rex qui se charge de maintenir la terre à l’endroit, de faire en sorte que la vie garde un peu de sens quand tout semble devenir impossible. c’est toujours rex qui veille à ce que ça file droit. alors lorsque le garde-fou a, à son tour, perd la raison ; que – qui – reste-t-il pour s’assurer que l’univers n’implose pas ? personne. y’a plus que deux connards dans une chambre du queens effervescent et la force du désespoir qui leur susurre des idées impures et si vous ne l’avez jamais entendu, soyez sûrs d’une chose : il a tendance à ne jamais la fermer sa grande gueule, le désespoir. il s’insinue dans la faiblesse des pensées d’autrui et fait paraître à l’œil sans espoir les mauvaises idées en idées géniales. il détruit les inhibitions et finalement entraîne le chaos. rex et kenny ; instigateur du chaos. si c’était pas si dramatique, ils auraient au moins le mérite d’avoir un titre qui claque. mais la tragédie se confirme lorsque ken ne s’horrifie pas à l’idée d’un éventuel assassinat. c’est certainement la solution la plus facile à réaliser. intérieurement, rex acquiesce, mais c’est pas ce qu’il voulait entendre. il voulait que son pote lui dise qu’il est débile et que si c’est pour balancer des inepties pareilles, ce serait tout aussi bien qu’il se la ferme. il voulait que ken sorte une solution magique de son chapeau et que tout soit réglé en un instant. il sait pas. il sait plus. alors il inspire, il souffle et il se concentre. on n’enregistre jamais les moments importants à l’instant même où ils ont lieu et si ça se trouve, le reste de leur vie se joue maintenant. tu pourrais tuer quelqu’un ? rex laisse l’ange passer. « oui. » finit-il par dire. « si j’avais pas le choix ; si je devais le faire pour toi, pour prim. sous certaines circonstances, je pense que n’importe qui pourrait tuer quelqu’un. » parle doucement à présent. comme si en ne parlant pas trop fort, s’il existe un dieu quelque part, il ne pourrait pas l’entendre. tente de rationaliser la chose, se dit que ce serait l’affaire du tout un chacun si les conditions pour étaient là. rex sait bien qu’il ne trompe personne, cependant. et qu’il ne répond pas non plus à la question. tu pourrais tuer quelqu’un ? pas sous la menace, pas pour sauver une personne qui t’es chère. est-ce que tu pourrais tuer quelqu’un de sang-froid et sans autre raison que le fait que tu te sois mis tout seul dans la merde ? tu pourrais prendre une vie par pure égoïsme, juste pour sauver la tienne ? se mord la pulpe du pouce, erratique. « je sais pas. probablement pas, j’imagine. » il le concède. de toute façon, il n’a pas grand intérêt à se prétendre imperméable à l’idée d’ôter une vie. « mais même si j’en suis incapable, je ne suis pas certain d’avoir le choix. on est pas des génies du mal, kenny. on a pas les ressources pour organiser un braquage, un kidnapping ou quoique ce soit d’élaboré. on est juste deux débiles avec un faible pour se foutre dans la merde. » il saigne du doigt, à présent. mais il ne remarque pas. il continue de jouer avec sa peau à vif, ignorant même la légère douleur. « mais un meurtre… c’est juste l’histoire d’une balle dans la tête et c’est fini. toutes les semaines, on entend parler d’un nouveau lycéen qui a tué dix de ses camarades de classe parce qu’il était tout le temps choisi en dernier au foot. alors si des gamins de quinze piges peuvent le faire, pourquoi pas nous ? » parce qu’on est pas des fils de pute. parce qu’on est pas des sociopathes. parce qu’on est cons et qu’on finira sûrement en taule. parce que… parce que… parce que… y’avait des milliards de raison de trouver la simple existence de cette idée absurde. ils n’avaient besoin que d’une – une unique – bonne raison de le faire pour ne plus pouvoir faire marche arrière.