lactose (ziggy)

Ton l'oeil rivé sur le téléphone. Pas un appel, pas un message. Rien. Silence radio. Et ça t’agace. Ça t’énerve. Tu t’inquiètes aussi un peu, il disparaît jamais aussi longtemps Aldo, il appelle toujours. Mais pas cette fois-ci. Juste quelques mots, « j'me barre, j’ai rendu l’appart ». Et puis plus rien. Et tu fais quoi dans tout ça ? Tes affaires à récupérer, un appart à trouver, même pour le peu de temps que tu comptes-y passer. Tu n'as jamais été tenté de vivre sous les ponts, et rien que d’y penser, t’en frissonne déjà. Tu le maudis Aldo, d’avoir encore une fois pensé qu’a lui et ses petits intérêts. On dirait ton père. Son portrait craché même si cette simple idée le ferait enrager. En attendant il a fallu trouver un toit, la colocation est apparu comme une réalité, un besoin, une issu. T’es tombé au bon moment, une des filles venez de quitter l’appart, ils avaient besoin d’une remplaçante, et vite. Ils t’ont pas demandé grand-chose, pas tellement de garantis et ça t’arrange bien. T’aurais eu du mal à leur expliquer que tes rentrées d'argent proviennent des photos de nu et des vols que tu pratiques. Pas vraiment engageant comme situation. T’as préféré éluder la question, balancer à tour de bras que t’étais mannequin, surtout pour des petites marques, des représentations, des soirées privés. Ils n'ont pas posé plus de question. Tant mieux. Tu n'as pas non plus spécifié que tu porté la vie, qu’un être était en train de pousser au creux de ton ventre, tu n'as pas précisé ta condition de femme enceinte, tu t’es dit que c’était mieux comme ça. Et tu sais pas encore combien de temps tu pourras la cacher ta grossesse, tu sais pas dans combien de temps ton corps finira par te trahir, laissant une forme ronde déformer tes robes et tes vêtements. T’ignore ce que tu feras si on te fou à la porte, tu sais par ou tu traîneras ta carcasse. En attendant tu profites de la chaleur de ton nouveau foyer, d’une chambre assez spacieuse, et d’un appart presque toujours rangé. Tu t’es même mis aux petits déjeuners, toi qui ne passer qu’en coup de vent dans ton petit appart du Bronx que tu partageais avec Amos. « Il y a plus de lait », que tu lâches en apercevant ta coloc, Ziggy. C’est vrai y'a plus de lait. Parce que tu viens de terminer la bouteille. Pour noyer des céréales –qui d’ailleurs ne t’appartiennent pas non plus, mais elle avait l’air d'abandonner là dans le placard à provision-. T’es certainement pas la meilleure coloc, tu n'auras jamais de médaille, parce que ta chambre est déjà dans un bordel monstre, parce que t’a investi deux des étagères de la salle de bain, et que tu n’es ni une as du ménage, ni une as du rangement. Mais t’essaie de faire des efforts, de mettre de coté tes tendances égoïstes. « j’irais en racheter cet après-midi… », tu hausses les épaules, un demi-sourire aux lèvres, « dis moi si t’a besoin d’autre chose… », même fauché t’arrivera toujours à dégoter de quoi remplir le frigo ou les placards. En voilà une autre compétence que tu leur à cacher…