feels like home (leomi)

hébergement temporaire. ça ne devait pas durer longtemps. elle rentrerait à bay shore très bientôt. promis finn, je participerai aux frais. dis oui dis oui. c'est à peu près tout à ce quoi il pensait en butant chaque matin - ou presque - sur les chaussures de sa sœur en bas de l'escalier. il y avait mis du coeur dans cette petite maison du début du vingtième siècle, survivante des grands plans d'investissements immobiliers si courants dans le queens. c'était plus chaleureux que l'appartement impersonnel de sa mère qui ressemblait à la première double page de n'importe quel magazine d'aménagement intérieur. et c'était moins le bordel que chez son père qui avait eu beaucoup de mal à abandonner leur maison en bois au bord de la plage. finn avait eu enfin l'impression d'avoir un endroit qu'il pourrait qualifier de "chez lui". avant que lily n'y mette son grain de sel et prenne racine dans ce qui devait être une chambre d'ami et pas une chambre de lily. il aligna les chaussures de sa cadette contre le mur de l'entrée et ramassa au passage son manteau jeté en boule sur le canapé. si encore c'était la seule excentricité de sa sœur ... mais voilà qu'elle lui avait ramené une de ses copines, en panne de logement. elle avait regardé son frère avec ses grands yeux, minaudant sa surprise de le voir agir aussi égoïstement. alors forcément, on avait fait de la place dans ce qui devait être un bureau et qui s'était transformé en chambre pour les amis de lily. il se levait toujours le premier, appréciant cette petite heure où il avait l'impression de vraiment vivre tout seul. il entendit l'escalier craquer puis la porte de la cuisine grincer alors sans se retourner il fit le bilan de sa cueillette du matin. tu sais en contrepartie du fait que tu ne participes pas du tout aux dépenses de la maison, tu pourrais au moins ranger tes affaires. dit-il franchement. sa sœur était sûrement la seule personne sur cette terre à avoir droit au franc-parler de finn. il reposa la cafetière pour se retourner et se préparer à recevoir toutes les explications pleines de bon sens de sa sœur. mais au lieu de ça, c'était leomi qui lui faisait face et finn se retrouva - on peut le dire - comme un con. il mit dix bonnes secondes à comprendre qu'elle pourrait le prendre contre elle. désolé je croyais que c'était lily. dit-il avant de lever la cafetière en direction de la jeune femme. café? il apprenait toujours la cohabitation avec cette petite brune qui parlait à peu près autant que lui. bonjour. avec un sourire un peu désolé, un peu gêné. il s'assit à la table, le regard volontairement fixé sur son bol de céréales, se plongeant dans une conversation interne sur le bien fondé de manger des miel pops à trente ans.

enveloppée dans les couvertures réconfortantes de son lit, leomi ne dort pas, les yeux bien grand ouverts à observer le plafond de sa chambre. attendant un signe du destin. un signal qui pourrait l’obliger à se lever. elle peste contre elle-même contre son encéphale en sur-régime. elle souhaite retrouver la douceur des bras de morphée. avoir pour une fois une nuit complète, bénéficier d’un sommeil réparateur. dans cette chambre impersonnelle elle gît, se tourne et se retourne, même mouvements incessants. insomniaque depuis la plus tendre enfance, elle se résigne . la gamine se lève, elle a besoin d’air. de remplir ses poumons. de voir autre chose que ses quatres murs étouffants. jetant un énième coup d’oeil à son réveil, il est encore tôt, leomi se lève. elle se sent lourd. lourd d’émotions. lourd de vide. lourd de rien. elle se sent juste ainsi, appréhendant déjà sa journée. elle s’habille rapidement, attrapant son paquet de clopes. tout doucement, la jeune femme ouvre la porte et glisse ses pieds le long du parquet. silencieuse, elle s’enfonce un peu plus dans la maison.  le plancher grince de temps à autre, mais le calme y est salutaire. un tendre sourire s’étire sur ses lèvres en voyant tout le désordre provoqué par lily son amie. cette fille à la personnalité si extravagante, qui arrivait toujours à la faire rire. la jeune curtis soupire, et se faufile à l’extérieur. elle peut sentir le froid jusque dans ses os, alors que le vent essaye de trouver un passage à travers ses vêtements. la môme aime ces matins hivernaux, cette plénitude. elle attrape une cigarette entre ses deux doigts fins, coinçant le filtre orangé entre ses lèvres. roulant cette dernière du main experte, alors que son regard dérive. une petite flamme, de la fumée, et le goudron s'insinue dans ses poumons. elle laisse échapper un soupire de contentement, malgré son corps frissonnant. elle savoure ce moment, restant ainsi pendant plusieurs longues minutes. inhalant, expirant. leomi savait qu’elle ne devrait pas dépenser de l’argent pour brûler ainsi ses poumons, mais elle ne pouvait s’empêcher de goûter à ce fruit si interdit. seul signe de rébellions de sa part, pour le reste elle s’était toujours évertuée à faire ce qu’on attendait-d'elle. entendant du bruit dans la maison, l’étudiante se dépêche d’écraser sa clope, avant de retourner à l’intérieur.  discrètement elle remonte les escaliers, se demandant si c’était lily qui leur préparait quelque chose. balançant son paquet de cigarette sur son lit, elle attrape son téléphone portable qu’elle enfonce dans l’une de ses poches. leomi retourne au rez de chaussée, cette fois-ci avec un peu plus d’assurance. mais s’arrête net sur le seuil de la cuisine, où finn se lançait dans un discours, d’un franc parlé qui lui ressemblait beaucoup “tu sais en contrepartie du fait que tu ne participes pas du tout aux dépenses de la maison, tu pourrais au moins ranger tes affaires.” les joues rouges, léomi se balance d’un pied à l’autre, indécise de la marche à suivre. elle ne souhaite pas le couper, mais se sent stupide à rester ainsi planté, les bras ballants. d’un pas feutré, elle décide de s’avancer un peu plus, alors que le jeune homme se retourne et se rend compte de sa méprise. la jeune curtis lui offre son sourire le plus bienveillant, ne se sentant point offensé. “désolé je croyais que c’était lily” . la benjamine hausse des épaules, signe que ce n’était pas grave. il était vrai que sa soeur n’était pas la personne la plus soigneuse qu’il soit. peut-être l'aidera t-elle à tout ranger un peu plus tard dans la journée. elle ne souhaitait pas voir le frère et la soeur se disputer pour si peu. “café?” elle lui lança un regard reconnaissant, hochant avec un peu trop d’avidité la tête. se retournant, la gamine sorti deux tasses et un bol avant de s’asseoir à son tour. les joues toujours aussi rouges, signe de sa grande gêne, elle entreprit le service du café. c’était quelque peu stupide, mais finn l’avait toujours un peu intimidé. pourtant leomi avait été élevé au milieu de grands frères surprotecteurs, mais avec le garçon carlyle c’était différent. elle se sentait toujours dans l’obligation de se faire petite, ayant la mauvaise impression d’un peu trop abusé de son hospitalité malgré ses efforts à participer. elle voulait faire plus pour l’aider, mais elle ne savait pas comment. et puis une toute petite partie d’elle avait peur qu’il la met à la rue. peut-être était-ce aussi parce qu’elle n’avait jamais rencontré de quelqu’un d’aussi silencieux qu’elle avant. soupirant, elle décida de se mettre un peu plus à l’aise, trempant ses lèvres dans sa tasse. c’était tout juste si elle osait le regarder dans les yeux, alors que lui aussi semblait tout aussi déviant. la fine équipe qu’il faisait. “bonjour” qu’elle balbutia à son tour d’un vague murmure, un peu trop timide. “promis j’aiderai lily à tout ranger” qu’elle souligna d’un petit sourire. comme si cette simple promesse allait tout changer. elle ferait tout simplement de son mieux.

il avait passé l'âge de rougir, et pourtant il ressentait toujours ce vieux sentiment d'embarras au fond du ventre. réfléchir avant de parler, avant d'agir. finn s'était toujours montré comme un garçon tout en calcul et en réflexion. combien de fois on avait pu lui reprocher. il pouvait passer des heures à préparer des conversations, anticiper sa réaction face à n'importe quelle situation. tout ça bien aidé par l'observation permanente qu'il faisait des gens et sa facilité pour cerner les gens. parce qu'ils étaient tous plus bruyants et extravertis de lui, il avait rapidement construit ses propres idéaux-types de personnes tandis que son silence agaçant l'avait protégé des intrusions des autres. on n'arrivait jamais trop à le caser dans une case. il était sympa finn, on l'invitait toujours aux soirées, mais qui le connaissait vraiment? sa sœur, sans doute avait su bousculer les choses quand à huit ans, elle était la seule à ne pas avoir peur de questionner son frère sur ses aventures amoureuses. d'ailleurs, il imaginait parfaitement le sourire amusé de sa sœur face à la situation si elle avait été là. volontairement, elle adorait le mettre dans ce genre de situations et parfois il arrivait à finn de s'imaginer qu'elle avait peut-être inviter une étrangère à vivre avec eux à dessein. il remplit la tasse de leomi - puisqu'il fallait peut-être qu'il lui donne un nom plutôt que de la désigner uniquement comme l'amie de sa sœur. il s'assit à son tour, étalant soigneusement le beurre sur son morceau de pain. il avait l'habitude depuis toujours de déguster son petit-déjeuner seul et puis de toute manière il n'était pas très loquace. il releva finalement la tête, un peu obligé disons-le par les quelques mots de la jeune femme. non, t'inquiète pas. il dit en souriant avant de replonger sa tartine dans son bol de café et de croquer dedans. c'est pas qu'il ne voulait pas engager la conversation, attention. mais il ne voulait pas troubler son calme matinal. de nouveau, il entendait intérieurement le rire de lily. je me demande vraiment comment tu fais avec les filles, qu'elle disait souvent avec malice à son frère pour se moquer de son incapacité à aligner plus de deux mots. il prit une inspiration, décidant qu'il était l'adulte du duo et qu'il était de son devoir de briser la glace. c'est juste que c'est ma sœur, enfin tu la connais elle n'écoute pas grand monde à part elle-même. et elle prend de la place. il confia avec un sourire presque complice à leomi. c'est là où les conversations avec finn trouvaient souvent leurs limites. au fond de lui, il appréciait l'influence plutôt positive que sa colocataire de (in)fortune avait sur sa petite sœur. carlyle savait que si lily s'était permise de ramener la jeune curtis ici, c'est qu'elle l'estimait vraiment et qu'elle savait que son frère ne désapprouverait pas. mais voilà, ça finn le gardait pour lui préférant laisser la conversation retomber et garder sa position de grand frère inaccessible et pas très sympa. il termina de mâcher sa tartine, le regard perdu dans son fond de café. tu as besoin d'une couverture en plus? il fait froid dans cette chambre, il faudrait que je change le convecteur. enfin comme j'ai remarqué que tu te levais tôt? enfin tu travailles peut-être? tu es étudiante non? demanda-t-il soudainement à la suite, chaque question prononcée pour masquer la précédente. il ne voulait pas passer non plus pour le mec creepy qui avait observé ses moindres faits et gestes sans rien dire. c'était pas son intention, plus un réflexe disons. une ou deux fois, il était arrivé devant une salle de bain occupée. parfois, il l'entendait partir avant lui. il avait peut-être lu la couverture d'un livre posé sur la table du salon un jour. sauf que la plus part des gens ne faisaient justement pas attention à ce genre de choses. bref, il se resservit un café qu'il but un peu trop vite. la langue brûlée, il songea aux raisons qui le poussaient à garder le silence la majorité du temps.

leomi détournait à son tour le regard, observant avec vif intérêt la bouteille de lait qui se tenait sous ses yeux. se mordillant la lèvre inférieure, elle commença à lire le nombre de calories et les diverses informations sur le libellé. le lait venait des vaches, intéressant.   intérieurement elle cherchait des sujets de discussion, quelque chose à dire, quelque chose d’intelligent. le silence s’étirait, et rien ne sortait de sa bouche. le néant. elle avait l’impression que le seul point commun qui les unissait, était  lily. elle  abaissa donc cette carte. faisant référence au désordre ambiant qui caractérisait bien son amie. leomi  était chez elle sans vraiment l’être. elle se souvenait que trop bien du jour où lily avait réussi à la convaincre de venir habiter ici. ‘tu verras mon frère est super cool, il dira rien.” la jeune curtis l’avait regardé longuement, plutôt dubitative. parce que gabin et pacôme avaient beau tous les deux être supra dupra cools, ils n'auraient jamais accepté une inconnue sous leur toit pendant une durée indéterminée. il faut dire que les jours s'étaient transformés en semaines, puis en mois. le temps se faisait long et la gamine en était bien consciente. naivement, une petite partie d'elle souhaitait rester dans cette maison. appréciant la routine qu'elle avait réussi à développer. s'étant attaché à ceux qui y habitaient. mais ce n'était pas sa famille, il ne fallait pas qu'elle l'oublie. "non t'inquiète pas" la gamine fronçait les sourcils, parce que justement elle s'inquiétait. elle se sentait en partie responsable. leomi soupira avant d'attraper à son tour une tranche de pain, et commença à étaler un peu de beurre. même si ça n'aurait pas été l'attitude la plus adulte, elle se demandait si elle n'aurait pas dû fumer un peu plus longtemps ça clope. la môme aurait pu éviter cette situation un peu trop gênante. sa langue claqua dans son palais, remontrance contre elle-même. l'instant n'était pas parfait, mais il fallait voir ça comme une opportunité d'en apprendre plus l'un sur l'autre. après tout ils n'avaient jamais vraiment discutés non? voilà l'occasion qui se présentait à eux. et puis elle savait que lily apprécierait l'effort. il n'allait pas la bouffer, sous ses muscles imposants et son visage peu avenant se trouvait surement un chouette garçon. "c'est juste que c'est ma sœur, enfin tu la connais elle n'écoute pas grand monde à part elle-même. et elle prend de la place. " la jeune curtis opina, lui rendant son sourire. lily c'était tout un tempérament qui avait l'habitude de faire tout ce qui lui chantait, alors que leomi était bien plus tempérée et subtile dans sa façon de faire. elles se contrastaient, se compensaient. "disons qu'elle a sa personnalité." sa voix était douce.  on pouvait entendre toute l'affection qu'elle avait pour son amie. parce qu'à ses yeux c'était le plus beau compliment qu'on pouvait lui faire, sa force. "en tant que grand frère ça ne doit pas être si facile tous les jours." qu'elle souligna, avec une trace d'humour. bien qu'elle compatissait légèrement. elle pouvait bien parler, mais elle n'était pas non plus connue pour être la parfaite petite soeur. et puis c'était un peu la règle implicite du jeu. à quoi ça sert d'avoir une petite soeur si elle ne vous enquiquine pas de temps à autre? c'est pas comme si vos parents pouvait la ramener au magasin pour un échange. son regard divagua dans le reste de la cuisine. observant les différents ustensiles, les meubles. elle croqua dans sa tartine, buvant petite à petit son café. elle était fière d'elle même, capable d'aligner plus de trois mots. en faire des phrases complètes. le rouge de ses joues s'était estompé, commençant à se sentir légèrement plus à l'aise. ils arrivaient à avoir une sorte de conversation, malgré les blancs. et puis finn semblait vouloir continuer la discussion, lui posant des questions,une véritable avalanche, tentant de s'intéresser sur sa vie. l'effort lui faisait chaud au coeur, ce dernier palpitant avec force dans sa poitrine.  les yeux de leomi s'écarquillèrent légèrement, on aurait dit un chevreuil aveuglé par l’éclairage des phares. "heu non merci. tout t'es très bien. tu as une jolie maison." qu'elle se dépêche de répondre ne souhaitant pas lui donner des efforts supplémentaires. la gamine dormait sur un véritable lit, dans une chambre et non un canapé. elle lui en était déjà suffisamment reconnaissante. elle trempa ses lèvres dans son café avant de reprendre timidement. elle parlait vite, presque trop vite. un peu comme pour arracher un pansement."je travaille dans un supermarché en ville et je suis étudiante dans la même fac que lily, l'histoire de l'art." qu'elle avoua. elle savait qu'elle était dans une branche avec peu de débouchée. tout le monde lui disait, à croire qu'elle finirait sdf. elle avait eu le droit à un long discours de ses parents, à croire que si elle ne choisissait pas de devenir docteur ,elle ne ferait rien de sa vie. en même temps à part pacôme qui était avocat, les autres ne brillaient pas vraiment de ce coté là. son père avait failli avoir une crise cardiaque en entendant elisa lui dire qu'elle chassait des fantômes."toi aussi tu te lèves tôt et toi aussi tu travailles." qu'elle souligna, formulant implicitement les questions qui allaient avec. courageusement, elle avait plongé ses yeux bleus dans les siens.

il avait invoqué sa sœur, et sans que celle-ci n'apparaisse physiquement, elle venait de sauver la situation. c'est en parlant de sa cadette que finn avait réussi à engager la conversation. leomi était d'un calme assez déconcertant, quand on connaissait lily, elles se contrastaient. il jouait le grand frère qui râlait assez souvent, dépassé par le tourbillon qu'était sa demi-sœur alors que sa vie n'était que routine et tranquillité. elle ne l'avait pas toujours été, elle ne le sera sûrement pas toujours. c'est sûrement que c'était bien plus facile de vivre dans son petit confort. le temps passe moins vite, et ses sentiments n'étaient pas trop bien à contribution. il aimait se laisser inspirer par les autres, il répondait plus qu'il n'engageait quoique ce soit. mais il avait trouvé une interlocutrice de choix. en voilà une qui ne lui arrachait pas les mots de la bouche. et puis, elle l'aurait sûrement laissé finir son café en silence si finn n'avait pas décidé de la situation ne lui convenait finalement pas. le trentenaire avait toujours choisi avec soin les gens qu'il laissait rentrer dans sa vie, souvent on se plaignait de cette distance qu'il mettait. leomi lui avait été imposé, mais quoiqu'il en soit, quoiqu'il se passe, elle avait intégré à son environnement quotidien et finn ne pouvait pas être indifférent. oh, je pense qu'elle exagère souvent les choses pour me faire réagir. il dit en souriant. et dieu sait qu'il en fallait pour lui enlever son sourire tranquille et faire monter le ton de sa voix. tu as de la famille pas trop loin? il avait toujours connu new york, ne vivant qu'à une heure d'ici, puis il avait passé son adolescence ici, il ne savait pas si elle avait des proches ici mais ça pouvait être potentiellement impressionnant de se retrouver ici, sans logement, à squatter prise entre une fille qui parle trop et son frère qui ne parle pas assez. il se racla la gorge pour conclure le flot de ses questions. bon sang, il n'était pas au boulot en train de remplir un dossier. il fallait sincèrement qu'il se reprenne en main et qu'il sorte plus souvent de son bureau. il hocha la tête, très bien, la maison est très bien. il est certain qu'après ce rapport de qualité de l'hébergement, elle se sentirait beaucoup plus à l'aise chez les carlyle. quoique après ce mitraillage, il en savait un peu plus sur sa nouvelle colocataire temporaire. il ouvrit les yeux en grand, un peu surpris, un peu admirateur, un peu dubitatif. il n'avait jamais pu - et jamais eu le courage - d'envisager les études autrement qu'à un but purement pragmatique. bon élève, on l'avait naturellement envoyé vers l'université où il avait choisi sans trop de risque le droit et la science politique. il s'était par ailleurs rendu compte après ses études que tout ça ne lui correspondait pas tellement. ça doit être passionnant, enfin j'avoue que je ne sais pas trop ce qu'on fait dans ce genre de filières mais... enfin c'est bien. ça lui allait bien à leomi. il ne la connaissait pas beaucoup, mais sa curiosité grandissait à mesure qu'ils échangeaient à chaque fois quelques mots. il acquiesça, jamais très à l'aise quand il fallait parler de lui. il pourrait se contenter à des choses très factuelles, mais il n'était pas contre l'idée de lui en donner un peu plus. en fait, j'aime bien arriver en premier. je travaille dans les services sociaux, je peux travailler avant les rendez-vous du jour. et puis tout me paraît plus simple le matin. puis il faut dire que vivre seul ne l'encourageait pas à rester trop à la maison. l'arrivée de lily avait changé les choses, parce qu'elle exigeait qu'il mange avec elle au moins deux ou trois fois dans la semaine et parce que le soir elle lui racontait en détail sa journée. mais depuis qu'il avait - lâchement - quitté gaia, sa maison avait longtemps ressembler à un dortoir. alors il avait commencé à aller tôt au travail, puis il y avait trouvé des avantages comme de pouvoir remplir son thermos de café avant les autres et d'avoir le temps de profiter du calme pour avancer ses dossiers. finalement rien de glorieux, rien que ne valait la peine de s'expliquer auprès de leomi.

quand leomi observait le jeune homme, elle pouvait lire tout l’amour qu’il portait à sa petite soeur. lily avait beau être encombrante, agaçante, elle était aussi pleine de vie et attachante. on l’aimait ou on ne l’aimait pas, mais elle marquait néanmoins les esprits. ça lui faisait chaud au coeur. et puis elle parlait toujours de son frère, à quel point monsieur était le meilleur. mieux que action man, digne de tous les super héros. la jeune curtis opina, s’esclaffant à son tour d’un petit rire mélodieux. “c’est une mélodrame”. combien de fois lily lui avait fait une scène sur les devoirs qui avaient à faire, à exagérer, à lui donner le sourire. elle se demandait si pacôme et gabin parlaient d’elle avec la même malice et attitude. elle en doutait légèrement pour le dernier. sa famille, c’était un sujet un peu délicat, sensible. mais il s’était ouvert à elle, il lui avait ouvert sa maison, c’était à son tour de lui rendre aussi un peu d’information. elle avait presque honte de lui avouer qu’elle avait toute sa famille à new york, alors qu’elle profitait de son hospitalité. leomi était bien consciente que ses frères et sa soeur auraient pu l'accueillir, mais à ses yeux c’était comme se mettre un coup de fusil dans le pied. parce que pacpac essayait comme il pouvait de sauver son mariage, alors la gamine ne voulait surtout pas être un autre obstacle sur le chemin. et puis gabin et nate passaient leur temps à jouer au chaud lapin, ils avaient besoin de leur propre espace. la cadette ne voulait surtout pas tomber sur eux dans une position compromettante par inadvertance. il y avait enfin ses parents, deux êtres froids qui prétendaient encore de s’aimer. leomi supportait à peine sa génitrice, alors que son père était un peu trop absent, surement en douce compagnie. alors chez finn c’était ce qui sonnait le mieux. un havre de paix bien loin de la folie des curtis. c’était plutôt triste d’admettre que l’endroit qui pour le moment correspondait à ses yeux le plus à une maison était ici avec un étranger, plutôt qu’avec des êtres chers. “hum oui on peut dire ça” qu’elle baragouine en se mordillant les lèvres. ses doigts pianotent doucement contre sa tasse, signe de son malaise évident. “disons que c’est un peu compliqué, on est nombreux. c’est un peu le bazar tu vois”. elle hausse des épaules, comme pour s’excuser d’être dans l’incapacité d’en dire plus. peut-être que s’il en savait plus sur sa situation, il prendrait tellement pitié qu’il l’adopterait. un petite sourire s’étira sur ses lèvres, parce que cette pensée la faisait rire. mais si jamais le garçon carlyle décidait de mettre fin à leur accord, elle ravalerait sa fierté et irait voir les personnes qui l’ont mise au monde. d’ailleurs le jeune homme semblait surpris d’apprendre que leomi étudiait les arts. son visage était si expressif que cela en était drôle. elle n’arrivait pas à percevoir ce qu’il pensait, si c’était une bonne ou une mauvaise chose, mais la jeune curtis décida de ne pas s’en soucier. elle avait l’habitude de tous ces gens qui ne comprenaient pas son choix. “c’est très optimiste comme paroles” qu’elle souligna avec espièglerie pour le taquiner. il semblait presque gêné, alors elle décida de lui venir un peu en aide. “on peut faire pleins de choses, documentaliste, commissaire priseur, archéologue, généalogiste, historien, des métiers très sexy, et au pire des cas chômeur.” une pointe d’humour transperçait sa voix presque timide. c’était inhabituel pour la gamine de se livrer ainsi. il faisait des efforts alors elle en faisait aussi. la môme le laissa à son tour parler de ce qu’il faisait dans la vie. elle non plus ne se serait douté que finn travaillait dans les services sociaux. au premier abord, il semblait plutôt froid pour ce genre de domaine. leomi s’était bien trompée. quelle quiche elle pouvait être! “ça doit être plus calme.” elle aussi aimait la tranquillité des matins, c’était toujours le moment le plus efficace de sa journée. elle s’offrait même une clope pour se récompenser de son travail durement fourni. “et ça va ce n’est pas trop triste comme travail? “ qu’elle souligne en buvant une gorgé de son café.

n'importe qui aurait soutenu que leomi ne prenait pas de place. seulement, finn était bousculé plus que de raisons dans ses habitudes. la question de la famille s'était finalement posée. il ne voulait pas lui donner l'impression de vouloir la faire partir. c'était simplement la simplicité souvent, de se réfugier chez un obscur cousin qu'on a croisé qu'une ou deux fois aux enterrements et aux mariages. il pesait ses mots, comme d'habitude. et pourtant, il se sentait terriblement gêné de pouvoir donner l'impression à la jeune femme qu'il aurait bien aimé qu'elle trouve refuge chez quelqu'un d'autre. pour être honnête, ce n'était pas désagréable de vivre avec quelqu'un. d'entendre les bruits de cuisine, l'escalier craquer, les portes s'ouvrir. ça amenait un peu de chaleur à cette maison trop grande, même pour lui. c'est vrai qu'il ne lui avait pas beaucoup parler depuis qu'elle était arrivée, mais finn appréciait de savoir qu'il y avait quelqu'un d'autre que lui quand il rentrait le soir un peu tard. il ne savait que trop à quel point les relations familiales pouvaient être compliquées. il ne s'agissait même pas d'avoir des rapports conflictuels avec sa famille. il comprenait le sentiment que la solution n'était pas de se réfugier chez eux, malgré la nécessité. il aimait beaucoup sa mère, elle n'avait jamais été le genre de mère intrusive, ni envahissante. il fallait reconnaître qu'elle avait su cerner son fils. quand ils s'étaient séparés avec ali, il aurait très bien pu retourner vivre chez sa mère. peut-être même qu'elle n'aurait pas posé de questions. mais, il avait préféré abuser de l'hospitalité d'un garçon avec qui il avait eu un cours en commun l'année précédente. c'était sans doute plus simple de faire le point, plié en deux sur le canapé d'un presque inconnu. je comprends. enfin il n'y a pas de soucis. ça doit quand même être rassurant de les avoir pas loin non? il disait ça et en même temps, sa mère n'habitait qu'au bout de la ligne de métro et ça devait bien faire quatre mois qu'il n'était pas allé la voir. mais peut-être que leomi était le genre de personne à aimer être à quelques stations de train de sa famille. il essayait de s'imaginer qui elle pouvait être derrière ses silences plus si nombreux. il lui avait demandé ce qu'elle faisait de ses journées et il était maintenant un peu gêné de lui donner l'impression qu'elle faisait un truc trop bizarre, ou pas assez ambitieux. il voulait seulement en savoir plus, mais comme d'habitude il voyait les choses un peu trop pragmatiquement. il aurait pu lui demander ce qu'elle préférait étudier, mais non lui voyait les choses avec les pieds bien sur terre.  je suis sûr que tu feras des choses très bien. c'est bien parfois de se laisser porter, de faire ce qu'on aime, j'aurais probablement eu beaucoup de difficulté en histoire de l'art. je ne me rappelle même plus de la dernière fois où j'ai mis les pieds dans un musée ou que je suis allé au théâtre. il avait soudainement envie de bousculer son train-train quotidien. les mêmes trajets qu'il faisait tous les jours. même son parcours de jogging était le même depuis une éternité. son travail n'avait rien de très glamour non plus. modestie ou réalisme, il était toujours embarrassé du regard approbateur des gens sur ce qu'il faisait, comme s'il portait d'un coup une cape de super-héros. c'est vrai. dit-il avec un petit sourire. les fins heureuses étaient malheureusement rares et longues à obtenir. parfois je ne me sens pas très légitime tu sais. ces gens viennent me voir plein d'espoir, et puis moi je suis dans mon confort. sans mentir je ne crois pas avoir eu à surmonter une quelconque épreuve un jour dans ma vie. il se sentait à l'aise, il s'ouvrait un peu. c'était souvent des choses qu'il gardait pour lui et il était surpris d'en parler si librement avec elle. peut-être que ce n'était pas grave de le faire en fin de compte. peut-être que ça n'était pas si dangereux de parler de lui, de ce qu'il avait vraiment sur le cœur.