blood in the cut, (muse)

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@MUSE BLOOMSBURY

C'est Muse. Muse qui lui a filé le fric, Muse qui a voulu bien faire, Muse qui a voulu l'aider — Muse qui a merdé. Muse qui a donné à Mimi de quoi se défoncer, sans le savoir, sans le vouloir. Il y a la part des choses à faire, dans tout ça. Mais à cet instant précis, Ander ne la fait pas. Le coeur qui lui bat aux tempes, l'alcool dilué dans le sang. Le besoin d'explications, le besoin de mise au clair. Des semaines, qu'il cherchait Mimi. Qu'il avait demandé à Muse de le contacter s'il la voyait. S'il avait la moindre piste. La moindre information à lui donner. Muse l'avait vue, mais Ander ne l'avait pas su. Elle avait sûrement ses raisons. Sûrement autre chose à penser — et peu de temps s'était de toute manière écoulé. Mais ça ne changeait rien à la violence qui pulsait dans les os du Wilkes à cet instant donné. Rien non plus à la démarche déterminée qui le poussait jusqu'à la porte de Muse, au beau milieu d'un Queens huppé et coloré auquel il ne s'était jamais vraiment identifié. Ça lui avait pris quelques gorgées d'alcool pour se décider. Ça lui avait pris une soirée où il avait eu le whisky mauvais. Un type dans un bar pour le bousculer. Et le vertige de Mimi, qui avait visiblement réussi à encore merder pour le peu de temps où il l'avait laissée seule. La plaie.

Il essaie d'ouvrir la porte pour entrer. C'est fermé — rien n'y fait. Pestant, sortant son trousseau, il contourna la bâtisse pour se glisser jusqu'à la porte arrière. Se servit de la clé qu'elle lui avait laissée pour entrer. Pied de nez magistral au frère de Muse qui, il le savait, refusait l'idée qu'un Wilkes comme l'autre ne continue de s'approcher de sa soeur. Ander s'en foutait. Ander l'ignorait. Ander n'en avait jamais tremblé. Et, présentement, Ander ne pensa même pas au fait qu'il aurait pu le croiser. Tout ce qu'Ander voyait, c'était le rouge de sa colère. Le rouge du ras le cul qui l'avait pris, quand il était retourné à la planque où il avait laissé Mimi, pour constater qu'elle s'était enfuie. Le vertige du high au coeur. La sensation qu'elle continuerait de tomber. Que jamais il ne pourrait la rattraper. Et que Muse, dans tout ça, n'avait en rien aidé. Mais que si Mimi s'était à nouveau enfuie, peut-être qu'elle avait eu l'idée de venir ici. Peut-être que Muse saurait, elle. Première et dernière piste qu'il avait. Et la colère qui l'empêchait de penser à une toute autre option, à cet instant donné.

« Mimi ?! » Peut-être que le frangin est là. Peut-être qu'il pionce. Peut-être qu'il n'est pas seul. Ander s'en fout. Ander progresse dans la maison. Le silence seul qui lui répond. Mais Mimi n'est pas là — et au fond de lui, il le sait. Ses tripes qui lui soufflent que Mimi est ailleurs. Que Mimi a froid. Que Mimi est seule, que Mimi est perdue. Que Mimi a besoin de lui. Mais que, pour ce soir, l'envie de la laisser crever la gueule ouverte était presque plus alléchante que celle de courir les rues pourries du Queens à sa suite. « Muse ? » Le second rugissement éclate, plus fort que le premier. Et il entend les pas dans l'escalier. Arrive à leur pied pour voir la jolie blonde descendre les marches et s'approcher. « Est-ce que Mimi t'a appelée ? » La colère et l'alcool qui l'empêchent de lui laisser le temps de répondre. Les dents serrées, les premières marches grimpées à la volée pour la rencontrer à mi-chemin. Pourquoi tu fais ça, Ander ? « Réponds, putain. Est-ce que tu sais où elle est ?! » La brusquerie qui peut paraître injustifiée. Mais pas ce soir, pas maintenant. Plus pour lui. Plus après ce qu'il avait appris. Plus de tendresse pour Muse. Et plus de clémence pour Mimi.

(C) BELOVED

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{ fear makes us feel our humanity. }
w/@ander wilkes

journée chargée, rendez-vous arrangés. t’es pas une fille organisée mais tu y travailles, tu vas y arriver à force de persévérer. journée à rallonge sans compagnie distrayante. t’es de ces cool kids, ceux qu’on évoque dans forbes comme ayant les gênes de la réussite mais pourtant, t’es toujours seule. avec un nombre limité d’amis pour t’entourer. longue journée à l’allure redondante, quelques rendez-vous barbants pour parler de sujets emmerdants. t’es pas comme ça muse, tu t'emmerdes dans ta vie mais c’est simple comme ça et puis tu écris au moins, même si ce ne sont pas les essais les plus glorieux. tu t’ennuies, tu tournes en rond sans espoir de briller pour ta carrière d’auteur. tes personnages principaux sont décriés, leur éthique est altérée mais tu as toujours ta plume. tire-toi muse, tu joues à quoi dans une vie qui ne te ressemble pas ? t’es une artiste toi mais c’est plus facile avec les contacts de papa et puis ça paie bien ces synopsis sans piquant alors tu te complais dans cette routine réconfortante, loin de ce que tu as été. t’es pas cette gosse aux yeux fatigués muse, aux vaisseaux dilatés. le chauffeur s’arrête devant chez toi et tu descends après quelques politesses échangées. étant donné son débit de parole et sa playlist datée, il peut toujours s’accrocher pour ses cinq étoiles.

un soupir lassé, tu rentres dans l'eau presque brûlante de ta baignoire il te faut un moment pour t’habituer mais c’est ton rituel, tu serais bien incapable d’expliquer à qui que ce soit pourquoi tu as besoin de te brûler au troisième degré mais tu aimes la sensation, besoin masochiste. tu alternes les sentiments. tu souffles le chaud, le froid dans un tempo déconcertant. t'es minée par le passé, l'esprit empoisonné par des "et si" qui resteront sans réponse. t'as été une épave. tu es différente maintenant, t'es une survivante d'un mal bien plus insidieux que quelconque tumeur. t'as survécu à la mort, celle qui débarque sans crier gare pour te prendre ce que tu aurais pu chérir éternellement. tu réfléchis, tu cogites dans une sempiternelle rengaine malsaine et puis finalement, tu t’endors sur ta douleur d’hier, ta compagne de demain sans même t’apercevoir que t’es encore dans ton bain.

un cri s'échappe, te réveille et un instant tu te demandes même si ce n'est pas toi qui l'a poussé. t'as un moment pour te reconnecter et t’apercevoir que t’es toujours dans cette eau devenue gelée, que tes doigts sont fripés et que tu aurais pu te noyer mais tu ne t’inquiètes pas, t’as plus peur de la mort. est-ce qu’on peut avoir peur d’une amie ? un deuxième cri plus perçant et directement adressé à ton encontre a le mérite de te faire émerger. tu reconnais la voix et tu sais très bien que la réaction de ton aîné sera sanglante si il arrive aux pieds de l’invité avant toi, surtout si il est accompagné. un vieux sweat usé mais tellement symbolique enfilé et tu descends les escaliers en trombe, pas totalement reconnectée à la réalité. les mots se bousculent à la frontière de tes oreilles encore endormies et il te faut un moment pour comprendre son ton impérieux. t’as l’air déboussolée avec tes grands yeux effrayés. c’est pas ander qui te fait peur, pourtant il devrait. tu sais qu’il est pas stable quand il est en colère mais c’est pas lui, t’as la confiance biaisée par la compassion alors tu réfléchis, lentement. pas dans le bon sens, t’as le cerveau embrouillé par le sommeil. non je crois pas. tu passes devant lui pour aller vérifier ton téléphone resté silencieux sur le plan de travail de la cuisine. non, pourquoi ? elle est où ? elle a eu des soucis ? t’as pas idée que c’est toi l’origine du problème. l’enfer est pavé de bonnes intentions après tout.

@MUSE BLOOMSBURY

Elle a l'air paumée, Muse. Encore plus qu'à l'accoutumée. Elle le regarde avec ces yeux de merlan frit qui donnent à Ander l'envie de lui en coller une pour la réveiller. Lui en coller une pour lui dire, parle-moi. Qu'est-ce que t'es fait ? Il enfonce ses ongles dans la paume de sa main pour se contenir. Muse ne mérite pas ça. Muse est fragile. Muse est perdue. Muse a traversé l'Enfer — mais pour Ander, ça n'excuse pas la stupidité de tous les gestes qu'elle peut poser.

« Non, je crois pas. » qu'elle finit par répondre. Elle a l'air de tomber du lit. Ou de n'importe où. À demi endormie, le cerveau et les réactions ralentis par le sommeil toujours envahissant qui l'étreignant. Ander devrait comprendre. Au moins respecter. Démontrer une patience qu'il n'avait peut-être pas l'habitude de montrer. Mais la colère est trop forte. L'amertume, trop poignante. Est-ce que tu réalises ce que tu as fait ? Les yeux qui crachent des flammes, alors qu'elle passe à ses côtés. Et il lui emboîte le pas, sans rien rajouter. La rage dans chacun de ses mouvements, tandis que Muse file dans la cuisine pour prendre son téléphone. « Non, pourquoi ? Elle est où ? Elle a eu des soucis ? » Et l'innocence de Muse déclenche une nouvelle vague de fureur en lui. Le ton qu'il ne retient pas — pas plus que les mots. « J'en sais rien, putain ! » La paume qui frappe le comptoir de la cuisine, brièvement. Le regard qui vient accrocher Muse, et l'envie de la bousculer qu'il ne retient qu'à grand peine. « J'pense pas. » Respire, Ander. Respire. J'le saurais, si c'était le cas.

Un soupir. Lourd, long. La main qu'il passe sur ses traits, soudainement fatigué par la mollesse contagieuse de Muse, et par la responsabilité de la vie de Mimi qu'il ne faisait que traîner encore et encore, chaque jour qui passait. Il se laisse tomber contre le comptoir. Se frotte les yeux du bout des doigts, les sourcils froncés. « Pourquoi il a fallu que tu lui files du fric, hein ? » Son regard qui revient sur Muse. Les mauvais mots au bord des lèvres, qu'il ne peut empêcher de couler. « Si tu veux qu'elle ait de quoi bouffer, achète-lui un sandwich. Ou réserve-lui une chambre pour la nuit, si t'as peur qu'elle ait nulle part où dormir. » Mais par pitié, oublie les liasses de billets. Le ton est plus lent. Les mots se détachent les uns des autres, et Ander croise finalement les bras. Observe Muse, en secouant la tête. Sans pitié. « Tu devrais l'savoir, bon sang. T'as rien appris sur elle avec le temps ? » Mimi, elle est pas fiable. Mimi, elle est pas stable.

Quand est-ce que tu vas piger ça, Muse ?

(C) BELOVED