sincerity_is_scary.mp3

traits de caractère / y'a un espèce de boum boum qui résonne dans sa tête quoi qu'elle fasse. et une sorte d'envie d'être partout à la fois, dans la forêt, dans la ville, dans la fête, dans ton lit. partout. puis elle a beaucoup de sang froid. elle parle pas beaucoup, aussi. mais elle observe. elle regarde tout. elle sait tout de toi au bout de quelques secondes sans avoir eu à poser aucunes questions. ça c'est parce que t'es cernable, toi. t'es reconnaissable. mais ce qu'elle aime, francis, c'est changer. être imprévisible. puis se lever un matin et enfiler une nouvelle peau. changer de couleur de cheveux toutes les semaines, changer d'amoureux tous les soirs. elle te rappellera jamais, c'est peut être pour ton bien.

c'était juste susie et elle, avant. susie qui court, ses cheveux verts qui la suivent comme une trainée de fumée presque nauséabonde. et derrière, francis. qui lui court après dans les rayons, qui la cherche partout, qui croise son regard dans l'escalator. elle était vive, en plus. partout, tout le temps. regard perçant et crocs acérées. prête à la dévorer, ici, là-bas, dans un parc ou un cinéma. elle l'avalait presque d'un coup, c'en était effrayant. puis c'était beau leur amour. ça coulait de source. et elles faisaient tout ensemble. se faisaient passer pour des soeurs, se faisaient payer des verres en boite, se faisaient l'amour, se faisaient la cour. jusqu'à ce que l'alcool au volant entre en jeu, et qu'un pauvre type la renverse, susie. puis elles se couraient après, comme toujours, et francis était juste derrière. et y'avait pas beaucoup de bruit ce soir là, mais pourtant elles ont rien entendu. et elle est morte susie maintenant, y'a plus que le ciel pour pleurer. le firmament et toutes les étoiles qu'elle comptaient, auxquelles elles attribuaient des noms bizarres, parfois juste des onomatopées. et y'a toujours la nuit pour l'embrasser, frank. y'a plus susie mais y'a la nuit.
et le pire dans cette histoire, c'est qu'elle est passée à autre chose, francis. elle pense toujours à susie dans le coin de sa tête quand elle enfouit son visage entre les jambes d'une autre, mais elle évite ces souvenirs de plus en plus. parce qu'elle la hante, susie. mais y'a une personne spéciale dans son lit, maintenant. parce que ça a beau faire un an que sa fleur est partie, ça laisse le temps à d'autres de pousser. d'autres comme poppy, comme pops. puis elle se ronge moins les ongles depuis qu'il est là. et il est pas aussi vert qu'elle mais il fait l'affaire. et il sait danser. presque le principal. parce qu'il saute dans tous les sens, pat. et il l'aime.
puis elle s'entoure bien ici. et papa et maman lui parlent plus depuis qu'elle leur a avoué sa sexualité. puis ça fait un peu de temps maintenant. mais y'a plus que sa tata qu'elle aime, francis. plus que sa tata qui l'appelle ma libellule. et sa tata elle parle plus à la famille non plus. parce qu'elle a quitté tonton pour une femme, tata. peut-être pour ça qu'elle s'entend bien avec frank. et elle boivent le thé ensemble, vont se faire faire des manicures. et elles dansent. puis elles se droguent un peu, ça c'est dans les moments les plus rigolos.
puis au-delà de tout ça, après la fête et les copains, y'a l'inconnu du lac. celui pour lequel son coeur bat à la chamade, celui qu'elle a croisé une fois et qu'elle a jamais revu. puis elle y est retourné au lac, nombreuses fois, pour le retrouver. mais jamais rien. presque comme s'il s'était noyé dedans. et encore maintenant elle cherche son regard dans la foule, coup de foudre désespéré, vivement qu'il pleuve à nouveau.