without me, (andia)

Georgia.
C'est Georgia.

Belle à en crever, malgré son air abattu et ses traits tirés. Belle dans son chagrin, belle dans toute la misère que le monde lui mettait aux pieds. Georgia qui, à quelques tables de là, sert deux types avec dans les yeux une douleur qu'il ne lui connaît pas. Georgia. Et ça lui retourne le coeur, à Ander. Un instant, ça lui fait oublier pourquoi il est là. Ça lui fait oublier ce type qui l'a appelé, un peu plus tôt dans la journée. Qui lui a donné rendez-vous dans le quartier, et qui lui a promis l'achat d'une quantité de drogues suffisantes pour lui permettre de se nourrir convenablement dans les jours à venir. Ça lui fait oublier le froid de fin d'année qui lui mord les extrémités, la nuit. Ça lui fait oublier Mimi. Rien ne reste plus, dans ce foutu bar miteux, que les doux yeux d'une Georgia égarée. Georgia éplorée. Qu'est-ce qui te tracasse, bébé ?

Trop de mois qu'il ne l'a pas vue. Trop de mois qu'il ne lui a pas parlé — qu'il n'a même pas chercher à la retrouver. Toute communication coupée. Une vie entière qui s'est écoulée depuis leur dernière dispute, leur dernière rupture — depuis celle dont ils ne se sont pas relevés. Il y a eu Tony, il y a eu Mimi. Il y a eu le tournevis dans le poumon, le retour à Harlem. Il y a eu trop de sachets vendus, trop de billets ramassés. Trop de nuits dans la rue. Et pourtant, rien n'a changé. Georgia brille toujours d'une triste lueur qu'il ne saurait nommer — et son estomac à lui se broie toujours à ainsi l'observer. Georgia.

Elle est occupée. Occupée à sortir des additions, un peu plus loin dans la salle. Ce n'est pas elle qui le serre, depuis qu'il est arrivé. Il ne peut cependant pas résister. Ne peut pas se retenir de vouloir l'approcher. Georgia. Et alors qu'il s'apprête à se lever, un grésillement léger lui vrille soudainement la tête, et le force à retomber. Un buzz venant de nulle part, qu'il ne pourrait expliquer. Une part de lui qui, pourtant, sait.

Mimi.

Ça lui fait serrer les dents, et ça lui donne envie de tout planter là pour partir la chercher. Mais le type avait de l'argent pour lui, et il était absolument hors de question de lui poser un lapin sous prétexte que sa jumelle n'était pas capable de tenir l'aiguille loin de son bras. Dans une demi-heure, il serait là. Et puis, il y a Georgia. Georgia.

Mimi attendra.

L'étourdissement passé, il se lève. Son verre en main, il s'approche du comptoir derrière lequel elle se tient toujours. Conscient qu'elle n'aurait que peu de temps pour lui parler — mais s'en moquant amplement. Le besoin d'aller la voir. Le besoin de s'annoncer. De lui demander, what's wrong baby ? « Hey, Gia. » Hey, Gia. C'est moi. Le verre qu'il a posé sur le comptoir, mais qu'il tient toujours dans sa main. Les yeux qui la scrutent, le sourire qui lui étire les lèvres sans qu'il ne puisse l'empêcher. Hey, Gia. Comment tu vas ?

(C) BELOVED

tu n’en pouvais plus de cette vie. tu n’en pouvais plus de faire ce métier que tu n’aimais pas, juste parce que ta mère t’obligeait à le faire. t’avais encore pas trouvé le moyen de la fuir. et ta vie était un bazzar monstre. depuis que tu avais avorté, tu avais l’impression que quelque chose s’était éteint en toi. tu portais un bébé, tu portais la vie, ça avait duré un mois, tu n’avais rien ressenti du tout. pas même les nausées de grossesse, et pourtant le manque était terrible. et ta culpabilité, elle, n’avait sans doute pas d’égale. tu te haïssais, purement et simplement. et c’était maintenant que tu t’en rendais compte, presque trois mois après. tu soupirais longuement, alors que dans un coin de la pièce, tu n’avais pas remarqué ander. ton ex-petit ami. ce n’est que lorsque tu retournais derrière le bar et que t’entendais ce surnom, que tu relevais la tête. sa voix. ce surnom qu’il était le seul à te donner. tu relevais tes yeux bruns sur le jeune homme, et tu avais l’impression de retomber sous son charme instantanément. « ander. » tu soufflais en posant le verre que tu tenais entre les mains. ça faisait des mois maintenant. des mois que votre histoire s’était achevée, une ultime fois. après des semaines et des semaines à vous quitter, à vous aimer de nouveau, et à vous quitter encore une fois. tu le regardais longuement et tu finissais par repasser devant le bar pour venir le serrer contre toi. oh ander, si tu savais. tu le serrais contre toi durant de longues secondes et tu fermais les yeux. « qu’est-ce que tu fais là ? comment tu vas ? » tu demandais en le regardant, un sourire sur les lèvres. un vrai sourire, celui qui disait que tu étais simplement contente de le revoir. que ça te faisait du bien, parce que ça te rappelait une période où tu étais un peu plus insouciante que maintenant. à ce moment là, ta vie n’avait pas encore bousculé. et tu regardais autour de toi, et t’avais simplement envie de te barrer d’ici, avec lui. pour aller où, tu n’en savais rien. t’avait juste besoin de t’échapper un peu. tu plongeais alors ton regard dans le sien et tu revenais le serrer dans tes bras. ander et toi, on pouvait pas dire que ça avait mal fini. ça avait simplement fini, une bonne fois pour toute. malgré la passion, vous aviez surement été lassés de vous chercher sans arrêt. c’était ton sentiment, du moins. à cette époque, t’aurais peut-être voulu quelque chose d’un peu plus sérieux, quelque chose de plus stable. chose qu’ander n’aurait pu t’offrir. « je suis tellement contente de te voir. qu’est-ce que tu deviens, ander ? » dis moi tout, ander. je te manquais ?

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@georgia torres

« Ander. » Et il sourit. De ce sourire trop calme, trop tranquille. Ce sourire que Gia lui tirait — moins carnassier que tous les autres dont son visage pouvait parfois se trouver tordu. Il ne bouge pas, lorsqu'elle pose le verre qu'elle tient. Ne bouge pas, lorsqu'elle fait le tour du comptoir. Relâchant simplement son propre verre une fraction de secondes à peine avant que le corps de Georgia ne vienne percuter le sien tout en douceur. Trop simple. Trop évident. Le seul moyen pour eux de se retrouver. Ça, et la rude tendresse d'un baiser qu'il se réservait pourtant de lui donner.

Elle le serre, et il passe ses bras autour d'elle. Étreinte enveloppante, pour isoler un instant Georgia et ses ennuis, Georgia et ses soucis, de la cruauté du monde autour de lui. L'envie de la garder là. L'envie de la faire disparaître des yeux des clients un peu trop pressés, un peu trop attirés par ses jolis formes et son minois délicat. Mais il ne le peut pas. Il le sait. Ferme les yeux pour une brève seconde avant de les rouvrir, le nez perdu dans ses cheveux. Georgia. « Qu’est-ce que tu fais là ? Comment tu vas ? » Elle relève les yeux pour pouvoir le regarder. Et il recommence à lui sourire. L'étreinte se défaisant peu à peu, en sentant les regards tomber sur eux. Nulle envie de lui attirer des ennuis. « Ça va. Je tue le temps. » Un haussement d'épaules. « J'ai rendez-vous au coin de la rue dans trente minutes, à peu près. » Pour un deal, Georgia. Les choses ne changent pas. Mais à naviguer dans les grands yeux sombres qu'elle lui ouvre, il en doute. Voit que rien n'est immuable, et qu'elle en avait traversé plus qu'il n'aurait pu l'imaginer. Oh, Georgia. Qu'est-ce que le monde a fait de toi ?

Les yeux qui restent accrochés, un instant, avant que Georgia ne finisse par se laisser retomber dans ses bras. Revenir se perdre, là — et il la serre à nouveau. Regardant brièvement autour d'eux, pour voir les regards quelque peu agacés qu'un ou deux employés ne pouvaient s'empêcher de leur donner. « Je suis tellement contente de te voir. Qu’est-ce que tu deviens, Ander ? » Il sourit, à nouveau. Se reculant quelque peu, plus par obligation que par choix. Aucune envie de lui attirer le moindre souci qui soit. « Pas grand-chose. » Il reprend son verre avec nonchalance. Une brève gorgée de bière, avant de baisser à nouveau les yeux vers elle. « La vie est moins belle sans toi, Gia. » Un léger clin d'oeil. Sourire tranquille. La sincérité au milieu du charme, malgré tout. Il avait rebondi, depuis que tout était fini. Il était resté auprès de Mimi. Avait trouvé Tony. Il s'était fait un trou, fait une vie. Jusqu'à ce que ce soit la mort qui ne manque de le cueillir. Que Mimi ne le trahisse, que Tony ne l'abandonne. Toi tu m'aurais pas fait ça, Gia. N'est-ce pas ? « Je cherche Mimi. Elle est dans le coin, je crois. » Il ne compte pas lui demander. N'a aucune intention d'impliquer Georgia dans tout ça. Reste loin d'elle, si tu le peux. « C'est à peu près ça. » Un sourire. Une nouvelle gorgée de bière, avant de reposer son verre. « Et toi ? » Et toi, Gia ? Pourquoi dans de tristesse dans les yeux ? Pourquoi tant de tendresse envers moi, après tout ça ? « Ç'a pas vraiment l'air d'aller. » C'est doux, c'est bas. Ça ne veut pas venir dans un sujet qui ne le concerne pas. Ça ne veut surtout pas être indiscret. Et pourtant, t'es là. « À quelle heure tu finis ? » Histoire que je te sorte de là. Que je t'emmène loin d'ici, et que tu puisses me raconter tout ça.

(C) BELOVED

ander. ton ander. tu le regardais et des fragments de votre relation passionnée et passionnelle te revenait en mémoire. c’était le bon vieux temps, où t’en avais un peu rien à foutre de tout, où tu prenais pas conscience qu’avoir quelqu’un dans ta vie, ça te sauvait quand même un peu. de ta mère, de toi-même. tu lui souriais, t’avais du mal à t’éloigner de lui. tu savais pas, putain, t’avais juste l’impression qu’il était arrivé au bon moment de cette foutue journée, comme une bouée de sauvetage qu’on attrape volontier. le jeune homme t’indiquait qu’il avait rendez-vous et tu acquiesçais lentement. certaines choses ne changeaient pas. et ça te rassurait un peu dans le fond, même si t’aurais aimé qu’il se sorte de cette merde. tu le regardais longuement, te détachant un peu. tu jetais un coup d’oeil à tes collègues, qui semblaient déjà t’en vouloir de prendre un peu trop de temps pour toi. t’étais chez toi, après tout. si tu voulais pas bosser, personne t’y obligeait. tu souriais avec tendresse quand il te soufflait que la vie était moins belle sans toi et tu secouais un peu la tête. « ne dis pas n’importe quoi. » tu soufflais en te pinçant les lèvres et en soupirant doucement. il t’indiquait alors chercher mimi, et tu hochais un peu la tête. tu ne l’avais pas vu. pas dans ton bar en tout cas. tu soupirais en continuant de l’observer et tu soupirais un peu, fermant les yeux quand il faisait remarquer que tu n’avais pas l’air d’aller franchement bien. tu haussais les épaules et tu rouvrais les yeux pour les plonger dans les siens. « rien de grave. » tu soufflais avec un petit sourire, balayant un peu cette question, d’un geste nonchalant de la main. ander te demandait alors à quelle heure tu finissais et tu souriais un peu. « c’est chez ma mère ici. je fais un peu ce que je veux. » tu murmurais alors en glissant une mèche de tes cheveux derrière ton oreille. tu l’observais longuement et tu croisais les bras sur ta poitrine en soupirant un petit peu. « on peut se voir quand t’auras terminé ton rendez-vous, si tu veux. » tu ajoutais en te pinçant les lèvres. tu lui offrais un sourire plus sincère. « je pourrais tout t’expliquer. » tu murmurais en haussant les épaules. ça ne pouvait te faire que du bien de parler, après tout. et puis revoir ander, ça te faisait vraiment plaisir. ça te rappelait les bons moments que vous passiez ensemble, auparavant.

@ander wilkes désolée pour le retard mon chat without me, (andia) 3227196488

« Ne dis pas n’importe quoi. » Et il sourit, Ander. De ce genre de sourire que Georgia avait toujours su lui tirer comme personne. Les étranges personnalités, associées dans la fougue et la passion. Séparées aussi souvent qu'assemblées — et ça ne faisait que trop longtemps qu'ils ne s'étaient pas retrouvés. Qu'il n'avait pas eu l'opportunité de la voir évoluer, sous son regard aussi protecteur qu'à l'accoutumée. Belle Georgia, Georgia brisée. Elle avait les fantômes dans les yeux et le mal de vivre dans l'aura. Besoin de respirer, et de sortir de là. Un besoin qu'il percevait, et qu'il avait finalement décidé de saisir. Profitant du coup du destin de la voir là, et de cette fragilité qu'il percevait.

« Rien de grave. » Elle ment, pourtant. Un mensonge qu'il ne lit que trop facilement — sourcil se haussant pour la scruter un instant. « C’est chez ma mère ici. Je fais un peu ce que je veux. » C'est un fait, et ça lui plaît. Il hoche la tête tranquillement, appréciant l'idée qu'elle puisse filer sans demander son reste dès que l'envie lui prendrait. Mais Georgia ne l'entend pas tout à fait de cette oreille-là. Georgia n'a pas envie de fuir comme une voleuse, et elle se raccroche à ce qu'il lui a donné. « On peut se voir quand t’auras terminé ton rendez-vous, si tu veux. Je pourrais tout t’expliquer. » Et il secoue la tête, sans se gêner. Prenant une longue gorgée de bière, avant de reposer son verre pour recommencer à l'observer. « Pourquoi pas maintenant ? » Les yeux qui percent ceux de Georgia. L'assurance dans la voix. « J'ai une demi-heure à tuer. Et mon rendez-vous ne prendra pas plus de deux minutes. » Un sourire qui étire ses lèvres, pour répondre à celui qu'elle lui avait donné. Pour l'encourager à la folie, calmement mais sincèrement. Suis-moi. « Allez, Gia. » Reste avec moi. « Qu'est-ce qui t'empêche de partir maintenant ? » L'éthique de travail, sûrement. Mais Ander s'en moque. Ander sourit. Ander lui donne le même regard qu'il y avait trop longtemps de ça. Le genre à lui promettre toutes les étoiles du ciel qu'il pourrait lui décrocher. Le genre à la traîner dans son sillage, quelles que soient les atrocités qu'il entreprenait. Allez, Georgia.

Viens avec moi.

(C) BELOVED, @GEORGIA TORRES

ander te regardait comme on ne t’avait pas regardé depuis longtemps. avec la promesse d’un jour meilleur, de moments qui te feront oublier ta triste vie. un regard rempli de promesses. tu soupirais en glissant ta main dans tes cheveux bruns et tu te pinçais les lèvres. maintenant ? tu regardais autour de toi, et tu te pinçais les lèvres. tu terminais par hausser les épaules et tu soupirais un peu. « j’arrive. » tu finissais alors par dire. tu capitulais, face à ses yeux qui ne demandaient que ça, que tu le rejoignes. tu savais pas pourquoi faire, tu savais pas où il allait t’emmener. mais tu ne pouvais pas lui résister bien longtemps, à ander, de toute manière. tu soupirais et tu glissais tes mains dans les poches de ton jean, te dirigeant vers une de tes collègues. elle faisait la tête quand tu lui annonçais que tu partais, mais c’était comme ça. elle savait très bien qu’elle ne pouvait rien dire. et puis, tu te tuais bien assez à la tâche pour prendre une pause. tu posais ton plateau sur le bar et tu revenais vers ander, un sourire sur les lèvres. « alors, tu viens ? » tu demandais, le pressant cette fois-ci. tu n’avais plus qu’une envie : c’était de sortir d’ici. tu souriais doucement et tu sortais finalement du bar, ta peau venait embrasser le froid mordant qui s’était emparé de new-york depuis plusieurs jours. tu soupirais un peu, resserrant ton écharpe autour de ton cou. et tu te tournais vers ton ex petit-ami, un sourire sur les pulpeuses. « je n’ai pas pu résister bien longtemps. j’espère que ça vaut le coup. » tu soufflais dans un petit rire en haussant les épaules. tu savais qu’il voulait la vérité. le pourquoi du comment, ton beau sourire s’était éteint. tu te pinçais les lèvres et tu enfonçais tes mains dans les poches de ton manteau pour les garder au chaud. tu soupirais un peu et tu commençais à marcher. destination inconnue. ses paroles te revenaient en mémoire. la vie est moins belle sans toi, gia. est-ce qu’il le pensait vraiment ? il avait sans doute dit ça pour te flatter, pour te faire du bien. tu savais pas. tu ne savais plus. ni comment agir, ni comment vivre. tu avais l’impression que ta vie s’était arrêtée quand tu avais mis fin à cette grossesse, deux mois plus tôt. tu avais l’impression que le monde continuait de tourner, mais que ta vie, elle, continuait de s’égrainer au ralentit. un point mort, duquel tu n’arrivais pas franchement à te sortir. tu soupirais un peu et tu tournais la tête vers lui. « tu savais que je travaillais là, où c’est le hasard qui t’as mené jusqu’à moi ? » tu demandais alors doucement, te pinçant les lèvres en l’observant de longues secondes.

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« J'arrive. » Elle s'est finalement décidée. Le sourire qui tire les lèvres d'Ander, alors qu'il hoche la tête et la laisse s'éloigner. Finissant son verre en quelques gorgées. Regardant autour de lui, pendant ce temps. Personne ne semblait les avoir remarqué. Personne ne leur en tiendrait donc rigueur — à part peut-être la collègue de Georgia, qui ne faisait que garder ses petits noirs braqués sur lui. Laissée à l'abandon. Mais Ander ne s'en excuserait pas. L'égoïsme mauvais, la seule envie de garder Gia à ses côtés. De l'arracher à cette soirée qui avait l'air de lui faire plus de peine que de bien, pour tenter de la sauver. L'écouter. Comprendre où elle était rendue. Comprendre où elle allait. Ce qui lui était arrivé.

On a du temps à rattraper, n'est-ce pas ?

« Alors, tu viens ? » Le sourire aux oreilles, cette fois. Fond de bière qu'il avale d'un trait, avant de se redresser et de lui emboîter le pas. À ne pas s'en rappeler s'il avait déjà payé. Il fait froid, dehors. Georgia resserre son écharpe autour de son cou, et lui l'observe toujours. Veste ramenée, fermeture éclair remontée. Habitué à la température ambiante — mais pas pour autant réchauffé. « Je n’ai pas pu résister bien longtemps. J’espère que ça vaut le coup. » Elle sourit — et il aime ça. Un peu plus de vie, dans ses yeux. La simple idée de se mettre à marcher, pour aller on-ne-sait-où. Marcher sans but. Marcher pour se perdre. Marcher pour parler. Est-ce que ça vaut le coup ? « On verra bien. » Il hausse les épaules. Sort une cigarette du paquet au fond de sa poche, la glisse entre ses lèvres. En propose une à Georgia, poliment — avant de sortir son briquet. Rapidement, la première bouffée de tabac sort de ses poumons, et il la suit quand elle se met à marcher. La rattrapant, bientôt, pour fumer d'une main et entourer ses épaules de son autre bras. « Tu savais que je travaillais là, où c’est le hasard qui t’as mené jusqu’à moi ? » « Hasard. » Il tire sur sa cigarette. Regarde autour d'eux. Son point de rendez-vous n'est pas très loin. Il tâchera de trouver un coin à l'abri du vent, d'ici là. Le business sera vite conclu. Et après, sa soirée serait à Georgia. « J'ai tendance à croire qu'il fait bien les choses. » Regard en coin — sourire taquin. Elle sent bon, malgré le froid. Elle est tiède, au creux de son bras. Juste là. « Alors, tu m'racontes ? » Il ne sait pas prendre des pincettes. Ne sait pas faire semblant. Ne sait pas ignorer l'éléphant au milieu de la pièce — pas plus longtemps, en tout cas. « On a encore une demi-heure à tuer. À moins qu'tu préfères attendre d'être au chaud avec un truc à boire. » L'un ou l'autre lui était parfaitement égal. Mais tant qu'à avoir du temps à tuer, il ne voyait pas pourquoi elle aurait encore repoussé l'échéance. Tôt ou tard, faudrait que tu parles, Georgia.

Point de rendez-vous dépassé. À quelques mètres de là, de quoi se réchauffer. Un autre bar, et un café plus tranquille. Pas encore fermé. Il les désigne d'un coup de menton. « Tu veux attendre à l'intérieur ? » Ou tu préfères le froid pour encore une demi-heure ?

(C) BELOVED, @GEORGIA TORRES

hors-jeu :

tu regardais ander et tu soupirais un peu, refusant la cigarette qu’il te tendait. tu te mettais à marcher, distançant le jeune homme qui ne tardait pas à te rattraper. il enroulait tes épaules de son bras et tu te calais contre lui, un sourire sur les lèvres. tu savais pas où ça menait tout ça. tu l’avais jamais vraiment oublié, ander. tu souriais quand il t’indiquait que c’était le hasard qui l’avait mené jusqu’à toi et tu souriais encore un peu plus, à ses mots. c’est vrai que le hasard faisait parfois bien les choses. tu espérais que ça continue, tu en avais un peu marre de cette vie trop compliquée. tu avais besoin de légèreté, de t’amuser, de simplement profiter de tes vingt-deux ans. « espérons que ça continue alors. » tu murmurais dans un rire en passant ta main sur sa taille. vous aviez surement l’air d’un couple heureux comme ça. alors que vous étiez simplement deux ex qui se retrouvaient, pour partager un moment. tu le laissais te guider dans les rues du queens et tu tournais ta tête brune vers lui quand il te demandait de lui raconter. tu allais répondre quand il te proposait de te mettre au chaud et tu haussais un peu les épaules. « ça ne me dérange pas d’attendre ici. » tu soufflais avec un simple sourire en te recoiffant, les cheveux décoiffés par le vent hivernal. il ne faisait pas si froid. du moins c’était supportable. tu désignais l’arrêt de bus et tu venais t’y asseoir, croisant tes jambes et tes bras en soupirant longuement et en regardant à nouveau le brun. « t’es sûr que tu veux connaitre l’histoire ? » tu demandais en grimaçant un peu, te pinçant les lèvres en haussant à nouveau les épaules. tu n’aimais pas en parler, tu n’étais pas vraiment fière de ce qui s’était passé ces derniers mois. et puis ça restait douloureux d’en parler, dans le fond. « je suis tombée enceinte en août. » tu soufflais alors en soupirant un peu, l’observant quelques secondes. tu savais qu’il ne te jugerait pas. ni d’être tombée enceinte, ni d’avoir avorté. pourtant, tu avais l’impression que ça se lisait sur ton visage, et que les gens ne cessaient de te juger pour ce que tu avais fait. « j’ai avorté. » tu murmurais alors, car effectivement, ton ventre était bel et bien plat. et tu ne voulais pas qu’il croit que tu l’avais perdu. non, tu avais bel et bien tué ton bébé.

@ander wilkes t'en fais pas chaton without me, (andia) 3176379322

La tête de Georgia contre son épaule, son bras autour de sa taille. Le sien retombe toujours autour de son cou, pour la protéger du froid et la garder à ses côtés. Et l'espace d'un instant, il se croirait presque retourné quelques années en arrière. Quand Georgia et lui c'était vrai, quand ils avaient arrêté de se poser des questions l'espace de quelques mois. C'était derrière eux, aujourd'hui — mais la complicité ne se perdait pas. Pas la moindre rancune envers le passé, dans le coeur du Wilkes. Celui qui fâchait restait sous scellé, mais les coeurs qui passaient dans son sillage n'en faisaient pas partie. Trop entier et trop changeant pour qu'il se trouve réellement affligé par l'amour et la chair qu'il croisait. Et Georgia, comme tant d'autre, n'y faisait pas exception.

« Ça ne me dérange pas d’attendre ici. » Il acquiesce pour accepter. Peu sensible au froid, et sachant de toute manière que l'hiver lui réserverait bien pire s'il ne se trouvait pas de toit dans les prochains temps. Pas vraiment l'intention. Elle désigne un arrêt de bus, et ils s'y dirigent. Il y prend place à ses côtés, à l'abri du vent. Le coeur tranquille, la clope qu'il continue de fumer malgré les bannières rouges placardées sur les murs vitrés, et interdisant la cigarette et tout autre type de fumée. Trop tard. Elle était déjà commencée. « T’es sûr que tu veux connaitre l’histoire ? » Elle n'a pas l'air sûre, Gia. Il la regarde, un instant, puis hoche la tête. Ne changeant pas d'avis. N'ayant pas plus peur que cela de découvrir ce qui lui était arrivé. Ça avait l'air lourd. Difficile à digérer. Mais il était prêt à tout entendre. À tout accepter. « Ouais. » Tant qu'tu m'dis pas qu't'as un gamin de moi, quelque part dans le monde, j'devrais réussir à t'écouter.

« Je suis tombée enceinte en août. » Le souffle ne reste pas coupé longtemps : la chronologie ne correspond pas. Aucune chance que ce soit le sien — et il ne fait que se laisser tomber le dos contre le fond de l'arrêt de bus, fumant et l'observant. La lueur soucieuse au fond des yeux, malgré tout. Comprenant bien la suite des événements, à en juger par le plat de son ventre. « J’ai avorté. » Au moins, c'est pas une fausse-couche, qu'il se prend à penser. Ne le dit pas. Voit la honte et la tristesse sur ses traits; ça suffit à lui nouer la langue pour un temps au moins. Il secoue la tête. Compatissant, de la seule manière qu'il pouvait. Mais la vie continuait, n'est-ce pas ? « C'est des choses qu'arrivent. » Il sait que c'est dur, de dire ça. Ses yeux ne sont même pas dans ceux de Georgia. Il ne fait qu'y penser. Peser la douleur, la détresse. Peser ce que ça pourrait faire. Les traces que ça a laissé sur elle. Ça arrive. « Mais ça craint. » Finalement son regard trouve le sien. Ses mots filent à nouveau, sachant ce qu'elle avait besoin. « J'suis désolé, Gia. » Les phrases sont peut-être dures, mais le ton ne l'est pas. Son humeur non plus. Il est là pour elle. Pas toujours des plus doués pour lui montrer — mais à quoi bon cacher ce qu'il pensait ? Au moins, t'as eu la chance de pouvoir te faire avorter. « Tu regrettes ? » Il en a l'impression, à en juger son regard. À en juger l'expression sur ses traits. Tu regrettes, Gia ? Tu le voulais, ce bébé-là ? « Le père, il t'a dit quoi ? »

C'est qui, l'type qui t'a fait ça ?

(C) BELOVED, @GEORGIA TORRES