diamants noirs et chrysanthèmes

traits de caractère /

Violanda est par-dessus tout ambitieuse. Depuis qu’elle est enfant elle rêve de réussir et de conquérir le monde, depuis son plus jeune âge elle sait que sa place est parmi les plus grands. Calculatrice, elle a su tout mettre en oeuvre pour parvenir à ses fins. Elle a su provoquer la chance quand il le fallait, elle a été capable de saisir les opportunités quand elles se présentaient. Patiente, Viola ne précipite jamais les choses, elle sait prendre le temps, elle est capable d’attendre le bon moment pendant des jours, des mois, des années si cela est nécessaire. Déterminée, Violanda est le genre de femme qui sait exactement ce qu’elle veut, qui ne laissera personne se mettre en travers de son chemin, et qui ne lâchera rien avant de l’obtenir. Réfléchie, elle prend le temps d’évaluer les situations et les opportunités, les occasions et les dangers. Elle ne laisse rien au hasard qu’elle considère comme son pire ennemi. Violanda n’est pas une femme spontanée, elle n’est pas capable d’agir sur un coup de tête et elle déteste les surprises. Intelligente, elle est une femme brillante qui comprend et assimile tout très vite. Elle a toujours été curieuse d’apprendre, et considère le savoir comme la clé du pouvoir. Possessive, elle ne supporte pas qu’on touche à ce qui lui appartient et n’est pas faite pour le partage. Pour les biens comme pour les hommes, il est dangereux de convoiter ce qui lui appartient. Élégante dans sa manière de s’habiller comme dans sa manière de parler, il est aujourd’hui difficile de s’imaginer d’où elle vient et d’ailleurs rares sont ceux ceux à le savoir. Elle a honte de ses origines et s’applique donc à les cacher. Froide, son regard peut vous glacer le sang quand elle le souhaite et elle n’est pas du genre à se laisser attendrir par des larmes ou un sourire. Ambivalente, Violanda ne se montre pas telle qu’elle est réellement au reste du monde. Elle sait qu’elle n’a pas le droit de montrer son véritable visage car il ne correspond pas aux standards de la société. Alors, elle s’est adaptée, elle s’est construit le personnage de la femme moderne parfaite, qui a grandi dans l’amour pour son mari et qui aujourd’hui porte un deuil difficile tout en se battant pour lui rendre honneur ; elle ne laisse pas entrevoir une seule seconde le monstre qu’elle est devenue en réalité.

Extrait d’un article paru dans le New-York Times le 15 février 2021.

Après deux ans passés dans l’ombre, l’écorcheur de Manhattan vient de frapper à nouveau. Daniel Rhodes, figure incontournable de marché international du diamant a été retrouvé assassiné chez lui. Il n’existe aucun doute selon les équipes de police, le mode opératoire correspond à celui du serial killer qui n’avait pourtant plus tué depuis sa dernière victime, Elizabeth Williams, le 12 septembre 2019. Ce terrible crime signe-t-il le début d’une nouvelle série ? Violanda Rhodes, dont le mari vient de lui être arraché, espère que « cette fois-ci la police fera correctement son travail pour qu’aucune autre n’ait à ressentir la douleur provoquée par la mort violente d’un être cher. ».


Dix ans que tu y penses, dix ans que tu t’y prépares. L’idée t’est venue la première fois qu’il a frappé, au premier meurtre qu’il a commis. Dans la folie d’un homme, dans l’horreur d’une mort, toi tu as vu une opportunité, tu as aperçu le chemin de ta liberté. Tu t’es renseignée à son sujet ; tu as lu tous les articles que tu as trouvés, visionné toutes les interviews, chacune des conférences de presses où il était mentionné. Il t’a fascinée bien plus que tu n’aurais pu te l’imaginer, et il te fascine encore Viola, pour la simple raison qu'il ne s’est jamais fait attrapé. Pendant ce temps, Daniel n’a rien vu. Trop occupé à t’ignorer, il n’a pas su déceler le noir grandir en toi, il n’a pas su voir le danger que tu commençais à incarner. De toute évidence, Il t’a toujours considéré comme un trophée, comme une femme-objet qu’il se contentait d’utiliser pour attiser la jalousie chez les autres et assouvir ses propres envies. Tu l’as laissé faire Viola, tu lui as laissé croire qu’il pouvait te dominer, qu’il avait le droit de t’écraser. Tu l’as laissé se perdre dans les draps de filles plus jeunes et plus belles que toi, tu lui as donné l’illusion d’un amour aveugle que tu n’as pourtant jamais ressenti. Mais l’ennui t’a peu à peu grignotée. Tu ne lui as pas donné d’enfant, tu n’as pas eu la carrière que tu voulais. Et cette frustration a déformé ta rancœur en volonté, celle de tout lui prendre et de ne rien lui laisser. Ta force Viola, c’est d’avoir su être patiente, ton génie c’est d’avoir su prendre le temps d’anticiper chaque éventualité. Dix ans que tu décris un amour que vous n’avez jamais connu dans les feuilles de journaux intimes factices, que tu lui fais signer des papiers qu’il ne lit jamais car il ne te pense pas capable de le duper. Tu lui as fait organiser sa propre destitution, sans même qu’il ne s’en rende compte. Tu n’as rien provoqué, tu t’es contentée d’attendre, patiemment. Puis, le jour parfait est enfin arrivé. Tu as glissé des somnifères dans un verre, tu as ligoté ses mains et ses pieds. Et tu savais exactement quel couteau utiliser, tu savais parfaitement quels gestes exécuter, car tu avais déjà tout répété tant de fois Viola. Inspirée par la folie d’un autre, tu ne t’es pas arrêtée alors qu’il hurlait. Tu as écorché sa peau, tu as tailladé sa chair. Tu t’es nourrie de la peur grandissante dans ses iris ; tu as découvert dans ses suppliques un pouvoir qu’il ne t’avait encore jamais accordé. Et dans l’horreur de cette nuit, entre le pourpre de son sang et la blancheur de ta peau, tu as éclos au milieu du chaos Violanda.  Enfin libre, enfin toi.



Daniel est mort et toi tu jubiles. Tout s’est passé comme prévu, tout s’est déroulé comme tu l’avais envisagé. Ils ont attribué le meurtre de ton mari à celui que tu avais choisi, et à aucun moment ton rôle dans cette tragédie n’a été remis en question. Tu es devenue la veuve éplorée que tu t’es préparée à être pendant toutes ces années. Tu sers aux médias un rôle de composition que tu as travaillé pendant dix ans. Chacun de tes mots, chacun de tes gestes est savamment pensé, est inspiré de ses femmes que tu as longuement observées, ces vraies victimes collatérales de la folie d’autrui. Tu es dans la lumière, et tu en joues, car tu adores ça Viola. Tu t’amuses de chaque interview, tu te ravis de chaque entretien avec la police, car tu les observes chercher sans te voir et que le sentiment de puissance absolue que cela te procure est nouveau, rafraîchissant et revigorant. Quand tu es seule, il t’arrive encore de parler à Daniel. Tu as besoin de lui dire à quel point tu es heureuse depuis qu’il est parti, à quel point il a été idiot de ne jamais croire en toi. Car si tu joues ton rôle de victime à la perfection, il existe un terrain où tu n’as pas besoin de jouer la comédie pour exceller. Quand tu es arrivée à la place de Daniel à la tête de son empire tout le monde s’est préparé à la faillite, et les vautours sont venus danser dans l’air au-dessus de toi, guettant la future agonie d’un royaume qu’ils convoitaient depuis toujours. Mais les semaines sont passées, et rien de tout ça n’est arrivé, tu sais exactement ce que tu fais derrière ce bureau devenu le tien. Tu es douée Viola, et tu comptes bien tous les écraser les uns après les autres, tous ces hommes qui ne croient pas en toi. Et tu sais pertinemment que leur avis à ton sujet est un avantage, parce qu’ils ne te verront pas venir, ils ne sentiront pas la corde se glisser autour de leurs cous. Car si tu as maintenant tout mais tu veux encore plus, et tu voudras toujours plus. Tu brilles dans la conquête Viola, mais prends garde à cette gourmandise qui pourrait bien finir par t’éteindre.